Brian is in the kitchen
Lisa Azorin
On ne vantera jamais assez les mérites d'un séjour à l'étranger pour perfectionner sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que celle de sa chère maman (désolée pour les daddies mais l'expression consacrée est bien "langue maternelle"…). Si au début ça patine et baragouine sévère, force est de constater qu'au bout de quelques semaines, la nécessité de survivre faisant loi, le registre de langue a changé du tout au tout. Outre-Manche, Brian est sorti de la kitchen et a découvert le all you can eat buffet et le fast-food. Outre-Rhin, il s'est résolu à emboîter les mots comme des Lego : Schuhe pour les chaussures, Handschuhe (chaussures de main) pour les gants, Hausschuhe (chaussures de maison) pour les pantoufles et Fingerhut (chapeau de doigt) pour le dé à coudre. Qui a dit que l'allemand était compliqué, franchement ?!
Mais avant d'en arriver là, qu'est-ce qu'il a ramé Brian ! Ce n'était pourtant pas faute d'en passer du temps dans la cuisine… Les premières conversations ont été succinctes. Hallo ! Schön, dich kennenzulernen ! THE END. Les gens le trouvaient discret, presque mutique… Pauvre Brian, qui par-dessus le marché suivait plutôt bien les conversations, y compris quand on se foutait de sa gueule. Grands moments de solitude que ces derniers, mais qu'y faire ? Heureusement, le mime et les onomatopées, universels, lui permettaient de faire un brin de causette et de ne pas passer pour le dernier des sauvages. Quoique… Imaginez un peu une conversation en mimatopées où il serait question de la recette des escalopes à la crème et aux champignons. Vous mimez ça comment vous, les lamelles de dinde saisies dans la poêle à feu vif ?… (photos et vidéos bienvenues !)
En terre étrangère, les choses se corsent quand on se trouve en présence de plusieurs étrangers n'ayant pas même la première syllabe d'un premier mot en commun. Disons, au hasard, un Iranien parlant farsi, une Allemande cherchant à traduire en turc et une Française en anglais. Dialogue de sourds ? Monologues de muets plutôt. On se regarde du coin de l'oeil, on se sourit d'un air désolé, on replonge dans son escalope aux champignons après un haussement d'épaules résigné avant de partir dans un fou rire… contagieux. Mais oui, mais oui, mais oui ! Eurêka esperanto ! Gloria ! Alleluia ! Le voilà le point commun : un bon fou rire. Franchement, il y a pire à partager, non ? Hasta la vista mosquito !
Ps : Pour votre culture polyglotte, "escalope" se dit "Schnitzel" en allemand, اسكالوپ en farsi.
Et pour ceux qui se poseraient la question, Brian still is in the kitchen.