Ah, si j'avais un franc cinquante

Damien Nivelet

Suite de "l'association"

Le théâtre commencerait le mois prochain. En attendant, je devais noter des idées car l'écriture serait collective. Je dois avouer que je n'avais jamais envisagé l'écriture sous cet angle, la jouer collectif moi pour qui c'était plutôt un exercice solitaire. Mais pourquoi pas après tout?
J'avais un thème musical en tête que je voyais bien comme introduction au spectacle, mais chaque chose en son heure... Il faudrait s'adapter aux autres auteurs participant à l'élaboration, tout en défendant ses idées. J'aurais appelé ça un exercice de démocratie littéraire. Mais je n'y étais pas encore...
Je devais bientôt aller voir ma soeurette enceinte, son mari, et leur petit garçon de cinq ans. J'étais impatient même si mon beau-frère me voyait plutôt comme un hurluberlu vivant aux frais de la société, un rêveur incurable. J'assumais ma différence, mon beau-frère étant plus pragmatique que moi, ce qui lui avait sans doute permis de bien mieux gagner sa vie certes, mais je n'étais pas envieux de ça... C'est parfois rageant comment le statut social fausse les rapports humains. Heureusement pas avec tout le monde, bien sûr.
Je n'avais jamais été bien riche, vivant de petits boulots alimentaires avant de tomber en dépression. Je rêvais surtout de vivre de ma plume. Hélas beaucoup d'appelés pour peu d'élus... J'avais entamé un roman que je n'arrivais pas à terminer, faute d'inspiration et probablement faute d'événements significatifs dans mon existence pour nourrir la dite-inspiration... Le premier départ de ma femme m'avait laissé en catatonie complète, prostré sur mon orgueil, même si je pouvais comprendre ses raisons...
C'était terminé tout ça, et je sifflotais "Ah, si j'avais un franc cinquante"...

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