La Prophétie du Lion Sorcier - Chapitre 74 : Le Coeur de Hiamovi

Lynn Rénier

Anya & le Magicien - Tome 1 : La Prophétie du Lion Sorcier

Une fois dans le bois, Dante et Anya prennent machinalement la direction de la Tanière. Ils savent pourtant qu'ils ne retrouveront pas la sorcière là. Ils ignorent où la trouver et espèrent trouver un indice sur l'endroit où le Cœur de la Magie réside. La Veilleuse leur a peut-être laissé une piste à suivre.

- Si seulement Evy était avec nous… soupire Anya.

- Je suis désolé, Cat. Nous devons nous débrouiller sans son aide, j'en ai peur.

La jeune femme se mure dans le silence. Elle ne veut pas croire que la Veilleuse soit partie.

Avec qui ira-t-elle discuter sous les arbres fruitiers du verger désormais ? Auprès de qui pourra-t-elle se confier sans appréhension ? À qui osera-t-elle raconter sa mésaventure et tous les secrets qu'elle a découverts ? Anya a conscience que pour l'heure rien n'est sûr, et elle chérit l'espoir qu'Évelyn a peut-être tenu tête aux mercenaires et n'est pas tombée, qu'elle va la revoir bientôt.

Mais en cet instant, la peur la tiraille et elle songe à la possible absence de son amie. Ce sentiment lui serre le cœur et pèse sur sa poitrine. Si Dante n'avait pas sa main chaude et réconfortante dans le sienne, elle ne sait pas comment elle tiendrait encore. Son courage prend donc le dessus et elle chasse l'idée qu'Évelyn ne reviendrait pas et qu'elle pourrait alors lui manquer.

Arrivés devant l'entrée de la grotte, ils hésitent. Y trouveront-ils leur amie ? Ou la sorcière accomplissant son funeste projet ? Bien décidé à arrêter Mélissa avant qu'elle ne puisse commettre l'irréparable, Dante s'engouffre dans la cavité. Anya ne tarde pas à lui emboiter le pas.

Ils constatent avec amertume que rien n'a bougé. Tout est tel qu'ils l'ont laissé en quittant les lieux avec la Veilleuse. Et l'absence de cette dernière est aussitôt remarquée.

- Pitié, qu'il ne lui soit rien arrivé, murmure la jeune femme en joignant ses mains en une prière.

- J'espère que Kylian a pu lui venir en aide à temps.

- Moi aussi…

Anya retient ses larmes. Ce n'est pas le moment.

- Force est de constater que ce n'est pas ici qu'est venue Mélissa. Alors où peut-elle se trouver ?

- Elle a parlé du cœur du bois. Est-ce à prendre au pied de la lettre ?

- Non, je ne pense pas. Il doit s'agir de l'endroit où repose la source de la magie.

- Mais où est-ce ? Évy ne t'a jamais parlé de cet endroit ?

- Je ne sais plus, peut-être…

- Fais preuve de mémoire, Dante. C'est important.

- Je sais, mais ça ne me dit rien. J'ai l'esprit trop occupé à vouloir stopper cette sorcière pour arriver à réfléchir posément.

- Calmes-toi, lui dit doucement sa compagnon en prenant ses mains dans les siennes. Il faut que tu occultes la Baronne de ton esprit.

Le magicien plonge ses yeux violets dans ceux d'Anya. Elle lui esquisse un petit sourire qu'il lui rend, forcé malgré lui.

- Fais le vide dans ta tête et essaie de te souvenir.

Le jeune homme ferme les yeux, fronce les sourcils et médite quelques secondes avant de lâcher un profond soupir.

- Je n'y arrive pas ! râle-t-il. Je ne vois que cette maudite femme !

- Regardes-moi, Dante. Ne penses à rien d'autre qu'à la voix d'Évy.

Fixant son regard au sien, il se laisse guider par la jeune femme. Puis, peu à peu, son esprit se détache de son objectif pour glisser dans le doux regard d'Anya. C'est alors que la voix de la Veilleuse lui parvient, comme si elle se tenait à ses côtés. Et devant son regard, les pages d'un livre illustré se tournent, lui révélant l'histoire contée. Par quelle magie ? voudrait-il demander. Mais il ne veut pas rompre le charme et se laisse emporter, espérant trouver une réponse.

