CES MOTS SONT POUR TOI - CHAPITRE 6
Philippe Esteban
CHAPITRE 6
Je n’ai plus envie de regarder derrière moi. Je sais que je verrais papa et maman, enfermés dans leur peine. Le souvenir tenace de ton visage sans expression sur la table d’autopsie me hante trop pour que je puisse y associer les traits déformés de nos parents. Et puis Fanou, ils sont tellement perdus dans leur chagrin qu’ils ne se rendent même pas compte du mien. Je vais être honnête avec toi p’tit frère, je leur en veux un peu de ne pas s’inquiéter, ni même d’essayer de s’occuper de moi. Je me sens vraiment seul dans cette chambre funéraire, planté là, debout à me taire, alors que je n’ai qu’une envie : crier, hurler…
Ton absence si brutale me fait très mal. Alors que dire devant l’indifférence maladroite de papa et maman? Je n’ai pas le droit de la leur reprocher, j’en suis conscient, mais Fanou, je ne demande vraiment pas grand-chose : juste un baiser, juste une étreinte pour que je me sente rassuré et compris.
Est-ce déjà trop réclamer ?
Tu me connais Fanou, j’ai toujours douté de moi et de mes capacités. Tout ce que j’ai pu accomplir, je l’ai fait parce que tu étais là. Je l’ai fait car je ne voulais pas te décevoir. Mais je ne suis pas aussi fort qu’on veut bien le dire ou le croire. Je vais encore jouer un peu la comédie et montrer que je suis capable de m’occuper de tout, de tout gérer, de tout encaisser, de tout comprendre. Mais il n’y aura pas un mot de vrai dans ce que je vais dire, pas une once d’authenticité dans la force que je vais encore devoir montrer.
Je me sens faible Fanou, faible parce que je me retrouve pour la première fois vraiment tout seul avec ton absence, et pour l’instant, je n’arrive pas à faire face. Ce qui nous arrive est tellement brutal.
Je jette un coup d’œil sur le dossier que m’a remis Yann. Je reconnais les documents que le docteur Hitze m’a fait remplir. On a ajouté une autre feuille avec un questionnaire biométrique et quelques données biographiques. Tout l’administratif et le superficiel résumé en quelques lignes. Tout ce qui te déshumanise, tout ce qui ne te raconte pas. Je sais ce qui se cache derrière ta date de naissance, celle de ta mort, et tout ce qui a pu exister entre temps entre toi et moi. La mention de ton poids, de ta taille, de ta pilosité, de la couleur de tes yeux, toutes ces informations qui font mal, car elles me renvoient au visage l’homme que tu étais encore il y a quelques heures. L’homme dont le cœur battait et faisait battre le mien.
Il reste des cases à compléter sur ce formulaire : l’heure du décès, ses causes, rien sur les conséquences, en revanche. Ça on s’en fout visiblement. Du moment que tu rentres dans une statistique, un tableau, des chiffres, le reste importe peu. Il n’y a pas de rubrique sur la peine que ressentent les grands frères. C’est dommage, il faudrait la créer.
Je me demande si j’ai besoin de connaître les causes de ta mort, de toute façon, ça ne va te faire revenir. Est-ce que ça va me rassurer ? Je ne pense pas. J’espère seulement que tu n’as pas souffert, tu sais que je ne l’ai jamais supporté. Je crois avant tout que j’ai peur que l’on m’explique pourquoi ton visage n’était pas parfaitement paisible quand je l’ai vu tout à l’heure.
L’odeur de crevé s’est éloignée, et avec elle, celle de l’essence de jasmin, qui commençait à me filer des maux de tête. Il reste ce parfum neutre d’hôpital, presque agréable après ce que je viens de respirer. Je n’ai plus que quelques pas à faire avant d’arriver devant le bureau du légiste en chef.
Je frappe et on m’invite à entrer.
