Addicted To You

amheliie-maryrhage-auteures

Deux étudiants appartenant à des fraternités opposées vont se rencontrer dans des circonstances assez particulières. La passion va s’inviter dans leur vie et risque de tout remettre en questions.


CONTENU DU DOCUMENT (ordre d'enchainement):

- Chapitres

- Synopsis histoire (attention spoilers)

- Présentation des personnages (attention spoilers)



**********

Seth

CHAPITRE 1

Bienvenue chez ΣAΨ 1

 

 

 

C'est une certitude, je hais les lendemains de soirée.

Mon réveil me sort d'un sommeil loin d'être réparateur. J'ai l'impression d'avoir à peine fermé les yeux que c'est déjà l'heure de sortir de mon pieu.

Les notes stridentes de la sonnerie viennent torturer mon pauvre cerveau qui tente de survivre aux atrocités qu'il a subi la veille : l'alcool, la musique à fond, l'odeur acre du tabac, et les résultats d'une soirée encore trop arrosée. Et à en croire les gémissements qui résonnent à mes oreilles, mon lit deux places est squatté.

Je tends la main vers ma table de chevet pour éteindre mon maudit portable. À tâtons, je fais tomber des objets qui n'avaient rien à foutre là et qui font un bruit sourd en atterrissant sur le sol, ne manquant pas de me réveiller un peu plus et d'alimenter ma future migraine post-cuite.

Parce que, qui dit alcool, dit forcément cuite, l'un ne va pas sans l'autre, et je suis devenu le roi de la gueule de bois du dimanche dans la baraque. Quoique, Kaleb me talonne de près ces derniers temps.

Un corps totalement nu et féminin – heureusement, je crois que j'aurais vraiment touché le fond si jamais je me réveillais à côté d'un mec… n'ai-je pas déjà touché le fond ? – vient se frotter contre moi. Des mains fines et délicates décident de me montrer leur intérêt. Je les sens glisser le long de mon torse, s'approchant dangereusement de mon entrejambe.

Je soupire. Je ne suis pas du matin, ce matin, et la gueule de bois ne me donne pas envie d'user des bons soins de la miss que j'ai ramené dans ma chambre. Même si mon corps me dit le contraire ma queue, avec sa petite habitude du matin, ne dirait pas non à un coup vite fait bien fait.

Sauf que la soirée est finie et mon devoir m'appelle. Si mes souvenirs sont bons, j'ai des choses à faire, la baise devra être remise à plus tard.

Sans même regarder la demoiselle que j'ai baisé cette nuit, ouvrir les yeux me ferait comprendre que la journée est déjà bien entamée, que les dimanches sont des jours pourris où il faut lutter contre les excès de la nuit passée, je lance d'une voix endormie et rocailleuse :

— La nuit est finie. Rentre chez toi, poupée.

Je sens un regard lourd sur moi, elle a cessé tout mouvement. Je crois qu'elle est surprise de m'entendre dire ça vu ma réputation, je ne suis pas censé repousser des avances aussi directes.

J'ouvre les yeux pour la dévisager, histoire de bien lui faire comprendre que je ne blague pas. Redécouvrant par la même occasion mon coup d'un soir, une petite blonde aux yeux gris, les cheveux en pétard, son maquillage coulant. Elle est plutôt mignonne, dans la catégorie plus que baisable. L'expression qu'elle affiche sur son visage est franchement contrariée. Aïe.

Voyant que je ne coopère pas, l'inconnue d'une nuit – car oui, je cherche encore son prénom depuis deux minutes et il ne me revient pas – sort de mon lit sans délicatesse, tentant de me broyer les couilles au passage.

Typiquement féminin comme réaction.

— OK !

Sa voix ne cache pas sa contrariété, tant pis.

Je ne me gêne pas pour la mater se rhabiller. Elle est vraiment bien foutue, bien que maigrichonne, elle se laisse regarder. Mon sexe ne reste pas indifférent à la vue de ses formes féminines, je remue sous les draps pour ne pas montrer mon excitation matinale. La blondinette cherche ses fringues à travers le foutoir de ma chambre. Elle tombe sur son string rouge et son jean, mettant fin au spectacle.

— Y'a quoi sous la couverture noire ? demande-t-elle, en attachant son soutien-gorge rouge vif.

La nana me montre l'énorme cage près de mon bureau, j'entends déjà les bruits qui proviennent d'en dessous. C'est l'un de mes plus beaux trésors qui s'y trouve, un trésor qu'elle ne connaîtra pas malheureusement.

— Des objets de torture, je réponds avec sérieux.

La petite blonde se met à ricaner. Dieu, ce que certaines nanas sont stupides au réveil ! Je me demande où je vais les chercher.

Justement, je ne les cherche pas, je prends tout ce qui me tombe dans les bras. Pas besoin de faire le tri dans ce cas. Bien que souvent, c'est toujours le même type de filles qui m'accueillent entre leurs cuisses.

La nana termine sa chasse aux vêtements, je reste stoïque dans mon lit, me réveillant tranquillement en remerciant le ciel de n'être pas accompagné d'un mal de crâne. Je suis crevé et savoir que je ne retrouverais pas mon pieu avant plusieurs heures me désespère. La semaine s'annonce super longue. Mais il paraît que j'adore ce rythme de vie de dingue, donc bon, je ne laisse pas parler mon humeur morose.

Mon coup d'un soir vient s'asseoir près de moi pour mettre ses talons aiguilles, elle, par contre, pète la forme.

— Bon, c'était chouette, hier soir, Seth. On remet ça quand tu veux. Tu m'appelles ?

Elle finit par me faire face, un feutre à la main qu'elle a dû trouver dans mon bordel. Sans rien dire, je la laisse écrire sur ma poitrine son prénom et son portable. Elle a l'air ravie que je ne la repousse pas. Il faut dire que Seth Shelton n'est pas réputé pour avoir une petite amie qui dure, mais plusieurs copines qui défilent dans son lit à tour de rôle, et les places sont chères. Être dans le tableau de chasse d'un SAP, et plus précisément de Seth Shelton, est devenu à l'Université un passage presque obligatoire pour toutes les nanas des sororités du campus. Et comment résister à la tentation lorsqu'on est jeune, con, et que les hormones du sexe nous bouffent le cerveau ? Justement, on ne peut pas. On dit amen à tout.

La miss m'offre un baiser d'au revoir avant de s'éclipser gentiment de ma chambre. C'est dingue comme les femmes changent d'humeur comme moi « je change de partenaires ».

Je baisse les yeux vers l'encre qui tache ma poitrine, la miss s'appelle donc Candice et m'a laissé son numéro de téléphone qui disparaîtra sous la douche.

J'attrape mon portable et décide de rester encore cinq minutes dans mon lit, histoire de faire redescendre le barreau que j'ai entre les jambes, avec ma lecture journalière des résultats du Basket, ou bien avec un round en solo avec ma main gauche. Malheureusement, les dernières nouvelles du monde sportif et voir la défaite des Suns2 de Phoenix me foutent tellement les boules que je ne suis même pas d'humeur à jouer solo ce matin.

Je sors du lit. Mon corps est courbaturé de la veille, je pue l'alcool et le sexe, des odeurs qui me sont plus que familières. Bordel, les premières fêtes de l'année sont toujours mouvementées. Ce sont des trucs de dingue, les meilleures même, sauf au réveil.

J'attrape un caleçon que j'enfile rapidement avant de me diriger vers la cage. J'en connais une qui va être ravie de voir un peu de lumière. C'est rare que je mette un drap sur sa cage, ce qui veut sans doute dire qu'hier soir, elle était chiante et qu'entre l'envie de baiser et l'entendre jacasser, mon choix a été rapide.

— Salut, Caroline, je lance en enlevant le lourd drap noir.

Salut, Seth.

Voici Caroline, ma compagne de tous les jours, qui peut s'avérer être un réel objet de torture quand cette dernière décide d'être pénible. Un magnifique ara de treize ans bleu et jaune, tacheté de vert et de blanc. Et le plus marrant ? C'est qu'elle parle. J'ouvre la porte de sa cage, tapote mon épaule pour qu'elle vienne s'y percher. Généralement, elle ne bouge pas de cette place quand on se balade dans la maison. Élever mon perroquet a été l'un des meilleurs passe-temps de mon enfance, avec le basket. C'est comme ma meilleure amie, même si elle a des plumes, et au moins, je suis sûr de ne pas la baiser.

Caroline obéit, venant se poser sur mon épaule, fière d'elle.

— On va déjeuner Caroline ? je demande en marchant vers la porte.

Déjeuner, toi et moi.

Je souris comme un idiot en entendant ces mots. C'est presque miraculeux d'entendre une bestiole qui n'est pas humaine parler. Caroline parle bien, elle sait tenir une conversation, et pour en arriver à ce stade-là, j'ai travaillé et sué corps et âme et usé de patience. Mais ça valait le coup.

On sort de ma chambre, que je ferme à clé. Je n'ai pas envie qu'un des mecs vienne me faire une crasse, surtout depuis l'emménagement, tout le monde est d'humeur à faire chier tout le monde. Les joies de la coloc ! Je crois que les vacances ont été une source sans fin d'inspiration pour les conneries chez certains.

J'ai à peine le temps de faire trois pas dans le grand couloir du dernier étage, qu'une voix nous interpelle.

— Salut Seth ! T'as survécu à ta nuit ?

Je me retourne et découvre Dax, un deuxième année, il fait partie de l'équipe de football de l'université, avec Austin, Tyler et Konnor. C'est un grand blond baraqué d'un mètre quatre-vingt, tout en muscles et tatoué de partout. Un brave type avec beaucoup d'humour et talentueux. Je le salue d'un geste de la main.

— Toujours en vie, je lance. Caroline, tu dis salut à Dax.

Salut Dax.

— Salut Caroline.

Le footballeur sourit avant d'entrer dans sa chambre. Nous continuons notre chemin, descendant les trois étages de la maison. C'est une grande bâtisse, comme un ancien hôtel des années 50 – mais restauré, hein. On ne vit pas dans un squat, plutôt dans une garçonnière – qui appartient au campus et qu'on loue depuis des années à l'Université. C'est un « QG » où 20 mecs vivent ensemble, organisent des soirées de dingue comme hier. La déco est plutôt sommaire et très sportive, des posters de grandes stars, des trophées, de nombreuses portes et salles de bains. Pas mal de bordel à certains endroits, mais c'est cool. Je descends l'escalier en croisant les deux frères qui viennent d'Allemagne, Claus et Lenz, qui me demandent aussi si j'ai survécu à ma nuit. Cette question commence à m'agacer, et je commence à me demander ce que j'ai bien pu faire comme connerie avec l'alcool que j'ai ingurgité. Si cela m'a échappé, on dirait que les autres l'ont très bien enregistrés.

J'arrive dans la grande cuisine où, bizarrement, je ne trouve personne. L'inconvénient quand on vit dans une fraternité étudiante, c'est qu'on est certain de ne jamais être seul. Mais vu les quelques souvenirs de la veille qui me reviennent, je commence à penser que la plupart des mecs sont allés dormir dans le lit d'une fille, et qu'ils ne reviendront que plus tard. Après tout c'est dimanche, personne n'a cours, pas de match, ni d'entraînement. Chacun fait ce qu'il veut.

