Amandine

Marie Leroy

Amandine est une fort belle jeune fille de dix-sept ans, douce et quelque peu timorée, que l’on peut comparer à un petit animal craintif et attendrissant.

                                                                                                 

Il émane de cette fraîche créature comme une aura de vulnérabilité, éveillant, chez qui y est sensible, le souhait de la protéger, de veiller à son bien-être. En dépit de son caractère particulièrement taciturne, Amandine est d’ailleurs capable de charmer presque tous ceux qu’elle rencontre, tant sa gentillesse et son ingénuité sont rares. Sa candeur vous émeut et vous fait sourire, son amabilité vous ravit, sa joliesse éclatante vous frappe à chacune de ses apparitions.

Même sa timidité exacerbée contribue à la rendre attachante : elle peut être si amusante, lorsqu’elle rougit pour presque rien, quand ses yeux s’écarquillent dès que l’on l’interroge, et que sa voix fluette semble étouffer entre les mots qui s’embourbent !

Elle a par ailleurs cultivé l’étrange habitude de s’effacer derrière celui qu’elle considérera comme son « bienfaiteur »… Parmi des inconnus dont la seule présence physique l’effraie au plus haut point, elle désigne – consciemment ou non – un quidam qui lui inspire confiance, et qu’elle escortera ensuite systématiquement, aussi longtemps qui durera sa torpeur. Il ne serait pas exagéré de dire qu’elle accompagnera cette personne presque partout, et que, souvent trop impressionnée pour répondre à une question qu’on lui posera, elle se rangera derrière l’avis de l’autre.

Ce serait en effet une entreprise laborieuse que d’étudier la personnalité profonde d’Amandine. Toutefois, à notre connaissance, aucun de ceux qu’elle a choisis pour prendre la parole à sa place n’a trouvé à se plaindre de cette tâche.

Qui donc pourrait regretter d’avoir apprivoisé Amandine… Sa compagnie est discrète, toujours plaisante, et ne vous envahit jamais, car la jeune fille s’accommode particulièrement bien de la solitude lorsque cela est nécessaire.

Durant la belle saison, elle s’adonne parfois à de longues promenades à la campagne, ou dans les forêts qu’elle adore ; il lui arrive de s’asseoir sous une ombrelle et de composer, en hommage à la nature, quelques poèmes ou acrostiches d’une étonnante finesse. Et, lorsque revient l’hiver, tel un chat qui se prélasse en savourant la chaleur du foyer, elle s’installe dans le salon, paisiblement, et se concentre sur ses peintures à la gouache, ou reprend quelque ouvrage de broderie.

Débonnaire et silencieuse, elle offre une présence apaisante, dont seule la grâce suffit à vous distraire.

Amandine a tous les charmes d’une fleur sur le point d’éclore. Ni femme, ni enfant, elle dégage un subtil mélange d’innocence et de sensualité : son teint est d’une fraîcheur opalescente, sa peau fine et claire, sa silhouette élancée et pourtant soulignée par des courbes délicates, ses cheveux dorés aux boucles angéliques ; et dans son regard, pur et vif, scintille quelquefois, subrepticement, une once de malice.

Amandine est incontestablement une créature enchanteresse, dont la beauté vous transportera.

Sa seule imperfection notoire est peut-être son singulier appétit… Elle peut, au milieu des autres convives, se sustenter avec une volonté féroce, tout en opposition avec son comportement habituel : il semblerait que tant de qualités réunies chez un seul être, exigent, pour leur déploiement, l’absorption quotidienne d’énormes quantités de nourritures…

Il vous appartiendra de décider, lorsque vous aurez la chance de côtoyer Amandine, si cette délicieuse petite personne mérite une telle assiduité à la préparation de ses mets.

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