CHIMERIA
Virginie Goevelinger
Je vais vous raconter l’histoire d’Alicia Smith. Non que cette fille soit célèbre ou qu’il lui soit arrivée quelque chose d’extraordinaire du moins pas à cette époque, non ce n’est pas tout à fait ça. Enfin de compte disons qu’entre vous et moi cette Alicia qui n’est personne d’autre que moi-même. Oui je tiens à parler de moi à la troisième personne, ce n’est pas que je sois prétentieuse ou que je me prenne pour Alain Delon, mais disons que pendant cette période assez longue, je n’étais plus tout à fait moi-même et je n’arrive tout simplement pas à comprendre comment j’ai pu en arriver là. Figurez-vous que je menais, enfin disons qu’Alicia menait à cette époque une vie des plus simples qu’il soit. Des études de droit à l’université d’Hopewood, un chat et un copain qui passait de temps en temps en touriste, rien de très sérieux. Métro, interro, dodo, comme beaucoup de terriens. Elle avait un petit boulot de serveuse pour arrondir la bourse d’études. Elle servait des litres de café et de bières aux différentes heures de la journée et de la nuit. Elle avait peu de passions, elle lisait quelques livres par ci par là, pour ses études surtout et des fois quand un best-seller paraissait intéressant. Elle faisait un peu de sport, comme tout le monde pour s’entretenir, pour ne pas mourir d’une crise cardiaque à l’aube de la quarantaine. Cela lui arrivait d’aller au cinéma ou de faire un peu de shopping mais rien à outrance. Elle entretenait une relation normale avec ses parents, enfin aussi normal qu’avec des parents divorcés. Elle avait sa mère au téléphone une fois par semaine pour s’entendre dire les sempiternelles erreurs qu’elle avait pu faire jusqu’ici ou celles qu’elle fera dans un proche avenir. Elle avait quelques amis, disons plutôt des connaissances chez qui, elle allait manger de temps à autre pour entretenir sa vie sociale et être polie. Elle ne courrait pas après le monde et la mondanité ne lui courrait pas après. Elle n’avait pas vraiment de relations sérieuses, elle avait plutôt une sorte de visite conjugal de temps à autre et ses casse-croutes n’en demandaient pas plus. Elle n’était pas comme les filles de dix-huit ans insouciantes et tellement amoureuse de l’amour et des fringues tendances. Elle était plutôt banale, jolie sans plus, mais on ne se retournait pas sur elle. Dans ces études, elle était dans la moyenne, depuis sa plus tendre enfance, elle courait pour valider ses examens et à chaque trimestre pour avoir la moyenne et ainsi éviter de redoubler une année, elle passait à chaque fois tout juste.
Encore ce matin, elle s’était réveillée en retard, elle s’était couchée tard après son service du soir pour continuer de bosser ses cours. Mais ce matin elle devait voir le panneau d’affichage pour voir les résultats de ses derniers partiels. Elle courrait de tout son saoul, les livres dans les bras, il ne lui restait que cinq minutes avant le début de son cours magistral pour pourvoir aller voir ses notes. Un attroupement était déjà devant agglutiné devant la vitre. Elle chercha son nom pendant un moment puis le trouva parmi la nuée des élèves de deuxième année. Elle y lu trois « validée » pour deux « ajournée ». Et merde, elle était bonne pour le rattrapage. Pas de vacances pour les braves, enfin surtout pour les nases incompétents même pas fichu de réussir leurs examens semestriels. Il allait falloir bosser deux fois plus voir trois fois plus. Elle était démoralisée devant ces deux lettres « AJ », deux lettres qui tombaient comme un couperet. Elle détournait la tête doucement pour aller en cours, quand son regard fut attiré par une affiche fushia à gros caractère noir titrait « CHIMERIA » avec un logo en forme de lion entouré par sa queue en forme de serpent, qui avait l’air de lui murmurer des choses à l’oreille. En dessous on pouvait lire l’adresse d’un site internet, un site communautaire apparemment. « Si vous souhaitez partager vos cours, vos impressions sur leur contenu ou la manière dont ils sont abordés, si vous voulez trouver des gens pour réviser ou si vous voulez simplement vous entre-aider ou parler de vous ou des choses que vous aimez, alors rejoignez CHIMERIA, un nouveau monde que vous créez et qui vous appartient ».
