Brasier

Christian Lemoine

Pas de coupure ni d’éraflure, aucune trace de blessure. Pas de symptôme apparent, aucune contusion visible, ni hématome ; ni aucun de ces signes qui racontent aux témoins les cassures et les chocs. Un visage serein, l’égide des héros au dessus du sourire en guise de talisman, et la souplesse encore un peu de la peau, rien que quelque soupçon d’eau de jeunesse, encore un peu l’indice d’une insouciance quand ne résiste à l’invisible que le lointain souvenir du brasier. Mais la brûlure, pourtant. Mais l’intransigeante tragédie d’être soi, sans entrevoir la surprise d’un sursaut heureux. Il ne saurait être autre ressource que le brasier, toujours, quand bien même il se traduit : aigreur, peine, ineffaçable brèche ouverte, la rupture d’un continuum qui ne saura pas retrouver la virginité des espoirs. La résignation ? Belle trompeuse ! Sous sa surface languide, s’activent sans répit les danses des mâchoires qui ne seront jamais repues de chair crue.
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