De l'autre côté du voile

Steve Grau

Arthur est le témoin d'évènements tragiques dont il est le seul à se rappeler. Passé de l'autre côté du voile, il découvre que d'étranges personnes utilisent la magie pour contrôler les autres.

 

   Cheveux coiffés au gel, chemise près du corps, chaussures en cuir, Arthur était prêt pour sortir en boîte de nuit. Après cinq années d'études pour devenir ingénieur en aéronautique et les derniers examens passés, il avait bien mérité de s'amuser un peu. Il rangea son modeste appartement d'étudiant en centre-ville, au cas où il ne rentrerait pas seul ce soir.

Il rejoignit le club du Lux avec sa voiture d'occasion, qu'il avait payé grâce à son travail de livreur de pizzas qu'il faisait le soir après les cours. Ses amis ne l'avaient pas attendu pour faire la queue pour entrer, car il fallait bien compter une heure. James était celui qu'il connaissait depuis le plus longtemps, un vrai ami d'enfance. Blond avec des lunettes, ressemblant tantôt à un intellectuel, tantôt à un surfeur, c'était surtout quelqu'un qui aimait faire la fête.

            — Tu as pu te libérer plus tôt, finalement ? remarqua Arthur.

                — Oui, j'ai eu de la chance, répondit James.

            — Comment ça se passe ton nouveau travail ? Tu ne m'as même pas dit ce que c'était.

            — Oh, rien de bien passionnant. Le niveau d'exigence est très élevé.

            — Tu as de l'expérience dans l'hôtellerie depuis le temps. Moi, je n'aurais jamais pu faire ça comme boulot du soir après les études.

              — Quand on a de la famille dans le métier, ça aide.

              — Tu vas travailler là-bas tout l'été ?

              — Peut-être même plus, oui, répondit-il d'un ton évasif. Sinon, tu as des nouvelles des filles ?

              — Elles arrivent dans une heure.

              — Cela ne m'étonne pas !  

Ils firent la queue et payèrent l'entrée, profitant du tarif étudiant tant que c'était encore possible. La discothèque était en plein air et possédait deux bars et plein de tables où s'assoir. C'était le lieu de fête le plus prisé de la région et il y avait toujours du monde. Arrivés assez tôt, ils eurent la chance de trouver leurs places habituelles encore libres et s'y installèrent.

Les filles arrivèrent finalement et tout le monde se fit la bise, mise à part Laurine qui fondit dans les bras d'Arthur et l'embrassa passionnément. C'était une belle fille aux cheveux châtains et lisses, un sourire lumineux, habillé d'une robe bleue qui lui allait à ravir.

Elles partirent ensuite se commander à boire. Arthur regarda James d'un air gêné.

        — Oui, oui, elle ne m'a même pas dit bonjour, déclara James.

            — Ca doit être dur que je sorte avec ta sœur ?

            — Bizarre, je dirais.

            — Je n'ai pas envie que ça te gène.

         — Tant que vous ne faites pas plus que vous embrasser quand je suis là, ça me va !

Laurine avait fait ses études au conservatoire de musique de Paris et était revenue récemment. Cela faisait une semaine qu'il avait réussi à la séduire et il vivait le parfait amour avec elle. Il savait que tout était toujours plus beau au début, mais il ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle était la bonne.  

Elle le força à aller sur la piste de danse et il se résigna à suivre le groupe. Arthur avait été un lycéen timide et réservé et avait mis du temps à prendre confiance en lui. Maisavec elle, il arrivait même à être naturel.

Aujourd'hui, il avait un appartement, une voiture, une copine et un diplôme quasiment en poche. Il avait l'impression d'être sur un nuage et ne s'était jamais senti aussi heureux de sa vie.

Une heure plus tard, James les retrouva tous les deux sur le canapé en train de s'embrasser et s'assit devant eux.

            — Ça vous dit qu'on parte d'ici ?

            — Déjà ? s'étonna Laurine.

            — Si c'est par ce qu'on … commença Arthur.

           — Non, pas du tout. Je m'en fiche de ça. Je ne me sens pas bien, c'est tout.

            — Qu'est-ce qui t'arrive ? demanda Laurine.

            — Dis-nous ce qui se passe, continua Arthur.