Cette affiche l’avait intriguée pendant tout son cours, elle n’avait pas pu se concentrer. Ecrivant partout sur sa feuille « CHIMERIA », verticalement, horizontalement, en diagonal, en petit, en gros, en caractère gothique (enfin du moins elle avait essayée) et en italique. Elle n’avait pas réussi à retranscrire une seule ligne de ce qu’avait dit son professeur de droit constitutionnel, mais lui était tellement absorbé par son discours, à se gargariser de ses propres mots qu’il ne faisait même pas attention à l’inattention de la plupart de ses élèves dont Alicia. A la moitié de ses trois heures de monologue interminable, son maître de conférences proposa de faire un entracte. Elle était restée plongée dans ses gribouillis, pendant que ses camarades étaient sortis assouvir leur addiction à la nicotine. Elle était plongée dans la vision de ce lion et son regard hypnotique, avec ce serpent qui lui susurre doucement à l’oreille, quand quelqu’un l’a fit sortir de sa torpeur.
_ Salut ! Moi c’est Kurt.
_ Euh, bon…bonjour, Alicia, balbutiais-je.
_ Je vois que tu as vu notre affiche ? Me dit-il désignant du menton mes graffitis.
_ Oui, je l’ai vu sur le panneau d’affichage à côté des relevés de notes. Comment ça « notre » affiche ?
_ Ha, c’est parce que je suis un de ses membres. Et tes partiels ça a donné quoi ?
_ Trois validés et deux ajournés.
_ Ah galère… Rattrapage en vue. Et de beaucoup ? Me questionna-t-il.
Jamais personne ne s’était intéressé à moi aussi longtemps.
_ Disons que je suis à cinq points de la moyenne dans les deux matières, donc ce qui veut dire qu’il va falloir que je planche et que je jongle encore entre mes cours, mes révisions et mon boulot.
_ Planning sympathique en prévision en effet. Et tu comptes te faire aider ?
_ Comment ça me faire aider ? Tu dis ça comme si je devais suivre une psychanalyse, m’offusquais-je.
_ Non, non, tu te méprends. Je voulais simplement savoir si tu faisais tes révisions en groupe ?
_ Non, mais je ne vois pas en quoi ça te regarde
_ Eh bien, comme tu t’intéresses à CHIMERIA et que tu as besoin d’un coup de main pour tes révisions, disons que je pourrais t’être utile.
_ Et qui te dis que j’ai besoin d’un coup de main et que tu me seras utile.
_ Je ne te savais pas si farouche, me dit-il me gratifiant d’un clin d’œil. Dis-moi tu n’as pas lu l’affiche jusqu’au bout n’est-ce pas ? Et pour tes révisions tu es sûre d’avoir tous tes cours ?
Là il l’avait piégé effectivement elle n’avait pas vraiment lu l’affiche, disons qu’elle avait été plus hypnotisée par ce lion chimérique que par ce qu’il y avait d’écrit et il avait encore raison sur ses cours. Avec son travail de serveuse il lui arrivait de rater certains cours magistraux et comme elle n’avait pas vraiment d’amis à part son patron le yogi Franck, mais ça ne comptait pas puisqu’il ne suivait pas les cours, alors oui il lui manquait effectivement des parties de cours que elle n’avait pas pu récupérer.
_ Je ne vois pas le rapport, fulminais-je, j’étais en retard je n’ai pas eu le temps de lire et pour les cours je travaille alors parfois c’est compliqué.
_ Eh bien, me dit-il en se glissant sur le strapontin à côté de moi, CHIMERIA est un groupe d’entraide sur le net, il permet de mettre en rapport des étudiants qui ont besoins d’aide en cours ou d’un point de vue sur une dissertation, ou tout simplement pour faire connaissance. Il est possible de récupérer les cours qui te manquent. Chaque membre a l’obligation de partager et de faire vivre le site, ce sont les prérogatives primordiales. Il y a d’autres règles également comme les membres ne doivent pas échanger et parler de CHIMERIA en dehors de CHIMERIA.
_ « Première règle du Fight Club, ne pas parler du Fight Club », me moquais-je.
_ Tu rigoles mais c’est à peu près ça. A part que pour rentrer dans CHIMERIA on n’a pas besoin de se battre lors d’un combat de Free Fight.
_ Ouf, je suis rassurée, ricanais-je.
Il lui rendit son sourire. C’était la première fois que cela lui arrivait, qu’un garçon aussi populaire lui parlait gentiment et lui avait souri. Elle en avait eu le feu aux joues et une sécheresse dans la gorge, des sensations qu’elle n’avait jamais connu auparavant.
