Cerbère Episode 2 : Martin

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Martin Cook n’en croyait pas ses yeux, ce qu’il avait pris d’abord pour une mauvaise blague, lui prenait le plus clair de son temps. Il y a deux jours un individu énigmatique avait sonné à la porte de son modeste logis dans le XIème arrondissement de Paris, un petit deux pièces qu’il avait loué dans une petite rue croisant la rue de la roquette, un peu trop animée pour le laisser dormir, mais assez délabrée pour l’y laisser vivre. Le type avait débarqué dans un long manteau gris fermé, il était de taille et de poids réglementaire, il aurait donc pu se dissimuler dans n’importe quelle foule sans jamais susciter l’attention, mais la rue de Lappe est particulière, il s’agit de l’une des artères du cœur de l’un des quartiers parisiens les plus festifs. Les gens y sont taillés pour sortir, leur dress code s’insère en quelque sorte dans l’intimité du quartier, ils font partie du décor au même titre que les pubs ou les magasins d’alimentation générale qui prospèrent lorsque les monops ferment leurs portes. Arrivé à 22 heures rue de la roquette en plein été, habillé comme un conseiller en assurance qui n’a pas fini sa tournée, revient à se promener avec un short sur une plage de nudistes. Lorsqu’il l’a vu approcher de son immeuble sans détourner son regard du haut de sa fenêtre, entouré par des hordes de jeunes venues engloutir un bidon d’alcool, que le type cherchait par-dessus tout à éviter, il a d’abord cru qu’on venait lui annoncer le décès d’un parent en Australie. Séduit par l’idée de recevoir un héritage, mais un peu décontenancé tout de même, il lui a ouvert la porte après l’avoir vu monter les marches quatre par quatre comme un dératé.

C’est à ce moment qu’il a pensé «à l’homme à la cigarette », le père de « Mulder » ou de « Scully » dans « X-Files ». Ce détails d’ailleurs n’a aucune importance, mais ayant lui-même croisé ce personnage à de multiples reprises au cours de ses égarements devant la télévision de ses parents, et l’ayant ainsi toujours associé au mystère et à la puissance, ce douloureux mélange qui conduit à la peur, il n’a eu aucun mal à faire le rapprochement. Il était d’ailleurs complétement effrayant. Les yeux rivés sur le T-Shirt de Martin, un pélican blanc sur un fond rose, il lui tapota la joue comme s’il le connaissait depuis une éternité, et lui glissa une enveloppe dans la poche. Ne pouvant plus s’enlever cette image de « l’homme à la cigarette » de la tête, Martin se contenta de regarder fixement les main du monstre en anticipant ses mouvements comme s’il était sur un ring de boxe et à deux doigts du K.O. « L’homme à la cigarette » est parti, laissant Martin et son enveloppe devant la porte, alors que Martin était à deux doigts de l’appeler « Papa »…une conséquence de son transfert dont il parlera sans doute à son psychologue. Puis il est resté là pendant dix bonnes minutes, en imaginant milles et unes raisons, qui ont poussé un inconnu à lui donner une enveloppe et à s’échapper. Il n’a pas voulu l’ouvrir tout de suite, les enveloppes peuvent cacher du poison, peut-être pas de l’anthrax mais des vérités qui ne sont ni bonnes à lire, ni bonnes à entendre. Et il a toujours adoré ces petits instants qui précèdent un grand moment, ils sont quelquefois plus plaisant que l’événement en lui-même, car dans l’attente du bonheur, on n’est jamais déçu, ni résigné, on sait qu’il se passera quelque chose.

A minuit pourtant, il s’avança d’un air déterminé vers cette enveloppe, et l’ouvrit. Il y trouva une parodie d’une tragédie grecque, qui était sans doute l’œuvre d’un mauvais auteur. Il était doctorant en lettres mais pourtant le manuscrit qui tenait sur 40 pages n’avait rien d’humain. Il était écrit en grecque ancien mais datait du XVème, peut-être un afficionado des lettres classiques s’est-il dit, mais le style était lyrique et contemporain à la fois . Quelque chose n’allait pas, il voulait découvrir pourquoi

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