Ce que je nomme "le Fascisme ordinaire"

Dominique Capo

Longue réflexion sur la société d'hier et d'aujourd'hui, et peut-être - en pire - de demain...

Jeudi après-midi, j'ai décidé d'aller dans un magasin de téléphone mobile pour changer de téléphone - prendre un 3G plutôt qu'un 2G datant d'une dizaine d'années, afin que puisse envoyer quotidiennement sms et mms sans faire de crise de nerfs à chaque fois parce que le réseau SFR ne passe pas de temps en temps.

En taxi, hier, vers 15h, j'y suis allé, la conductrice du taxi m'attendant rangé sur un parking à quelques mètres de là. j'ai marché les quelques mètres jusqu'à la boutique. Or, entre la boutique et moi, il y avait un parapet. Et je n'ai pas vu qu'il n'y avait pas de marche pour le descendre.

Trop tard, je l'ai franchi sans voir le mètre de vide qui béait devant moi. Et, forcément, je me suis cassé la figure.

Il m'a fallu un certain temps avant de pouvoir me trainer jusqu'à l'intérieur de la boutique. Quelqu'un qui passait par la m'y a aidé, ainsi que la vendeuse de la boutique. Je me suis immédiatement assis pour récupérer ; j'avais du mal a tenir sur mes jambes. J'ai même fait une crise de convulsions de quelques minutes. Le choc j'imagine. Assis, j'ai effectué les démarches pour changer de téléphone portable, qui sera actif mercredi prochain, avec le même numéro de téléphone.

Donc, rien ne change de ce coté là, si ce n'est que l'envoi et la réception de sms, mms, ou tout simplement pour téléphoner, sera encombré de moins d'inconvénients que jusqu'à maintenant. Mais au lieu d'être chez SFR, je serai chez Orange, puisque eux entretiennent leurs antennes relais. Et avec le 3G, ça sera plus rapide, aisé, etc.

J'ai pris un téléphone le plus simple, avec juste téléphone, sms, mms, petite caméra et photo. C'est suffisant, puisque je ne m'en sers que dans ce but, vis-à-cis des quelques rares contacts amicaux hors Facebook, qui pensent et tiennent assez à moi pour me téléphoner et me demander de mes nouvelles.

Car absent de Facebook hier - je n'y ai pas mis un mot, alors que c'est ce que je fais quotidiennement. Cependant personne ne s'en est soucié. J'aurai pu avoir un accident plus grave, mourir, qui s'en serait inquiété.

Après tout, ce n'est pas le problème des utilisateurs de ce réseau social me rétorquera t'on. Chacun a sa vie, ses problèmes, ses épreuves, ses difficultés - juste -. Mais chacun qui y est confronté reste dans son coin, individualiste, égoïste, égocentrique, ne pensant qu'à lui même ou à son entourage proche alors que lorsque lui-même est face à la même situation, il désirerait qu'on se préoccupe de lui. S'il ne le fait pas, pourquoi les autres le feraient.

Ceci dit, le taxi est venu me reprendre devant la boutique, et m' ramené chez moi. Cependant, les douleurs dues a ma chute ne se sont pas amoindries. Mon problème est que la jambe qui a "morflé" est ma jambe forte, celle sur laquelle je m'appuie pour marcher, l'autre, a cause de mon hémiplégie, étant plus faible naturellement. Donc, a chaque fois que j'appuie sur ma jambe gauche, les douleurs déjà existantes dues à l'hématome et à l'œdème, se réveillent avec fulgurance.

Jeudi, j'ai hurlé de douleur a maintes reprises en tentant de me déplacer ; et je suis tombé plusieurs fois, du fait de sa faiblesse due au choc. Le docteur est venu hier, et a bien confirmé que c'était un hématome et un œdème. Il m'a prescrit des calmants pour la douleur, et des anti-inflammatoires. Et je loue un déambulateur pour me déplacer, pour une période d'un mois.