_ Pour en revenir à CHIMERIA, il faut être parrainé par un autre membre avec plus d’ancienneté dans le groupe pour pouvoir créer son compte grâce à un mot de passe qu’il t’aura donné, un code de parrainage. Chaque membre à la possibilité de parrainer qu’un seul filleul si je puis dire.
_ Alors si je comprends bien, tu viens d’enfreindre la première règle de CHIMERIA, me moquais-je.
_ Hey tu comprends vite à ce que je vois, répondit-il dans un rire des plus charmeurs. C’est la seule période où nous pouvons parler de CHIMERIA, c’est pendant la recherche de parrainage. Nous cherchons une personne qui corresponde à notre groupe et qui aurait besoin de notre groupe et nous lui proposons d’y entrer.
La pause touchait à sa fin et le professeur avait recommencé son discours sans fin. Kurt était resté à côté d’Alicia, ils échangèrent des petits mots sur de petits bouts de papier comme des adolescents pour parler de CHIMERIA, les règles, les us et les coutumes, les accès à la base de données des cours, les interactions des membres, les anciens, la cours de récré, autant d’informations auxquelles elle pourrait désormais avoir accès. Kurt déposa dans sa main le dernier petit mot, il y était marqué « CERBERUS », Kurt lui fit un dernier clin d’œil puis fila aussi vite qu’il était apparu.
Que se passerait-il si une secte apocalyptique se cachait derrière un des réseaux sociaux les plus populaires et puissants de notre monde ?
L’université d’Hopewood regorge d’étudiants fortunés et issus de familles puissantes qui côtoient également des élèves ordinaires. Dans ses murs une vague cybernétique est prête à tout engloutir sur son passage et à créer un nouveau monde. Zack Benett est le créateur du nouveau réseau social en vogue « CHIMERIA », il se trouve à la tête de ce réseau secondé par ses rabatteurs. CHIMERIA a pour but de mettre en rapport tout étudiant de tout bord, dans un seul et même but acquérir le savoir. Le savoir qui en général va des cours de l’université, des informations venues de l’extérieure et de l’intérieure, des rumeurs mais aussi tout ce qui touche à la vie privée.
Alicia est une nouvelle étudiante fraichement débarquée de Galdwin, elle est en première année de droit et elle vient tout juste d’avoir 18 ans. N’étant pas une élève fortunée et des plus brillante, elle travaille en tant que serveuse au Barhaman, un repère de bikers géré par Franck HABERENSKI un bobo biker et philosophe à ses heures. Native de parents divorcés et fâchés, elle essaye tant bien que mal de mener sa vie comme elle l’entend avec une mère frustrée et blessée qui est bien décidée à ce que sa fille ne répète pas les mêmes erreurs qu’elle a pu faire par le passé.
Le matin de l’affichage des résultats des premiers partiels, elle arrive comme souvent en retard. Il ne lui restait plus que cinq minutes pour bifurquer à l’angle de la cafétéria pour se retrouver dans le patio de droit pour pouvoir consulter ses notes. Elle arriva toute essoufflée et s’aperçut avec déconvenue et déception qu’elle était ajournée dans deux matières. Mais lors de cet instant d’échec affiché, elle tomba sous le charme d’un lion à queue de serpent représenté sur un prospectus fushia épinglé au mur qui avait pour nom « CHIMERIA » et pour slogan « Le savoir en partage, aurez-vous l’honneur de devenir un ou une filleul(e), pour entrer dans le monde la connaissance infini ». Elle ne comprenait pas vraiment de quoi il retournait mais elle était intriguée par cette image de créature chimérique. La position du serpent par rapport au lion était des plus curieuses, vue sous cet angle, on pouvait penser que le serpent murmurait à l’oreille du lion. Était-ce lui, le savoir ?
En retournant à la réalité et au soporifique cours de droit constitutionnel, Alicia ne cessa de penser à CHIMERIA, en dessinant et réécrivant ce qui le symbolisait, c’est alors qu’elle fut abordée par l’un des élèves les plus brillants et des plus populaires de sa première année, Kurt ALTON fils du juge fédéral ALTON et du juge pénal ALTON. C’était la première fois qu’un élève de cette stature lui adressait la parole, elle si transparente et ordinaire qu’une table bon marché. Après avoir échangé de brèves courtoisies, Kurt lui révéla qu’il était en réalité un rabatteur pour CHIMERIA et qu’il souhaiterait devenir son parrain, si elle souhaitait faire partie du réseau.