Quand il rouvre enfin les yeux, une étincelle nouvelle éclaire son regard.

- Les Veilleurs ont toujours veillé sur le Cœur du bois, révèle-t-il. Il n'y a qu'après le massacre de son peuple que notre amie a du s'en éloigner.

- Tu sais donc où le trouver ?

- Le village des Veilleurs a toujours été bâti autour du Cœur, pour le protéger. Comment n'y ai-je pas pensé plus tôt ! C'est évident !

- Dis-moi que tu sais comment nous y rendre.

- Malheureusement, non. Elle n'a jamais voulu m'y emmener.

- Retour à la case départ…

Surprenant le regard triste que sa compagne pose sur l'endroit, le magicien lui propose de sortir de la Tanière.

- Nous ne trouverons rien de plus ici.

Elle le suit, d'un pas trainant. Au fond d'elle, elle souhaiterait restée là encore un peu. Pour s'imprégner de l'odeur d'encens et se mucher dans les coussins éparpillés autour du foyer. Cet endroit va lui manquer, songe-t-elle en le quittant.

 

Alors qu'ils sortent de la grotte, ils tombent nez à nez avec un être curieux fait d'écorce et de feuillage. Patiemment, il les attend à l'ombre des arbres.

- Un sylvain, siffle Dante médusé.

À ses côtés, Anya n'ose bouger, aussi interdite que lui, mais littéralement fascinée.

- Seriez-vous à la recherche d'une âme sombre ? leur demande l'esprit sylvestre dans un bruissement de feuilles.

Les deux jeunes gens restent muets un instant, bien trop impressionnés par la présence de la créature. Puis, Dante se reprend :

- Oui. Savez-vous où nous pourrions la trouver ?

Le sylvain s'avance vers eux, gracieux et silencieux.

- Prenez vers le Nord. Suivez le Bascia. Jusqu'aux pieds du Grincheux. Vous l'y débusquerez.

- Qu'y a-t-il là-bas ? ose Anya.

- Ce pour quoi les Veilleurs existent. Et un douloureux passé.

- Je ne comprends pas…

L'être sylvestre n'en dit pas d'avantage et disparaît peu à peu dans les buissons, se fondant dans la végétation.

- Merci, lui adresse Dante reconnaissant.

- Qu'y a-t-il aux pieds des montagnes, Dante ? Pourquoi les êtres magiques parlent-ils toujours pas énigmes ? C'est agaçant…

- Je l'ignore, mais nous n'allons pas tarder à le découvrir. Viens, allons-y.

Elle glisse sa main dans la sienne et ils prennent la direction indiquée par le sylvain.

 

Après de longues minutes de marche à un rythme effréné, ils débouchent sur ce qu'ils pensent être une clairière aux pieds des Montagnes du Grincheux. Pourtant, c'est un tout autre paysage qu'ils découvrent, interdits.

Autrefois, un village se trouvait là. Il n'en reste que des ruines éparses sur lesquelles la nature a rapidement repris le dessus. On distingue pourtant nettement les fondations en pierres taillées des maisons, les poutres qui soutenaient les toits et le verre des fenêtres brisées. Les arbres ont poussé, la mousse s'est installée. Cela ne dissimule pas les traces pour autant. Par le passé, les Veilleurs vivaient ici…

Anya se fige devant la statue d'un lion couverte de mousse. Sa grosse patte est posée sur une sphère, son regard porté sur le lointain. Dans cette atmosphère particulière, elle l'imagine prendre vie, se défaire de sa gangue de pierre pour rugir sa colère. Elle ne pourrait lui donner tort…

Dante, de son côté, constate avec peine les marques laissées par les attaques. Son cœur se serre, comme si une part de lui avait assisté au massacre du peuple-félin, comme s'il s'était trouvé là lui aussi pour voir l'horreur qu'a subit le peuple-lupin.

Il éprouve le chagrin de savoir ce qui s'est passé, de comprendre la tristesse de Laïn quand elle en parlait. Mais plus encore, il a cette étrange sensation d'en avoir été témoin. Et alors la colère prend le pas sur tout. Ne demeure qu'une idée : arrêter Mélissa, quitte à lui voler ce qu'il y a de plus sacré.