         — Rien. Il y a juste des gens que je n'aime pas qui sont arrivés.

       — C'est une grande boîte, tu ne vas pas les croiser, répondit Arthur.

            — C'est ceux de ton quartier ? demanda Laurine.

            — Non, rien à voir. Laissez tomber, ce n'est pas grave.

Il partit et disparut dans la foule.

            — Il avait l'air bizarre, non ? demanda Arthur.

            — Oui, je ne l'ai jamais vue comme ça. Ça m'inquiète. Tu veux bien venir avec moi pour le retrouver.

            — Oui, allons-y.

Il y avait souvent des bagarres dans ce club et Arthur se demanda si son ami n'en risquait pas une avec eux. Ils le cherchèrent dans la foule, mais ne le trouvèrent nulle part. Ils revinrent finalement à leur table et le retrouvèrent avec leurs amis. Il ne voulut pas en dire plus et parla avec les autres comme si de rien n'était. Arthur incita Laurine à le laisser tranquille.

           — Ne t'en fait pas, il nous en parlera demain, lorsque l'on s'entendra mieux.

            — Oui, tu as sûrement raison.

La soirée continua et Laurine partit commander à boire. Arthur réalisa qu'elle mit beaucoup de temps à revenir et jeta un œil au bar. Elle était en train de parler à un homme, son verre à la main. Jeune, mais pas assez pour être un étudiant, il était assez musclé et avait un look ravageur. Arthur ne put s'empêcher de se sentir jaloux. Il voulut la rejoindre, mais se retint au dernier moment. C'était peut-être le genre de chose qu'il aurait fait avant, mais plus maintenant. Il serait passé pour le mec défendant maladroitement son territoire. Il ne voulait pas d'une telle relation avec elle et préféra lui faire confiance.

Il n'arrêta pas pour autant de jeter des coups d'œil attentifs dans sa direction. A son grand étonnement, ce fut James qui intervint. Il se plaça entre eux et parla à cet homme. Arthur eut l'impression que cela devenait tendu et décida d'intervenir. Il n'eut pas le temps d'approcher que son meilleur ami tomba par terre. Il accourut vers lui et se figea sur place en découvrant l'angle monstrueux que faisait sa tête. Laurine aussi semblait en état de choc, ne bougeant pas d'un centimètre. Il regarda ensuite l'autre homme, mais ne put voir son visage. Puis, ce fut le trou noir.

 

 

       Arthur se réveilla vers neuf heures du matin. Il avait encore ses habits d'hier soir et avait passé la nuit sur les draps. Il sonda sa mémoire et eut du mal à se rappeler ce qui s'était passé. Il se rappelait parfaitement bien du début de la soirée, mais n'avait aucun souvenir d'être rentré chez lui. C'était le premier trou noir de sa vie.

Il se leva et alla à la salle de bain. Il se regarda longuement dans la glace et ne comprit pas ce qui le dérangeait. Tout avait l'air normal. Les choses étaient en fait bien trop normales. Pas de mal de tête, pas de mal de ventre, aucunes cernes sous les yeux. Il n'avait absolument pas la gueule de bois, mais sa mémoire était entièrement brouillée.

Il prit une douche, puis se prépara un petit-déjeuner, essayant de se souvenir de ce qui avait bien pu se passer. Il s'apprêta à manger, lorsque son téléphone sonna. C'était un de ses copains d'hier soir.

            — Tu ne viens pas au poste de police ? demanda Xavier.

            — Pourquoi ?

           — Parce que … tu ne te rappelles pas ? Tu dois avoir une sacrée gueule de bois. Eh bien, il n'y a pas trente-six manières de dire ça. James est mort.

            — Quoi ?

          — James est mort. On se réunit au poste de police avec les autres. Tu veux venir ?

            — Oui, bien sûr.

Il raccrocha. La nouvelle lui fit l'effet d'un coup de fouet. Il se rappela la vue du cadavre de son ami, le coup brisé, au beau milieu de la piste de danse. Pourtant, rien après ça ne lui revint. Ni le visage du mec à qui il parlait, ni d'Anaïs.

