Danse
franekbalboa
Comme à mon habitude, je trouvais encore le moyen de m'isoler au milieu d'une soirée agitée. Nulle compagnie ne m'allait en ces moments où la solitude semblait tellement attirante. Je m'assis sur un talus au bord de l'eau. Cette eau qui avait cette faculté de m'apaiser, j'observais l'écoulement légèrement bruyant, l'oeil sans doute hagard, je savourais le moment quand surgit une personne qui s'extirpa des fourrés.
J'étais à la fois agacé et admiratif de la part de cette âme qui avait choisi la "solitude" mais qui parasitait ma tranquillité. Je vis que c'était une femme. Simple. Elle était habillée d'un bas de jogging et d'un pull épais. L'ensemble très confortable ne lui allait pas mal du tout. Son visage était noirci d'un maquillage qui avait coulé. Elle avait pleuré, en effet. Elle s'installa, dos à moi, j'étais caché dans l'ombre nocturne. Un rai de lumière semblait l'entourer, le réverbère du pont l'éclairait à peine, mais je voyais distinctement la scène. Des gens parlaient sur le pont en riant. Elle jeta un regard dégoûté en direction du bruit, et elle installa son téléphone dans un coin d'herbe, l'allumant sur un morceau de musique classique. Je ne sais pas ce qui me surprit le plus... Le fait de la voir danser, triste et belle, ou le fait que je connaissais parfaitement ce morceau... Elle commença son spectacle, qu'elle ne pensait dédié qu'à elle. Les pas s'enchaînaient merveilleusement. Elle était si gracieuse, un peu ronde mais parfaite dans ses déplacements, sa légèreté, sa douceur et ses pas. Le morceau continua, j'admirais désormais cette femme, cette danseuse pleine de grâce et de peine. Elle finit par s'arrêter, et s'assit à quelques mètres de moi.
Elle ne m'avait toujours pas remarqué, mais je me manifestais alors par un raclement de gorge. Elle se tourna, étonnée, me demandant ce que j'avais vu.
Je lui répondis honnêtement, elle fut à la fois surprise et gênée. J'ajoutais alors qu'elle avait été superbe, et m'excusais alors prétextant devoir retourner à la fête. Elle me répondit par un sourire, je me sentis alors obligé de rester. Je lui demandais ce qu'elle comptait faire, elle me répondit qu'elle souhaitait rester seule. Souriant, je lui demandais alors si je pouvais rester seul avec elle.
Elle resta silencieuse, attendit quelques secondes, puis elle se tourna et m'invita à m'asseoir à coté d'elle. J'acceptais l'invitation. Une fois installé, elle s'approcha d'un mouvement de hanche, et se colla à moi. Je passais un bras autour de ses épaules, elle posa sa tête sur la mienne. Et de son bras, elle me serra contre elle.
Nous restions ainsi, immobiles, silencieux. Nous profitions d'un moment innocent sous le seul jugement de l'eau. Je ne sais combien de temps dura cet instant... Je sais simplement que mon téléphone nous a interrompu, et que je l'ai fait taire, reprenant le savoureux moment que nous dégustions, silencieusement, calmement, doucement.
C'était beau.