Laissant son amie derrière lui, le jeune mage s'enfonce vers le centre du petit village des Veilleurs. Les arbres autour de lui portent les stigmates du passé sans que ça ne les ai empêché de se développer. Ils sont immenses, touffus, et donnent à l'endroit un air de bois sauvage inexploré. La végétation, plus forte, a repris possession des lieux et surmonté le traumatisme. Ce qui n'a pas été le cas de ses habitants.

Pas la moindre trace d'animaux ou d'insectes. Le combat qui a fait rage ici les a fait fuir et le sang versé qui a imprégné la terre les a dissuadés de revenir. Cependant, une étrange aura se dégage dans l'air, irrésistible telle une voix suave qui appelle et invite. Dante ne peut y résister. Il doit en trouver la source, voir ce qui l'attire en ce lieu comme un aimant.

En lui, il sent quelque chose remuer. Sa magie est exacerbée. Il la sent crépiter au bout de ses doigts, électrique et galvanisée. Il a du mal à la contenir tant elle cherche à se libérer. Qu'y a-t-il ici pour avoir un tel effet sur lui et son art ? Le Cœur du bois est source de la magie primaire, mais pourquoi est-il tant affecté de s'en approcher ?

C'est alors que les ruines se dessinent en cercle autour de ce qui semble être une place. Cinq lions de roche accueillent les intrus. Différents les uns des autres dans leur posture, ils sont les gardiens du lieu, tournant le dos à un arbre comme jamais Dante n'en avait vu.

Le tronc épais est si gros qu'il faut plus d'une vingtaine de personnes pour en faire le tour en se tenant la main. Son feuillage d'un vert sombre couvre l'espace qui se dégage à ses pieds et semble surplomber le bois. Au sein de l'écorce, là où le tronc se sépare en branches, Dante aperçoit une lueur vive et orangée. Serait-ce une bulle de résine ?

Le chêne millénaire de l'Académie semble ridicule en comparaison. Cet arbre géant domine le bois de toute sa hauteur et dégage une puissance que le jeune mage perçoit avec une évidence stupéfiante. Impossible de savoir de quelle espèce végétale il s'agit, comme si c'était un ensemble de tout.

Là des boules de gui, ici des feuilles de saule, par là des fleurs de pruniers. On peut également voir des branches noueuses ou encore des lianes de lierres. Et il donne le sentiment d'être aussi vieux que le monde et un certain respect s'impose alors à sa seule vue.

Émerveillé, Dante a bien du mal à croire ce qu'il voit. Les légendes contées par la Veilleuse prennent vie tout-à-coup, et prennent aussi tout leur sens.

- L'Arbre de Vie, chuchote-t-il. Moi qui pensais que ce n'était qu'une expression des Veilleurs… Tout est vrai… La source de la magie primaire, le Cœur du bois c'est cet arbre…

Il fait un pas pour s'en approcher. Il voudrait le toucher, sentir l'écorce vibrer sous sa paume tant il a l'air vivant. Mais un éclair vient le frapper dans un bruit assourdissant.

 

Plongé dans sa contemplation de l'arbre géant, il n'a pas vu Mélissa sortir de l'ombre. Elle l'attendait. Et à le voir distrait, elle en a profité pour l'attaquer. Il aurait dû s'en douter. Il aurait dû se montrer plus prudent.

- Je ne te laisserai pas approcher la Source, lui crie-t-elle. Elle m'appartient !

Le jeune mage atterrit avec rudesse dans les ruines d'une maison à trente pas de là. Contrairement à ce qu'il aurait pu penser, son esprit analyse rapidement la situation. C'est son corps qui ne suit pas. Son dos le fait souffrir et une douleur lancinante lui tétanise le bras. Son coude a du percuter les pierres. Une chance qu'il ne soit pas blessé d'avantage.

Il se relève en titubant, encore sonné par le choc. Au pied de l'arbre, la sorcière patiente. Il est conscient que l'affronter ne sera pas chose aisée. Sa magie est peut-être pure mais il n'est pas un Haut-Mage pour avoir la puissance nécessaire de la battre. Il ne peut que repousser l'inévitable.

- Je ne suis pas là pour vous la voler, mais pour la protéger. Et, si je puis me permettre, le Cœur ne vous appartient pas. Il n'appartient à personne !

