Au milieu de la nuit
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Je n'entends plus sa voix qu'au milieu de la nuit lorsqu'elle m'appelle, la voix alourdie, rauque d'alcool et de larmes, pour me dire à quel point je lui manque… à quel point elle me hait.
Parfois, elle rage et me dit qu'elle est heureuse avec lui, qu'elle adore sa douceur et qu'il lui apporte plus que je n'aurais jamais pu lui offrir.
Si je parle, elle hurle ; si je me tais, elle pleure.
Elle murmure des « je t'aime » aussi souvent qu'elle jure que notre rencontre était une malédiction qui la tue toujours à petit feu.
Alors je me tais, je l'écoute se rappeler la chaleur de mes baisers, le parfum de ma peau.
Je l'écoute me maudire, me supplier de lui foutre la paix, mais c'est elle qui m'appelle sans cesse, elle qui ne voulait pas de nous. Mais c'est elle qui souffre, elle qui pleure. Je ne peux qu'écouter.
Rarement, je lui réponds : « je t'aime, mon cœur » et alors ses sanglots l'étouffent, elle gémit comme en résultat d'un coup.
Elle dit toujours que c'est la dernière fois, mais ça ne l'est jamais. Parfois, des semaines passent, mais elle rappelle toujours pour me dire qu'elle me hait, que je lui manque comme l'air manquerait à ses poumons. Que je suis le fantôme qui hante chacun de ses pas.
Je suis le dragon dans son conte de fée quand mon seul souvenir suffit à la tenir prisonnière.
Je ne veux pas lui rappeler que si nous ne sommes plus rien, c'était sa décision. Son choix, pas le mien. Je l'écoute pleurer, s'épuiser, s'endormir. Je ferme les yeux, j'écoute ses respirations se faire plus régulières et je l'imagine là dans mes bras. Finalement je raccroche et j'essaie d'oublier sa douloureuse absence.
Je reprends ma vie comme si de rien n'était, jusqu'à ce que le téléphone sonne et qu'à nouveau sa voix résonne au milieu de la nuit.