Il se dépêcha de l'appeler pour lui demander comment elle allait. Il chercha son numéro sur son téléphone, mais ne le trouva pas. Son contact avait disparu. Surpris, il chercha leur discussion par SMS, qui ne semblait n'avoir jamais existé. De plus en plus chamboulé, il alluma son ordinateur et chercha son compte Facebook. Leur discussion aussi avait disparu.

Il s'énerva et tapa sur le bureau dans un accès de rage. Plus rien n'avait de sens. Il se dépêcha de sortir rejoindre ses amis au poste de police, espérant enfin y voir plus clair.

Habitant en centre-ville, il ne lui fallut que quelques minutes pour y arriver. Il se présenta à l'accueil et un policier l'emmena rejoindre ses amis. Ils étaient en présence de deux policiers qui prenaient leurs versions des faits. II aurait bien raconté à ses amis tous ses problèmes, mais il était trop essoufflé et on lui fit signe de s'assoir et d'écouter.

            — C'était stupide, on n'aurait jamais dû l'encourager, se plaignit Emily.

            — Il a fait son choix, répondit Xavier.

            — Il est mort à cause de nous !

         — C'était pour s'amuser ! On a appelé les secours, on a fait tout ce qu'on a pu !

            — Ce genre de choses arrive, répondit le policier pour les apaiser. Et vous, étiez-vous présents aussi ?

Tous les regards se tournèrent vers Arthur.

            — Je ne comprends pas, que s'est-il passé ?

          — Vous avez beaucoup bu hier soir ? demanda le policier.

            — Non.

            — C'est peut-être le choc, déclara la policière avec lui.

            — Il a escaladé le toit d'une bâtisse à la sortie du Lux, lui expliqua Emily les larmes aux yeux. II a chuté et …

Elle fut incapable de terminer sa phrase. Arthur était toujours aussi perdu.

            — A la sortie du Lux ?

        — Si tu ne te rappelles de rien, ça ne sert à rien d'être venue, commenta Xavier.

           — Je me rappelle qu'il parlait à un homme devant le bar, je suis venu pour vérifier que tout allait bien, puis j'ai vu son corps par terre, le cou brisé.

            — Mais de quoi est-ce que tu parles ? s'énerva Xavier.

            — Je sais très bien ce que j'ai vu ! s'emporta Arthur.

          — Donc, intervint le policier, vous affirmez avoir vue votre collègue mort « dans » la boîte de nuit.

            — C'était mon meilleur ami !

        — Dans ce cas, intervint la policière, il y aurait eu des centaines de témoins.

Arthur ne sut pas quoi dire. Il regarda ses collègues qui le regardaient comme s'il était devenu fou. Emily le fusillait du regard, comme s'il avait craché sur la mémoire de James. Arthur ne tint plus et s'en alla à toute vitesse.

 

 

            Les deux jours suivants furent difficiles, très difficiles. Il ne se rappelait de rien et le peu dont il se rappelait était apparemment faux. Il n'avait pas osé reprendre contact avec ses collègues, redoutant de passer encore pour un fou. De même, il n'avait pas tenté de recontacter sa copine. Il avait peur de s'être fâché avec elle cette fameuse nuit. Peut-être avait-elle fait en sorte qu'il ne puisse plus la contacter après une dispute. Il ne comprenait rien et avait préféré garder la tête enfouit sous le sable.

Il lui fallut cependant sortir pour l'enterrement de son meilleur ami. Il n'avait jamais participé à un enterrement et se tritura les méninges pour trouver la tenue la plus adaptée. C'était mieux que de penser à ce qui l'attendait.

Il retrouva ses collègues sur place et la famille de James qu'il connaissait. Il alla d'abord saluer la famille, étant donné que ceux-ci ne l'avaient pas vu se ridiculiser au poste de police. Puis, il aperçut la sœur de James.  

Anaïs avait une robe noire et un châle sur le visage. Il ne l'avait jamais vue aussi triste, mais étrangement, il la trouvait à la fois magnifique dans sa tristesse. Il alla vers elle d'un pas timide, essayant de capter son regard, comme pour avoir l'autorisation d'approcher. Elle le vit enfin et il la rejoignit.

            — Je suis vraiment désolé pour ton frère.

          — Merci. Vous vous connaissiez bien depuis ces dernières années.

            — Oui, je le considérais comme mon meilleur ami.