Pour réponse, elle lui jette un sort puissant. Son corps étourdi, il n'a pas le temps de l'esquiver et le prend de plein fouet. Le souffle coupé, il tombe à genoux en cherchant sa respiration. Elle finit par revenir, difficilement.

- Crois-tu vraiment que je vais te laisser me mettre des bâtons dans les roues sans riposter ? Tu vas mourir ici, comme ces imbéciles hommes-bêtes. Mais avant, je tiens à prendre mon temps. Il serait dommage de ne pas profiter des jeux qui s'offrent à moi.

Son rire résonne dans le village sans vie des Veilleurs.

Dante s'étonne de ne pas être déjà mort. La magie de la sorcière est puissante. Plus qu'il s'y attendait. D'autant qu'il s'est laissé surprendre. Mélissa joue avec lui avant de l'achever. Soit. Si c'est ce qu'elle souhaite, alors il veut bien se prêter au jeu. Tant qu'il parvient à l'empêcher d'arriver à ses fins…

Il peine à se relever, le thorax douloureux. Le sourire affiché sur le visage de la sorcière est machiavélique, fourbe et triomphal. Il ne peut s'empêcher de serrer les poings. La colère gronde en lui et la rage le gagne. S'il pouvait lui enlever ce rictus condescendant qu'elle lui adresse… Soudain, une voix timide l'appelle.

- Dante ?

- Cat… souffle-t-il.

- Tu es venu accompagné, se moque Mélissa, comme c'est mignon. Et si je m'amusais un peu avec ta jeune amie…

Un grognement presque animal sort de sa gorge :

- Non ! Ne la touchez pas !

Le crépitement au bout de ses doigts devient plus intense et sa magie lui échappe. Le sort, tel un éclair, frappe la sorcière pour l'envoyer dans le décor. Dante en reste une seconde surpris. Il ne se connaissait pas cette puissance.

Aussitôt, il se sort des décombres pour trouver Anya avant que la sorcière ne se reprenne. Il ne veut pas imaginer ce qu'elle pourrait lui faire subir.

 

Il la trouve, immobile, à quelques pas du cercle de lions. Son regard est fixé sur l'arbre immense qui les surplombe. Elle semble fascinée, presque envoutée. Le Cœur aurait-il un effet sur les non-initiés ?

- Cat, ne restes pas là.

Elle tend un doigt vers le tronc épais :

- Alors c'est…

- Oui. Les Veilleurs l'appellent l'Arbre de Vie.

- Il est magnifique.

Un grondement leur parvient et sans réfléchir, Dante prend Anya contre lui avant de se jeter au sol. Le sort passe au-dessus de leur tête pour se briser sur les ruines derrière eux. La jeune femme ne peut retenir un cri de frayeur.

- La Baronne est là, comprend-t-elle.

- Et elle n'est pas décidée à nous laisser l'arrêter.

- Le contraire aurait été étonnant.

Tous deux se relèvent pour jeter un regard méfiant à la sorcière qui se tient entre les lions. Une aura sombre l'enveloppe, un cercle de symboles brillants sous ses pieds.

À peine sont-ils debout que la Baronne leur adresse de nouveau un sort. En un geste pareil à celui de jeter une fléchette sur une cible dans un simple jeu de bar, elle pointe ses doigts dans leur direction. Alors, un bracelet de runes lumineuses se dessine dans l'air, autour de son poignet, et un grondement résonne.

- Attention ! prévient Dante.

D'un bond, Anya et lui se réfugient derrière un mur, juste à temps. Le fracas du sort, comme le bruit d'un éclair frappant la terre, fait trembler la pierre. Un soupir échappe à la jeune femme.

- Les choses deviennent plus sérieuses, commente le mage.

- Parce qu'elles ne l'étaient pas déjà ?

L'ironie de sa compagne le fait sourire.

- Cat, s'il te plaît, mets-toi à l'abri. Je ne veux pas qu'elle puisse te faire du mal.

- Et toi ? Tu ne vas tout de même pas la combattre seul ?

L'inquiétude qu'il lit dans le regard d'Anya le touche en plein cœur. S'imaginait-il vraiment qu'elle resterait indifférente ? Quel imbécile ! Il ne peut pourtant pas en être autrement, il est le seul à pouvoir faire quelque chose contre Mélissa.

