Créature de la nuit

lou-crashstone

Ses clefs tintèrent sur le buffet de l’entrée lorsqu’il les y déposa. La pièce baignait dans la lumière bleutée exaltée par l’écran de l’ordinateur en veille posé sur la table au milieu du salon. Lentement il fit glisser sa veste le long de ses épaules et observa de loin le clignotant signalant un nouveau message. Un frisson monta le long de son échine. Il fit quelques pas et du bout du doigt réactiva l’écran. Un message, un seul s’affichait au milieu de son écran.

Un sourire se dessina sur ses lèvres et il tâta ses poches à la recherche de son paquet. Ses doigts jouèrent avec son zippo avant que la flamme ne vienne lécher le bout de sa cigarette. Il prit place sur la chaise posée en face de l’écran et ses doigts se rapprochèrent du clavier, effleurant doucement les touches.
Il passa sa langue sur ses lèvres et ses doigts pianotèrent enfin sur les touches pour former un bref message qu’il s’empressa d’envoyer :


« Laisse ma main parcourir ta hanche et se glisser à l’intérieur de ta cuisse. Tu sais que j’aime ça quand tes cheveux balaient mon torse, oui, j’adorerais que tu me chevauche. »


Il se renversa sur sa chaise et laissa son regard vagabonder autour de lui. La pièce était en désordre, des affaires et des vêtements trainant un peu partout. A vrai dire, la seule chose de rangée était son immense collection de CD contre le mur.


Cela faisait deux semaines qu’il avait rencontré Iza. Du moins le nom qu’elle se donnait. Deux semaines à faire monter l’excitation à coup de messages déposés jour et nuit dans sa boite mail. Deux semaines à fantasmer, à imaginer ses doigts parcourir son corps en détail à la recherche d’un plaisir mutuel.

***

Un jour, alors qu’il venait tout juste d’emménager, en pianotant sur la table il avait senti sous ses doigts une profonde entaille. Il s’était penché et avait découvert une adresse mail gravée à même le bois sombre. Curieux de nature, il avait cependant longuement hésité avant de se décider sur un coup de tête et de répondre à cet appel muet. Un soir il avait envoyé un court message, les yeux rivés à l’écran, son cœur battant dans ses tempes.

« Qui êtes-vous ? »

La réponse lui était parvenue presque instantanément, comme si le destinataire attendait son message.

« Je m’appelle Iza. »


Ainsi avait débuté leur relation, à coup de longs messages lancés comme des bouteilles à la mer, qui trouvaient toujours leur destinataire. De fil en aiguille les messages étaient devenus de plus en plus personnels, de plus en plus brûlants. Une relation étrange s’était instaurée entre eux, comme un jeu du chat et de la souris, à deviner le premier les fantasmes de l’autre, ce qui le faisait jouir et gémir de plaisir. Il aimait son langage cru, cette envie qui le prenait de la baiser, de la prendre encore et encore, jusqu’à ce qu’elle en hurle de répit.

Sa souris parcourut la longue liste de leurs messages pour finir par en ouvrir un au hasard. Il commença à lire. Les mots qui s’affichaient sur son écran lui faisaient un effet dingue, la pensée que tout ceci finirait par se concrétiser, qu’elle serait finalement à lui le mettait dans un état d’excitation indescriptible. Sa main quitta doucement la souris pour descendre vers son bas ventre et ouvrir sa braguette. Son membre était gonflé du désir inassouvi qu’il avait envie de la prendre inlassablement. Ses doigts se glissèrent sur son sexe brûlant, commençant de lents mouvements de vas et viens  tandis qu’il relisait fébrilement leurs messages de la veille. Les yeux à demi fermés et ses dents qui mordaient sa lèvre inférieure témoignaient de son plaisir grandissant. Son torse se soulevait de plus en plus vite tandis qu’il pouvait sentir la sueur coller ses cheveux bouclés sur son front. Yvan rejeta la tête en arrière tandis que son corps se crispait dans un ultime soubresaut et il éjacula dans un long râle.