Après plusieurs jours de réflexion et de conflits intérieurs, Alicia s’était enfin décidée à rentrer le mot de passe que lui avait donné Kurt afin de créer son interface réseau et de pénétrer le monde savant de CHIMERIA. Elle s’y inscrit et rempli son profil, comme tant d’autres en avaient fait auparavant. Elle pouvait avoir désormais accès à tous les cours de l’université, faire partie des groupes de travail, avoir des amis virtuels, échanger des informations sur tout et n’importe quoi et même avoir accès à des données personnelles et intimes d’autres membres. Elle pouvait donner son avis sur tout et rien, elle avait enfin l’impression d’exister et pour cela elle devait en échange fournir les mêmes choses. C'est-à-dire se dévoiler toujours un peu plus, mettre des anecdotes de sa vie personnelle, des photos d’elle enfant ou de maintenant, raconter ce qu’elle faisait au jour le jour, les endroits qu’elle fréquentait, elle devait s’ouvrir de plus en plus sur ce monde virtuel. Personne en dehors de CHIMERIA ne parlait de CHIMERIA, mais les membres se reconnaissaient entre eux et se faisaient de petits signes pour se dire qu’ils savaient qu’ils faisaient partis du même groupe, le groupe des gens qui ont le savoir. Un des principes même de CHIMERIA était le silence au-delà des murs numériques qui constituaient son monde. Alicia était devenu à croc à CHIMERIA, elle ne comptait que sur lui pour réviser et pour travailler ses cours, il était devenu son seul et unique courant de penser. Elle ne pouvait passer une heure de son temps sans commenter, lire, ou publier une information dans CHIMERIA. S’en était devenu tel qu’elle avait utilisé ses économies pour pouvoir acheter un ordinateur avec une clé réseau pour pouvoir être constamment raccordée à son monde. Cela avait commencé à inquiéter son patron Franck, qui lui était complètement réfractaire à toutes ses formes d’intrusions constantes du monde virtuel dans le monde réel. Elle devenait de plus en plus paranoïaque, se refermant sur elle-même, faisant toujours attention à ce qu’elle disait et à qui elle parlait. Elle n’était plus spontanée, elle était devenue un véritable automate cybernétique. Depuis qu’elle faisait partie de CHIMERIA, ses notes avaient augmentés dans toutes les matières, mais ça vie sociale s’était considérablement amoindris. Elle dormait de moins en moins et ne parlait plus à personne. Tout ce qui lui importait était CHIMERIA et les dernières informations que l’on pouvait y trouver. Bien que beaucoup de gens la connaissaient désormais virtuellement, elle n’avait jamais été aussi seule de toute sa vie. C’est un après-midi d’automne où elle avait commencé à se sentir épié et même suivie. Elle n’arrivait pas à mettre la main sur la raison de cette sensation, mais elle devenait de plus en plus oppressante. Sur le campus, sur le chemin de son dortoir, comme à son travail elle sentait que quelqu’un la suivait elle en était persuadée.
Un soir de service au bar, un jeune homme habillé comme un fan de Nirvana qu’elle n’avait jamais vu auparavant était accoudé au comptoir à boire un café. Il devait être courageux ou suicidaire pour goûter au café de Franck. Alicia ne l’avait jamais vu auparavant pourtant en le regardant elle pensait l’avoir déjà rencontré, comme une sensation de déjà-vu. Il l’avait accosté poliment et d’une manière très ringard du genre : « On ne serait pas déjà vu quelque part ? » Pas très original. Il était là chaque jour pendant le service d’Alicia, à croire qu’il ne travaillait pas. Elle le voyait souvent écrire dans de petits carnets avec un élastique autour. Au fil de ses visites, il avait sympathisé avec Franck, qui ne manquait pas d’ailleurs de lui conter ses nombreux voyages. Alicia avait fini par apprendre qu’il s’appelait Arsher. Elle avait remarqué qu’il tentait de lancer la conversation quand elle était à côté de lui. Il lui posait également des questions. Sur ce qu’elle faisait comme étude ? Quels étaient ses passe-temps ? Et ce qu’elle trafiquait constamment sur son ordinateur et sur son smartphone ? Quel fouineur, pourquoi lui posait-il autant de questions. Mais elle continuait d’être évasive et distante. Un jour, elle l’avait rencontré sur le campus, ça devait être là qu’elle l’avait croisé auparavant puisqu’il lui apprit qu’il faisait des études de journalisme. Ils s’étaient mis à discuter sur le chemin de la bibliothèque quand Kurt était