Comme tous ces gens.

mooona

Je suis comme cet ivrogne titubant dans les rues éclairées faiblement les nuits pluvieuses, un fond de bouteille de vin rouge bon marché à la main. Comme cette étrangère immigrée fébrile, hésitante sur son chemin, retournant sur ses pas, la peur au ventre d’être rapatriée. Comme cette vieille femme tremblante, avec beaucoup de vies derrière elle mais ne sachant plus très bien laquelle elle mène aujourd’hui. Comme ce chien errant et affamé, à la recherche de son maître qui l’a lâchement abandonné. Comme cet enfant des rues, un ours en peluche borgne et crasseux à la main, priant pour ramener assez d’argent le soir à sa mère, ses frère ou son oncle sous peine s’être puni. Comme ce politique trop préoccupé par sa campagne électorale afin d’accéder au pouvoir pour écouter le peuple. Comme ce suicidaire qui ne s’est jamais sentit aussi vivant que le moment précédent sa mort. Comme ce soldat d’une de ces guerres, plongeant son regard dans celui de sa victime juste avant de tirer. Comme cet homme manifestant trop de haine pour des gens qu’il juge différent de lui, seulement pour ne pas s’avouer que c’est lui-même qu’il n’accepte pas. Comme ce chêne puissant et massif âgé de 250 années déraciné et abattu à coup de hache et de tronçonneuse  parce qu’il était gênant  pour la construction d’une belle autoroute flambante neuve, toute de béton vêtue. Comme cette jeune fille de treize ans, pleurant à chaudes larmes sur son lit rose fleurit, larguée par son copain parce qu’elle n’a pas voulu baiser. Comme cet adolescent, fuyant la réalité triste et austère en se réfugiant dans des jeux vidéo violents et insensibles à coup de mitraillettes et de kalachnikovs, démontant ces personnages fictifs sur lesquels il fantasme. Comme ce bon père de famille à bonne situation et à bonne réputation, rentrant  à la maison après avoir sauté sa secrétaire toute la journée et lisant le soir une histoire de conte de fée a son fils de quatre ans. Comme ce livre poussiéreux aux pages jaunis posé sur la table de chevet, abandonné en cours de route, remplacé par la télé allumée même pas regardée.Comme ce jeune garçon de 8 ans, sachant tout juste tenir un crayon dans sa main et  faisant glisser sous son doigt la paroi lisse et fine de la toute dernière invention de Steeve Jobs.

Comme tous ces gens qui souffrent, physiquement, psychiquement, inconsciemment ou les trois en même temps.

Je suis un cliché parmi tant d’autres, monsieur ou madame tout le monde, qui s’efforce de vivre dans la norme ou presque. Avec ses blessures, ses craintes, ses douleurs,  ses joies et ses instants de bonheurs. Comme tout le monde je cache mes peurs, comme tout le monde je pleure le soir et rayonne la journée. Comme tout le monde, je rêve de liberté, mais comme tout le monde je me fuis. Préférant choisir la facilité que de m’assumer, que d’oser. Je m’enferme dans une prison rassurante qu’est la routine au lieu de goûter au délicieux  risque qu’est de s’évader. Parce que s’échapper c’est effrayant, tellement incertain, alors on préfère rester là, attendre, continuer nos petites affaires ennuyeuses qu’on se persuade d’être passionnantes. Mais cela ne nous empêche pas d’être des êtres instables continuant à se balader dans l’inconstance de nos pensées qui nous rattrapent. Parce que nous sommes tous pareils, mais personne ne veut se l’avouer. Personne n’ose le clamer haut et fort de peur de …passer pour un fou ? Quelle importance ? Puisque nous sommes tous des fous….au fond on attend tous la même chose : qu’un d’entre nous se lance…

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