Arthis 2.0 – Épisode 1: Les surimis salvateurs

grabuge

Ça a commencé cette nuit. Un bruit de craquement, de grincement, des murmures métalliques et quelque chose de lourd qui marche. Un bruit hypnotique, étouffé, comme enregistré sous l'eau. Tout était noir, je ne voyais rien, normal, je dormais. Mon corps s'est mis à trembler, comme ces jours de gastro, suivi d'un gros mal de ventre. « Arthis », je crois que j'ai entendu ça plusieurs fois, d'une voix qui semblait se rapprocher.

Et puis je me suis réveillé, suis parti au collège, comme d'habitude, j'ai pas pris de p'tit dej' avant de partir parce qu'encore une fois je me suis réveillé trop tard. Mais non je me couche pas tard, c'est pas tard 2h du matin, demandez aux jeunes de mon âge ! Quoi mon âge ? Je vais pas te le donner. Je suis méchant hein ? Je m'en fous. Tu m'écoutes et puis c'est tout. Non tu n'es pas en train de lire, tu entends ma voix dans ta tête : « Lalalala » et puis de toute façon si c'est pas la mienne c'est la tienne et t'es tout aussi fou. Bref, j'ai sûrement pas ton âge, et je suis pas fou.

Cours d'Histoire de M'dame Heurtin de bon matin, ce qu'elle me les brise de bon matin (Eh ça rime ! On dirait une accroche de pub pour des céréales, mais les céréales ils te montrent le petit dej', moi j'en mange le soir devant le PC alors bon...). « Et donc nous en étions à la séparation entre l'Allemagne de l'Est et l'Allemagne de L'Ouest, qui peut me dire comment s'appelaient les deux parties ? Tiens, au hasard, toi qui dort en classe ». Mais non je ne me suis pas senti visé du tout. Je sentais bien mes camarades rigoler, alors pour les faire taire j'ai dit ce qu'il fallait dire « RDA et RFA, Bundes Republik Deutschland pour l'un ou l'autre je sais plus ». Et puis elle a continué a parler, j'ai même pas su si ce que j'avais dit était juste, et puis je m'en foutais.


« Armez les torpilles, nous allons faire feu ! » ai-je entendu. Aucun rapport avec le cours.
— Visez-moi ce salaud !
— Mais Capitaine, on peut pas !
— C'est un ordre !

J'ai entendu un bruit sourd, quelque chose qui tombe en contrebas.

— Et lui il fait quoi là ? Encore en train de dormir ?
— Mais Capitaine, il était pas là avant !
J'ai senti qu'on se rapprochait de moi, puis quelqu'un m'a ouvert les yeux avec les doigts, à quoi je répondis par un « Eeeeeh ! »
— C'est l'heure ! Debout ! On se fait attaquer ! Il faut défendre le sous-marin !
— Le... QUOI ?


J'étais bel et bien dans une putain de cage de fer, avec des boulons gros comme des Smarties™, et des boutons et des câbles de partout. Mais surtout, un nain en bretelles et Marcel avec un pantalon gris sale me regardait droit de ses petits yeux écarquillés si grand. À côté il y avait un gros sans haut, avec le même pantalon gris un peu moins sale, et un maigrichon tout propre, mais l'air un peu bête avec un fort strabisme.


— Je sais ! Tapons contre la carlingue !
— Mais qu'est-ce que vous foutez bordel ? Dis-je.
— Y'a un goéland sur le sous-marin. Ce con fait pencher le palmier en s'asseyant dessus !
— De... QUOI ? Attendez attendez attendez... Le sous-marin est SUR un palmier, en l'air ?!

Lançais-je, l'air perplexe et étonné.

— Oui oui...
— Mais... Comment est-ce que vous avez fait ?! Hurlais-je.
— C'est pas nous. C'est de la faute à machin là, c'est quoi son nom déjà ?
— Panéïdon ? Posélédon ? Un truc en « p » je sais plus quoi, dit le gros.
— Poséïdon non ?
— Ouais c'est ça. Il y a eu un gros raz de marée et on a surfé pendant pas mal de temps, pour finir sur une île, sur ce palmier.
— Et vous faites quoi depuis tout à l'heure ?
— On tire des torpilles.
— Mais vous êtes pas un peu cons ? Vous toucherez jamais le goéland en tirant des torpilles, ça marche que sous l'eau !
— Comment tu sais ça ?
— Ben je sais pas moi, physique élémentaire, une torpille ça a des hélices pour se propulser, mais ça vole pas dans les airs !
— Comment tu sais ça ?
— Vous êtes jamais allés à l'école ?
Tout les matelots se regardent, et plus le temps passe, et plus je sens un espèce de malaise s'installer.
— Tu viens de quelle planète ?
— Ben la Terre !
— Connais pas.

Le sous-marin se mit à tanguer.

— Il faut faire quelque chose ou nous allons tous mourir !
— Vous avez pas un flingue ? Une arme ? Dis-je.
— Rien.
— Et moi j'ai faim, dit le gros.
— T'as qu'à manger des surimis, dit le maigre.
— Ben voilà ! Lançons des surimis au goéland ! Ça le fera fuir ! M'exclamais-je.

Le grand maigrichon ouvrit l'écoutille et lança des surimis.

— Il est parti !
— Oui mais il faut encore descendre du palmier !
— Je sais ! Eurêka ! Dis-je comme Archimède. On va chacun prendre des draps, et sauter en parachute.
— J'ai le mal de l'air ! Dit le gros.
— Oh et moi j'ai peur de mourir, dit le maigre.
— Fermez vos gueules, dit le nain en Marcel.

Tous les quatre, nous prîmes nos draps, et sommes monté sur le sous-marin d'où j'ai pu voir un paysage absolument sublime, il y avait une lagune (et j'adore les lagunes, sauf quand elles sont de chez Dacia), des cocotiers, une plage immense de sable fin et une forêt dense. Par chance il n'y avait rien au Nord-Ouest et nous avons pu sauter jusqu'en bas. Je dois avouer que j'ai eu peur de mourir. Je dois vous avouer que j'ai poussé le gros dans le vide, mais il a pas lâché son drap.

— Sea, sex & sun. Où sont les femmes ?

Ils n'ont pas compris les deux références musicales, et je suis resté con, à regarder leurs tronches baignées de soleil, les yeux plissés, ridicules.

— Pas de femmes. La dernière que j'ai vu c'était à Lunatic Pandora.
— Lunatic Pandora ? Là où Adel réside dans Final Fantasy 8 ?
— De quoi tu parles ? T'es vraiment bizarre ! Non, la capitale. On y mouille tous les navires. Et pas que, dit le nain en rigolant grassement.

— OH ! J'ai dit on se réveille ! C'est la fin du cours et tu vas être en retard !
— Hein ? Quoi ?
— C'est pas le moment de dormir ! Faut dormir la nuit ! Et dépêche-toi y'a un autre cours après !

Saloperie de rêve. J'ai vraiment cru que c'était vrai ! J'veux dire, c'était pas un rêve normal ! D'ailleurs mes doigts sentent le surimi, et ça fait depuis hier soir que j'en ai pas mangé.

Coïncidence ?

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