Confinements intimes #3

Cyrille Royer

4 novembre.

Après deux jours de travail je suis épuisé, je prends un congé. Pourtant, je ne sors pas de chez moi, j'ai une activité physique quasi nulle et je dors très peu.

Faut dire qu'hier, j'ai eu un COPIL. COPIL pour comité de pilotage. On aurait pu appeler ça un MILO ou un TÉTAGE (j'aime bien cette dernière possibilité), mais non, c'est COPIL qu'on dit. On a aussi le CODIR pour comité de direction, mais pour y assister, il faut être directeur, et moi, avec toutes mes activités, je n'ai pas le temps d'être directeur, vous pensez bien.

Un COPIL, donc. D'habitude, quand on fait un COPIL, on se déguise en costume, on prend le train et le métro, on a chaud, ça donne mal à la tête. Ça se passe généralement dans un grand bureau sans fenêtres, parce que les grands bureaux sont souvent au milieu des tours, et c'est précisément au milieu des tours qu'on observe la plus faible concentration de fenêtres.

Torse nu devant le miroir de la salle de bain, j'enfile ma chemise juste avant la réunion. Je m'imagine faire ça dans le grand bureau sans fenêtres au milieu de la tour parisienne, devant les clients : excusez-moi, j'en ai pour une minute.

Ensuite se pose la question de l'angle de vue. Pas évident de faire entrer des relations purement professionnelles dans son chez soi, même si c'est à travers un cadre Zoom. Je pense me mettre devant la bibliothèque. Les interviews qu'on voit comme ça à la télé, ça vous pose un homme. Moi devant la collection de BD des filles... J'abandonne l'idée, j'opte plutôt pour un mur blanc, façon photo judiciaire. Les autres ont fait comme moi.

Repos ce matin, cet après-midi je me remets à bosser. Faudrait pas perdre les bonnes habitudes.

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