           — Moi, je n'étais pas là. J'ai raté ces dernières années avec lui. Tout ça pour étudier à Paris. On ne sait jamais quand le destin va vous enlever quelqu'un.

            —  Je suis vraiment désolé, Anaïs.

Elle le regarda d'un air gêné, comme si elle voulait qu'il parte. Il avait l'impression qu'elle le traitait comme un étranger.

            — Tu sais que s'il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour toi, tu peux me le demander. Tu peux tout me dire.

             — C'est très gentil, répondit-elle encore plus gênée.

          — Je n'ai que peu de souvenir de cette maudite soirée, j'en ai vraiment honte. Je sais qu'on ne s'est pas parlé depuis …

            — Mais de quoi est-ce que vous parlez ?

          — Enfin … je ne veux pas être intrusif … mais c'est normal que je sois là pour toi dans cette épreuve

            — Je ne vous ai rien demandé.

          — Pourquoi est-ce que tu me traites comme un étranger ? s'énerva-t-il. (Personne ne s'était retourné, mais il avait senti que les gens autour avaient entendu.) On ne se connaît pas depuis longtemps, je sais, mais on est proche, toi et moi.

Emily arriva et se rapprocha d'elle.

            — Non mais tu es un grand malade ! s'énerva Anaïs

           — Enfin, tout le monde le sait qu'on était ensemble cette semaine, ça n'a jamais été un secret !

            — Qu'est-ce que tu racontes ? intervint Emily.

            — Ah quoi vous jouez, toutes les deux ? continua Arthur.

           — Toi, à quoi tu joues ? intervint un homme à côté. Ça ne va pas d'emmerder ma nièce dans un moment pareil !

Plus personne ne parla et les regards se posèrent sur lui. Il sortit son téléphone

      — Je ne raconte pas d'histoires, elle et moi étions ensemble ! Regardez ces photos !

Il ouvrit sa galerie d'images et chercha les fameuses photos qu'ils avaient faites cette semaine au parc, au bowling, à leur première soirée entre amis … Elles n'étaient plus là. Il fouilla partout, mais ne trouva rien. Il comprit que celui qui avait effacé le numéro de téléphone de sa copine avait certainement effacé les photos d'eux ensemble. Il s'en voulut de ne pas avoir vérifié.

            — Elles étaient là ! bégaya-t-il.

Son oncle le frappa d'un coup de poing qui le renversa par terre.

         — Espèce de malade ! Comment oses-tu nous faire ta crise de paranoïa à l'enterrement de mon neveu ! Tu devrais avoir honte ! Vas-t'en avant que je n'appelle la police !

Les gens le bousculèrent et Xavier l'empoigna fermement pour le faire partir. Il fut littéralement jeté dehors et tomba à nouveau par terre. La lèvre en sang, le visage plein de terre et les cheveux décoiffés, il se releva comme un déjanté et courut loin de cette folie.

 

 

            Arthur observait l'enterrement de loin. Il se fichait bien d'avoir l'air d'un psychopathe, il était déterminé à comprendre ce qui se passait. Si ce n'était pour Anaïs, il le devait absolument pour son meilleur ami.

L'explication la plus plausible était qu'on lui ait versé une drogue dans son verre qui lui aurait fait perdre la mémoire. Pendant cette maudite soirée, Anaïs aurait décidé de cacher sa relation avec lui, pour une raison ou pour une autre. Elle aurait peut-être effacé toute donnée d'elle sur son téléphone, comme ces fameuses photos. Cependant, il avait la conviction au fond de lui que c'était bien plus compliqué que ça.

La cérémonie fut très émouvante, du peu qu'il put entendre. Les gens finirent par retourner à leur voiture pour rentrer chez eux. Anaïs marchait avec ses parents dans le parking, lorsqu'un motard s'arrêta à leur niveau. Ce n'était pas une moto banale, mais une Harley Davidson assez chère. Anaïs monta à l'arrière et ses parents continuèrent vers la voiture. Arthur se dépêcha de rentrer dans sa voiture garée plus loin et les prit en chasse.

