An doras dubh

kerby

Chapitre 3:

Un sale moment.

   Le lendemain le temps c'est légèrement adoucit malgré un vent persistant obligeant les gens à se couvrir et accélérer le pas pour se mettre à l'abris. Les caniveaux ruissèlent encore de la pluie battante tombée la veille. Le ciel encore ombragé de nuages apporte une certaine obscurité sur la ville. Les bureaux de la Garda Siochana sont éclairés. Il est huit heures du matin et pourtant tout donne cette impression d'être en fin de journée.

   Killian est adossé au distributeur de café. Pour la énième fois depuis qu'il est arrivé il regarde la pendule qui trône au-dessus de la porte d'entrée. Une heure qu'il attend que sa collègue se pointe. Cela le surprend, elle qui n'a jamais été en retard depuis qu'ils se connaissent. Que peut-elle faire ? S'interroge-t-il. Perdu dans ses pensées et touillant machinalement son café, il finit par en faire déborder un peu. Le liquide bouillant lui brûle légèrement la main. Il regarde cette goutte noire couler le long de ses doigts. Il suce le bâtonnet en plastique et le garde en bouche, le mâchouillant nerveusement. D'un pas vif il se rend à son bureau sur lequel il pose son café. Du tiroir il sort un paquet de mouchoirs en papier et s'essuie la main. Cette odeur de café, cette sensation de chaleur bouillante lui fait remonter à la surface de sa mémoire sa première rencontre avec Cassie.

***

   Cette journée là il avait décidé de se prendre un café afin de décompresser un peu. L'affaire sur laquelle il enquêtait en ce moment lui prenait tout son temps et malgré de nombreux indices aucuns n'étaient suffisants pour permettre l'arrestation du criminel. Alors qu'il retournait à son bureau, à cette époque la machine se trouvait dans le couloir, il se fit rentrer dedans au détour d'un virage. Le café se retrouva non pas par terre, mais un curieux coup du hasard sur sa chemise blanche. Comme si cette journée n'était pas déjà assez merdique.

- PUTAIN!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Face à lui Cassie encore en uniforme de patrouille. La jeune fille se remit du choc.

-Je suis désolée, je ne vous avais pas vu.

Killian était hors de lui.

-Et vous pensez que c'est vos excuses de merde qui vont faire disparaître ces traces???

Cassie releva la tête bien haut et le fixa droit dans les yeux.

-Hey connard va falloir voir à vous calmer, c'est pas la peine de m'insulter alors que je m'excuse. A vous aussi de faire attention.

Il la regarda avec des yeux emplis de colère. Alors qu'il s'apprêtait à lui répondre, il se ravisa. Mais quel con, pourquoi je lui gueule après, tout ça parce que je n'arrive à rien dans cette enquête de merde. Mais sa fierté l'obligeant à ne pas s'excuser, il la contourna et reprit sa route. Au loin derrière lui il l'entendit de nouveau.

-C'est ça casses-toi.

***

   Il regarde de nouveau l'heure, puis son téléphone. Mais le voyant d'appel en absence est éteint. Il jette un œil vite fait sur son portable, rien. Il parcourt son répertoire et se décide à l'appeler. Il tombe direct sur le répondeur, signifiant que le téléphone de Cassie est éteint. Deuxième chance il compose celui du fixe. La tonalité résonne. Deux, puis trois. Au bout de la cinquième il entend la voix de cassie.

Bonjour vous êtes bien chez Cassie Ó Súilleabháin. Je ne suis pas là pour le moment, mais vous pouvez laisser un message et je vous rappellerais.

   Le message est aussitôt suivit du BIP traditionnel.

-Cassie, c'est Killian juste au cas où je te rappel que tu as du travail aujourd'hui et que je t'attend. Magnes toi avant que le patron s'aperçoive de ton absence.

Il raccroche. Instinctivement il se retourne vers le bureau de son chef. Rien. Pas un mouvement, mais il sait que cela ne va pas durer, tôt ou tard celui-ci va en sortir et se demander pourquoi Killian est encore assis à se tourner les pouces alors qu'il devrait être chez la famille de la victime à les interroger en compagnie de sa collègue. Mais pourquoi a-t-il eu cette idée. Il le sait pourtant ne jamais penser au mal qui pourrait se produire car il finit toujours par arriver. Au fond de la pièce une porte s'ouvre et Brian Ó Cuinn sort de son office.

-Pluincéid qu'est-ce que vous foutez encore là? Où est passé Ó Súilleabháin?

Le flic se lève pour faire face à son chef.

-Elle ………….. Heu ……………. Elle est aux toilettes.

-Et bien allez lui dire de magner son petit cul et allez faire votre boulot!!!! Vous pensez que l'on vous paie à rien foutre?

-Oui chef.

Il attrape sa veste et sort à toute vitesse. Il y a des jours où il déteste son job, son bureau, son patron. Des jours comme celui-ci où il aimerait rester au lit ou balancer son badge à la gueule de ce type. A l'extérieur il monte dans sa voiture et démarre. Alors qu'il est en route pour le domicile de la victime son téléphone portable sonne.