Je me fais un café tout en préparant le repas de Caroline ainsi que mon bol. Je termine les céréales de Benson et l'inscris sur la liste des courses pour qu'on en rachète demain.

Nous nous installons tous les deux sur le grand îlot central. Lorsque Caroline entend le bruit du verre, elle descend de mon épaule et vient remplir son estomac.

Je finis de me réveiller en mangeant avec les bruits de fond de la maison. Je constate qu'il est presque midi quand la porte de la cuisine donnant sur la rue s'ouvre.

Je me tourne pour voir qui est l'intrus, mais le son de sa voix me donne son identité.

— Salut vieux, t'as encore tes couilles ?

Couilles ! répète « ma camarade à plumes », Caroline.

Elle est presque pire que moi. Si je suis très porté sur le sexe, ma compagne tente désespérément de me rejoindre dans ce vice.

Je foudroie du regard Zane qui, à en croire sa tenue, rentre de son footing. Il est visiblement très en forme. Je lui dédie un doigt d'honneur en lançant mon célèbre :

— Fuck !

— C'est toi qui as baisé toute la nuit, pas moi.

C'est pour ça les remarques de bon matin ? À croire qu'ils ont tous oublié avec qui ils vivaient.

Mon pote termine sa bouteille d'eau avant de s'asseoir en face de nous. Zane Linwood est un grand blond d'environ 1m90 avec un immense tatouage dans le dos représentant une croix du Christ. Il a des yeux vert émeraude, un regard étrange, presque perdu. Il joue dans l'équipe de basket de l'université à mes côtés. Il est Arrière, je suis Meneur. Je le connais depuis toujours, on a grandi ensemble avec Kaleb. Le trio infernal, à peine âgés de 20 ans, les trois meilleurs amis.

Comparé à lui, je mesure 1m88, j'ai les yeux bleus, des cheveux bruns avec la dernière coupe à la mode, pas de tatouages, et aussi bien foutu que lui. Comme tous les mecs vivant dans cette baraque.

Je finis mes céréales alors que Zane essaie de caresser ma perruche, mais Caroline en décide autrement, elle essaie de le mordre avec son bec, ce qui amuse mon pote.

— Un jour, elle va me bouffer un doigt.

— Comme ça, ça t'évitera de les fourrer n'importe où, je lance en plaisantant.

Je me tourne vers Caroline qui a terminé ses graines.

— Caroline veut manger autre chose ? je demande.

Caroline veut manger une pomme.

Zane se dévoue et va me laver une pomme. Mon meilleur ami ne prête même plus attention à ma perruche, il n'est plus surpris de l'entendre parler. Après tout, il l'a vu grandir.

Chaque jour, c'est le même rituel, les mêmes questions la plupart du temps, mais c'est comme ça qu'on peut faire parler son perroquet.

Il revient, me tend la pomme et un couteau. J'entreprends de la couper et donne les morceaux à Caroline, alors que la curiosité de Zane le pousse à me demander :

— Alors, tu m'as pas répondu, t'as encore tes couilles ?

— Tu veux vérifier ? je propose à mon meilleur ami.

— Non, merci, la vision des miennes me suffit.

C'est bien ce que je pensais.

— Où est Kaleb ? je le questionne.

— Il s'est arrêté pour régler un truc en face, chez les filles.

Je souris. On sait tous ce que veut dire « régler un truc avec les filles ». Kaleb est le seul de nous trois à s'être casé avec une des nanas de notre sororité. Le seul « sage ». Il est trop sage à mon avis.

On commence à parler de la reprise de l'entraînement mardi quand un cri digne d'un égorgement résonne de l'étage supérieur.

— Les mecs, réunion dans 10 min ! Le grand patron veut nous parler du Tournoi et des nouvelles du début de mois ! Alors on se bouge le cul et on vient rapidement dans le salon.

Zane et moi, nous nous dévisageons, un sourire d'idiot sur le visage. Bordel, comme je l'attendais ce tournoi ! Il ne va pas avoir la même saveur que le précédent, rien n'a la même saveur quand on est les leaders. Tout est beaucoup plus intéressant.

Bienvenue dans mon monde, et plus précisément, au sein de ma fraternité, chez les Sigma Alpha Psi.

 

***


Sigma Alpha Psi (ΣAΨ) est la fraternité Leaders de l'Université d'Arizona, à Tucson. Cela fait maintenant deux ans que nous détenons ce titre - délicieusement illégal - et nous allons devoir remettre le trophée en jeu cette année, dans un tournoi qui est tout aussi interdit que le titre en lui-même. En tant que sportifs, le défi de la compétition ne nous fait pas peur, nous avons l'habitude de gérer ce genre d'événements, rien ne nous effraie. L'adrénaline et l'excitation du jeu sont nos drogues et chaque Frère ici présent est plus qu'impatient de se défier aux autres.

Zane et moi arrivons dans les derniers dans le grand salon, où poufs, canapé et fauteuils se talonnent pour entrer dans l'énorme pièce. Kaleb n'est pas arrivé. En face de nous se trouve le Chef de SAP, Austin Tatton, 25 ans. C'est le plus vieux de la fraternité. Il joue depuis 4 ans dans l'équipe de football, c'est le capitaine même. Physiquement, il ferait presque flipper avec son regard et ses cheveux noirs. Il est toujours impeccablement habillé. Les Sportifs et les Élites sont les deux fraternités avec des membres pétés de tunes, ayant une éducation très « respectable ». Ça me fait toujours rire quand j'entends ça, il suffit de nous suivre un mois pour voir qu'on est loin d'être des enfants modèles. Nous ne sommes pas non plus des débiles comme les films aiment à le montrer. Les Fraternités ont des règles que nous suivons scrupuleusement. Chaque événement a une place particulière, quand il faut être sérieux, nous le sommes. Et à cet instant, les réunions parlant de la Greek Life, sont des moments importants.

— Bonjour, les mecs ! lance Austin.

Nous le saluons tous et lui laissons le soin de nous informer du sujet du jour, à savoir, le début de l'organisation du Tournoi des Fraternités d'Arizona.

— J'espère que la nuit a été bonne pour tout le monde ? Bien qu'elle fut courte pour certains.

J'ignore les regards et les ricanements sur moi. Je commence vraiment à me demander ce que j'ai pu faire hier soir comme connerie. Je demanderai à Kaleb, plus tard, lui me répondra.

— C'est la troisième réunion de l'année et, en ce début de mois d'octobre, j'ai le plaisir de vous annoncer que nous allons commencer l'organisation du Tournoi des Fraternités du Campus. Seth et moi-même allons faire le tour des Fraternités pour discuter des dates et des épreuves, et nous nous réunirons tous pour le choix final d'ici un mois. Si vous avez déjà des idées, mettez-les dans la coupe, on en discutera rapidement. N'oubliez pas pour autant le Rush3 des Pledges4, nos petits derniers de l'année précédente commencent à en avoir marre de servir de bonniche et il est temps de remplacer les chambres vides de nos Alumnae5. Langdon, notre Rush chair, va avoir besoin de bras encore, cette année…

Austin continue de nous faire part des nouvelles. La mise en place d'un planning pour le ménage après les soirées, des courses et de toutes les tâches ménagères ou de vie en communauté bien chiante avant l'arrivée des nouveaux. On parle de nos emplois du temps. Nous sommes 20 à vivre au sein de la fraternité, nous représentons les équipes de basket et de football de l'université. La plupart suivent un double cursus grâce à nos bourses sportives. Par exemple, je suis en Astronomie, Zane en sciences humaines et Kaleb en économie. Bien que notre principal intérêt reste le sport.

Beaucoup de questions concernent le Tournoi, Austin reste vague, bien que la plupart aient déjà participé, il y a deux ans. Parfois, on dirait qu'on vit avec des gosses et cet événement va être l'unique centre du monde. Je sens que ça va être sympa.

— Seth ?

Je sors de mes pensées en entendant mon prénom. Le silence est revenu dans le grand salon, tout le monde me dévisage. Je me redresse du pouf et essaie d'entrer dans la conversation.

— Ouais ?

— Tu m'écoutes ou tu étais encore accaparé par tes exploits sexuels ?

Tiens, prends-toi ça dans les dents, Seth.

Je souris, mais au fond, je commence à sévèrement m'inquiéter. Quand je bois avec des filles dans les parages, généralement, je ne reste pas longtemps habillé.

Je ne réponds pas aux piques et laisse mon Chef jouer les perroquets.

— Je disais que, toi et moi, nous avons rendez-vous tout à l'heure avec les Corbeaux et les Geeks pour parler du programme du Tournoi.

Je me décompose la seconde d'après. Je jure en ne cachant pas mon agacement à l'idée d'aller voir les amateurs de noir et les addicts d'Apple. J'aurais presque préféré aller chez les Philosophes. Eux, au moins, ils ne sont pas fermés comme des huîtres dans leur monde.

Ma réaction ne manque pas d'amuser mes camarades.

— Eh oui, mon vieux, c'est ça d'être le bras droit, maintenant, on a des obligations.

J'aurais mieux fait de dire non.

Qu'est-ce que je raconte ? Je suis plus que ravi d'être le bras droit des SAP, c'est dans ma personnalité d'être un leader. Je suis seulement de mauvaise humeur, aujourd'hui.

— Ouais, mais les Gothiques et les Geeks ? Tu veux ma mort ?

— Prends ça comme une vengeance personnelle, mon ami.

— À quoi ? je questionne sur le même ton taquin.

Tout le monde éclate de rire. Austin se redresse de son fauteuil. Il me sourit à pleines dents, et sur son visage c'en est presque flippant. Je crois que j'ai vraiment fait une connerie.

— Tu verras quand t'auras fini de dessoûler et que la mémoire te reviendra mon pote, rien de vraiment différent des deux dernières années.

OK, le message est bien reçu.

Austin ne me dit rien de plus, me laissant gamberger avec ma mémoire noyée sous les effluves d'alcool… et à mon avis, de sexe. Je ne vois que ça.

La réunion se poursuit avec Grayson, le nouveau Pledge master – responsable des Pledges –, il me remplace étant donné que j'ai accédé à un nouveau poste au sein de la fraternité. Je tente de réfléchir sur la connerie que j'aurais pu faire. Mais rien ne vient.

Je jure, frustré dans tous les sens du terme. Ma troisième année à la fac sera l'année des résolutions. J'ai déjà donné deux ans avec ce genre de moments embarrassants, le pire c'est que ça m'a forgé une superbe réputation de tombeur et de fêtard, en plus de celle de sportif talentueux. Tout le monde m'apprécie pour ce que je suis… sauf que mon avenir risque de se concrétiser cette année. De plus, j'ai de nouvelles responsabilités, je ne peux pas me permettre de déconner. Et vu tous mes vices et projets, il vaudrait mieux que je m'en débarrasse rapidement.

Je crois que j'ai du boulot !

 

 

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1 : Sigma Alpha Psi (S-A-P) en lettres grecques.

2 : Les Suns de Phoenix sont une équipe de Basket pro en NBA aux USA.

3 : Période de recrutement, où les candidats posent leur candidature et participent aux activités de recrutement.

4 : Candidat qui a été accepté pour « s'essayer » à la greek life (vie étudiante selon certaines règles). On rejoint officiellement la fraternité/sororité lorsque l'on devient un membre actif.