C'était la voiture de ses parents, une vieille Toyota à trois portes, qu'il avait empruntée pour aller à l'enterrement. Il suivit la moto à bonne distance en faisant tout son possible pour rester hors de vue. Lorsqu'ils retournèrent en ville, ce fut bien plus difficile avec toute la circulation. La filature ne fut pas un franc succès et il finit par les perdre. Il tourna en rond dans la ville en priant pour retrouver cette maudite moto. Après vingt minutes sans succès, il décida de rentrer chez lui. Ce fut par le plus grand des hasards qu'il reconnut la moto garée devant un bar. Soulagé, il se gara plus loin et approcha discrètement.

La moto était posée au beau milieu du trottoir et les gens s'écartaient sans rien dire. Il s'approcha d'elle et l'examina. Le casque était posé sur le siège, sans personne pour surveiller, à son grand étonnement. Il ne se risqua pas à la toucher, ayant peur d'activer une alarme.

Il aperçut Anaïs assise à la terrasse d'un bar. Elle ne portait plus son châle et semblait bien plus élégante dans sa robe noire. L'homme qui l'avait emmené était dos à lui et il ne put voir son visage. Il reconnut tout de même l'allure d'un jeune homme assez classe.

Anaïs et lui buvaient des cocktails et semblaient s'amuser. Son attitude insouciante ne collait vraiment pas avec une femme qui venait d'assister à la mise en terre de son frère. Tout cela était décidément de plus en plus louche. Les choses devinrent encore plus horribles lorsqu'elle échangea un baiser avec lui. Pas un petit baiser de réconfort, mais un baiser long et sensuel. Cette vision lui déchira le cœur. Il voulut débarquer en hurlant et lui casser la figure, mais il se ravisa. Ce n'était pas en agissant de la sorte qu'il obtiendrait enfin des réponses.

Il décida de faire le tour du bar pour voir le visage de cet homme. C'était un jeune homme d'une trentaine d'années, assez charismatiques et bien habillé. Il n'avait plus l'âge de faire encore des études, si seulement il en avait fait dans sa vie. Il ressemblait au contraire à un fils de fortuné qui obtient tout ce qu'il veut. Il semblait si insouciant qu'il se décida à s'approcher encore. Il le reconnut enfin. C'était l'homme avec qui James avait parlé avant de se faire tuer au Lux.

 

 

            Arthur passa la journée à suivre l'assassin de son ami. Il était resté avec Anaïs, la trimballant de bars en salles de jeux à travers toute la ville. Leur parcours les mena finalement à ce fameux club où James était mort.

Arthur buvait une bière à une table du bar extérieur, ne prenant même plus la peine de se cacher. Il y avait bien trop de monde serré les uns contre les autres pour qu'on le reconnaisse. Il ne jetait même plus beaucoup de coup d'œil vers eux. Cet homme mystérieux faisait la fête avec tous ceux qui passaient et Anaïs était bien trop enivrée pour qu'il apprenne quoi que ce soit en les épiant.  

Il n'avait encore jamais eu l'alcool mauvais, mais il semblait qu'il y avait une première fois à tout. Non pas qu'il avait beaucoup bu, il n'aurait pas eu assez d'argent pour ça, mais la situation avait de quoi être déprimante. Il se demandait vraiment ce qu'il fichait ici et songea à partir.

Lorsque son portefeuille fut vide, il se décida à rentrer chez lui avant de puiser sur les économies de sa carte bancaire. Jouant des coudes parmi la foule, il sursauta lorsqu'une explosion assourdissante retentit derrière lui. La foudre venait de frapper au milieu de la piste de danse. Il y eut plusieurs explosions électriques en direction de la table d'Anaïs et il s'y précipita pour vérifier qu'elle allait bien.

Il dut se frayer un chemin à travers la marée de gens dansant les uns contre les autres. Il ne comprenait pas pourquoi personne ne se préoccupait de l'éclair qui avait éclaté au beau milieu de foule. Aucune panique, aucun amusement, les gens continuaient de danser comme avant. Mais au point où il en était, la réaction des gens ne l'étonnait plus.

Les tables VIP étaient légèrement surélevées par rapport aux autres, entourées de faux rochers et surplombées de cactus. Des flammes jaillirent des mains d'un homme et s'élancèrent vers les tables VIP. Elles brulèrent une partie des cactus, puis s'envolèrent dans le ciel comme si elles rebondissaient dessus. Le jeune assassin sur un rocher reçut un éclair du ciel, mais ne tomba pas pour autant. Les mains brillantes d'électricité, il tira un éclair sur l'homme qui lui avait jeté des flammes. L'éclair le fit exploser comme un pétard et d'innombrables morceaux de chair atterrirent sur les danseurs tout autour.

