Âme fragmentée (2) – Je tague.

Je tague en noir les murs de la ville.

Pour en dénoncer les maux.

Je tague en rouge les murs du quartier.

Pour montrer la violence.

J'écris bien gros.

Pour rendre le dessin plus visible que les pensées des gens.

J'écris bien droit.

Pour que les écarts de la société se remarquent.

Je recouvre la couleur du mur.

Bien trop sobre.

Je recouvre le noir du bitume.

Avec des traces de pneus bourrés.

Je repasse les vieilles lettres taguées.

Qui représentent toujours la réalité.

Je repasse les lettres, les tagues.

Pour arrêter de saigner.

Je marche dans les rues de la ville un jour de pluie.

Et montre mon appartenance à chaque lieu.

Je marche dans les rues de la ville.

Et chaque jour j'aperçois quelque chose de nouveau.

Les passagers à bord des trottoirs regardent devant eux.

Les passagers à bord des voitures fument.

Les passagers de métro regardent dans le vide.

Les cyclistes regardent la route.

Les passagers des taxis regardent leurs téléphones.

Les passagers des bus se fixent dans le blanc des yeux.

Personne ne regarde les tagues. Tout le monde évite de parler des maux.

Alors je les écris. Un jour peut-être seront-ils vus.

Je tague, pour rendre ce monde plus joli.

©Starlight.