5 : Ancien membre de la fraternité. Lorsque les membres d'une fraternité/sororité terminent leurs études et sont à la recherche d'un emploi, ils deviennent alumnae.

 

 

*****

Memphis

CHAPITRE 2

Rencontre




GREG : L'intégration se passe bien ?

MOI : Tu le saurais si tu passais me voir.

GREG : Désolé, pas le temps, cette semaine <3

 

Je jette mon portable sur mon lit sans même répondre. Je sais qu'il est occupé, mais sa présence me manque. Ici, je me sens comme un poisson dans une cage, pas à ma place. Pourtant, c'est la sororité qui me correspond, les filles pour la plupart sont cools et pas chiantes surtout, mais je ne sais pas, il me manque quelque chose et je suis certaine que Greg pourrait y remédier. Je me sens ridicule, comme si j'avais besoin d'un chaperon pour faire mes premiers pas dans le monde. Et quel monde ! La fac est un micro cosmos où chacun a sa place, où chacun sait ce qu'il a à faire et avec qui. Pour moi, c'est le bazar le plus complet sortie de ces quatre murs. Le campus est si grand que je me suis déjà perdue trois fois en moins d'une semaine, les cours n'ont pas encore commencé et je sais à peine où est la bibliothèque. Quant aux salles où je vais devoir me rendre, ça me paraît proche de la lune. Je comptais sur Greg pour me faire faire le tour, mais il est trop occupé. Et demander de l'aide aux filles… ça me paraît absurde.

Je cherche le plan bien rangé dans le tiroir de mon bureau et je tente de le déchiffrer, mais le Mandarin serait plus simple. J'allume le GPS de mon portable et entre l'adresse de la maison pour au moins être sûre de pouvoir rentrer.

La maison est calme quand je sors de ma chambre. Je descends les marches des deux étages qui me séparent du rez-de-chaussée et passe par la cuisine pour prendre une pomme lorsque la sonnette retentit et me fait sursauter. C'est la deuxième fois que j'entends cette musique résonner et je ne suis pas sûre de m'y habituer. Ce n'est pas un bruit strident, c'est plus comme trois cloches qui sonnent le glas.

Maé, notre reine, accueille les visiteurs qui, de ce que j'entends depuis la cuisine, sont des hommes. Je reste quelques instants à écouter le brouhaha de leur conversation, avant de me décider à sortir de mon trou pour rejoindre le salon et voir ce qu'il se passe. Deux mecs sont posés sur le canapé en demi-cercle placé devant la fenêtre pendant que Maé fait son numéro. Cette fille est étrange, comme tous les gothiques, mais elle, elle ressemble à une de ces poupées de porcelaine qu'on expose dans une vitrine. Son teint est pâle, ses vêtements toujours chics et ses gestes lents et mesurés. Elle est en train de lisser sa jupe avant de s'asseoir comme le ferait une reine sur son trône.

Notre sororité est différente des habituelles que l'on voit. Ici, on est chez les Craws, les Gothiques de la fac, cette étrange communauté méconnue et méprisée par tous les autres. Dans l'ordre des fraternités/sororités à fuir comme la peste, la nôtre vient en première place juste devant les Geeks et les scientifiques. C'est la plus petite aussi, les autres comptent de 50 à 100 membres, nous, nous ne sommes qu'une vingtaine dans une petite maison coloniale. Et je préfère ça, la fac est déjà un énorme changement. Au moins, ça reste familier et convivial malgré le peu d'attraits qu'on a pour les étrangers. Ce n'est pas qu'on soit asociales, enfin pour moi c'est un peu ça, mais ceux qui ne nous comprennent pas nous jugent et nous méprisent alors autant ne pas s'embêter avec eux. J'ai été contente quand Greg m'a parlé des Craws, lui fait partie de la version masculine, ça me permet d'étoffer mon dossier « activité sociale » tout en restant moi-même. Même si je vais devoir vendre des gâteaux en forme de cercueil pour l'association des croque-morts. Il n'y a qu'une chose que les autres nous envient, c'est nos fêtes de Halloween. Elles nous reviennent et sont généralement l'événement à ne pas manquer, ce soir-là.

Je m'appuie contre le chambranle de la porte qui donne sur le salon en croquant bruyamment dans ma pomme quand les deux étrangers bodybuildés me remarquent. J'essaye de faire comme si de rien n'était en continuant de manger, mais le premier avec ses yeux noirs, et son air qui donnerait à n'importe qui des frissons, me fait penser qu'il aurait sa place chez les Craws s'il n'avait pas l'attirail du sportif bien dans sa peau. Je hais ces mecs, ceux qui ont tout et vous le balancent à la figure comme un besoin viscéral de se sentir puissant. À croire que les muscles ne suffisent pas, quant à leurs homologues féminins, les pom-poms girls en chef, je crois qu'elles me feraient vomir avec leurs faux sourires, leurs faux seins, leurs faux cheveux blonds et leurs faux cerveaux. Ils ne sont qu'apparence et chercher à gratter, c'est parier sur le mauvais cheval, il n'y a rien en dessous, à part une perte de temps.

Le grand brun au regard noir s'installe plus confortablement en se laissant aller contre le dossier du canapé et je distingue l'autre bodybuildé qui sourit à Maé.

Les signaux d'alarme s'allument en masse dans mon cerveau, les pancartes, clignotants, feux de détresse, fusées et autres accessoires de signalisation sont tous sur ce mec assis nonchalamment sur le canapé comme si le monde lui appartenait et tous crient SEXE à plein volume.

Il est… j'en reste accrochée à ma pomme tellement je suis surprise. Habituellement, les sportifs ne me font aucun effet, ils ont tous le même look, le même sourire qui fait la fierté de leur dentiste et la même corpulence. Mais lui, il est magnifique. Et le pire dans tout ça, est que si sa prestance me ferait rager habituellement, ici, elle me fait saliver. Il n'a rien d'exceptionnel, mais c'est un tout qui le rend à mes yeux, magnifique. Il est grand, même si assis, on a du mal à en juger, mais à côté, son ami fait miniature. Son corps est forcément sculpté et j'imagine déjà ce qu'il se cache sous son tee-shirt. Une mâchoire carrée, des pommettes saillantes valorisées par ses yeux, je crois que c'est ce qui me fait fondre comme une imbécile. Son regard bleu azur envoie clairement un message « je vais te faire jouir comme personne ». Il respire le sexe, c'est un danger pour le cœur de toutes les midinettes qui doivent y succomber. Quand il passe la main dans ses cheveux, j'en suis à compter les reflets dans ses mèches brunes.

Bon Dieu, je me fais pitié à réagir ainsi et heureusement, la voix cristalline de Maé me fait reprendre mes esprits alors que le jus de ma pomme me coule sur le menton comme si je bavais devant lui.

Je mords violemment dedans et le beau gosse se tourne vers moi. Il me sourit, je crois que je gémis comme l'imbécile que je suis en train de devenir devant lui. J'essaye de résonner normalement, il doit être aussi crétin que ses pieds et sa tête, aussi belle soit-elle, doit être vide. Voilà, je dois me focaliser sur le vide intersidéral que son esprit doit cacher pour enfin reprendre forme humaine.

J'essaye d'écouter la conversation qu'a Maé avec le copain de « vide intersidéral », mais il n'arrête pas de me regarder et j'ai du mal à ne pas me demander ce qu'il voit.

— Bon, je suppose que le samedi soir, ça ne vous pose pas de problèmes ?

Je n'aime pas le ton qu'il emploie. Comme si on n'avait rien à faire un samedi soir dû à notre manque de popularité.

— Non, dis-je, on a poney le samedi soir et ensuite cueillette d'ingrédients pour les potions du dimanche.

Ils se retournent tous les trois dans ma direction et je sens que je vais me mettre à rougir. Je ne sais pas ce qui m'a pris de rétorquer ça, mais ils sont tellement sûrs d'eux, et « vide intersidéral » m'attire tellement que je suis agacée.

Maé me regarde en penchant un peu la tête de son trône de reine, l'air de me demander « Memphis, n'as-tu rien d'autre à faire que venir troubler ma réunion au sommet ? ». Je croque dans ma pomme pour ne pas flancher et partir en courant me cacher dans ma chambre, puis je me décolle du mur et pars en direction de la porte d'entrée en me rappelant qu'une randonnée autour du campus m'attend.

Je passe la porte et m'effondre directement sur la première marche qui mène à la maison. La chaleur de Tucson me foudroie un peu plus et je jure en baragouinant. Bon Dieu, qu'est-ce qu'il me prend ! Ce n'est pas comme si habituellement je faisais attention à ce qui m'entoure, à ce que les autres peuvent penser de moi et à me sentir ridicule devant un mec. Et puis quoi ? Quand sa voix résonnera, je vais mouiller ma culotte aussi ?

J'en suis à essayer de me détendre tout en triturant mon foulard porte-bonheur quand la porte s'ouvre et qu'une voix qui ne peut qu'appartenir à « vide intersidéral » résonne dans la rue.

— Poney alors… bizarre, je vous voyais plus sur des licornes.

Je tourne la tête dans la direction opposée, en soupirant. Je n'ai pas inondé mes sous-vêtements en l'entendant, c'est que je dois redevenir moi. Ma confrérie est tout au bout de la rue, un peu comme si on était les recalés des fraternités, celle des sportifs par exemple est au milieu, idéalement placée, et ses habitants n'ont pas à se taper des mètres de marche supplémentaires pour aller les uns chez les autres et surtout en cours.

« Vide intersidéral » se laisse choir à mes côtés, je tente de réprimer l'envie de m'éloigner de lui en agissant comme une enfant qui ne veut pas être assise à côté du garçon qui lui tire les cheveux à la récré. Son odeur est un peu trop proche et, il a tout du mec agréable, en apparence.

— Non, les licornes c'est seulement pour les jours de fête.

Je l'entends rire tout bas et je me retourne pour le regarder. Ses yeux me dévisagent. Un bleu pareil n'existe que dans les séries télé et c'est dû à des lentilles. On nous prend, nous les gothiques, pour des extraterrestres, mais quand je le vois lui, avec ce regard, je doute de sa nature humaine.

Il continue de m'observer. Alors je me lève, après avoir jeté mon trognon dans les fleurs qui bordent la maison, pour essayer de fuir ce que je ressens quand il pose ses yeux sur moi et finalement, c'est encore pire. Ses yeux font le tour de ma personne, enfin plutôt de ce qui me qualifie de femme, mes hanches, mes seins jusqu'à mes jambes qui sont ridiculement petites. Chez moi, tout est petit, à croire que la fée croissance a oublié mon berceau. Je mesure à peine 1m55 et tout est en rapport à ma taille, mon poids, mes formes, tout est petit. Mon père me trouve adorable et prend plaisir à voir qu'il peut encore me soulever et me faire tourner dans ses bras comme quand j'étais enfant et Greg me rassure en me disant que tout ce qui est petit est mignon. Oui, c'est mignon, mais c'est chiant.

— Quoi ? je finis par demander en soupirant.

— Rien. Enfin, je t'imagine bien nue sur une licorne.