venu à leur rencontre l’air contrarié. Il congédia Arsher et emmena Alicia à l’écart pour lui conseiller de ne plus revoir ce type. Alicia n’avait pas bien compris la réaction de Kurt et se posait désormais beaucoup de questions sur sa réaction. Elle avait tenu à lui en parler après les cours. Il avait l’air agacé quand elle avait abordé le sujet, puis il l’avait embrassé pour mettre un terme à ses questions. La situation d’Alicia était de plus en plus confuse, Kurt l’avait embrassé mais lui avait interdit de parler de ça à qui que ce soit. Il avait plus ou moins une relation clandestine, c’est lui qui décidait où et quand ils se voyaient. C’était toujours chez elle, jamais chez lui, pas de sortie ciné ou de resto. Ils sortaient chacun de leur côté et jamais au même endroit par risque de se rencontrer. Les seules soirées où elle était autorisée à être au même endroit c’était celles organisées par Zack, le créateur de CHIMERIA, il y avait tous les membres du campus qui étaient conviés dans sa grande demeure victorienne. Elle avait déjà vu Kurt avec d’autres filles et il lui avait expliqué que ce n’était que des amies rien de plus, mais ce qu’elle voyait sur CHIMERIA disait exactement le contraire. Il se montrait ouvertement avec des filles de son rang. Pendant toute cette période, elle avait essayé d’éviter Arsher ce qui était des plus compliqué puisqu’il était tout le temps fourré au Barhaman, il était souvent en grandes conversations avec Franck, on avait l’impression qu’ils manigançaient des trucs pas clairs ensemble. Un soir où Alicia avait fini son service, Arsher lui avait proposé de la raccompagner et elle était tellement furieuse contre Kurt que pour se venger elle décida d’accepter l’escorte. C’était pendant cette brève balade, qu’Arsher lui avait confié qu’il était à la recherche de sa sœur qui avait disparu depuis plusieurs mois maintenant. Ses parents avaient tenté d’en parler à la police pour la déclarer comme disparition inquiétante mais le Commandant de la brigade avait minimisé les choses en leur faisant comprendre que cela devait être qu’une simple fugue. Ils avaient bien essayé de coller des affiches, mais une heure après elles avaient toutes disparues. Après cette confession, Arsher et Alicia s’étaient rapprochés, à ses côtés elle avait désormais l’impression de revivre ou de vivre vraiment pour la première fois. Ce changement d’attitudes et son manque d’intérêts désormais pour CHIMERIA n’avait pas échappé à Kurt, ce qui le rendit plus agressif à l’égard d’Alicia. A la sortie de la bibliothèque un soir de révision, à l’abri des regards, un petit comité d’accueil Kurt à sa tête s’était chargé de rappeler à Arsher de garder ses distances avec Alicia. Arsher têtu comme un âne n’avait pas vraiment écouté le conseil de ses agresseurs et fila dégoulinant de sang au Barhaman. Franck l’avait recueilli et soigné avec des mixtures et des plantes bizarres qu’il avait ramené de je ne sais où. Alicia avait veillé Arsher toute la nuit pour être sûre qu’il se remette bien de ses blessures. Le surlendemain à son réveil, Arsher profita de la fermeture du bar pour demander à Alicia de l’y retrouver. Ils l’attendaient Franck et lui un air grave sur le visage. Arsher lui avoua qu’il enquêtait sur CHIMERIA depuis plusieurs mois maintenant, depuis que sa sœur avait disparu. Quand il avait fouillé sa chambre pour essayer de comprendre la raison de son départ il avait retrouvé un petit bout de papier caché dans le ventre de son nounours marqué CHIMERIA et HEROUOS et la seule chose qu’elle avait soit disant emmené dans sa fuite était son ordinateur. Cela n’avait rien de cohérant, elle n’avait emporté ni des vêtements, ni ses papiers, ni argent. Elle s’était volatilisée. Il avait alors fait des recherches sur ce CHIMERIA et était tombé sur une interface utilisateur où il fallait rentrer un mot de passe. Il tenta « HEROUOS », mais là un avertissement était apparu. Son meilleur ami Drazik alias « le Snake » était ce que l’on pouvait appeler un hacker. Il avait fait sa petite enquête sur les derniers mouvements de carte bleue de Lisebeth et il avait essayé de tracer son portable. Il n’y avait pas eu d’activité depuis sa disparition par contre le dernier signalement GPS de son téléphone se trouvait non loin de la demeure de Zack Bennett. Alicia avait commencé à ouvrir les yeux sur ce qu’était véritablement CHIMERIA après en avoir parlé