avec la psychologue scolaire, suite

Simon Lecoeur

chapitre 9 bis

Cela dura toute une année scolaire. Je ne pleurais pas mais je rentrais souvent fatigué à la maison. Le médecin notait très de nombreuses choses dans son cahier, elle conservait mes dessins; elle y faisait parfois référence d’une semaine à l’autre. Un beau jour, je compris pourquoi j’avais besoin d’elle. A intervalle régulier je devais dessiner des immeubles de mon quartier, que je faisais devant elle ou que je produisais chez moi. Peu après les vacances de février, elle posa sur la table une série de six ou sept dessins et me fit observer chacun d’eux. Classés par ordre chronologique, je fus saisi de l’évolution, l’aspect du soleil changeait et palissait de plus en plus. Sa rondeur diminuait d’un dessin à l’autre, les rayons rétrécissaient. Moins de lumière, moins d’énergie à chaque fois. Les nuages de plus en plus sombres s’accumulaient. Je pris conscience que je n’allais pas bien du tout ; les dessins devenaient le miroir de ma détresse. Ensuite, la psy entra dans le détail et s’arrêta sur les formes des immeubles qui apparaissaient de plus en plus petits.

Pourquoi les fenêtres et les portes devenaient elles plus étroites ? Et pourquoi certains détails du début avaient tout à fait disparu, comme les cheminées, les gouttières, les tuiles des toits pentus ? Et les balcons fleuris effacés d’un coup de gomme.

La preuve de mon mal être s’affichait là, sous mes yeux.

Se dire que ça va mal dans sa tête, à neuf ans, fut loin d’être évident à accepter.

Vers la fin de l’année scolaire, la directrice de l’école rencontra maman et déclara que j’étais guéri et que la psy irait soigner ailleurs.

Pour l’école, j’étais rétabli, mais de quelle maladie au fait ?

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