Coupure d'effets

                           Coupure d’effets

            La dentelle de la petite culotte lui grattait le testicule gauche. Il tourna dans une ruelle et mis à profit la manœuvre pour vérifier que personne ne l’observait. Rassuré, il plongea la main dans sa jupe pour rectifier la situation.

            Un lampadaire bégayait, n’éclairant l’étroit passage pavé qu’en fin de phrase. Un rat renversa une poubelle en s’enfuyant à son approche. Il accéléra le pas.

Il se remémorait avec délice les derniers instants du meurtre, le regard incrédule de la victime dont le sang s’échappait de la plaie béante que son couteau de boucher lui avait ouverte en travers de la gorge. Attiré par la minijupe et la jarretière qui en dépassait, le beauf s’était gentiment laissé attirer dans le parking souterrain. C’est là qu’il avait frappé, lui, le tueur du samedi, l’assassin des crétins qui faisaient leurs courses en survêtement, le « saigneur » des banlieues glauques.

            Il était presque arrivé au bout de la venelle quand il avisa le premier des loubards. Ils étaient deux qui trônaient sur un banc fatigué, occupés à faire un sort à un six-pack de kro. Comme il s’y attendait, son passage fut marqué par des sifflements et autres « salut chérie, tu suces ! » Il ne répondit pas et continua sur sa lancée, il ne fallait pas traîner, le cadavre encore chaud allait certainement bientôt trouver acquéreur.

« L’a un beau p’tit cul, mais l’est pas bien polie la d’moiselle …

- Mais non, c’t’une timide …laisse faire l’artiste…Hé mignonne, puisque tu m’tournes déjà l’ dos, mets-toi en levrette, j’arrive ! »

            Il tenta d’accélérer encore la marche mais ses talons n’étaient pas précisément calibrés pour Paris-Roubaix. Il se tordit violemment la cheville et pour couronner le tout, son slip se logea traîtreusement dans la raie des fesses. C’est à ce moment qu’une violente poussée dans le dos le précipita au sol. L’un des deux lui attrapa les mains pendant que l’autre entreprenait de lui soulever la jupe. Il tenta vainement de se libérer de l’étreinte qui lui enserrait les poignets pendant qu’avec force grognements, le plus excité s’attachait à lui découvrir le fondement.

« Putain c’t’un mec ! » cria Laurel

« Déconne ! » beugla Hardy tout en lui lâchant les mains de surprise.

            Il réagit vite. Il saisit son sac à main tombé sous lui, l’ouvrit rapidement et en extirpa son long couteau de boucher. D’un revers, il trancha la carotide de l’un, tout en remontant son genou entre les jambes du second. Ce dernier s’écroula en grognant.

            C’est recroquevillé en position fœtale, les mains serrées entre ses cuisses, que le caïd des ruelles vit s’approcher de lui une grande blonde dont la jupe remontée laissait entrevoir une quéquette et deux balloches, un grand poignard sanglant à la main.

            Juste avant de l’égorger, le serial killer lui dit avec un grand sourire  : « Tu vois mon gars, t’auras appris un truc aujourd’hui : les voies du saigneur sont impénétrables ».