Bonaparte manchot

Jean Claude Blanc

une histoire ordinaire d'un simple d'esprit qu'a fait son devoir, envers la Nation, pas très clair le type...

                              Bonaparte manchot

 

« Napoléon est mort à Ste Hélène

Son fils Léon lui a crevé le bidon

On l'a retrouvé assis sur une baleine

En train de sucer les poils de caleçon »

 

Une comptine un peu légère

Qu'on m'a servie y'a bien longtemps

Mais je n'ai pas pu m'en soustraire

D'en dérouler tout un roman

 

Napo du Mont Chauvet, se révèle sans cervelle

En gardant ses moutons, contemple l'horizon

Des fois il est pas clair, est rond comme une queue de pelle

De la poche de son veston dépasse son litron

 

Depuis sa tendre enfance, il tète son biberon

De rasades de gnole pour corser l'addiction…

Pour en faire un costaud, un vrai Napo sans dot

D'où son surnom facile, Bonaparte manchot

 

A fait toute son armée, jadis dans la Légion

Musclé comme Apollon, a fait son baluchon

Avec tous les copains, a pris le même bateau

Direction Kabylie, les gorges de Palestro

 

Comme tous les rappelés, il a fait le boulot

De sa stature énorme et ses pognes de géant

Sa tête à faire fuir un troupeau de lions,

Le rôle du bourreau lui allait comme un gant

 

Cantonné à sa tâche, sans le moindre sentiment

A lui de faire causer, felouzes récalcitrants

Il était bien traité, jamais ne se plaignait

On le craignait c'est sûr, même qu'on l'évitait

 

En attendant son heure, son retour au turbin

Le plus clair de son temps, assouvir ses instinct

De tortures vachardes, de vices improvisés

Il avait ses idées, on lui foutait la paix

 

Appellation subtile, pour effrayer les bleus bites

Avait pas son pareil pour les langues, les délier

On invitait Napo, à la dernière limite

Là tu pouvais y aller, le gus s'allongeait

 

Paysan sans scrupule, mais sans méchanceté

Il descendait du Mont, de sa montagne austère

C'était un silencieux, un homme solitaire

Qui faisait son devoir, enfin il le croyait..

 

Reprit habit civile sa période achevée

Rejoignit ses moutons, sa bruyère jolie

Sans médaille, sans ruban, sans gloire ni merci

Un seul rêve dans sa tête, retrouver ses sommets

 

Au bar du village, parfois vient faire son tour

On l'abreuve de canons, pour éveiller sa mémoire

De l'ours mal léché, on délivre le crachoir

Les badauds sont avides de ses noires discours

 

Sacré Napoléon, une légende vivante

Héros sans le savoir, et jamais ne s'en vante

Des rumeurs moralistes, de ceux qui ont rien à dire

Supporte plus les bronzés, son passé le fait rire

 

Il a vieilli depuis, sa couronne est flétrie

Personne vient le voir, se terre en secret

Mais c'est notre empereur, Napoléon sans trône

Réserve à son bétail, son humeur de brave homme

 

Bonaparte manchot, miséreux albatros

Sur le plancher des vaches, il est à son affaire

Avait rien demandé que de vivre sans gosse

Lui a pressé le citron, cette putain de guerre

 

On feuillette patiemment le livre de cette sale guerre

On s'enivre à loisirs des gloires du passé

On passe par-dessus bord guérillas sanguinaires

Exactions et bavures, sont jamais évoquées

 

Les estropiés des années folles

Qui n'ont pas été aux écoles

A tout jamais chair à canon

Des tortionnaires à l'occasion

 

Napoléon dans son buron

Çà ne l'empêche pas de dormir

A qui la faute, pas la question

Faute à personne, pas le souvenir…

S'exonérer de ses méfaits

Pour vivre mieux il vit caché

Ayant d'autres chèvres à garder

 

Il en faut bien de ces sales trognes

Pour effectuer les sales besognes

Tous à la solde de la nation

Pour redorer notre blason

Lui il s'en moque, aucun pardon

Pas poursuivi par ses démons

                  JC Blanc     octobre 2020   (français niais, né comme çà pas fait exprès)

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