Bouffée de chaleur
Diane Peylin
Lola ferme les rideaux. Le tissu rouge glisse vivement sur la tringle. La jeune femme à la chemise ouverte transpire... Il l’attend dans la chambre. Elle sent qu’il l’appelle. Cette odeur... Lola aime son parfum. A chaque fois, ça lui fait le même effet. Son bas ventre est en surchauffe et sa tête lui tourne. Sa langue, toute excitée, passe et repasse sur ses lèvres gourmandes.
- A nous deux... susurre-t-elle.
Ses petits pas rapides s’enfoncent silencieusement dans le moelleux de la moquette profonde. En direction de la chambre du plaisir...
DRING!!!! La porte d’entrée se réveille.
- Et merde ! s’énerve Lola.
En quatrième vitesse, elle referme le chemisier sur ses seins si joliment galbés et va ouvrir en râlant :
- Merde ! Merde ! M... M... Maman ! Quelle bo... bonne surprise, bredouille la femme au visage humide.
- Bonjour ma chérie ! chante sa chère mère. Mais, tu n’es pas prête ! Qu’est-ce que tu faisais ! Tu vas nous mettre en retard, dépêche-toi ! déraille -t-elle.
- Oui... hésite Lola. Attends-moi sur le canapé et ne bouge pas, j’arrive. Prends un livre et ne bouge pas.
La dame aux épaulettes ‘’Robocop’’ pose gentiment son derrière rebondi sur la banquette. Lola, abasourdie, tente de remettre les choses au clair tout en marmonnant :
- Mais qu’est-ce qu’elle fait là..? On est... samedi. Il est 10 heures. Elle m’énerve quand elle fait ça. J’la sors pas du lit moi ! On est en retard ! En retard pour quoi ? Elle... Zut ! La réunion chez sa copine Eliane... avec le sophrologue. Je l’ai complètement zappé. Ca tombe vraiment mal. C’est pas juste...
Avant d’aller se débarbouiller la figure, elle jette un coup d’oeil dans la chambre. Posé sur le lit, il n’a pas bougé depuis toute à l’heure. Il est de plus en plus craquant. La couette rabattue sur le côté ne cache rien de ses formes délicieuses. Ca lui reprend, une chaleur dévastatrice se propage autour de son nombril.
- Non, pas tout de suite... gémit-elle.
Devant le miroir, elle tente de se reprendre. Elle s’asperge d’eau, rien à faire. Elle transpire à grosses gouttes. Lola vire au rouge tomate. Elle bouche l’évier et ouvre les robinets à fond. Une fois le lavabo plein, elle plonge la tête dedans. 1, 2, 3, 4, ..., 10 secondes... elle sort de l’eau en inspirant un grand coup.
- Lola ? Qu’est-ce que tu fais ? On va être en retard... râle la maman.
- J’arrive, j’arrive... articule difficilement l’excitée un peu déboussolée.
La figure dans la serviette, elle tente d’éloigner les mauvais esprits en se frictionnant. Elle frotte, elle frotte,... Résultat : son désir avide l’obsède toujours et elle se paye, en prime, une face d’écrevisse.
- J’tiendrais pas... C’est trop bon... murmura-t-elle en se mordant les lèvres.
Ca y est, elle commence à avoir la tremblote. A chaque fois c’est pareil, quand elle n’a pas ce qu’elle veut, elle fait une sorte de crise de manque. Lola ne maîtrise plus rien. Tant bien que mal, elle tente de boutonner sa chemise trempée. Une fois cette épreuve terminée, elle enfile le pantalon qui traîne sur le panier de linge sale. Une tâche sur la poche droite. Tant pis. Elle laissera le chemisier sorti. Ni vu, ni connu. Après cette action éclair, la demoiselle ne sait plus trop où elle en est. Si, toujours au même point. Elle ne pense qu’à une chose : la chambre. Maladroitement, elle prend le crayon noir et souligne ses yeux gourmands. Pour le rouge à lèvres, c’est moins évident. Après l’avoir passé une quinzaine de fois sur ses lèvres enflammées, elle manque de l’avaler. La gourmandise la possède. Lola veut sentir sa bouche se coller à lui. Tout près. Elle imagine sa langue le caresser. En commençant par les extrémités. Lola salive. Son parfum, elle le sent d’ici.
- Stop ! s’énerve-t-elle.
Deux claques sur les joues, histoire de se réveiller et de se remettre une surcouche de rouge, direction la sortie.
- On y va maman ! ordonne-t-elle les dents serrées.
- Tu te calmes un peu ! crie la mère casse-bonbon. T’es en retard et maintenant tu veux me presser! Fais attention !
- Ouais... ouais...
La dame au visage pâle se lève et s’avance tranquillement vers la porte. Lola se tortille. Ses mains moites ne savent plus où se mettre. Un coup dans les poches de derrière, puis dans les cheveux, derrière la nuque... Les gestes nerveux deviennent caresses... Sa mère se rapproche. Lola sent son coeur vibrer contre sa poitrine... son ventre se réchauffe de plus en plus... sa bouche crie famine... Sa mère est là. Lola l’attrape par les épaules, la pousse dans le couloir et lui dit en suffocant :
- Bouge-pas, j’en ai pour cinq minutes. J’arrive... tout de suite...
Son corps déchaîné court vers la chambre. Lola a envie de lui. Maintenant. Tout de suite. Ca ne peut pas attendre. Même s’il y a maman. Elle n’en saura rien. Elle va rester sagement à la porte. Pendant que sa fille, dans un corps à corps affamé, va prendre son pied. Ca y est. Elle donne un grand coup de pied contre le bois, pénètre sauvagement dans la pièce échauffée, et se jette sur le lit. Lola l’empoigne de ses mains émues. Elle le déshabille. Rapidement. Il ne porte presque rien... Sa langue se ballade passionnément sur son corps sucré.
- Que c’est bon... gémit Lola.
Sa bouche, gloutonne, le mordille. Parfois le croque. Elle aurait voulu prendre son temps. Elle prend toujours son temps avec lui. C’est encore meilleur. Mais...
- Lola !
... la mère gueule encore. Lola se dépêche. Ca y est presque. Elle le sent en elle. Il sait vraiment y faire avec elle. Il arrive à être tendre et violent à la fois... Il faut qu’elle y aille.
- Lola !
Les cheveux hystériques, elle s’échappe de sa chambre.
- C’est bon ! On y va ! lance Lola.
Sa mère l’attrape, lui tire la joue et lui frotte le bord des lèvres.
- C’est quoi ça ! Tu as recommencé ! Tu pouvais pas te retenir ! Devant ta mère en plus ! T’as pas honte de te goinfrer toute la journée ! hurle la mère outrée.
Lola baisse les yeux et sort. Discrètement, elle lèche le reste de chocolat lové au coin de sa bouche.