Je vois d’abord un gigantesque fauteuil de bureau en cuir, presque le même que celui de mon boss. Le légiste continue de parapher des documents et il n’a toujours pas relevé la tête pour me regarder. A vue d’œil, il doit avoir une petite cinquantaine, un peu plus peut-être. Si on ne m’avait pas dit qu’il était médecin légiste, je l’aurais pris pour un prof de fac. Tu sais Fanou, je t’en avais parlé de ceux-là aussi ... on ne peut pas les classer dans la catégorie des gauchistes exaltés, ou alors franchement ramollis, mais plus dans la tendance catalogue de la Camif.
Le docteur Granger a toutes les qualités requises pour entrer dans la secte : la coupe de cheveux qui va bien, à la Giscard version 74, avec la mèche plaquée sur le crâne pour cacher la calvitie.
J’imagine que si tu étais là avec moi dans le bureau, tu aurais tout fait pour me déconcentrer. C’est le genre de mec dont tu adorais te moquer. Faut dire que franchement, il y a matière. La monture de lunettes très seventies, façon Yves Mourousi, les fringues d’un autre siècle inspiration Deschiens (le pantalon en tergal vert amande, je pensais que ça n’existait plus que dans Peur sur la ville… Raté, j’ai le modèle vintage sous les yeux), je ne sais pas si on peut classer le prototype dans la catégorie « post- pompidolien » ou « néo-giscardien ».
Il est curieux ce petit bonhomme avec son long visage anguleux, ses pommettes saillantes, sa mâchoire carrée. Il a une tête de chroniqueur judiciaire, non ?
Fanou, j’entends ce que tu aurais pu dire en sortant de son bureau, les vannes que tu aurais balancées, tes propos exagérés. Ça me fait même sourire de penser à ça.
Le docteur Granger m’invite à m’asseoir. Il me présente ses condoléances, certainement sincères, mais comment en être certain ? Je me demande depuis combien de temps il répète les mêmes choses aux gens qui défilent dans son bureau.
Peut-il réellement compatir à toutes les peines ?
Peut-il absorber comme une éponge toutes les larmes versées devant lui ?
Peut-il encore réagir humainement devant une mère qui perd son enfant ?
Un enfant qui perd sa mère ?
Un grand frère impassible qui perd son petit frère ?
Là encore je me dis que je ne souhaite pas connaître la réponse.
Depuis l’annonce de ta mort, je ne croule pas sous les témoignages de compassion et de consolation, et après tout, je n’en cherche pas. Je désire seulement que l’on s’adresse à moi avec sincérité : c’est ce qui me préservera et me sauvera, ce qui me rendra certainement plus fort pour que j’accepte l’inacceptable.
Je n’arrive pas à m’extraire de mon silence, je n’en ai plus la capacité physique : trop nerveux, trop anxieux pour raisonner, trop peureux devant cette perspective de vivre mon futur sans toi maintenant. Peureux et lâche devant la vérité.
Je m’assois sur une chaise plutôt confortable, mais je n’arrête pas de bouger : tu me connais, j’agite nerveusement mes jambes, comme d’habitude, mais cette fois, tu ne seras pas là pour poser ta main sur mon genou. J’ai beau l’attendre. J’ai beau te provoquer, mais tu ne viens pas.
J’ai laissé mon sac dans le bureau de Thibault Hitze et déjà je le regrette. Même s’il m’encombre, sa présence me rassure. J’ai besoin de son odeur, de sentir sa texture synthétique. Je regarde une nouvelle fois mes bottes, pour ne pas croiser le regard insolemment calme du légiste : elles sont couvertes de pollen. Ca m’énerve d’avoir des chaussures sales. Si j’avais de quoi les essuyer, je le ferais.
Mes mains ne se sont pas réchauffées, elles restent toujours moites aussi ; je les essuie sur mon jean et plus je les sèche, plus les traces brunâtres sur mon pantalon deviennent visibles. De toute façon, je me sens sale depuis ce matin.
Fanou, je n’ai pas envie que cet homme me parle, car ce qu’il a à me dire ne me plaît pas.