A chaque fois que j'appuyais sur ma jambe gauche, ma souffrance était intenable. Mon genoux a un peu gonflé. Je n'ai donc dormi que par à coup, malgré les somnifères et le Dafalgan, pour essayer d'apaiser la douleur. Ce matin, j'ai un peu moins mal, mais j'ai toujours du mal a me déplacer, et ai toujours besoin du déambulateur pour le faire.

Je me sens vraiment impotent,malhabile, et j'ai l'impression d'être un escargot. Voila, ce qui m'est arrivé. Voila pourquoi je suis pratiquement absent de Facebook en ce moment ; qui me regrette vraiment en outre, qui se soucie de ma santé, etc. Quand on est handicapé, malade, ce genre d'accident décuple encore davantage toutes les difficultés que le quotidien m'inflige. Le moindre petit geste, déplacement, le moindre acte, aussi anodin soit-il, est une source de douleur. C'est un parcours du combattant, solitaire, silencieux, parce qu'il n'y a personne pour vous aider, pour vous épauler. Chaque action - faire son lit, se changer, mettre la table, faire à manger, etc - est à l'allure d'un escargot, alors que j'ai tant de choses à faire dans la journée. Mais ce n'est pas grave, qui en a quelque chose à faire, qui ça intéresse.

Dire que des tas d'autres personnes dans la mème situation que moi sont confrontés, non seulement aux mêmes problèmes, mais également, à la même solitude, au même désespoir de se rendre compte que ce qui est si simple, si facile, pour l'immense majorité des gens, est un véritable parcours du combattant qui vous fait hurler de douleur physiquement, mais qui vous meurtrit psychologiquement, et qui vous désespère de ne pas réussir à accomplir ses actes, comme vous désespère aussi face à l'indifférence généralisée - ou presque - qui se manifeste autour de vous.

Et pourtant, il y a longtemps que je me suis rendu compte de cette indifférence quasi-généralisée - à quelques exceptions près -, où l'apparence, la superficialité, l'éphémère, la bêtise, la violence, l'entre-soi, l'égocentrisme, etc. priment sur tout le reste. Et si cela me désespère et me blesse, ça me met aussi en colère, une grande colère, une fureur tempétueuse ; je n'accepte pas cet état de fait ou la justification qu'on me serine régulièrement est : "c'est comme ça ; je n'y peux rien ; je ne peux rien faire à mon petit niveau, et autres fadaises."

C'est faux, c'est juste une justification facile pour se donner bonne conscience et continuer à faire comme si de rien n'était, alors que de simples petits gestes - des pas grands choses - pourraient modifier cela. Peut-être pas énormément, mais comme on dit : ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières.

Seules deux ou trois personnes ont donc cette attitude vis-vis de moi, comme je l'ai vis-à-vis d'elles, au quotidien, ou au pire, régulièrement. Et je serai le premier à les soutenir, à leur venir en aide par tous les moyens à ma dispositions, avec toutes mes capacités - même étant handicapé - pour être présent à leur coté - Facebook, téléphone, présence physique, etc., et peu importe le moyen finalement.

Ce qui prouve que c'est possible, faisable, que ce n'est pas astreignant, chronophage ou énergivore. En outre, par les vidéos que j'ai trouvées sur le fonctionnement non visible de nos sociétés, très instructives, que j'y partage actuellement -, les preuves de faire autrement, existent. Elles sont à portée de clic pour qui veut chercher un peu et se renseigner sur les moyens de se comporter différemment.

Ce qui est terrible, monstrueux, ignoble, peut parfois pousser certains au désespoir, à la solitude la plus extrême, à la folie éventuellement, c'est que ce comportement collectif à l'égard de gens comme moi ou d'autres vivant les mêmes choses, provoque des crises d'angoisse, de panique, des terreurs, des souffrances, comme je l'ai dévoilé au travers d'une vidéo de quelqu'un expliquant en quoi ces crises d'angoisse consistaient.