- Je n'ai pas le choix, lui dit-il en caressant sa joue. Il faut que quelqu'un l'arrête. Ou du moins, il faut que je tente de l'empêcher de tuer la magie.

- Mais, Dante…

- Je t'en prie, Cat, ne rends pas cela plus difficile que ça n'est déjà.

La jeune femme se jette dans ses bras.

- Je ne veux pas te perdre toi aussi, sanglote-t-elle.

- N'ai crainte, je ne la laisserais pas me vaincre si facilement.

- Je ne parle pas de ça…

Ils échangent un regard et tout est dit. Le mage se rend bien compte qu'à cet instant il n'est victime d'aucune illusion. Les yeux d'Anya sont emplis de vérité. Il est si troublé, presque gêné.

Le temps se suspend un instant tandis qu'ils s'observent. Seul le fracas des sorts de la Baronne résonne autour d'eux. Le mur derrière lequel ils se cachent tremble parfois, sans les sortir de leur échange muet.

- Évy avait raison, murmure la jeune femme.

- À quel sujet ?

Anya rougit un peu. Elle ne peut pas lui dire.

- Cat, à propos de quoi avait-elle raison ?

- De tout. Elle avait raison sur tout…

- Et sur nous aussi ?

Elle lui adresse un regard surpris.

- Comment… ?

- Paraît-il que c'est évident, exceptés pour les principaux concernés.

Un petit sourire timide apparaît sur le visage de Dante et son regard se fait incroyablement doux. Émue, Anya ne sait plus que répondre. Les larmes troublent sa vue et glissent sur sa joue. Avec tendresse, le jeune mage vient les essuyer du bout des doigts.

- Est-ce si terrible ? demande-t-il.

- Non, au contraire.

- Alors pourquoi pleures-tu ?

- Ce sont des larmes de joie.

Il la prend contre lui et elle se serre dans son étreinte. Ils auraient pu rester ainsi une éternité si la sorcière ne les menaçait pas.

- Sors de là, petit mage ! vocifère-t-elle au loin. Serais-tu trop trouillard pour m'affronter en fin de compte ?! Ne m'as-tu pas promis un duel digne de notre art ?

Dante serre les mâchoires. Il doit faire ce pour quoi il est venu. Il ne peut y couper.

- Montres-toi ! le commande la Baronne. Je n'ai plus de temps à perdre à jouer au chat et à la souris !

Si la souris reste cachée, il n'y a plus aucun intérêt pour le chat, songe le jeune mage. Mais, qui est vraiment le chat ? Une étincelle se glisse dans son regard. Puis, il concentre sur attention sur sa compagne :

- La situation n'est pas idéale pour parler de nous, je crois. Mais je te promets que nous aurons tout le loisir d'en discuter après. Tu veux bien ?

- Alors reviens-moi, s'il te plaît. Ne la laisse pas l'emporter.

- De ça, il n'en est pas question. Plus encore maintenant.

Ils échangent un sourire. Dante laisse ses doigts s'égarer dans les cheveux de sa compagne. Il aurait voulu lui avouer ses sentiments en d'autres circonstances. Par-dessus tout, il craint de ne pouvoir tenir sa promesse. Cependant, intérieurement, il se sent une force nouvelle.

 

De son côté, la Baronne s'agace. Ses attaques font trembler les ruines du village des Veilleurs. Le mur qui abrite les deux jeunes gens finira par céder et Dante le sait. Il est décidé. Et malgré le regard suppliant de son amie, il ne peut se résoudre à laisser Mélissa voler le Cœur du bois. Car s'il décide de fuir, Mélissa mettra son plan à exécution. N'est-ce pas pour cela qu'elle a collecté des ingrédients, après tout ?

Il prend les mains d'Anya dans les siennes, plonge son regard dans les yeux couleur caramel de la jeune femme.

- Restes à l'abri, lui dit-il en posant un baiser sur son front. Je reviens vite.

La jeune femme sait qu'elle ne pourra pas le retenir.

- Je t'en prie, fais attention à toi, dit-elle alors qu'il se relève.

Il lui adresse un sourire qui se veut rassurant :

- Ne t'inquiète pas.

Et ses doigts glissent dans les siens tandis qu'il s'éloigne. Un pincement lui étreint le cœur. Il doit revenir, à tout prix !


© Lynn RÉNIER
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