Atavisme ?

Loxias

Il avait une bague en forme de hibou. S'il ne se souvenait pas des temps où il hululait, il voulait sans doute que tout le monde sache qu'il le fît, qu'ils s'en souviennent même à sa place.


« Que reste-t-il de ces nuits ? » demandait-il à qui sais-je, comme pour combattre l'amnésie. Mais l'amnésie est encore un baume. Et lui de se gratter justement là où ça le démange !


Peut-être ne veut-il pas guérir. Sortir de sa convalescence reviendrait en quelque sorte à devoir retourner à l'école et il n'aurait plus la force d'être aussi sage, ni d'être aussi compatissant. Peut-être encore qu'il attend, persuadé de se tenir bien attentif, la main tendue de la vie.


Il lui tendrait alors sa main à lui, et peut-être la vie apprécierait-elle sa bague en forme de hibou ?


D'aucuns prétendront que miser sur une bague est un peu léger. « Qu'il se reprenne cet homme ! ». Et ils auront bien raison. Au royaume du mensonge, tout le monde à raison. C'est bien la moindre des choses.


Mais lui qui refuse de pactiser avec le monde, lui a tort. Lui qui voudrait directement pactiser avec la vie, par peur plus que par orgueil, par souci d'intégrité surtout, pour ne pas avoir à mentir, lui a tort !


Heureusement, il puise dans ce désolant constat une idée rassurante. Les erreurs du monde, ces enfants de la certitude, seront sa nourriture. Il développera grâce à ces avortons de quoi redevenir toujours lui-même, conservant son enfance intacte. Enfin, au moins encore un peu...


Oui, le monde finira par l'absorber, mais de cet homme-là, il s'en souviendra le monde !

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