Non pas de mon fait ou des gens qui sont victimes de ce genre de phénomène, mais du fait de l'indifférence, de l'apathie, de l'égoïsme, etc. de cette immense majorité qui ne réagit a rien, qui n'est touchée ou émue, inquiète, heureuse, uniquement pour leur cercle proche ; et encore parfois. Or, rien que ça, ça montre qu'ils sont dénués d'humanité ; de cette humanité essentielle qui est la base de tout système social et d'interaction entre les gens, évolués. C'est ceux que je nomme parfois "les moutons" dans mes textes.

Car in en revient, encore et toujours à cette justification absurde : les autres, ce n'est pas leur problème. Et mon problème, mes épreuves, que sont elles comparées à d'autres épreuves,; difficultés de l'existence, maladie, problèmes d'argent, de travail, de famille, éminemment plus délicats et ravageurs, que d'autres subissent - j'en connais ici.

Alors qu'il faudrait peu, pour moi, pour ceux qui sont victimes de ces mêmes traitements dignes tortures mentales de tortionnaires dignes des régimes totalitaires les plus monstrueux - et je souligne tant de fois qu'il faut cette expression que j'assume entièrement - pour que ça change. Pour terminer d'ailleurs, ça me fait penser à ceci, mème si l'image est violente et que c'est un exemple extrême - mais c'est fait pour :

Vous savez tous et toutes que je travaille sur un livre suer les origines idéologiques et ésotériques du Nazisme. Or, Hitler et ses sbires n'auraient pu accomplir tout ce qu'ils fait à l'Europe et au monde, si, en Allemagne ou dans les pays occupés, chacun à sa place, sans réfléchir aux conséquences de ses actes, en obéissant bêtement, à ce qu'accomplissait la masse du peuple partout ailleurs, s'était comporté différemment. Il y en a qui ont résisté, qui ont refusé, en résistant, et qui l'ont souvent payé de leur vie. Mais l'immense majorité des gens, comme ici ceux et celles qui utilisent Facebook comme des moutons, était apathique, parce que c'était comme ça, et qu'individuellement, ils se disaient : ce n'est pas mon problème, j'ai mes soucis, moi aussi j'ai peur, et je ne veux pas m'en mêler, etc.

Ici, par le comportement de cette immense masse de moutons dont je dénonce régulièrement les comportements apathiques, égoïstes, superficiels, etc. et bien, ils se comportent exactement comme ce conducteur de train qui conduisait un convoi a Auschwitz, qui le faisait parce que c'était son métier, que c'était comme ça et qu'il n'y pouvait rien ; tout en sachant qu'il envoyait des milliers de gens a la mort. Mais ce n'étais son problème.

C'est très parlant, et le parallèle, même si les conséquences sont moindres - quoique dans certaines circonstances - est vraiment éloquent. Dites vous que chacun de vous, par vos actions, par votre façon de vous comporter, d'intéragir, de partager ce que vous partager avec les autres - et notamment des personnes comme moi ou d'autres dans le même cas - êtes ce conducteur de train. Et que selon votre action, si ce n'est pas a la mort que vous nous envoyez, mais au désespoir, à a la tristesse, à la folie parfois, à la détresse, aux tourments, du fait de votre désintérêt, nonchalance, égocentrisme. Ou vous détournez le train quand vous tendez la main, vous partagez, vous discutez, vous acceptez la différence, vous ouvrez un peu de votre vie, de votre univers, lorsque quelqu'un comme moi ou d'autres font cette démarche envers vous. C'est le mème principe.

Et dans le cas de ce que j'ai vécu dernièrement, mon accident de Jeudi, ou par mes multiples tentatives de main tendue a l'encontre de quelques unes de personnes à qui j'ai tendu la main, et qui ont agis comme ces moutons, comme ces conducteurs de train conduisant ce convoi a Auschwitz, réfléchissez-y. Réfléchissez à cette part d'humanité que j'ai décrit au travers de ce texte, et qui est en vous...

Je ne suis pas parfait, loin de là, j'ai mes défauts, mes incapacités ou mes impossibilités également. Chacun tente, en fonction de sa personnalité, de son vécu, de ses blessures, de ses victoires ou défaites, forces ou faiblesses, de faire au mieux. C'est vrai pour les autres, c'est vrai pour moi.