Il se lève et me fait face ou plutôt me domine. Il est encore plus grand que je ne le pensais et à côté de lui, j'ai l'impression d'être Biblo le Hobbit. Sa main attrape une mèche de mes cheveux, pour la placer devant.

— Voilà, comme ça, nue, juste avec tes cheveux qui tombent.

Je reste un peu pétrifiée quand sa main lisse ma mèche et qu'il frôle mon sein, si bien que je n'arrive qu'à balbutier des inepties avant de me reprendre et de le repousser.

— Pour qui tu te prends !?

— Seth Shelton, dit-il en souriant.

Je ricane, « vide intersidéral » a un nom à jouer dans Beverly Hills, pourquoi ne suis-je pas étonnée ? Je m'éloigne de lui et descends d'une marche ce qui me rend encore plus insignifiante. Au fond, c'est ce que je suis pour lui, un jeu auquel il s'adonne avec toutes ces filles qui lui courent après et qu'il croit pouvoir jouer avec moi. C'est ce que font ces mecs, ils collectionnent les filles et plus leur tableau de chasse est gros, plus ils se sentent puissants. Mais ça ne marche pas avec moi, non, le sexe pour le sexe c'est tout ce que je fuis, tout ce que je déteste et répugne.

— Va faire ton numéro à celles qui y croient.

Je me détourne et descends le reste des marches en vue d'accomplir ce que j'avais prévu, même si je n'ai aucune idée d'où je vais, mais hors de question que je joue les touristes devant lui en sortant mon plan.

— Parce que tu n'y crois pas, peut-être ?

Je m'arrête. Je dois être l'attraction de la journée à ses yeux parce qu'il a décidé de ne pas me lâcher. Il se place devant moi et je redis bonjour à son torse. Mon cerveau note bien les pectoraux fermes et tous les attraits de ce corps, mais je refuse de les laisser prendre le dessus.

— Tu crois bien aux vampires, pourquoi pas à moi ?

Je croise les bras et me tire les cheveux par la même occasion, s'il y a quelque chose de grand chez moi, ce sont mes cheveux, ils sont capables de me faire une robe. L'année dernière, Greg m'a supplié de me déguiser en cousin Machin* avec eux.

— Ils sont sûrement plus réels que ta piètre tentative pour me mettre dans ton lit.

— Tu crois que je ne suis pas sérieux ? Je ne me suis jamais tapé une gothique, je suis sûr que ça peut être… intéressant.

Il plonge les mains dans son jeans, je relève la tête pour le regarder. Bon Dieu, si je devais côtoyer ce mec à longueur de temps, je choperai vite un torticolis à force de me dévisser le cou pour voir sa tête de beau gosse trop sûr de lui.

— Je ne suis pas une expérience pour demeuré. Si tu veux te taper une gothique, attends Halloween et demande à tes blondes de se déguiser.

Je fais un pas sur le côté, énervée de ce qu'il sous-entend. Au fond, je sais que je ne suis qu'un jeu pour lui, mais quand même, je suis vexée. Je ne sais pas pourquoi je m'attends à autre chose de sa part, je me moque de ce qu'il pense et de ce qu'il fait. Je ne le connais même pas, bon sang !

Je continue mon chemin en ruminant pour moi-même.

— Tu sais où j'habite si jamais tu changes d'avis !

Il crie dans mon dos et je ne trouve rien d'autre à faire qu'un fuck pour qu'il comprenne que je ne mordrais pas à l'hameçon.


 ______________________

*Personnage de la famille Adams



*****

Seth

CHAPITRE 3

Déni



Quelle fille bordel !

Je regarde avec insistance la dernière nana qui a retenu mon attention s'éloigner. Son corps est petit, mais réellement mignon. Ses longs cheveux bruns créent chez moi le désir. Des images classées X naissent dans mon esprit, je m'imagine très bien la baiser en tirant sur cette chevelure magnifique. Elle doit être à tomber toute nue, sa peau blanche avec ses quelques taches de rousseur, ferait un parfait contraste avec la mienne plus bronzée.

Je n'ai jamais couché avec une Gothique. Pourtant, j'ai une liste de conquêtes plutôt importante, mais je n'ai pas eu l'occasion de tomber sur une amatrice de tête de mort et d'Edward Cullen. Je suis certain que dans un lit, une Gothique est aussi chaude qu'une star du X. Avec leur vision du monde décalée, une partie de jambes en l'air avec l'une d'elles doit être une expérience inoubliable.

Je sens déjà que ma queue approuve cette idée. Cette nana a du caractère, j'adore les femmes qui me résistent avant de succomber, ça rend les choses plus intéressantes et passionnantes lorsqu'elles craquent.

— Qu'est-ce que tu fous ? me demande Austin.

Je me tourne pour lui faire face lorsqu'il arrive à mes côtés, il regarde tout comme moi ma prochaine conquête.

— Tu mates ton prochain repas, Serial Fuckeur ? C'est une Gothique.

— Et alors ? C'est une femme, non ? je rétorque en haussant les sourcils.

— Une femme qui aime le noir et les vampires, sérieux mec, t'es grave.

Alors qu'Austin continue de se moquer de moi, je réalise que je ne connais pas le prénom de ma prochaine conquête et, étrangement, au lieu de m'en foutre, l'idée de le découvrir, m'excite.

Je suis mon chef de fraternité sur le chemin du QG des Geeks. Je crois que cette entrevue se passera bien, j'aurais l'esprit occupé à fantasmer sur une charmante gothique, et c'est largement suffisant pour égayer ma journée.

 


***


Deux jours plus tard.

 

 

Je grogne en entendant Nash me charrier sur samedi dernier. Ce petit jeu commence à m'agacer profondément. Tout le monde me parle de cette soirée dont je n'ai aucun souvenir, et les vannes fusent sur ce que j'aurais fait.

Je ne peux pas y répondre, puisque justement, je ne sais pas ce que j'ai fait, et mes chers amis ont décidé de me laisser dans le mystère le plus total.

Bande de connards.

Ils arrivent à m'énerver alors que normalement, je suis censé être serein : on reprend l'entraînement avec le Coach dans quelques minutes, et j'ai eu la joie de retrouver Maggie, la kiné. Je suis arrivé un peu avant tout le monde au gymnase, histoire de me détendre de la reprise de la fac, cette femme est un superbe coup. Et il me fallait au moins ça pour me concentrer.

Je serre les poings en entendant Zane se foutre de ma gueule. Nous sommes tous les trois sur le terrain, en tenue de sport rouge, un ballon à la main. Des bruits de rebonds et de pas résonnent autour de nous, les autres sont aussi présents, nous sommes 15 dans l'équipe. Ça sent bon la reprise…

Et pourtant, je suis irrité.

— Kaleb, je crois que Seth fait la gueule, lance Zane.

Kaleb attrape au vol le ballon qu'on lui passe et l'envoie directement dans le panier, sans même chercher à viser. Il est doué, grand, plus d'1m95, il est afro-américain et fier de l'être. C'est le plus baraqué de notre trio, ses yeux marron vont à merveille avec son sourire de mannequin du dimanche. Il a une cicatrice sur le menton, dû à une connerie qu'on a fait étant gosses.

— Il en a peut-être marre d'être exclu du principal sujet de la conversation, renchérit Zane.

Je le foudroie du regard en récupérant le ballon, je tente le trois points et le rate, ce qui ne manque pas de m'agacer.

C'est leur faute.

— Pourtant, notre serial fuckeur adore être le centre de l'attention, continue K.

Y'en a assez d'être pris pour un con ! Je suis celui qu'on respecte bordel !

— Bon, vous allez me dire pourquoi tout le monde me demande si j'ai encore mes couilles ?! Si la nuit s'est bien passée ?! Ou encore si je n'ai pas trop mal aux reins ?! Si mes talents vont m'ouvrir des portes ?! Qu'est-ce que j'ai fait samedi bordel ?!

Je me rends compte que le ton de ma voix était vraiment dur. Mais cela les fait au moins réagir, les moqueries cessent subitement. Zane et Kaleb échangent un regard suspect. Celui qui n'annonce rien de bon.

Merde, je m'attends au pire.

Je les dévisage d'un œil mauvais, ce qui les décide à enfin l'ouvrir.

— C'est la faute à Zane, mec, j'étais avec ma copine !

— Attend, c'était au tour de Kaleb de jouer au Sam !

Les deux commencent à se disputer, on dirait deux nanas. Dans leur brouhaha qui dure plusieurs minutes, je finis par entendre une phrase qui retient mon attention.

—… ce n'est pas ma faute si elles ont allumé la caméra pour filmer leur baise !

— Sérieux ?!

Les deux se tournent vers moi, mal à l'aise, lorsque je les interromps dans leur querelle de gonzesses. Je médite sur ce que je viens d'apprendre. Merde, j'ai la sensation de m'être pris un pain dans la gueule.

Dites-moi que c'est une blague !

Mon questionnement doit être visible sur mon visage, parce que Kaleb s'approche de moi en disant :

— Mais t'inquiète, mon vieux, Zane a récupéré la bande…

Oh, ça devrait me rassurer ? J'adore mon meilleur ami, mais il a parfois des idées de génie stupides.

— Alors comment tout le monde le sait ? je les questionne d'un ton dur.

Zane jongle avec une balle qu'il récupère à ses pieds, il fuit mon regard. Le grand blond a fait une connerie aussi, sa voix est presque un chuchotement lorsqu'il m'annonce :

— Disons que dans un élan de beuverie, après que tout le monde soit parti…

— Vous avez maté la vidéo ?! je devine, incrédule.

Dis-moi le contraire !

En entendant Kaleb se marrer, je comprends que c'est ça. Bon sang, c'est pas vrai !

 

— C'est Austin qui était curieux ! On ne peut pas lui dire non ! Oh et puis, ce n'est pas comme si tu n'étais pas habitué à ce qu'on parle de tes exploits sexuels ! Mais t'inquiète, j'ai détruit la bande ensuite.

Après l'avoir maté, la logique aurait été de directement passer à l'étape « destruction des preuves ».

Zane a l'air mal à l'aise, il essaie de se justifier pour le cacher. Lui aussi a eu quelques soucis avec la gent féminine, depuis, il dédramatise tout. Parfois, il ne réfléchit pas.

Un peu comme moi, vu ce que je viens d'apprendre.

Je nous regarde tous les trois, plantés comme des arbres, alors que tout le monde autour de nous bouge. Je suis sur le cul de par ce que je viens d'apprendre, mais je n'ai pas l'impression de bien comprendre tout ce que ça entraîne. C'est le must en guise de conneries, je crois que j'ai atteint le plus haut des niveaux, mais étrangement ? Ça ne m'étonne pas tant que ça.

— Ça craint, je grogne malgré tout.

— C'est clair, surtout que tu sais que les recruteurs de la NBA commencent déjà à regarder les troisièmes années en plus ?

Je soupire. Vas-y, enfonce le couteau dans la plaie Zane.

— Je sais, je réponds avec détachement.

Cette conversation commence à me rendre nerveux. J'essaie de récupérer un ballon au vol pour me remettre dans l'entraînement, mais je renonce. Merde, il faut qu'on cesse de parler de ça, ça me déconcentre.

— Tu sais aussi qu'il vaut mieux avoir aussi un comportement irréprochable pour avoir un bon contrat ? renchérit Kaleb.