J’ai relevé la tête un court instant pour croiser mon visage dans le reflet d’un miroir devant moi, je ne suis pas très fier de ce que je vois : traits défaits, cheveux poisseux et collés par la sueur de mon casque. Je note même les traces de doigts sur les verres de mes lunettes ; après tout, c’est normal, je n’arrête pas de les enlever et de les remettre depuis ce matin.
Plus les minutes passent, plus ma nervosité s’exacerbe. Je ne sais plus comment me tenir sur mon siège. Je n’ai plus d’ongles, alors que j’avais résisté deux semaines sans les ronger. Je n’ose plus regarder mon jean, il est couvert de crasse à force d’essuyer mes mains humides.
La notion du temps m’échappe car ma montre ne fonctionne toujours pas. Finalement, je me demande si je ne me complais pas dans ce monde d’attente, car tant que je repousserai au plus loin de moi l’idée de ta mort, je resterai en vie. Pas la peine de me dire que c’est un calcul idiot, je le sais parfaitement, mais pour l’instant Fanou, je n’ai rien trouvé de mieux.
- Monsieur Guillet, j’ai vu que vous étiez le frère du défunt…
- Oui, son frère aîné… de deux ans… enfin presque trois.
- La question risque de vous paraître idiote, mais quels étaient vos rapports avec votre jeune frère ? Est-ce que vous vous entendiez bien ?
Faut que je lui réponde quoi, Fanou ? Il me demande si on s’entendait bien tous les deux… Je lui dis quoi, hein ? Je lui raconte chaque moment qu’on a passé ensemble ? Pourquoi j’ai l’impression que trente ans de souvenirs m’explosent au visage d’un seul coup ? Pourquoi tant d’images, de parfums, de sons se bousculent dans ma tête à cette même seconde ?
- Nous avions les meilleures relations possibles. Nous étions même très proches Stéphane et moi. On m’a même souvent reproché de trop le couver quand il était petit, de le surprotéger. En fait on se disait tout, on n’avait aucun secret l’un pour l’autre.
- D’accord, monsieur Guillet, cela va donc faciliter les choses. J’imagine que le décès de votre frère, aussi brutal soit-il, ne doit pas vous surprendre outre mesure.
- Je vous demande pardon ? Je ne saisis pas trop ce que vous cherchez à me dire.
- Vous venez bien de me dire que vous et votre frère n’aviez aucun secret l’un pour l’autre.
- En théorie oui, mais visiblement, ça n’a pas l’air d’être le cas…
- En effet… J’en ai bien peur. Allez, je vais aller droit au but, votre frère souffrait d’un anévrisme au cerveau.
- Quoi ?! Il ne m’en a jamais parlé… Vous avez vu ça pendant l’autopsie ?
- Monsieur Guillet, vous pensez bien que nous n’avons pas encore eu le temps de pratiquer une autopsie sur votre frère, et de surcroît, il nous aurait fallu une autorisation de votre part pour le faire… Voilà, le dossier médical qu’on m’a remis ce matin, précise qu’un anévrisme a été diagnostiqué en octobre dernier. Votre frère était même suivi au CHU par le docteur Boidrou, du service neurologie.
- Vous me l’apprenez…
Tu ne m’as rien dit… Tu étais malade, et tu m’as rien dit… Tu n’avais pas confiance ? Tu avais peur que je m’inquiète, c’est ça ? Tu as dû te dire, mon frangin se fait tellement de bile pour moi qu’il ne vaut mieux pas que je lui en parle… Tu es vraiment un p’tit con !
- Vous savez monsieur Guillet, je ne pense pas qu’il faille en vouloir à votre frère de ne vous avoir rien dit… C’est souvent aux êtres qui comptent le plus qu’on en dit le moins quand on a des problèmes de santé. C’est un moyen de les préserver. Des cas comme celui de votre frère, j’en traite presque tous les jours. On pense tout savoir sur nos proches, et au final, on découvre qu’ils avaient leurs secrets. C’est le propre des gens qui savent qu’ils vont mourir plus tôt que les autres. Je vais vous donner exactement les informations qui m’ont été transmises par le service des urgences. Le décès de votre frère a été constaté ce matin à 9h40.