ouvertement avec Franck, Drazik et Arsher. Ils avaient tous échafaudés un plan pour pénétrer la maison des BENNETT et voir si Lisebeth y était retenue prisonnière. Ils avaient convenus que cela devait se dérouler pendant une des soirées de CHIMERIA, et la prochaine devait se dérouler chez Kurt. Alicia devrait y participer pour ne pas éveiller les soupçons du réseau sur son manquement à la première règle. Elle s’était rendue chez Kurt à la soirée, tous les membres de CHIMERIA s’y étaient rendus. Zack avait fait un long discours sur l’importance de la loyauté et du respect des règles au sein du réseau. Alicia se retrouva entourée de Kurt et d’un autre rabatteur qu’elle ne connaissait pas. Elle fut ligotée et jetée dans un van GMC noir. Kurt et le rabatteur l’empêchaient de se débattre et Zack avait pris place à côté du chauffeur. Ils se dirigèrent vers la maison BENNETT qui était vide ce soir-là, Monsieur le Doyen ayant un repas de charité et les domestiques ayant pris leur soirée. Franck qui attendait Arsher et Drazik avait vu le van noir se garder dans l’allée des BENNETT. Il tenta de prévenir ses complices qui se trouvaient à l’intérieur mais apparemment les ondes des talkies walkies ne passaient pas. Franck avait décidé de s’y rendre en faisant le tour de la maison. Pendant ce temps-là, Alicia avait été emmenée au sous-sol et enfermée dans une espèce de geôle. Il l’avait laissé là, seule dans cette pièce humide, elle était toujours ligotée, elle avait néanmoins réussi à se mettre debout et inspectait les murs pour essayer de trouver une issue. Quand elle tomba sur une inscription signée par une certaine Lisebeth comme la sœur d’Arsher, qui mettait en garde le monde contre les sombres dessins de Zack et de son réseau. Ses garde-chiourmes étaient remontées à l’étage sûrement pour discuter de son sort. Lorsque qu’elle entendit la voix d’Arsher et de Drazik non loin de sa cellule. Elle les appela au secours pour qu’ils viennent la libérer. Arsher s’approcha de la porte mais elle était verrouillé et il n’y avait pas de trace de clé, Zack avait dû la garder sur lui. Mais c’était sans compter sur Drazik qui avait plusieurs cordes à son arc et un passé de cambrioleur. Ils remontèrent tous les trois à pas feutré, apparemment Franck avait mis le feu à la cabane à outils pour faire diversion, ce qui entraîna les kidnappeurs dans le jardin, ils en profitèrent pour s’extraire de la maison. Une fois arrivés dans le van, Franck leur dit sur le ton de l’humour qu’il avait aussi laissé une petite surprise dans une petite salle rempli de boîte qui clignotait et qui soufflait à la cave, sûrement les serveurs de CHIMERIA. Pendant que Zack et ses complices tentèrent d’éteindre le feu, Franck démarra la voiture et appuya sur le bouton d’un petit boîtier et là une forte détonation éventra la maison des BENNETT et ils filèrent dans la nuit sans se retourner. Arrivés, au Barhaman en pleine nuit, ils se posèrent tous les trois pour débriefer sur ce qui venait de se passer. Alicia informa Arsher du message qu’avait laissé Lisebeth dans sa cellule. Franck avait allumé la télé pour regarder les informations, c’est à ce moment là qu’ils virent que la tête d’Alicia et d’Arsher étaient désormais mis à prix pour incendie volontaire et acte terroriste.
« Lorsque le pouvoir de l’amour dépassera l’amour du pouvoir, le monde connaîtra la paix »
Alicia SMITH est originaire d’une petite ville du Michigan, Gladwin, fille de Martha assistante juridique divorcée d’Arthur chargé d’affaires en matériel agricole. Alicia a grandi dans un environnement stable les premières années de sa vie. Elle avait passé son enfance dans un petit pavillon de banlieue en périphérie de la ville. Enfant sage et calme, elle était discrète et parlait peu, plutôt timide. Ses parents travaillaient tous les deux en ville et son père était amené à faire souvent des déplacements. Elle n’avait pas besoin de nourrice, car déjà toute petite Alicia était indépendante et sérieuse, elle ne faisait pas de vague. C’était une enfant recluse qui n’aimait pas trop la compagnie des autres. Elle parlait peu. Ses parents avaient même pensé pendant un temps qu’elle était autiste. Ils lui avaient fait passer toute une batterie de test, sans que les résultats soient concluent. Non Alicia était simplement une enfant réservée et ordinaire. Aujourd’hui elle a dix-huit ans et tente de survivre à sa première année de Fac.
