Confinements intimes #38
Cyrille Royer
9 décembre.
Je pense à un truc : la boîte nous a pas demandé de saisir notre satisfaction pour le mois de novembre.
Bon, vous allez me dire, la satisfaction, c'est quelque chose d'insaisissable, comment vous pouvez la saisir ? J'explique. C'est une saisie dématérialisée. Comme c'est une saisie virtuelle, on peut saisir l'insaisissable. L'informatique est d'une logique implacable.
Saisir sa satisfaction, c'est pour dire si on est content. C'est assez simple. Ça pourrait être des couleurs (des gommettes), ou des têtes de bonhommes qui se fendent la pêche ou qui font la gueule, mais pour nous, ce sont des notes de 1 à 5. 1 : très pas content, 2 : pas content, 3 : moyen content, 4 : content, 5 : très content (pour les fayots).
Moi, d'habitude, je mets 3 pour pas me mouiller (moyen content), 4 quand c'est les vacances.
Au premier confinement, j'avais mis 1 (très pas content donc). Mon chef m'avait appelé pour dire que ce n'était pas normal, qu'il avait des comptes à rendre et qu'on lui fixait des objectifs de gens contents dans son équipe, sinon il avait des problèmes. - Ah, désolé, je pensais qu'on était dans un espace de libre expression, et je voulais mentionner le fait que je n'étais pas, comment dire, super fan du télétravail, enfin, je n'avais pas compris qu'il fallait se fixer l'objectif d'une croissance à deux chiffres de la satisfaction.
Donc voilà. On vous demande comment ça va, mais prière de dire que c'est l'éclate : nous sommes condamnés au bonheur.
Au deuxième confinement, ils ne demandent plus, on se demande bien pourquoi.
Aujourd'hui, la playlist, c'était jazz, cumbia, soul et néo-classique (heureusement qu'il y a des tags sur les pistes que j'écoute).