Ils se sont passés le mot ?

Je sais qu'il déconne, il essaie de détendre l'atmosphère pesante. Mais non, ça ne me fait pas rire, je me sens seulement… agacé. Pourquoi je ne me souviens pas de tout ça ? Quand même, si j'ai couché avec deux filles, dans ma chambre, je devrais m'en rappeler ne serait-ce qu'un peu ?

Est-ce que la Candice était l'une d'elles ? J'en sais rien ! Et si je me torture l'esprit je vais avoir une sale migraine et ce n'est pas vraiment le bon moment.

Bordel, je déteste vraiment l'alcool.

— Oh, parce que Zane a un comportement irréprochable, peut-être ? je lâche, histoire de changer de sujet.

— Je ne me fais pas filmer en charmante compagnie de deux nanas en train de…

Je secoue la tête. Stop, je ne veux rien savoir.

— Ça va, ça va ! Mais dois-je te rappeler ta mésaventure avec ta prof de sociologie ? je taquine Zane.

Ce dernier reste impassible, il me répond simplement :

— J'ai eu un B+ à mon devoir.

— Seth aurait décroché un A.

Les deux recommencent à blaguer. J'aurais ri avec eux dans d'autres circonstances ; je ris toujours de mes « exploits », mais là… je n'en sais rien. Je suis comme stressé par ce que je viens d'apprendre. Ce n'est pas rien de savoir qu'à un moment donné, on a fait des choses dont on ne se souvient pas. Le pire, c'est que rien ne me revient. C'est comme si mon cerveau voulait me faire oublier ce fâcheux événement.

Maudit traître.

Je sursaute en sentant la lourde main de Kaleb sur mon épaule. Il me sourit d'un air compatissant.

— Mon pote, on t'aime comme tu es. Si t'es à l'aise avec une réputation de tombeur, ce n'est pas notre problème. Mais réfléchis deux minutes à ce qui s'est produit. Ce n'est pas rien, et même Zane en a conscience, c'est pour te dire !

— Tu veux que j'arrête de baiser ?

Parce que c'est juste impossible à mes yeux !

Kaleb se met à rire.

— Mais non ! Arrête simplement l'alcool, Serial Fuckeur. Le coach le dit : avant un match, il faut évacuer le stress, et y'a rien de mieux. Mais mieux vaut le faire dans une chambre et si possible sans caméra, OK ?

La voix du sage et gentil Kaleb qui ne fait jamais rien de mal. Au moins, Zane connaît ce monde de « dépravés ».

— Quoique… il devrait arrêter le sexe aussi, c'est dans le programme des dépendants sexuels, tu devrais faire leur questionnaire « 40 questions pour établir votre diagnostic sur la dépendance sexuelle », je suis sûr que tu serais un patient intéressant, me taquine Zane, sinon à ce rythme, tu vas avoir une chaîne avec ton nom sur YouPorn.

Je souris et m'apprête à lui sauter dessus pour lui en coller gentiment une, quand le Coach Adams débarque en tenue, un carnet à la main et son sifflet dans la bouche. Le bruit familier de l'objet résonne. La voix masculine et dure nous ordonne de le rejoindre :

— Aller les Wildcats ! On se bouge le cul ! J'ai deux trois choses à vous dire !

À mon avis, on va avoir droit au même speech que l'année dernière sur nos soirées, le comportement qu'on doit avoir, et j'en passe. J'adore ce type, un vrai tyran, mais extrêmement doué dans le jeu. J'écoute d'une oreille, content de savoir que ça annonce la reprise du championnat.

Mais malgré la joie et l'excitation, je n'arrive pas à me sortir de la tête ce que j'ai appris : je crois que j'ai bien merdé.

 

***

 

Je rentre de l'entraînement vers 18h, complètement fatigué, mais satisfait. J'aime ce genre de journée : une baise d'avant match, un bon match de basket et une super baise post match. Haley, la capitaine des Pom-poms est vraiment un super coup elle aussi, rapide, pas compliquée, toujours disponible, elle a réussi à me détendre après la conversation plutôt étrange que j'ai eue avec Zane et Kaleb.

Pourtant, lorsque je sors de ma douche, mon esprit n'a pas cessé de penser à cette conversation, aux remarques des deux personnes qui me connaissent depuis toujours, à cette sextape que j'ai fait avec les deux nanas de l'équipe féminine de basket. Dieu merci, Zane a récupéré la vidéo, mais merde… ce n'est pas rien. D'accord, ça fait rire tout le monde aujourd'hui, et ça me vaut des plaisanteries amusantes. Mais ce « débordement », je ne le trouve pas drôle, il m'inquiète. Suis-je allé trop loin ? Ai-je atteint une limite ?

Je doute, et le doute, c'est rarement bon.

À l'abri des regards, je décide de me renseigner sur ce dont Zane m'a parlé. Certes, c'était en rigolant, mais souvent, c'est plus facile de faire passer un avis avec de l'humour, non ? Par exemple, quand Kaleb s'est mis avec son ancienne copine, on n'a pas arrêté de le charrier en lui parlant de ses défauts et il a fini par s'en rendre compte.

Et si mes potes essayaient de me faire comprendre que ma Jenni à moi commence à influencer mon avenir dans le mauvais sens ?

J'allume mon ordinateur sur mon bureau et m'effondre dans mon fauteuil. Caroline quitte son perchoir et vient se poser devant moi. Je tends la main pour caresser sa tête, elle se frotte contre mon doigt.

— Caroline, tu crois que Seth ne pense qu'à baiser ?

Seth, baiser, Seth aime les femmes.

Je souris, je vois que Zane est passé par là. Jamais je ne lui ai dit que « j'aimais » les femmes… ou bien elle l'a entendu au cours d'une conversation. Mon ara me fait rire, elle me parle comme le ferait une confidente.

— Seth a des problèmes d'après Zane.

Caroline me regarde en remuant la tête. On dirait qu'elle me dit oui. Bien sûr, mon interprétation reste une interprétation.

Je continue de lui parler en allant sur Internet. Je ne réfléchis pas lorsque je tape dans le moteur de recherche les mots clés « dépendance sexuelle ». C'est ce que Zane a employé. Je tombe sur le site principal.

J'éclate de rire en voyant le portail, un message s'affiche, il donne la description d'un sexuel addict, un dépendant. Ces gens-là sont des coincés en fait, à croire qu'on est forcément un dépravé si on pense que le sexe est primordial.

Je tombe sur une sorte de questionnaire, le truc dont mon pote m'a parlé. Je suis surpris, il ne déconnait pas, en fait. Les 40 questions existent bien… ainsi que des conseillers qui sont en ligne de 8h à 22h et qui analysent rapidement les réponses pour donner un diagnostic dans le plus bref délai.

Une connerie, c'est sûr.

Je me tourne vers mon ara qui joue avec un stylo et lui lance, sur un ton amusé :

— Bon, t'es prête Caroline, on va rire.

Rire, bêtises ?

Ouais, on va remplir un truc débile.

J'ouvre le questionnaire et commence à lire avec attention.

La première question me fait sourire, je tape ma réponse dans l'encadré réservé pour. On dirait le QCM pour entrer dans la fraternité des fêtards.

D'ailleurs, je ne réfléchis pas au préalable à des réponses avec un langage adapté.

 

1. Avez-vous déjà essayé de contrôler la fréquence de vos relations sexuelles ?

Pourquoi contrôler la fréquence de mes rapports sexuels ? J'ai une queue, c'est pour s'en servir, non ? Elle ne va pas rester planquée dans mon pantalon toute ma vie. Quand j'ai envie, généralement, je l'assouvis, point. Comme n'importe qui.

 

Pris dans l'élan, je me mets à répondre aux questions à la chaîne.

 

3. Avez-vous le sentiment que vous ne voulez pas que l'on soit au courant de vos activités sexuelles ou amoureuses ? Avez-vous l'impression que vous avez besoin de cacher ces activités aux autres (amis, famille, collègues, conseiller, etc.) ?

Je ne cache pas mes activités « sexuelles et amoureuses » puisque tout le monde le sait ! Il n'y a pas une personne sur ce maudit campus qui ne sait pas que j'ai un tableau de chasse aussi long que le bras. Ma famille ? Cela ne les regarde pas. Mes potes ? N'est-ce pas un des sujets principaux chez tous les mecs ?

Je ne dis rien concernant les rencontres amoureuses. Après tout, je n'ai pas de véritable petite amie qui reste assez longtemps pour être considérée comme telle. Je suis jeune, je n'ai pas à me prendre la tête avec une nana qui surveillerait le moindre de mes faits et gestes.

Je passe à la question suivante, un brin énervé.

 

5. Avez-vous eu des activités sexuelles à des moments déplacés, dans des endroits déplacés et/ou avec des personnes inappropriées ?

Qu'est-ce que vous appelez déplacés ? Vous voulez savoir si j'ai déjà eu des « activités sexuelles » en dehors de mon lit ? Très bien : oui, j'ai déjà eu des relations hors de mon pieu. Où ça ? Dans un terrain vague, dans une voiture, dans les gradins, dans les vestiaires, à une soirée, dans des toilettes, en boîte, la liste est longue. Ce n'est ni déplacé ni inapproprié, parce que ces activités sexuelles étaient consenties et désirées et que le résultat a été explosif à chaque fois. Il n'y a rien de mal à pimenter sa vie sexuelle de temps en temps !

 

Je souris un peu en relisant ma réponse, heureusement que ce test est anonyme. Peut-être y suis-je allé un peu fort ? Après tout, il me demande d'être le plus honnête possible, c'est ce que je fais.

Des interrogations naissent en moi. Est-ce que j'ai toujours eu envie de coucher avec toutes mes partenaires ? Oui… enfin, normalement, ça me paraît logique… enfin plus tellement maintenant que j'y pense.

 

8. Pensez-vous qu'une activité sexuelle ou une relation peut rendre la vie supportable ?

Le sexe est quelque chose de primordial chez l'homme. On est biologiquement programmé pour se vider les couilles, pour se reproduire et accessoirement prendre son pied. Ce serait un crime de mourir sans en avoir profité, non ? Donc oui, je pense qu'une activité sexuelle régulière (tout comme le sport, le sexe, c'est du sport !) est primordiale dans la vie, et peut la rendre non pas supportable, mais merveilleuse.

 

11. Tenez-vous une liste, écrite ou non, du nombre de partenaires que vous avez eus ?

Pas besoin, les autres la tienne pour moi. En plus, à quoi ça me servirait ? À faire le concours du nombre de fois où j'ai le plus trempé mon biscuit ? C'est digne d'un gamin de 15 ans.

 

13. Avez-vous perdu la notion du nombre de partenaires sexuels que vous avez eus ?

Probablement. Mais n'importe quel individu de mon âge connaîtrait ça. Quand on est jeune, on profite.

 

15. Avez-vous des relations sexuelles sans vous préoccuper des conséquences (par exemple la menace d'être pris ou le risque d'attraper un herpès, une maladie vénérienne, le SIDA, etc.) ?

Se faire griller est un fantasme très… excitant. Donc, non à mes yeux, je ne me préoccupe pas qu'on me retrouve le pantalon aux chevilles. Concernant les maladies sexuellement transmissibles, je me protège toujours.