Kurt ALTON est un brillant élève en première année de droit, propre sur lui, polo Ralph Lauren avec une veste en cuir Armani et le jean assorti. Il n’avait pas un cheveu qui dépassait toutes ses dents étaient alignées à la perfection. Il était brun aux yeux verts avec ce qu’il faut de charisme et d’assurance pour que les autres le prennent au sérieux et l’écoute. Kurt est fils de magistrats, ses deux parents sont juges mais pas dans la même cour de justice. L’un à la cour fédéral, l’autre à la cour pénal. Ses week end se résument aux parties de tennis et de golf au yacht club à 100 000 dollars l’adhésion. Ses vacances se passent souvent à Hawaï pour l’été et à Gstaad en Suisse pour l’hiver. A peine arrivée en première année de droit, tout le monde le connaissait et lui connaissait tout le monde, même les profs, surtout les profs. Il avait de très bonnes notes et était toujours volontaire pour participer en travaux dirigés. Il faisait partis de plusieurs clubs, club de débat, club de d’échecs et club d’escrime. Tout lui réussissait et toutes les portes s’ouvraient devant lui.
Franck HABERENSKI est le patron du Barhaman dans lequel travaille Alicia depuis la rentrée en tant que serveuse. Franck a un passé plutôt nébuleux, il a l’air d’avoir entre 40 et 50 ans, on ne sait pas trop. Il a des cheveux mi- longs grisonnant un peu gras. Des yeux gris pétillants avec une petite coupe rose et un bouc pointu. Il portait un jean délavé qui avait dû faire la guerre du Vietnam, un t-shirt de Metallica avec par-dessus un vieux gilet miteux gris, des tongs finissant l’ensemble, l’inscription « semper fidelis » tatouait son biceps. Il avait une démarche de petit vieux, un peu recroquevillé sur lui-même marchant à petit pas feutré. Il avait l’air toujours un peu stone. On ne sait pas très bien ce que constitue le passé de Franck, le yogi Franck comme l’avait surnommé Alicia, car il avait toujours un dicton philosophique ou pacifique à placer dans une conversation. Il avait apparemment beaucoup voyagé, en tant que globe-trotters ou en tant que soldat, on ne savait pas trop, il avait une grande connaissance de l’histoire et la géographie de certaines contrées très reculés que l’on ne voyait qu’à la télé. Ce n’était pas un violent mais il savait se battre il pouvait immobiliser un homme rien qu’avec une clé de bras. C’est pour ça que dans son bar tout le monde se tenait à carreaux certains avaient essayé de déclencher des esclandres mais il les avait vite tué dans l’œuf et à chaque fois il faisait la moral à ses assaillants comme dans Pulp Fiction où l’un des tueurs cite Ezekiel. Il avait des petites habitudes un peu bizarre un peu roots, il buvait un cocktail bizarre « le russe blanc » et devait certainement abuser de temps à autre des produits illicites.
Arsher FITZGERALD avait les cheveux mi-longs pas coiffés et les yeux noisette avec une barbe naissante. Il avait un look un peu grunge, avec un pantalon un peu déchiré, T-shirt kaki avec une étoile rouge et de vieilles converses aux pieds. Il ne quittait jamais sa besace US qui devait contenir tous ses secrets et ses bombes de peinture. Il était en première année d’école de journalisme. Cadet d’une famille aisée, il avait une grande sœur de trois ans son aîné prénommée Lisebeth. Ses parents étaient tous les deux dans le monde des médias, son père dans la presse écrite, propriétaire de plusieurs journaux à scandales et sa mère présentatrice d’un talk-show en access prime. Arsher était diamétralement opposés à ses parents. Il souhaitait devenir plus tard journaliste d’investigations pour dénoncer les dérives de notre société. Depuis qu’il était petit, il dénonçait les injustices. Déjà à l’école élémentaire quand il s’était aperçu que les élèves issues de familles riches avaient des traitements de faveur, même si lui également en bénéficiait, il avait organisé une manifestation devant les grilles de l’école avec un panneau prônant les bons points et les images pour tous. Plus tard il s’était enchainé à un arbre centenaire qui devait être abattu au profit d’un green de golf. Adolescent, il avait eu quelques petits problèmes avec la police pour des faits de vandalismes et autres détériorations de biens publics. Faire des moustaches sur la statue représentant Madame Le Maire pour dénoncer les magouilles politiques n’était pas du goût de tout le monde. D’ailleurs pour ne pas faire de vague et éviter la disgrâce publique à ses parents les affaires étaient souvent étouffées et lui avait passé quelques années en pension. Désormais à 18 ans un peu plus mature et discret, il avait bien l’intention de poursuivre son combat mais en ce faisant plus prudent et surtout sans se faire prendre.