***

   L'appart de Cassie est plongé dans la pénombre, l'air est encore légèrement remplie de fumée, l'odeur de la cigarette froide est imprégnée dans les rideaux. Tout est parfaitement scellé, pas un brin d'air ne filtre donnant à ce lieu une vague ressemblance de pub, tripots ou autres opiumerie. Cassie est allongée sur son canapé, son bras pendu vers le sol. A proximité de sa main ouverte sur le tapis usé, un verre à roulé jusqu'au pied de la table de salon sur laquelle est posé deux bouteilles de Jameson dont une entièrement vide. Là où se trouve le tapis à finit d'imbiber un liquide, du whisky tout probablement, laissant une large tache sombre. Tout est silence lorsque soudain le téléphone sonne. La jeune femme émerge de son sommeil alcoolisé lorsque retentit la deuxième sonnerie. Elle ouvre les yeux tant bien que mal. Le bruit lui fait mal au crâne, c'est comme un marteau-pilon lui défonçant le cerveau réduisant en miettes les quelques neurones encore en activités. Instinctivement elle cherche quelque chose de lourd en tâtonnant le sol. Elle finit par tomber sur le verre et s'en saisit. Avec violence elle le balance droit vers le téléphone, comme si ce geste allait suffire à faire cesser e bruit. La cinquième sonnerie laisse enfin place au répondeur et à son message enregistré.

Bonjour vous êtes bien chez Cassie Ó Súilleabháin. Je ne suis pas là pour le moment, mais vous pouvez laisser un message et je vous rappellerais.

Putain qu'est-ce qu'elle déteste entendre sa voix et ce message d'une banalité affligeante, chaque fois elle se dit qu'elle doit en faire un autre plus personnalisé, mais ne le fait jamais. Enfin le message d'accueil cesse.

-Cassie, c'est Killian juste au cas où je te rappel que tu as du travail aujourd'hui et que je t'attend. Magnes toi avant que le patron s'aperçoive de ton absence.

Bon sang le rendez-vous avec la famille de la victime. Elle se redresse d'un bond, bien trop vite en fait ce qui lui donne durant quelques secondes le tournis. En s'asseyant sur le canapé elle pose son pied nu sur la partie humide du tapis. Une grimace de dégoût se lit sur son visage.

-Heurk!!!!!

Ca tape de plus en plus fort dans son crâne, malaxant ses tempes du bout de ses doigts elle se lève. Son cœur est au bord de la nausée et cette odeur de tabac froid ne fait rien pour arranger les choses. Elle marche avec une lenteur exaspérante pour elle vers la fenêtre. Elle tire le rideau et ouvre en grand afin d'aérer la pièce. Cassie remarque alors qu'elle porte les même fringues que la veille. Elle ne peut pas partir ainsi, pas sans ôter cette odeur de sueur et de fumée de sur elle. Elle fait couler l'eau de la douche qui va encore mettre des heures avant de chauffer à cause de son installation pourrie. Un de ces jours elle devrait y faire quelque chose, forcer son proprio à tout faire réparer alors que celui-ci à l'air totalement de s'en foutre. En attendant de pouvoir se doucher, elle réchauffe une tasse de café noir dans son micro-onde. Le liquide est amer et lui laisse une lourdeur sur l'estomac. Il semblerait que le Jameson et le café ne fasse pas bon ménage. Tout en buvant elle allume son portable. L'écran s'illumine. 1 appel raté. Elle se doute bien qu'il s'agit de Killian. Elle parcours son répertoire et trouve le nom de son collègue. Elle appuie sur le bouton et l'appel est lancé. A l'autre bout Killian décroche.

-Cass'

-Oui.

-Bon dieu qu'est-ce que tu fous? Le boss est furax.

-Désolée.

-Enfin c'est pas grave, je t'ai couverte. Tu es prêtes?

-Pas encore.

Un moment de silence, elle sait que Killian s'inquiète de ce qui arrive, ce n'est pas dans son habitude de rater une partie de l'enquête.

-Tu veux que je vienne te chercher?

-Non. Va voir la famille, de mon coté je vais aller prendre des nouvelles du légiste.

-Ok. Tu es sûr que tout va bien?

-Oui. Et Killian …………….. Encore désolée.

-T'inquiètes pas pour ça, tu me revaudras ça.

Elle raccroche. Elle se sent mal de ne rien lui avoir dit. Peut être qu'il pourrait l'aider, l'écouter. Mais elle sait que Killian a ses propres soucis et ne veux pas lui en causer d'autres, surtout pas avec les siens. De toute façon elle n'a jamais trop su se confier aux autres, préférant porter le poids de ses malheurs sur ses épaules. Elle retourne dans la salle de bain et se déshabille. Un instant elle regarde la cuvette des WC, se demandant si elle va vomir le liquide qui barbote dans son estomac. Puis elle se glisse sous la douche, laissant l'eau chaude la relaxer et apaiser son ivresse. Enroulée dans sa serviette de bain, elle essuie du revers de la main la buée sur le miroir. Ouais se dit-elle, un coup de maquillage feront disparaître ses cernes. Elle ouvre l'armoire à pharmacie, attrape des aspirines qu'elle avale d'une traite. Dans la chambre elle enfile les premiers vêtements qui viennent et fonce droit vers la sortie.

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