 

17. Avez-vous le sentiment que dans une relation, votre seule (ou votre principale) force réside dans votre habilité sexuelle ou dans votre capacité à procurer une intense excitation émotionnelle ?

Étant donné que je n'ai que des partenaires sexuelles, je me dois d'être performant, de procurer du plaisir et de l'excitation, qu'elle soit émotionnelle ou physique.

 

18. Vous sentez-vous comme une marionnette inanimée si vous n'avez personne autour de vous avec qui flirter ? Avez-vous le sentiment que si vous n'êtes pas avec votre partenaire sexuel ou amoureux, vous n'êtes pas « vraiment vivant » ?

Je suis le maître de mon destin… sauf quand je bois. Mais je ne suis pas alcoolique, j'évite de boire, sinon… ouais, je crois que je pourrais devenir une marionnette de mon désir. Mais c'est seulement quand j'ai plusieurs bières à mon actif, d'habitude, je me contrôle. Le sexe nous aide à nous sentir vivant par ce qu'il nous procure.

 

19. Avez-vous le sentiment que vous avez droit au sexe ?

Heureusement que j'y ai droit ! Pourquoi on devrait mettre une interdiction « avis aux jeunes hommes de plus de 18 ans, surtout, ne sortez pas vos joujoux ». Le sexe, c'est comme boire, manger, voter, vivre et pisser, ce sont des OBLIGATIONS et des DROITS.

 

24. Avez-vous le sentiment que la vie n'aurait pas de sens sans une relation amoureuse ou sans sexe ? Avez-vous le sentiment que vous n'auriez pas d'identité si vous n'étiez pas l'amant(e) de quelqu'un ?

Ce n'est pas un sentiment, mais plutôt LA grande constatation d'une vie : une vie sans sexe ne vaut pas la peine d'être vécue. Le sexe ne force pas une identité, mais une personnalité, être l'amant de quelqu'un, c'est vague. Tout dépend de la personne… ou des personnes. Quoi qu'être un amant tout court, c'est un dur métier.

 

25. Vous arrive-t-il de flirter ou de faire l'amour sans même avoir eu l'intention de le faire ?

Ça s'appelle l'imprévu et de temps en temps, ça ne fait pas de mal.

 

Je réponds rapidement à celle-là. Cette question me gêne, cela ne me plaît pas.

Y'a que la vérité qui fâche.

Foutaises !

Je lis la suivante, et je crois que je suis tombé sur LA question.

 

26. Est-ce que votre comportement sexuel et/ou amoureux influe sur votre réputation ?

Effectivement, ma réputation est en partie basée sur mes « exploits » sexuels. Mais c'est valable pour d'autres. Je ne suis pas un cas à part.

 

27. Est-ce que pour vous le sexe ou les « relations » sont un moyen d'essayer de résoudre les problèmes de la vie et d'y échapper ?

Je n'échappe à rien, je n'ai aucun problème !

 

Mes réponses se font plus virulentes, pourquoi j'ai eu cette idée stupide ?

Mais malgré l'agacement, cela ne m'arrête pas.

 

31. Est-ce que vous avez besoin de faire l'amour ou de « tomber amoureux » pour vous sentir un « vrai homme » ou une « vraie femme » ?

Non, je n'ai pas besoin de ça pour me rassurer à ce niveau-là. Je suis un homme, point.

 

32. Avez-vous le sentiment que votre comportement sexuel ou amoureux ne vous apporte pas plus de satisfactions que si vous étiez coincé dans un tourniquet ? Êtes-vous fatigué de cette situation ?

Je suis toujours autant satisfait… juste un peu inquiet parfois dû à certains débordements, mais rien d'alarmant.

 

33. Êtes-vous incapable de concentrer votre attention sur d'autres domaines de votre vie parce que vous êtes préoccupé par une autre personne ou par le sexe ?

D'accord, le sexe est une part importante de ma vie, mais j'ai le basket, mes amis, mes études… je ne pense pas qu'à ça tout le temps !

 

Enfin… j'y pense très souvent… dès que je croise une fille dans la rue ou dans une sororité remplie de gothiques, par exemple.

C'est vrai que celle-là… elle m'obsède un peu.

 

34. Vous surprenez-vous en train de penser de façon obsédante à une personne en particulier ou à un acte sexuel même si ces pensées vous font souffrir, vous mettent mal à l'aise ou vous font sentir en manque ?

Je ne suis pas un psychopathe non plus !

 

Mes doigts me brûlent d'envie de dire JOKER.

 

35. Est-ce qu'il vous est arrivé de vouloir stopper ou maîtriser vos activités sexuelles ou amoureuses pendant une période donnée ? Avez-vous souhaité être moins dépendant sur le côté émotif ?

Je ne suis pas dépendant côté émotionnel, et pourquoi stoper puisque je gère.

 

39. Avez-vous le sentiment d'avoir perdu le contrôle de votre vie à cause de votre comportement sexuel et/ou amoureux ou de votre dépendance excessive ?

Ouais… parfois quand je déconne, j'ai l'impression de perdre un peu le contrôle. Mais je sais vite me rattraper. Je me prends en main. Ma dépendance excessive ? Je ne suis pas dépendant.

 

40. Avez-vous jamais pensé que vous pourriez tirer davantage de votre vie si vous n'étiez pas autant mené par vos quêtes sexuelles ou amoureuses ?

Je ne passe pas ma journée à essayer de trouver une partenaire, donc non, ma vie va bien, juste quelques petits… doutes. Mais rien d'alarmant. Quand j'aurai réglé ces problèmes, ça ira comme sur des roulettes !

 

Je termine d'écrire les derniers mots de ce questionnaire plus que grotesque. Voilà, c'est fini. Sans vraiment réfléchir à ce que je fais, je clique sur envoyer. Une fenêtre s'affiche en me disant que je dois patienter quelques minutes, le temps que les « spécialistes » des obsessionnels du cul analysent mes réponses.

J'ai le temps de raconter à Caroline ma journée. Mon perroquet fait fixette sur ma péripétie avec la vidéo de mes ébats, elle répète sans cesse des mots en rapport avec mon « vice ». Je commence à croire qu'il me manquait une case quand j'ai entrepris son éducation linguistique en l'entendant parler autant de sexe que trois mecs réunis devant un hamburger. Mais tout ça fait partie de moi, donc c'est normal que mon oiseau ait les mêmes sujets de conversation, non ?

Je laisse Caroline à son monologue sur la vidéo, elle vole à travers la pièce, fait sa petite vie. J'ai le temps d'étudier mon programme en astronomie, mon deuxième cursus après le basket. C'est une matière où je me balade un peu, je n'ai pas vraiment opté pour la partie du programme où je pourrais me recycler en astronaute de la NASA, l'astronomie professionnelle a tendance à se séparer en deux disciplines : astronomie d'observation et astrophysique théorique, à des degrés plus ou moins approfondis. En plus, Tucson a le meilleur programme de tout le pays. Personnellement, j'ai opté pour astronomie d'observation, qui pourrait déboucher sur… pas grand-chose étant donné le contenu assez soft par rapport au programme supérieur. Pour que cela me serve réellement, il faudrait que je fasse huit ans de plus à la fac. Mais étant donné que je ne compte pas me lancer dans une carrière, autre que celle de basketteur professionnel, j'enrichis mon cerveau de sportif avec ce genre de matière : les enseignements d'explorations.

J'ai sept cours : de l'astrométrie, c'est-à-dire la mesure de la position dans le ciel des étoiles et des planètes, l'observation des objets célestes, l'astronomie solaire, la planétologie, l'astronomie stellaire, l'astronomie galactique et en option, l'astronomie extragalactique. Je pensais tomber sur l'étude des petits hommes verts, mais apparemment, c'est tout autre. Bref, on verra ce que ça donne. Tout ce que je sais, c'est que l'astronomie est un domaine plus que passionnant ; la preuve, je suis un passionné !

Au moment où je commence ma lecture du programme en planétologie, un message sur mon PC m'indique que les spécialistes des obsessionnels du cul ont analysé mes supers réponses.

Je me redresse de mon fauteuil et clique sur l'icône qui s'allume pour lire la réponse qui ne manque pas de m'énerver :

 

 

« BONJOUR,

SUITE À VOS RÉPONSES, NOUS AVONS ÉTABLI UN RAPIDE DIAGNOSTIC QUI CORRESPOND À UNE PERSONNE ÉTANT ATTEINTE DE DÉPENDANCE SEXUELLE À UN STADE PLUS OU MOINS AVANCÉ. SI VOUS SOUHAITEZ EN SAVOIR PLUS, OU OBTENIR DES INFORMATIONS CONCERNANT UNE THÉRAPIE, VEUILLEZ VOUS ADRESSER À UN GROUPE DE SOUTIEN PROCHE DE CHEZ VOUS.

À BIENTÔT

Correspondant de DASA. »

 

 

Je jette ma souris sur le bureau et je sens la colère m'envahir. C'est n'importe quoi ce truc ! À mon avis, c'est une réponse automatique. Ce n'est pas un vrai psy qui se trouve derrière ce pc, ou un quelconque spécialiste. Ce sont juste des tarés qui veulent du monde à leurs réunions de dingues, des frustrés du sexe qui veulent entendre les histoires de personnes ayant une VRAIE vie. En plus, mes réponses sont dues à ma connerie. Je n'étais pas sérieux…

Je me fige devant cette constatation plus qu'évidente. Bien sûr que si, j'étais sérieux, j'ai pesé chacun de mes mots et tiqué devant certaines questions parce qu'elles faisaient naître en moi une réflexion intérieure qui ne me plaisait pas.

Je secoue la tête. Non, je maintiens qu'ils se sont plantés. Je ne suis pas un dépendant, je vis, un point c'est tout ! D'accord, j'ai beaucoup d'expérience, mais c'est normal à mon âge !

Bref, ce sont des conneries.

Alors que je m'apprête à fermer l'onglet internet, mon regard dérive sur le programme de la saison NBA accroché à mon mur. Les paroles de mes deux meilleurs amis me reviennent à l'esprit. Cette année, j'entre dans ma troisième année d'études, mon troisième championnat avec les Wildcats d'Arizona, mon équipe universitaire. On a gagné deux fois d'affilée la coupe, on va forcément attirer des recruteurs…

Et les recruteurs préfèrent les types sérieux, qui ont un comportement fiable et à qui on peut faire confiance. Plus on est discret, moins on attire la presse à scandale et moins on a de squelettes qui pourront coûter un bras à un club en cas de pépin. Du coup on entre dans la catégorie « jeune prodige exemplaire » pour qui, une proposition de contrat ne sera pas difficile à obtenir. N'importe quel sportif le sait. Je le sais… et c'est bien ça le problème. Je pense que je commence à douter de mon comportement avec ce qui s'est produit samedi dernier. Qu'est-ce qu'un professionnel penserait d'un môme faisant une sextape ? Rien de bon. Il faut que je me prenne en main.

Prenant mon courage à deux mains, je cherche sur le site un onglet recensant tous les lieux des réunions. Quand je le trouve, je suis étonné en voyant l'adresse la plus proche.