Martha SMITH, mère d’Alicia assistante juridique de 55 ans, divorcée depuis 5 ans. Son divorce avec le père d’Alicia, Arthur, s’est très mal passé, divorcé pour cause d’adultère, Martha est devenue aigri depuis cette époque. N’arrivant pas à pardonner à son ex-mari de l’avoir trompée et quittée pour une fille qui avait la moitié de son âge, elle avait rapporté toute son attention sur sa fille, lui imposant ses choix, lui dictant sa manière de vivre, les personnes à fréquenter. C’est elle qui l’avait inscrite en droit, elle voulait que sa fille devienne avocate ou juge. Elle la mettait en garde contre l’amour et la fourberie des hommes, comme quoi ils n’étaient pas dignes de confiance et qu’ils ne cherchaient qu’à utiliser les femmes et les jeter après service. Depuis son divorce, elle n’avait pas refait sa vie, elle s’était plongée dans son travail et vivait une nouvelle vie par procuration en s’immisçant dans celle de sa fille le plus possible. Elle poussait sa fille à rencontrer les avocats pour lesquels elle travaillait, pour alimenter son carnet d’adresses. Elle était furieuse quand elle avait su que sa fille avait pris un travail dans un bar sordide, repère de drogués et de voyous, mais elle n’avait pas les moyens de lui payer ses études alors elle avait ravalé sa fierté mal placé.
Zack BENNETT est le président des étudiants de la faculté d’Hopewood et son père en est le Doyen. Il a perdu sa mère dans un tragique accident de voiture quand il était plus jeune. Il était présent quand c’est arrivé, il en est sorti indemne avec seulement l’arcade sourcilière ouverte, qui vu la violence du choc était un véritable miracle. Sa mère elle n’avait pas eu cette chance, elle était morte dans d’atroces souffrances, agonisant en hurlant à l’aide.
Il a grandi dans une demeure cossue, où il ne manquait de rien et avait tout ce qu’il voulait, avec la meilleure éducation. Il a toujours été le premier de sa classe et même maintenant qu’il est en master de sciences politiques, il est major de sa promotion et ce depuis 4 ans d’affilés. Capitaine de l’équipe d’escrime et élu au conseil de gestion de la Faculté, il est très populaire. De prime abord sociable et poli, Zack est très exigent avec les personnes qui l’entourent, dans l’intimité, on peut le définir comme caractériel et capricieux, mais il sait se faire aimer des autres. Très charismatique et inventif, il est le créateur de CHIMERIA et est à la tête d’un groupe d’amis tous issus de familles puissantes.
Son physique est des plus attrayant, châtain aux yeux noisette avec une petite cicatrice sur le sourcil gauche, stigmate du tragique accident qui le priva de sa mère, il a tout du gendre idéal, sourire enjôleur et corps d’athlète, il fait tourner les têtes et chavirer les cœurs. Même les garçons l’adulent, c’est un leader né.
Mais ce sourire angélique ne cacherait-il pas quelque chose de plus sombre et plus profond ?
Drazik alias « Snake » est le meilleur ami d’Arsher, on ne sait pas grand-chose sur lui, à part que c’est un Hacker, très doué. Il a effacé tout ce qu’il le concernait sur le net et vie en marge de la société. C’est un adepte du cyberespace mais il en combat les dérives et il croit à la théorie du complot, ce qu’il le rend un peu parano. Il porte souvent des t-shirts avec des slogans geek, comme « No Future » ou la tête de Dark Vador floqué dessus. Il a les cheveux noirs coiffés en épis maintenu avec un gel extra fort. Il avait les yeux bleus mais portant souvent des lentilles pour changer d’apparence, il avait également un percing sur l’arcade et un autre sous la lèvre inférieure. Il avait dans le dos un tatouage représentant une sorte de code binaire. Certaines personnes avaient tenté de savoir ce que ce tatouage pouvait représenter mais il leur avait répondu qu’il serait forcé de les tuer s’il leur en révélait la signification. Il avait toujours les derniers appareils dernier cri et d’autres qu’il avait fabriqué lui-même mais dont on ne comprenait pas vraiment à quoi il pouvait bien servir.