***

Deux semaines étaient encore passées ainsi, dans l’attente de leur première rencontre. C’était un sentiment étrange d’avoir l’impression de connaître les moindres recoins, les moindres pensées d’une personne sans jamais l’avoir touchée physiquement. Un soir, un seul message s’était affiché sur son écran, court, impératif.

« Demain, 22H, chez toi. »

Il s’était renversé brusquement en arrière sur son siège, le cœur battant à tout rompre. Il n’était plus tellement sûr de désirer le basculement dans la réalité de leur histoire. Il ne savait d’elle que son nom, que les descriptions qu’elle avait bien voulu lui donner d’elle. De plus, persistait la crainte de ne pas être à la hauteur, que tout soit trop réel justement.
Les heures avaient défilées comme dans un rêve, tantôt rapides, tantôt lentes. 22H était finalement arrivé et il avait ouvert sans un mot sa porte au coup de sonnette.

Elle était brune, les cheveux longs légèrement ondulés et une frange droite qui barrait son front. De taille moyenne, perchée sur des talons hauts ouverts sur le devant du pied, fermés par des lacets autour de la cheville. Elle avait de grands yeux bruns tirant sur le violet et un petit nez retroussé qui lui donnait un certain charme. Elle ouvrit lentement son manteau, découvrant la guêpière qui encerclait sa taille et retenait ses bas à l’aide de porte jarretelle. La dentelle noire brodée aux extrémités de rouge soulignait ses seins, les moulant avantageusement vers le haut, faisant ressortir leur rondeur. Yvan laissa glisser son regard sur elle, la cambrure de ses hanches accentuée par la hauteur de ses talons qui ne semblait attendre qu’une caresse pour se mouvoir.  Son regard descendit encore, caressa la culotte noire légèrement transparente et son petit nœud rouge qui promettait des merveilles de plaisir. Un sourire se dessina sur ses lèvres.
Iza fit glisser le manteau le long de ses épaules puis de ses bras pour le laisser tomber à terre. Elle fit un pas en avant tandis qu’il retenait son souffle devant tant de sensualité. Lentement elle fit glisser une main sur son torse, la laissant courir le long de son ventre puis se glisser sous sa chemise. Ses doigts remontèrent le long de ses côtes pour venir taquiner ses tétons qui se durcirent sous la caresse.
Il rejeta la tête en arrière, sentant son membre se gonfler sous l’excitation qu’il ressentait. Un petit sourire provoquant naquit sur ses lèvres tandis qu’elle ressortait sa main pour venir déboutonner un à un les boutons de sa chemise. Toujours passif, il la regarda écarter lentement les pans du vêtement et observer son torse fin mais musclé. La jeune femme se pencha en avant et sa bouche se posa sur la clavicule d’Yvan, sentant la peau frémir sous la caresse de ses lèvres. Elle descendit lentement, embrassant ses tétons, les aguichant de sa langue. Sa bouche continua à descendre lentement, effleurant la peau de son ventre. Elle se mit à genoux devant lui et ses mains commencèrent à déboucler sa ceinture tandis qu’elle embrassait son sexe dressé à travers le tissu. Elle défit le bouton et descendit sa braguette, faisant lentement glisser le pantalon le long de ses jambes.
Elle se mordit la lèvre devant son impatience et approcha sa bouche de son membre saillant. Son sexe était dressé à quelques centimètres de sa bouche et de petites gouttes de sperme coulaient de son gland. Un sourire pervers se dessina sur ses lèvres et elle tendit la langue pour lécher le bout de son sexe comme elle l’aurait fait d’une glace. Un gémissement s’échappa des lèvres d’Yvan et elle prit son membre entier en bouche, sans cesser de faire courir sa langue dessus. Elle entama des mouvements de vas et viens tandis que sa salive moussait sur les coins de ses lèvres, lubrifiant et accélérant la pénétration. Elle entoura son gland de sa langue tandis que sa main branlait de plus en plus vigoureusement son sexe depuis la base. Elle approfondit encore la pénétration et Yvan se crispa, se sentant venir, au bord de la délivrance.
 Il attrapa brusquement ses poignets pour l’écarter de lui, son désir pulsant à travers son corps tout entier.