Arthur eut l'impression d'assister à une scène irréelle. Les lumières des projecteurs, la musique assourdissante, les cactus en flammes, les débris, les appareils détruits crachant des étincelles, les morceaux de chair trainant par terre et surtout, les gens, dansant comme si de rien n'était, le visage couvert de sang. Ils étaient comme hypnotisés, ne voyant rien de ce qui se passait.

II marcha parmi ces gens aveugles avec l'envie de les secouer en leur hurlant de se réveiller. Puis, il aperçut une file en particulier qui semblait réagir différemment. Elle était recouverte de sang jusque dans les yeux. Pourtant, elle restait simplement là sans rien faire, comme en état de choc.

            — Vous allez bien ?

Pas de réponse.

            — Vous avez vu les éclairs ? Vous avez vu cette personne se faire tuer ? Vous m'entendez ?

Toujours pas de réponse. Il se décida à lui donner une gifle, espérant n'importe quelle réaction. La fille se cacha le visage dans les mains, comme une petite fille apeurée, poussant des petits cris incompréhensibles.

Puis, tout le monde se figea et la musique s'éteignit. Arthur fut si effrayé qu'il fit semblant de ne plus bouger à son tour. Seuls les projecteurs continuaient de bouger, illuminant par intermittence cette marée de corps immobile. Il regarda autour de lui et découvrit que son voisin de gauche avait un os qui sortait du bras. Pourtant, il était aussi immobile qu'une statue, sans la moindre expression de douleur sur son visage.

Un vieil homme monta sur le plus haut des rochers et Arthur l'observa du coin de l'œil. Il claqua des doigts et les cactus cessèrent de bruler. Il agita les mains et les débris s'élevèrent dans les airs. Les projecteurs, les enceintes, les morceaux de murs, tout ce qui avait été détruit se répara comme par magie. Ce fut ensuite au tour du sang de s'élever dans les airs. La fille en face de lui fut à nouveau propre, jusqu'à même sa robe qui n'arborait plus la moindre tache.

Le vieil homme descendit au niveau des gens et les inspecta. Il s'arrêta devant le jeune homme blessé au bras.

            — Toi, répond en toute franchise. Avec qui as-tu envie de te battre ici ?

            — Avec lui, répondit-il en montrant un autre du doigt. Il m'a bousculé et n'arrête pas de me regarder de travers.

Le vieil homme l'amena devant lui.

          — Toi, tu l'as provoqué pour l'inciter à frapper en premier. Vous étiez en train de vous battre, lorsqu'il est tombé par terre et c'est cassé le bras. Et puis, avec l'alcool, vous avez continué.

Les deux hommes se firent face comme des pantins, les bras le long du corps. Le vieil homme s'éloigna pour inspecter d'autres personnes. Arthur n'en revenait pas de ce qui se passait. Il s'inquiéta pour Anaïs et décida de s'approcher. Il fit plusieurs pas de côté, priant pour que le vieil homme ne le voie pas.

Hélas, le jeune assassin monta sur les rochers, observant la foule immobile. Arthur le foudroya du regard, se fichant qu'il le remarque. Heureusement, celui-ci défit sa braguette et urina sur les gens.

       — Ca ne va pas ! hurla le vieil homme. Je viens de les nettoyer.

            — Je ne vois pas en quoi des gens aspergés par un peu de pisse seraient anormal dans une boîte de nuit.  

Le vieil homme répondit quelque chose d'inaudible, puis claqua des doigts d'un air las. Les gens se remirent subitement à danser et la musique se ralluma. Les deux hommes qui se faisaient face comme des pantins se mirent à se battre comme des enragés. Cette fois, les gens regardaient la bataille, encourageant leurs favoris. Enfin de vraies réactions de leurs parts. Les vigiles arrivèrent ensuite et les emmenèrent loin d'ici.

La fille qu'il avait essayé de consoler était toute propre, dansant avec enthousiasme dans la foule. Arthur décida de continuer vers les tables VIP pour atteindre Anaïs, profitant à nouveau de pouvoir se fondre dans la masse.

