Bons et mauvais risques
Jean Claude Blanc
Bons et mauvais risques
En ce monde abruti, c'est fou ce qu'on s'ennuie
La classe dominante se divertit de risques
Quand le peuple fourmi, au labeur est soumis
Tous les jours que Dieu fait, face au danger panique
Menace, perdition, péril, imprudence
Difficultés, embûches, alarme, SOS, urgence
Comment les distinguer, ces bons, ces mauvais risques
Quand les stars de télé, se donnent la réplique
Vivre c'est prendre des risques, que l'on doit assumer
Est-il moins héroïque, de mourir d'une cirrhose
Que faire du parapente et se briser les os
Addiction et frissons, aux riches sont réservés
Celui qui se surpasse, représente l'archétype
Du chef d'entreprise, idéal, dynamique
Est sain et profitable, toujours pousser plus loin
Les limites du courage, pour fleurir son destin
Règle de valeur sociale, définie et choisie
Sentiment de puissance, pour le moindre gringalet
Au quotidien mortel, sans saveur, sans envie
Juste pour bander plus fort, joue sa vie à coups de dés
Bons risques adulés, du côté des nantis
Les sports dits « extrêmes », exigent un gros budget
Alors que ceux qui bossent, malgré la maladie
Durant leurs rares loisirs, les passent à roupiller
Il est moins dangereux, de faire de la chute libre
Qu'ouvrier bâtiment, de tomber dans le vide
Dure probabilité, cruelle arithmétique
Si bien que de fumer, est un acte héroïque…
On admire et on vante, le gus solitaire
Costaud, plein de ressources, et qui ne craint personne
Incroyable demi-dieu, une sorte de surhomme
Qui fait bander ses muscles, sous les rampes de lumière
Faut dire, dans les médias, le défi est porteur
Fort Boyard, Kho Lanta, bravades sans égales
Mais nous pauvres minables, ordinaires « people »
Principe de précaution, c'est pour nous la morale
Mais s'arrête pas là, la folle contradiction
On nous impose le soir, les exploits des champions
Héros à vénérer, car ils font sensation
Mimant la tragédie, vertiges et émotions
Filmés et enregistrés, à condition d'être bons
Télé-réalité, comique, paradoxale
Sacralisant l'audace, des singes médiatiques
Pendant qu'au voyeur né, on lui fout la panique
Notion de risque moins sanitaire que morale
Le saut à l'élastique, fait flipper les coriaces
Alors qu'au boulot, le stress pose pas problème
Il est plus que certain, de claquer de l'angoisse
Que de mourir de trac, sur une mise en scène
Notre société fonctionne, à l'idéologie
Le bon et le mauvais, le bien et puis le mal
C'est depuis tout gamin, que l'on nous initie
Au code établi « ne faire, que ce qui est normal »
Les dingues de l'audimat, pour eux, c'est pain béni
Etant sous cette emprise, abondent de folies
Invitent au tournage, qu'artistes connus de tous
Aventuriers d'un jour, pour qu'ils nous foutent la frousse
Poussant bouchon trop loin, hélas, prévisible
Que ça vire au carnage, en tentant l'impossible
Le crash de l'hélico, on va en faire des pages
A tous ces supermen, leur rendre un brin d'hommage
Ils ont pris les bons risques, alors la France est triste
Tandis que le mendiant, lui, meurt à l'improviste
Ils ont de l'entregent, journalistes, réalistes
Pour l'empire de nos sens, tapent sur la corde sensible
Alcooliques, fumeurs, drogués de vidéo
Traités de compulsifs, le diable dans la peau
Pour eux les mauvais risques et les pervers effets
Que l'on doit sermonner, au nom de la santé
Mais toi, Florence Arthaud, douce fiancée des mers
Qu'avais-tu dans la tête, voguer dans cette galère
Couronnée de victoires, bravant les océans
Dans un hélicoptère, t'as rejoint le néant
Belle Femme accomplie, souriante, solidaire
T'avais conquis ta gloire, de liberté sur Terre
De te voir disparaitre, pour une conne passion
J'en demeure prostré, t'es morte sans raison
Public en redemande, du sang et puis des larmes
Tellement il est frustré de succès, de lumières
C'est sa manière à lui, de reprendre les armes
Devrait aller combattre, le djihad du désert
« La vraie vie », c'est là-bas, pour mourir à la guerre
Ici, que faux semblants, on se tue, de distraire JC Blanc mars 2015