Parfois, je suis maladroit, parfois je suis brutal dans mes mots. Je ne le nie pas ça fait partie de moi. Par ailleurs, étant concentré sur mon livre et ayant des centaines de contacts dans mes "amis" Facebook, je ne porte pas forcément - involontairement de ma part attention - à ceux ou celles qui me tendent la main ; et que je ne vois pas.

Je ne dis pas que tout le monde est indifférent, je dis que l'immense majorité est indifférente, ce n'est pas pareil. Et, malheureusement, c'est cette immense majorité à laquelle des gens comme moi - ou ceux et celles qui ont des épreuves, difficultés, maladies, handicaps, différences de tout ordre en gros - sont contraints de se soumettre, contre lesquels ils ont l'impression d'être impuissants. Je ne m'y résigne pas.

En outre, justement, je concentre mon attention sur ceux et celles dont l'échange mutuel entre elle et moi, je le pense viscéralement, va dans ce sens. Fais que cet échange, ce partage, pourrait ère fructueux, enrichissant, source de bonheur, d'ouverture vers l'autre, de tolérance, etc. autant pour ces personnes que pour moi.

Par mes moyens, avec ce que je suis, etc., je m'y emploie avec la plus extrême des virulence et de détermination ; y compris si j'en souffre, si j'en suis malheureux, blessé, ou autre. J'essaye, humblement, modestement, d'apporter ma pierre à cela, parce que ça m'importe. Est-ce que cela changera quelque chose ? Globalement non, c'est évident. Mais si une, deux, ou quelques personnes réagissent, et modifient leur comportement, que ce soit a mon égard ou à l'égard de personnes dans de semblables - ou pires - situations, ce sera déjà une victoire.

Prendre la main de quelqu'un - vous en l'occurrence - est toujours faisable. Ce qui est plus dur, et plus vital, plus nécessaire, c'est qu'une personne qui, pour tout ce que j'ai écris auparavant, prenne la main que je lui tends malgré ou à cause de tout cela. Là est la victoire, là est l'avancée déterminante qui permet d'avancer.

Enfin, pour répondre : oui, quand je me suis cassé la figure, le chauffeur de taxi, la vendeuse, le médecin, m'ont aidé. Ça c'est dans la réalité, et sur l'instant. Le véritable combat, c'est sur des réseaux sociaux comme Facebook qu'il se livre, parce que ceux-ci sont le reflet de nos comportement de masse ; pas de nos comportement individuels, ponctuels, dans une situation comme je l'ai vécu.

Faut-il leur en vouloir ? Oui, parce que cela montre leur manque d'humanité. Parce que leurs actes sont le reflet de ce comportement quotidien sur un réseau social comme Facebook, qui démultiplie d'eux ce qui n'est pas visible au premier abord. En usant de Facebook de telle ou telle manière, nous dévoilons comment nous nous comportons, avec une loupe grossissante, du fait de l'anonymat - chacun étant anonyme derrière son ordinateur. Il montre cette apathie, cette indifférence, cette superficialité, cette éphémérité, cet égoïsme, égocentrisme "ordinaire", "normal", "banal" de l'immense majorité de ces utilisateurs(trices). Parce qu'il n'est pas "comme moi", parce qu'il n'est pas de "chez moi" - pays, région, ville, statut social, religion, philosophie de vie, handicap, maladie, niveau d'étude, etc.

Bref, parce "qu'il n'est pas moi", et que pour cette raison, je l'ignore, je le rejette, et pourquoi pas, un jour, je l'enferme dans un camps ; il n'est pas comme moi, moi qui suis un représentant de la masse des moutons. Et pourquoi pas, je le laisse seul, je l'abandonne, il souffre, il meurt, parce que je ne m'en suis parce qu'il n'est "pas moi". Pour reprendre le titre d'un documentaire que j'ai vu il y a quelques années sur la période nazie - déjà - : le Fascisme Ordinaire. Car oui, cette banalité des comportements décrits est bien un "Fascisme Ordinaire"...


Dominique Capo


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