Il escalada les faux rochers par-derrière et se cacha derrière les cactus, qui n'avaient plus beaucoup de feuille. Le jeune assassin était au téléphone et il décida d'atteindre Anaïs. D'où il était, il pouvait lui toucher le bras sans être vue. Peu importe qu'elle le reconnaisse ou pas, il devait absolument l'éloigner de toute cette folie. Il la tira par le bras, mais elle se retourna à peine. Il aperçut son regard vide plongé vers ses chaussures. Elle était figée comme les autres plus tôt. Un robot, un pantin, un légume. Voir cette fille, habituellement si vivante, figée de la sorte fut presque plus horrible que le reste.

Le jeune assassin raccrocha son téléphone et claqua des doigts. Anaïs reprit vie comme une poupée et il tourna son menton vers lui.

            — Ne suis-je pas le plus fort de tous les sorciers ?

            — Oui, le plus fort ! sourit-elle.

           — Je sais que tu ne comprends rien à ce que tu dis, mais ça n'en reste pas moins vrai.

Il l'embrassa passionnément. Arthur fut dégouté par ce que cet homme lui faisait subir. Il savait enfin qu'elle n'était pour rien dans cette histoire. Ce salopard avait tué James et avait hypnotisé tout le monde pour oublier. Il s'était entiché de sa copine et l'avait hypnotisé elle aussi. Arthur bouillait de rage et aurait voulu lui sauter dessus pour l'étrangler de ses mains, mais cela aurait été inutile. Que pouvait-il faire face à un dieu capable de cracher des éclairs.

Il la déshabilla brutalement, prêt à coucher avec elle devant tout le monde. Il le pouvait bien après tout, personne ne le verrait même s'il le faisait au milieu de la piste de danse. Impuissant, Arthur décida de partir, ne pouvant supporter cela plus longtemps.

Il alla aux toilettes et se passa de l'eau sur le visage. Pris d'un accès de rage, il frappa le miroir jusqu'à le briser et hurla de tous ses poumons. Il s'enferma ensuite dans une cabine pour pleurer en paix.

Revenu au calme et loin de la musique, des bribes de mémoire revinrent à la surface. Cette expérience lui rappela ce qui s'était passé la fameuse nuit où James s'était fait tuer.

 

 

      Anaïs rigolait avec un jeune homme suffisamment séduisant pour qu'il se sente jaloux, mais c'était finalement son frère James qui s'était interposé. Lorsqu'il approcha, James était étendu par terre, le cou brisé. Il ne ressentit presque rien et fut incapable de penser quoi que ce soit. Il resta simplement là, immobile à côté d'Anaïs qui en faisait autant.  

            — Logan ! Qu'est-ce que tu as fait ?

Le vieil homme du nom d'Henry arriva à leur niveau d'un pas énervé et claqua des doigts. La musique s'arrêta et les gens se figèrent.   

            — Tu étais obligé de faire ça ? ralla Logan.

           — Cette foule me fatigue et cette musique me tape sur les nerfs ! Pourquoi l'as-tu tué ?

            — Ce petit con pensait pouvoir me donner des ordres ! Ce n'est pas parce que tu travaillais pour moi et que tu connaissais l'existence de la magie que tu avais la moindre importance, dit-il au cadavre. Tu étais mon serviteur, tu m'appartenais, et maintenant ce sera au tour de ta sœur.

Il la prit par la taille et elle le regarda à peine, encore figée.

        — Et alors ? s'exaspéra Henry. Tu aurais pu lui effacer la mémoire. Tu ne peux pas tuer tous les homos sapiens que tu croises !

           — Ne me dis pas ce que je peux faire ou non ! J'ai tous les droits, je peux faire tout ce que je veux ! Tu veux que je te renvoie en petits morceaux à mes parents ?

        — Non, inutile d'en arriver là, répondit-il en serrant les dents.

Logan posa son regard sur Arthur.

            — Attends, qui c'est celui-là ? Poupée, regarde-moi ! Dis-moi la vérité. C'est qui ce pauvre con ?