Un sourire provoquant naquit sur les lèvres d’Iza tandis qu’elle reculait lentement vers le lit, entrainant Yvan à sa suite. Elle se colla contre son torse, lascive, venant lui murmurer dans le creux de l’oreille ;


-    Baise-moi


Celui-ci la fit tomber en arrière sur le lit et se plaça à califourchon sur elle, arrachant plus qu’il ne défaisait les agrafes de son corset. Ses seins lui apparurent enfin, leur pointe se dressant insolemment. Il pencha la tête en avant, les attrapant entre ses lèvres, les faisant rouler avec sa langue tandis qu’elle se cambrait contre lui. Ses mains descendirent le long de son corps pour se glisser à l’intérieur de sa cuisse. Ses doigts effleurèrent sa culotte trempée en effectuant une douce pression sur son clitoris. Un petit gémissement s’échappa des lèvres de la jeune femme et il continua ses petits mouvements circulaires, lui arrachant des gémissements de plus en plus rauques. Sa bouche remonta le long de son cou tandis qu’il faisait descendre le bout de tissu le long de ses cuisses puis de ses chevilles. Ses mains revinrent encercler brutalement ses poignets tandis que son bassin venait se coller au sien, la pénétrant vigoureusement. Ses mouvements en elle se firent de plus en plus rapide, tandis qu’il sentait le plaisir monter dans son bas-ventre et irradier dans tout son corps, lui procurant le sentiment de ne faire plus qu’un avec sa partenaire, de n’être plus qu’un corps en mouvement, incapable de dire ou le plaisir commençait et où il finissait. Yvan ferma les yeux, se laissant emporter par son désir et les mouvements de bassin de sa partenaire pour finir par jouir à l’unisson avec elle dans un long spasme.


Il s’abattit sur elle, son torse se soulevant au rythme de sa respiration saccadée.
Son cœur se calma doucement et il rouvrit les yeux, découvrant son visage à quelques centimètres du sien. Yvan referma les bras sur elle, se blottissant dans la chaleur de leurs corps.

***

Yvan se tourna dans son lit, constata le froid autour de lui. Il ouvrit les yeux.  
Elle avait disparu, créature de la nuit qui retourne à la nuit.

***

S’il ne s’était pas senti aussi fatigué, Yvan en aurait conclu à un rêve. Il laissa les souvenirs de la veille remonter doucement de sa mémoire, se mordant la lèvre inférieure en repensant à leurs ébats. Pas une trace ne subsistait d’elle, pas un mot.
Il prit une douche et s’habilla puis sortit de chez lui, dans le but d’aller flâner en ville. Alors qu’il était encore dans le couloir commun aux autres habitants de la résidence, il tomba sur sa voisine. Il la salua brièvement avant de se souvenir brusquement de l’adresse qu’il avait trouvée des mois auparavant gravée dans le bois.


Il fit demi-tour et revint vers elle.


-    Excusez-moi, vous savez qui habitait la avant ?


La femme lui sourit aimablement, intriguée par sa question.

-    Oui, je me souviens de la locataire précédente pour l’avoir croisée une ou deux fois, une jolie jeune femme brune !
-    Vous ne vous souvenez pas de son nom par hasard ?


Elle marqua un temps d’arrêt, avant d’afficher une grimace désolée.


-    Non désolée, mais il me semble que c’était un prénom assez court, qui finissait en «a».


Yvan eut l’impression de recevoir un coup de poing. Il battit en retraite, le souffle coupé.


-    D’accord merci beaucoup.


Il revint précipitamment chez lui et envoya un mail à Iza, complètement troublé.
Une réponse lui parvint automatiquement.


«Nous sommes désolés mais l’adresse que vous avez demandé n’existe pas. »

Yvan eut un bref sourire et éteignit son ordinateur.

Lou Alarest.

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