Neuf heures quarante… Je mets ma main sur ma bouche pour m’empêcher de vomir. J’ai des frissons partout dans le corps, ma poitrine se contracte. Encore une fois, je n’arrive pas à parler. Je retire ma montre et je la tends au légiste en lui montrant l’heure avec mon index sur le cadran.
- Votre montre s’est arrêtée à cette heure précise ? Ce genre de choses arrive parfois, mais plus souvent pour des naissances … C’est moins fréquent pour les décès, à moins que l’on pense très fort à une personne avant de mourir.
Je remue la tête pour dire non. Mes mâchoires ne se débloquent pas. Je n’arrive plus à les ouvrir. Depuis le moment où maman m’a appris ta mort, je n’ai jamais été aussi proche des larmes. Et pourtant, mes yeux restent secs. J’ai ressenti ta mort sans même le savoir et tu m’as envoyé un dernier message pour me dire que tu partais. Plus jamais je ne vais porter cette montre. En plus c’est toi qui me l’avais offerte pour mes trente ans. Elle restera toujours bloquée sur 9 heures 40.
Je ne me souviens plus ce que je faisais ce matin au moment où tu mourais. Tu es mort sans doute en pensant à moi, et au moment où tu mourais je ne sais même pas à quoi je pensais.
J’ai beau supplier mes yeux pour qu’ils pleurent, ils ne m’écoutent pas. Ma poitrine est prise dans une sorte d’étau qui m’empêche de libérer mes larmes.
- Votre frère est arrivé aux urgences vers 9 heures ce matin. Il avait déjà perdu connaissance depuis une vingtaine de minutes et il n’a pas pu être ranimé. A priori, il devait déjà être en état de mort cérébrale quand on l’a admis aux urgences.
Je vais vomir Fanou. Je te vois en train de mourir pendant ton transport à l’hôpital. Tu luttes pour ta vie et la douleur te fait un peu grimacer. Je l’ai lue cette douleur sur ton visage, le froncement de tes sourcils, les commissures de tes lèvres contractées, la sueur qui a perlé sur ton front. Je vois tout ça maintenant… Je le vois et je ne peux plus rien faire, je n’étais pas là avec toi et je m’en veux.
- Son collaborateur l’a accompagné aux urgences avec les pompiers. Il leur a raconté que votre frère était arrivé ce matin avec une forte migraine et qu’il avait pris deux cachets d’aspirine pour faire passer la douleur. Il situe cela vers 8h15. Votre frère s’est ensuite levé de sa chaise en se tenant la tête à deux mains et il est tombé sur son bureau. Je pense qu’au départ votre frère a dû être victime d’une crise d’apoplexie qui a entraîné la rupture de l’anévrisme, avec les conséquences que l’on sait. Donc, le temps que les secours arrivent, et qu’on le conduise aux urgences, il a dû se passer une bonne demi-heure.
- Monsieur Guillet, je vais être franc avec vous, même avec la meilleure volonté du corps médical, je ne pense pas que votre frère aurait pu être réanimé. Et si tel avait été le cas, je ne sais pas dans quel état nous l’aurions retrouvé au réveil.
En définitive, comme je vous l’ai dit, votre frère a succombé à une hémorragie cérébrale, provoquée par la rupture d’un anévrisme. Vous pouvez demander une autopsie pour en avoir la confirmation. Mais compte tenu des antécédents médicaux, ce serait une perte de temps.
- Pas d’autopsie !
Je me rends compte que je crache les mots plus que je ne les prononce. Ce sont les seules paroles que j’ai pu articuler depuis un petit moment. Je parle pour moi-même, car de toute façon, tu m’as désigné pour m’occuper de tout, et que tant que j’aurais de la force en moi, personne ne te disséquera. Je ne pourrais pas vivre en sachant que tu as été trépané, pour qu’au final on obtienne la confirmation de ce que nous savons déjà.
