Chroniques adolescentes
ysiscriten
Il riait, criait, jouait, chahutait, taquinait ses camarades, mettait ses professeurs hors d’eux-mêmes. Comme il était casse-pieds cet élève a toujours cherché la petite bête, à répondre à la moindre remarque d’un professeur qui de surcroît ne s’adresse pas à lui. Une vraie tête à claques, mais jamais désagréable, affectueux même. Pourtant ce garçon gardait un secret terré au fond de son âme.
Une phrase, un mot peut-être aurait suffi, mais il s’y refusait. Joyeux et taquin en apparence, sombre et versatile en son être, il ne vivait pas sa vie, il la subissait et voulait s’enfuir d’elle.
Cela est-il possible ? D’échapper à sa vie ? Ce n’est pas un renoncement, non. Au contraire c’est le choix le plus grave et le plus important que j’ai à faire maintenant. Je me laisse une semaine pour y réfléchir. Comment échapper à ma vie ? Sans faire de mal à personne, m’évanouir en silence, m’effacer, disparaître. Comme un souffle m’évaporer et glisser dans l’air avec lequel je ne ferai plus qu’un ?
Et chaque soir au sortir du lycée, avant de franchir le seuil de la maison familiale, il abandonnait son masque de gaieté et revenait à lui-même. Sombre, renfermé, taciturne. Ses parents se heurtaient constamment à un mur de silences, à peine quelques bonjours et mercis échangés. Aussitôt dans sa chambre, il réfléchissait. Pourquoi suis-je ainsi ? Pourquoi tout le monde à le sourire alors que moi je ne fais que retenir mes pleurs ? Pourquoi je fais subir ça à mes parents ? Alors il étouffait ses sanglots et ses cris muets dans son oreiller.
Il se sentait mal dans sa peau, et dans cette vie qui, malgré lui, ne voulait pas s’interrompre. Cependant, il n’en voulait à personne, non, jamais il n’avait remis en cause l’éducation et l’amour que ses parents lui avaient donnés. Parfois, il lui arrivait de penser que s’il avait eu un frère ou une sœur, enfin quelqu’un avec qui partager son mal être, alors peut-être qu’il n’aurait jamais songé à commettre ce geste de désespoir.