Ceux qui ne sont rien (selon Manu)

Jean Claude Blanc

bel exemple de ces simples inconnus, quidams ordinaires dans la société des pas perdus, gonflé Jupiter, la preuve....

               Ceux qui ne sont rien (selon Manu)

Vais vous conter par le « Manu »

Cette pauvre histoire bien ordinaire

Sûr que vous ne serai pas déçus

La scène se passe dans une chaumière

Là où réside une bergère

Mais sans moutons, peine perdue

Sur le sentier des traines misères

Inspire Manuel, cette vieille fourbue

 

Dans nos patelins, on n'a pas honte

D'ignorer ces laissés pour compte

Certes oiseaux rares pour la plupart

Qui pour mieux vivre, se tiennent à l'écart

 

C'est pas qu'ils sont avares de mots

Aimeraient tellement parler l'argot

Mais impossible, leur tournent le dos

Peur de choper rhume de cerveau

Préfèrent rejoindre le populo

Ces blaireaux de boules et de Pernod

 

Dans la vallée près d'une rivière

Se morfond une drôle de bergère

Qui chaque jour compte ses moutons

Comme de touristes y'en a guère

En fait s'emmerde à 100 sous de l'heure

Car il n'y a pas de raison

Qu'elle prenne pas sa part de bonheur

(Mais à venir, j'en ai bien peur)

 

Serait risqué aller la voir

Dans sa baraque, près des bois noirs

Pour ainsi dire « Noirétable »

Le paysage des misérables

 

Vivant du strict minimum

A ses déboires, vous fais la somme

Pas de lumière, eau sur l'évier

« Fond du jardin » pour déféquer

Juste un fourneau, une cheminée

Guise de frigo, un garde-manger

 

Ravitaillée par les corbeaux

Va à la ville rarement

Entendez courses au casino

Nantie par contre, de beaux vêtements

Qu'elle enfile juste aux enterrements

Sera pas dit qu'elle manque d'argent

 

De ses misères, en est fière

Aussi les gens préfèrent se taire

Quant aux sales langues de vipères

Leurs commentaires, les envoie braire

 

Se fait coquette malgré son âge

Lorsqu'elle descend jusqu'au village

Pas de mari, ni d'enfance sage

Elle vit de peu, pas davantage

Sachant se mettre à la page

 

Elle impressionne le voisinage

Est-elle sorcière rude personnage

Ou bien bigote, sur son nuage

Se moquant bien des bavardages

Qui la désignent « folasse sauvage »

 

Elle mène ainsi son existence

Demande à personne sa pitance

Les plus lucides la respectent

Tandis que d'autres, circonspects

La verraient bien, dans une secte

 

Texte inventé de toute pièce

Pourtant survie, une chouette gonzesse

Veux pas trahir ses secrets

D'intelligence, nous dépasse

(En fait c'est celui qui est..)

L'ai bien connue, première de la classe

De son destin, nul ne s'angoisse

Sauf votre auteur, qui la retrace

Cette dame digne d'un palace

Elle qui se chauffe à la glace

 

« Ceux qui ne sont rien », selon Manu

Faut les jeter, hors de sa vue

La République, pas que dans la rue

Elle vote aussi, cette fille perdue

 

Tous complices de ses malheurs

On se promet main sur le cœur

Y'en aura plus à l'avenir

De ces Etres Humains, comme martyrs

De ce progrès que l'on nous chante

 

Toi l'inconnue, même des tiens

Tous sont morts et enterrés

Aussi t'adresse doux baise main

Au nom de nous tous sur les sommets

 

T'as pas de bagnole, tu marches à pieds

Certains te dédaignent, et puis après

Qui donc est le plus miséreux

Sûrement pas toi, t'es habituée

Laisse jaser, imbéciles heureux

 

Vous confie pas qui est cette minette

Serait trahir ses pensées

En tous les cas, elle végète

Attendant plus venir son prince charmant

D'ailleurs sa porte, fermée à clés

 

Cherche la recette du verbe « aimer »

Abandonnée, près du courant

Sa maisonnette délabrée

Pas de Moïse pour la sauver

Alors égrène son chapelet

Cogite « après moi le déluge »

Près de la Vierge son seul refuge

Quant à Manu de France transfuge  JCBlanc avril 2022 (moderne Cosette)

Signaler ce texte