- Je voudrais savoir une chose, et peut-être que vous allez pouvoir me répondre. J’ai vu une sorte de grimace sur le visage de mon frère… Est-ce qu’il a eu mal quand il est mort ?
- Tout a dû arriver très vite, monsieur Guillet. Je ne crois pas qu’il ait eu le temps de souffrir. Il faudra le dire à vos parents, ça les rassurera. Quand on perd un de ses enfants de façon aussi subite, il est important de savoir que la mort n’a pas été douloureuse. Les mères y sont très sensibles.
- Vous savez, docteur, c’est aussi valable pour les grands frères qui perdent leur petit frère.
- Oui, bien entendu…
Il me tend un dossier cartonné à ton nom avec des certificats de décès signés et une plaquette avec les démarches administratives à suivre pour préparer tes funérailles.
- Si vous avez besoin de certificats de décès supplémentaires, vous pouvez vous adresser à l’accueil, et on vous en photocopiera d’autres. La brochure est assez claire, mais bon, elle déroute souvent les gens, car justement elle est trop claire. Vous avez les coordonnées du crématorium si vous souhaitez qu’il y ait incinération. Le corps sera exposé ici, à moins que vous ne désiriez le garder chez vous ; mais dans ce cas, il faudra nous prévenir assez vite. Monsieur Guillet, j’aimerais vous dire que le pire est derrière vous, mais hélas, ce qui vous attend dans les prochains jours ne va pas être une partie de plaisir. Je me permets de vous dire ça, car vous m’avez l’air d’être un homme très solide. Vos parents vont avoir besoin de vous dans ces moments difficiles. J’espère aussi que vous avez quelqu’un sur qui compter pour vous soutenir. N’hésitez surtout pas à demander de l’aide. C’est primordial.
Solide ? Je dois bien cacher mon jeu alors. Je dois être dans le même état que papa et maman, mais seulement, je n’arrive pas à le montrer. Ca me fait trop de chocs en une seule journée : ta mort, ton visage grimaçant sur la table d’autopsie, la découverte de cette maladie que tu m’as cachée, et puis surtout ces images que je me fabrique, où je te vois lutter pour ta vie pour enfin mourir.
Et pourtant, tout cela doit glisser sur moi, puisqu’on me trouve encore « solide »…
Yann arrive avec une housse transparente comme celles dans laquelle on emballe les vêtements au pressing. Il tient aussi un sachet plastique avec tes effets plus personnels.
Je reconnais ta montre, ta gourmette, l’anneau que tu portais à l’annulaire droit et la boucle que tu mettais à l’oreille gauche. Tout en argent, car comme moi, tu n’aimes pas les bijoux en or.
Dans la housse transparente, je découvre les derniers vêtements que tu as portés, un 501 un peu délavé, une chemise bleu marine avec bien entendu, des chaussettes unies assorties, un boxer blanc Calvin Klein et des Caterpillar noires un peu usées que tu mettais pour faire de la moto. Il y aura d’autres affaires à récupérer à ton bureau. J’essaierai de passer dans l’après-midi si j’ai le temps… ou le courage.
Je reprends un peu mes esprits pour dire au revoir au médecin et à Yann. Je leur serre la main à tous les deux, et je suis surpris par la poigne franche de Yann. J’aurais pensé qu’il avait la poignée de main molle. Je sors du bureau et il m’accompagne un moment dans le couloir.
- Dès que vous pouvez, il faudra revenir ici avec des vêtements pour qu’on puisse préparer le corps. C’est possible de prendre des chaussures pour votre frère aussi. Vous n’aurez qu’à tout laisser au Dr Hitze, ou alors à moi s’il n’est pas là.
Yann retourne dans la salle d’autopsie. Je souris quand j’entends le bruit caoutchouteux de ses chaussures dépareillées sur le carrelage.
J’inspire fortement et plaque la housse avec tes vêtements contre ma poitrine. Je sens aussitôt une onde de chaleur agréable se diffuser en moi. Tu es parti, Fanou, ton corps sans vie repose à quelques mètres de moi, mais malgré ça, ma solitude ne fait encore que commencer.