Comme un défi que je me lance à moi-même, je décide de me bloquer le jeudi soir. Je devrais pouvoir sortir en douce et aller assister à cette réunion des DASA de l'Université d'Arizona… J'y trouverais sans doute la confirmation que je m'inquiète pour rien… Ouais, je l'espère vraiment, parce que je ne sais pas comment je pourrais gérer ce genre de problème en étant qui je suis.

 

 

 *****

Memphis

CHAPITRE 4

***

 

 

Je suis à peu près certaine qu'ils ont changé l'emplacement de la bibliothèque dans la nuit, sinon je n'aurais pas devant moi la cafeteria. Ils jouent avec mes nerfs sur ce campus, sûrement une sorte de bizutage. Je souffle et regarde autour de moi, à la recherche de la moindre indication et je tombe sur un plan du campus qui indique la bibliothèque à l'autre bout. J'avance dans cette direction en maudissant les petits lutins qui œuvrent pendant la nuit pour faire de ma vie un marathon.

Les cours ont commencé et je n'ai pas dû arriver à l'un d'eux à l'heure. J'en suis encore à découvrir les endroits où je dois me rendre et j'ai du mal à les enregistrer. Pourtant ma visite du campus s'est plutôt bien passée étant donné que je suis rentrée 5h plus tard avec en tête, l'emplacement de chaque bâtiment. Du moins c'est ce que je pensais. Les deux beaux gosses étaient partis et Maé nous a réunis pour nous faire part des prochains événements. La première épreuve de la très attendue compétition inter-fraternités aura lieu après la fête de Halloween. On ne sait rien d'autre à ce propos, les épreuves sont décidées par les Sigma Alpha Psi et tenues secrètes jusqu'à leur déroulement. Je m'attends au pire venant d'eux, même si une clause d'égalité a été mise en place les années précédentes pour ne favoriser personne, en mettant des épreuves de différents styles, je me doute que la partie sportive va être dure. Je ne fais pas de sport, mais compte tenu de mon sens de l'orientation plutôt médiocre j'augmente chaque jour mon capital endurance. Je ne sais pas comment aborder cette compétition. Elle a l'air importante pour tous, mais je ne vois pas trop quelle gloire on pourrait en tirer en tant que Craws. Ce n'est pas mon but, même si je vais me prêter au jeu et donner le meilleur de moi-même pour porter mon équipe, mais je sais qu'on part perdants. Reste à espérer qu'on s'amuse un minimum et pas à nos dépens.

Quand à la fête d'Halloween, après avoir laissé passer dans une conversation avec Sylvia ma voisine, que mon père est cuisinier, je suis chargée du buffet. Le truc c'est que, si mon père cuisine très bien, je suis à peine capable de faire cuire des pâtes sans qu'elles soient collantes. Je suis donc un peu dans la merde pour apprendre à faire des gâteaux et autres petits fours en moins de trois semaines.

Je commence à voir le toit de la bibliothèque au loin alors que je redescends vers le bas du campus quand mon téléphone sonne. Je l'extirpe difficilement de la poche de mon jeans et souris en voyant l'appelant.

— Allo ?

— Memi ! Alors cette rentrée, ça se passe bien ?

Je souris en entendant la voix chaleureuse de mon père, c'est comme me ramener à la maison et tout de suite, tout va mieux.

— Très bien, le campus est un peu énorme pour moi, mais sinon ça va.

— Tu t'es perdue ? Pourtant tu as emmené au moins dix plans avec toi !

Je ne réponds pas, je ne suis pas stupide au point de lui donner de quoi se foutre de moi. Mon père, que j'adore, est très taquin avec moi, parfois un peu trop. Un blanc s'installe entre nous ce qui me fait m'arrêter quand je l'entends soupirer avant de prononcer mon nom. Mon cœur palpite à l'idée que quelque chose soit arrivé à ma mère.

— Qu'est-ce qu'il y a papa ?

— Ta mère. Elle rentre ce week-end.

Très bien, me dis-je, oui c'est très bien, je resterai sur le campus ce week-end et tant pis pour le resto.

— Trouve quelqu'un d'autre pour ce week-end, je ne viendrai pas.

— Memi…

— Je ne peux pas, j'ai plein de révisions à faire et…

— Arrête de chercher des excuses.

Je me tais. Il sait parfaitement que je ne veux pas la croiser, l'entendre ou quoi que ce soit qui serait en rapport avec elle. Je ne peux pas, l'idée me hérisse le poil. Ce n'est pas ma mère, c'est la femme qui m'a mise au monde, point. Je ne comprends pas mon père qui l'accueille à bras ouverts, je fuis ses visites et vis ma vie. Pourtant, si je donne cette image à mon père, au fond je reste cette petite fille qui se demande pourquoi sa maman ne l'aime pas. C'est plus fort que moi, je cherche des réponses, mais contrairement à lui, je ne lui trouve pas d'excuses.

— Je ne viendrai pas papa.

— Très bien dit-il en soupirant, ne t'inquiète pas pour le restaurant j'ai un extra qui sera disponible, mais Memi, j'aurais aimé que tu sois là.

Je gémis rien que d'y penser, leurs retrouvailles vont être comme d'habitude, bruyantes et tristes quand elle repartira, je ne tiens pas à assister à ça.

— Je dois te laisser papa, je te rappelle la semaine prochaine. Je t'aime.

Je raccroche sans lui laisser le temps de rajouter des arguments qui ne serviraient à rien d'autre que nous mettre dans une situation qu'on a vu et revu des centaines de fois.

Je suis enfin en vue de la bibliothèque. Elle est flambant neuve, toute en verre sur quatre étages, le soleil se reflète sur les vitres ce qui la fait briller comme un diamant. Je repère Greg qui m'attend devant et le rejoins rapidement. Je serre mon ami dans mes bras, un peu plus longtemps que d'habitude et s'il semble surpris un instant, il comprend très vite que j'ai besoin de cette étreinte comme pour reprendre des forces après une bataille. Je n'arrive pas à me chasser de la tête qu'elle va venir. Qu'elle va faire son numéro à mon père, qui va lui ouvrir les bras, et ensuite, elle repartira rassurée sur l'homme qui l'attend à chaque fois qu'elle en a envie. Je la déteste. Je déteste ce qu'elle fait. Ce qu'elle est. Et je déteste le comportement de mon père quand elle est là. Je déteste qu'il me dise que ce n'est pas sa faute, qu'elle est malade et le baratin habituel. Elle n'est pas malade, à mes yeux, elle est juste lâche et faible, elle préfère son addiction à nous.

Je m'écarte de Greg en soupirant avant de sourire pour le rassurer. Il n'est pas dupe, mais il n'insistera pas pour savoir ce qu'il y a. Greg m'attrape par l'épaule et nous entrons dans la bibliothèque. Le calme est impressionnant pour ce grand bâtiment, même dans les couloirs il n'y a que des chuchotements. Je reste collée à Greg et le suis dans les escaliers. Mon ami n'est pas un grand parleur. Avec lui, le silence n'a pas de poids, il est léger et appréciable. Avec lui, tout est naturel et bienvenu. Nous sommes amis depuis la primaire et depuis on ne se quitte plus. Il est le seul à savoir pour ma mère, et à ne pas juger. Pourtant sa famille est parfaite. Son père est prof au lycée de notre ville, sa mère ne travaille pas et s'occupe d'un tas d'associations et de son jardin. Ils sont souriants, accueillants et tolérants. Des parents en or qui s'inquiètent parfois de voir leur fils se renfermer dans son monde, mais qui le laissent évoluer comme il l'entend. Greg, derrière ses airs de gothique à ne pas approcher de trop près au risque d'être mordu, est quelqu'un de sensible et de gentil. S'il pouvait donner son cœur il le ferait sur le champ. Avant j'avais peur que cette gentillesse lui coûte, qu'on se serve de lui et son besoin de savoir les gens heureux, mais il a vite compris qu'on ne peut pas toujours dire oui.

Il me jette un coup d'œil quand on arrive enfin au deuxième étage, je souris à ses grands yeux noirs. Ses cheveux sont coiffés en arrière et gominés à l'excès, il a un piercing à la narine qui nous a valu un « putain de merde »  de la part de sa mère quand elle l'a vu et des vêtements noirs qui moulent son corps fin et pourtant athlétique. Parfois quand on est tous les deux à ne rien faire et qu'il est allongé a penser à je ne sais quoi, je lui dis qu'il est magnifique, et il me sourit timidement, comme si les compliments n'étaient pas habituels. Pour moi, il est l'être le plus magnifique et je suis heureuse de le connaître.

Le deuxième étage consacré aux sciences n'est pas trop peuplé encore et on trouve rapidement une table dans le fond où l'on s'installe. Greg sort son bazar et s'étale sur les trois quarts de la table. J'essaye de me faire de la place en poussant ses affaires. Je sors mon bloc-notes et cherche mon livre d'anatomie, mais je ne le trouve pas dans mon sac.

Je grogne en le laissant tomber.

— Qu'est ce qu'il y a ? me demande Greg de sa voix grave tout en commençant à bosser.

— J'ai oublié un bouquin.

— Tu es dans une bibliothèque, je pense que tu devrais pouvoir pallier à ce problème.

Il me regarde en battant des cils comme s'il s'adressait à une demeurée et je ne peux m'empêcher de rire, ce qui me vaut des regards mauvais de mes congénères occupés a bosser aux autres tables.

— Je reviens, dis-je en me levant.

Je pars vers les allées de livres. Quand je vois la longueur de la pièce je décide de commencer par trouver la méthode de classement afin de ne pas perdre trop de temps en recherches inutiles. Je souris en pensant que la fac est pour moi une succession de perte de temps inutile, j'ai vraiment hâte d'être au jour ou je pourrais tout trouver d'une simple envie. Je me dirige vers la section médecine et caresse les livres en cherchant celui qui m'intéresse.

J'ai toujours bien aimé l'odeur des livres, depuis la première fois ou je suis entrée dans une bibliothèque. Bon c'était une salle avec une étagère, mais les livres étaient vieux et sentaient bon les trésors. J'étais en primaire, fascinée par la magie qu'ils opéraient en moi, comme si j'allais découvrir des choses inestimables en les ouvrant.

Je tombe enfin sur la section anatomie, je voudrais trouver le même que j'utilise pour mes cours, mais je crois que c'est peine perdue, ceux présents datent un peu. Je m'accroupis pour en récupérer un qui a l'air plus récent lorsque j'entends des pas s'approcher de moi sur la moquette bleue. Mon regard tombe sur une paire de baskets et quand je me redresse, le torse qui me fait face, recouvert d'un tee-shirt blanc trop moulant à mon goût, ne me laisse que peu de doutes sur l'identité de l'intrus qui ose envahir mon espace personnel.

— Anatomie, dit-il tout bas, tu sais que je suis un peu un expert dans ce domaine et je peux sûrement t'apprendre plus qu'un bouquin.

— Seth, heureuse de t'avoir revu, salut.

Je ne cherche même pas à le regarder, je sais déjà que je vais le regretter si je croise son regard. J'essaye de m'extirper de son chemin, mais il en a décidé autrement.

— Tu fais médecine ?

Je soupire.

— Non, je cherche juste des infos pour mes prochains meurtres.

Il rit. Et malgré moi je lève la tête pour le regarder. Il a les cheveux humides qui lui retombent un peu sur le front, et quelques gouttes glissent sur son cou, son sourire est désarmant, quant à ses yeux… je crois que jamais je ne m'habituerais à ce regard, bleu, dérangeant, et pourtant excitant.

