Assassin 2

Emma Cobadana

Elle était étendue bien droite sur le canapé du salon ; la cheminée flamboyait vaillamment à côté d'elle, lui projetant une douce chaleur réconfortante sur tout le flanc droit. Ses yeux fixaient l'horaire affiché sur la façade de sa box par chiffres lumineux : 23h15. Puis, ses yeux peu à peu se fermèrent, la plongeant dans un sommeil espéré. Elle entendait, comme lointain, le bruit d'un claquement de volet mais l'état dans lequel elle se trouvait - mi conscient, mi comateux - lui fit vite occulter ce phénomène sonore qui aurait pu être inquiétant.

Le silence emplit de nouveau la pièce, dérangé de temps en temps, par le crépitement du bois dans la cheminée.

Tout à coup, ce sont les miaulements plaintifs de son chat qu'elle reconnut. Puis un cri soudain, comme s'il s'était fait mordre par un chef de bande un peu virulent souhaitant marquer son territoire. Ce dernier incident la perturba plus que les précédents, l'obligeant à réouvrir les yeux, non sans peine, tellement ses paupières lui semblaient lourdes.

C'est là qu'elle vit très distinctement une ombre masculine imposante juste à côté d'elle. Elle sursauta. Il était trop tard. Déjà, avant même qu'elle n'est pu émettre un cri (quand bien même : elle était isolée à des kilomètres à la ronde), cette masse se vautra sur elle, la paralysant de peur et de force. Les flammes dansantes dans l'insert de la cheminée, lui permirent d'entrevoir certains traits de son visage. Barbu, la peau luisante, le front dégarni, il empestait l'alcool et la sueur. Ce mélange nauséabond l'écœura allant même jusqu'à lui provoquer un spasme. Il lui écrasa les poignets plaqués le long de son corps avec ses genoux ; il devait peser dans les 90 kg au moins.

Puis sa paralysie initiale laissa place à la rage. Elle se débattit de toutes ses forces. Elle tenta de mordre son agresseur, lui cracha au visage, essaya de le griffer avec ses ongles sur les genoux qui l'emprisonnaient. Il lui décolla une gifle qui la calma... Momentanément.

"Ne bouge pas ma jolie, ça ne va plus être très long".

Elle comprit.

Ses mains à lui vinrent s'immiscer sous son pull. Il lui caressa fortement les seins, lui pinçant les tétons avec férocité entre ses doigts.

Ses larmes à elle commençaient à couler le long de ses joues rougies par la chaleur maintenant suffocante de la cheminée.

Ses mains à lui montèrent le long de sa gorge à elle pour atteindre les parois de son cou de part et d'autres. Dans un ultime élan de courage, elle tenta de se débattre de toutes ses forces. Malgré tout, elle sentit que les pouces de son agresseur ancrés sur ses carotides commençaient à avoir raison de son agressivité.

"C'est bientôt fini bébé" lui glissa-t-il à l'oreille.

Son haleine chaude tout proche de son conduit auditif la dégoûta une dernière fois. Puis, l'étranglement lui comprimant le peu d'air qui lui restait dans les poumons, devint une douce délivrance.

Ses muscles à elle avaient lâchés, son corps était éteint, sans vie.

Bien évidemment, comme tout le monde, elle n'avait jamais imaginé mourir comme ça. Pas maintenant, pas dans ces circonstances, et pour quelles raisons ? Qui était-il ? Et elle, qu'avait-elle fait de mal ? Son esprit vagabondait alors même que son enveloppe corporelle elle, était inerte.

Inexplicablement, tout son être qui était devenu, comme prisonnier de chaînes, se libéra. Elle reprit son souffle, cette bouffée d'air inespérée comme lorsqu'on sort la tête de l'eau d'une apnée un peu trop longue. Elle sursauta, redressant le buste en position assise ; se sentant plus vivante que jamais.

Elle était seule, transpirante, sur son canapé. Son chat à ses pieds.

Les chiffres lumineux de la box indiquaient 23h45.            

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