— Heu tu m'excuses, mais j'ai du boulot, dis-je en baissant les yeux.

— Je te fais de l'effet, dit-il en me barrant encore la route.

 

Je ne dis rien. J'essaye de passer contre l'étagère, mais là encore, son entraînement de sportif doit lui permettre d'anticiper tous mes mouvements, si bien que je me retrouve contre les livres avec le corps de Seth à quelques centimètres de moi. Ses mains se posent de chaque côté de mon visage. Je déglutis, en regardant la force de ses bras. J'inspire et mon air s'emplit de son odeur, de son parfum frais et captivant.

— Pas du tout, je finis par répondre.

Je pense que, même moi, je ne crois pas à ce que je viens de dire. Il se penche vers moi. Je m'accroche à mon livre d'anatomie, comme à une bouée qui m'empêcherait de faire ce que me crie mon corps, à savoir, me coller contre lui comme une chatte en chaleur.

— Alors, pourquoi tu me fuis comme ça ?

Sa voix n'est qu'un murmure à mon oreille. Il passe son nez dans mes cheveux et (mais) je tente de le repousser.

— Peut-être par ce que tu ne m'intéresses pas.

— Non, c'est tout le contraire, je le sens. Qu'est ce que tu as à perdre à te laisser aller ?

Je gémis en sentant ses doigts sur ma hanche. Il fait des cercles avec son pouce sur ma peau et ça la chauffe délicieusement.

— Ma dignité…

— Ce n'est que du sexe…

— Justement, ça ne m'intéresse pas.

Je relève les yeux vers lui. Son visage s'éloigne du mien pour me regarder, je crois qu'il cherche à savoir si je suis sérieuse. J'espère qu'il voit que c'est le cas et qu'enfin il va me lâcher. Je me sens ridicule quand il est là, mais en même temps mon corps apprécie sa présence.

— Il n'y a rien de mal au sexe, c'est bon, pourquoi s'en priver ?

— Parce que le sexe pour le sexe ne m'intéresse pas.

Il fronce les sourcils avant de sourire et de saisir ma taille pour rapprocher mon bassin du sien. Nom de dieu ! Je suis à peu près sûre que baiser, ici et maintenant, ne le dérangerait pas.

— Tu as déjà essayé ? Le sexe pour le sexe ?

Je secoue la tête en le sentant se frotter contre moi.

— Alors tu devrais.

Il se penche et respire mon cou. Je suis de la guimauve dans ses bras que j'en laisse tomber mon livre sur la moquette.

— C'est bon, c'est seulement de la jouissance sans autres préoccupations. Sa langue trace ma jugulaire. C'est du laisser-aller dans le plaisir. Sans se soucier de ce que pense ton partenaire une fois sorti du lit… aucune attache, aucune barrière, juste du plaisir.

Je l'écoute. Mon corps perçoit ses mots, ses caresses, son souffle sur ma peau rendue humide par sa langue Je suis presque hypnotisée par lui, ce qui explique pourquoi mon genou n'a pas frappé cette entrejambe dure qui se frotte à moi. Malgré ce que ça représente, malgré le dégoût que j'ai pour ce genre de choses, j'aime qu'il me touche et qu'il me désire. J'aime sentir son corps grand et fort contre le mien. Et j'aimerais le sentir dans en moi.

— Laisse-toi aller…

Mes bras allaient l'encercler pour le rapprocher de moi, quand je vois l'interrogation dans ses yeux. Il ne sait même pas comment je m'appelle et pourtant, coucher avec moi ne le dérange pas. Je ne veux pas de ça, je n'ai jamais voulu de ça, du sexe anonyme au point d'en oublier où l'on est, et avec qui. Ce n'est pas moi et ça ne le sera jamais même si je ressens de l'excitation pour Seth, même si mon corps l'appelle désespérément, je ne coucherais jamais comme ça, je ne serai jamais ma mère.

Je repousse Seth de toutes mes forces, il me relâche et reprend son habituel sourire. Je ressens comme un manque de ses mains sur moi, il va finir par me rendre accroc à son toucher, j'en ai la nausée de penser ça, qu'est ce que me fait ce mec ?

— Ne me touche plus ! je lance avec colère.

Seth s'appuie contre l'étagère d'en face et me dévisage avec un air narquois alors que je ramasse mon livre et tente de faire taire le tremblement de mon corps.

— Pourquoi ? Parce que tu aimes ça ?

Je le fusille du regard et m'en vais retrouver Greg sans répondre à ses continuelles avances. Non, ça ne me plaît pas, je ne veux pas que ça me plaise, il est hors de question que ça me plaise, hors de question que je devienne comme elle.

 

 à suivre...


******************


!! ATTENTION SPOILERS !!

 


SYNOPSIS DÉTAILLÉ

 

Bienvenue à l'Université d'Arizona.

Cette année, la fac accueille le Tournoi des Fraternités & Sororités pour élire les leaders qui « règneront » durant les deux prochaines années sur le campus. Tout le monde participe à cet événement secret et attendu qui se mêle à la Greek Life, la vie étudiante.

Seth Shelton est un membre important de Sigma Alpha Psi, la fraternité des sportifs. Très populaire et respecté, c'est un basketteur talentueux en voie de devenir un pro, mais sa réputation plus que sulfureuse lui joue parfois des tours. Alors que son avenir va se décider au cours de cette année, de nombreux imprévus lui tombent dessus. Seth va devoir faire des choix.

Memphis Hopkins vient d'entrer chez les Craws, la sororité où tous les Gothiques vivent en communauté. En première année de médecine, elle est plutôt discrète et mystérieuse. Son passé a forgé la personne qu'elle est aujourd'hui et son amour pour le noir. Un peu perdue dans son monde, son arrivée à la fac va l'amener à faire une rencontre inattendue, qui risque d'éveiller en elle ses pires craintes.

Et cette rencontre n'est autre que Seth Shelton.

Rien ne les prédestinait à se rencontrer, leur deux mondes sont à deux extrémités totalement opposées, et pourtant, en ce début d'année, les chemins de Seth et Memphis vont se croiser lorsqu'ils débarquent tous les deux chez les Dépendants Affectifs et Sexuels Anonymes (DASA). Chacun d'eux est présent pour une bonne raison : l'un veut guérir, l'autre veut se rassurer. Mais rien ne va se passer comme prévu. La passion va s'inviter dans leur vie et risque de tout remettre en question, leur choix, ainsi que leur vision des choses.

Poussés par un désir qui surpasse tout, leur thérapie va rapidement être mise au second plan. Ils vont entamer une relation torride malgré leurs différences et les démons de chacun, où divers combats et obligations viennent se mêler à cette histoire déjà bien compliquée.

Pour Seth, c'est l'organisation du Tournoi des Fraternités qui se révèle être un passe-temps amusant, le championnat universitaire de Basket-ball, son addiction qui ne cesse de s'accroître au fil des semaines avec le débarquement de la Gothique dans sa vie, ses proches qui lui demandent d'être à la hauteur de sa réputation.

Pour Memphis, c'est le bouleversement de son entrée en fac, son apparence de Gothique qui devait la protéger du monde extérieur et des étrangers va la mettre à découvert sur ce champ de mines qu'est l'Université et changer ses habitudes grâce à la compétition. Elle va devoir apprendre à se sociabiliser et très vite, elle va succomber au charme de Seth malgré tout ce qu'il représente et qu'elle n'aime pas.

Alors que le Tournoi commence, leur couple va connaître des hauts et des bas, mais aussi de bons moments de rire et d'émotions. Mais la réalité va vite les rattraper : leur entourage ne voit pas leur histoire de la même façon qu'eux, et ils vont tenter de leur faire comprendre à leur manière que tous les duos ne sont pas forcément viables.

Est-ce qu'une Gothique au look étrange peut vivre une histoire d'amour avec un sportif populaire ? Affaire à suivre.



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PRÉSENTATION RAPIDE DES PERSONNAGES PRINCIPAUX :

 

Seth Shelton :Il est né dans une famille riche typiquement américaine, avec beaucoup de valeurs, et vivant dans les beaux quartiers. Seth a eu une enfance et une adolescence plus qu'avantageuse et épanouie, où il faisait tout ce qu'il voulait. Sa relation avec son père est très conflictuelle et il préfère son grand-père qui l'a élevé. Il a deux grandes sœurs jumelles. Âgé de 20 ans aujourd'hui, c'est un grand brun aux yeux bleus qui entame sa troisième année à l'université d'Arizona. Il a intégré avec ses deux meilleurs amis, Zane Linwood et Kaleb Azaan, basketteurs également, Sigma Alpha Psi, où il est devenu le nouveau bras droit du chef la fraternité. À eux trois, ils forment un trio infernal. Seth a embarqué Caroline, son perroquet à la personnalité plutôt amusante dans la mouvementée Greek Life.

Populaire et talentueux dans son domaine de prédilection, le basket, il est ce qu'on pourrait qualifier de « coureur de jupons ». Mais derrière sa réputation, son tableau de chasse et son goût très prononcé pour le sexe et la fête, Seth cache en réalité une véritable addiction qui l'inquiète de plus en plus à l'arrivée des sélections pour la NBA.

En « manque » d'amour, il est tombé dans l'addiction du sexe dès son entrée au lycée, c'est un réel addict qui baise plusieurs fois par jour et qui n'arrive pas à se contrôler. À ses yeux, c'est une façon d'être aimé (surtout par les femmes). Il a un double cursus universitaire, à côté du basket, il se passionne pour l'astronomie.

 

Memphis Hopkins : Enfant unique née de la rencontre de July et Miles à un festival de Memphis, son père et sa mère se sont donc mariés vu que July était enceinte. Enfant peu désiré, mais chouchouté par son père alors que sa mère est toujours absente (elle est accroc au sexe). Elle grandit presque normalement entre les disputes et les aller et venue de sa mère. En maternelle elle se fait un copain, Greg Keller et ne se sont plus quittés depuis. En grandissant, elle se referme sur elle sauf avec Greg, elle n'ose pas approcher les autres et encore moins inviter des amis chez elle de peur que sa mère rentre avec un homme. Son apparition du gothisme arrive au début du lycée. Niveau cœur ? Un petit ami gothique lui aussi au lycée et puis rien d'autre après. C'est une jeune femme de 19 ans, qui fait sa première entrée à l'université. Elle est introvertie, Gothique, petite, brune avec des cheveux très longs, ses yeux sont noisette, elle est fine et elle aime le noir. Memphis vient étudier la médecine, elle souhaite devenir gynécologue. Elle a une relation fusionnelle avec son père, c'est lui qui l'a élevé, elle l'aide parfois dans son restaurant où il est cuisinier. Elle aime l'harmonica, elle parle le japonais qu'elle a appris avec Greg un fan de manga. Memphis est quelqu'un de fidèle en amitié, elle a peur de devenir comme ça mère ou pire tomber amoureuse comme son père, de quelqu'un d'addict au sexe. Elle entre dans la sororité des Craws, pas de gaité de cœur, mais elle doit se montrer plus sociable pour le bien de ses études et cette position dans la société étudiante lui permet de rester dans son élément tout en se sociabilisant.

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