           — C'est Arthur, répondit Anaïs, on sort ensemble depuis une semaine, c'est le vrai cou de …

       — Quoi ? On vient à peine de se rencontrer et tu me trompes déjà !

            — Elle l'a connu avant toi, souligna Henry.

         — Elle m'a parlé ! Elle m'a souri ! Elle avait clairement envie de moi alors qu'elle était avec lui. Quelle salope !

            — Si tu le dis.

            — Bon, il est temps de se débarrasser de lui aussi.

          — Logan, si tu me permets, je suis là pour t'éviter ce genre de problème. Tuer trop d'homos sapiens, ça attire l'attention.

            — Et comment vas-tu me débarrasser de lui, hein ?

       — Ils se connaissent depuis à peine une semaine, leur relation sera facile à effacer. Peu de photos, peu de données informatiques, peu de souvenirs.

           — Ok, si ça peut te faire plaisir, soupira-t-il.

Logan claqua des doigts et le monde bougea à nouveau. Il partit avec Anaïs qui n'avait pas remarqué la mort magique de son frère. Henry réalisa ses sortilèges. Arthur porta le cadavre de James  pendant qu'Henry hypnotisait ses collègues. Il le déposa en bas d'un bâtiment et ils réagirent tous comme s'il venait de tomber.

 

 

        Le lendemain matin, assit dans sa voiture, Arthur observait le manoir de loin. Logan avait laissé Anaïs pour rentrer chez lui et il l'avait suivi. Il se triturait les méninges pour savoir comment entrer. En l'attaquant pendant son sommeil, il avait peut-être une chance de le tuer. C'était à la condition bien sûr que ces êtres aient besoin de dormir.

Jamais dans sa vie il n'aurait cru un jour qu'il essayerait de tuer quelqu'un. Il n'avait jamais fait de mal à personne et n'avait jamais enfreint la loi. D'un autre côté, personne n'avait encore assassiné son meilleur ami et abusé de sa copine non plus. Renoncer et oublier étaient hors de question. Le monde était aveugle et il avait la chance d'être passé de l'autre côté du voile. La magie était réelle et même s'il ne comprenait pas comment c'était possible, il se devait d'agir.

Un employé de maison sortit par un petit portail avec de grosses poubelles. C'était un jeune homme avec une tenue impeccable, un veston noir sur une chemise blanche et une cravate rouge. James avait dû occuper cet emploi sans lui dire, l'amenant à rencontrer cet horrible Logan. Arthur décida de tenter sa chance et l'intercepta au portail avant qu'il ne rentre à nouveau.

            — Excusez-moi ? Vous travaillez ici ?

            — Oui.

            — Qui est-ce qui habite là ?

          — Ca ne vous regarde pas, répondit-il d'un air désemparé.

Il s'apprêta à fermer le portail, mais Arthur le bloqua avec sa main.

            — Combien pour entrer ?

Sa tentative maladroite de le soudoyer n'eut aucun effet. L'employé essaya de refermer la porte, mais Arthur le fit sortir dehors. Il lui donna plusieurs coups de poing et les deux hommes roulèrent par terre dans une lutte chaotique. Arthur finit par l'étrangler avec sa cravate jusqu'à ce qu'il devienne aussi rouge qu'elle. Lorsqu'il relâcha sa prise, l'employé ne bougeait plus. Paniqué, il prit son pouls et fut soulagé de voir qu'il respirait.

Il traina son corps jusqu'au locale à poubelles et le déshabilla pour se faire passer pour lui. Les vêtements lui allaient à peu près, mais il n'était vraiment pas habitué à une telle tenue.

« Allez, si James a pu bouger là-dedans, tu le peux aussi », se dit-il.

Il entra par le portail et le verrouilla avec le trousseau de clefs qui était dans ses poches. Il traversa le jardin rempli de plantes bien taillées et entra par une porte-fenêtre. Le manoir était grand et presque aussi décoré que Versailles. Tout était en or à l'exception des statuettes et tableaux.

Le plus étrange était qu'il n'y avait pas la moindre caméra. Il se demanda s'il n'y avait pas quelque chose de magique pour protéger des intrusions. Marchant en territoire inconnu, il essaya de ne toucher à rien et d'être le plus discret possible, tout en évitant d'avoir l'air louche. La sueur inondait sa chemise et il avait l'impression qu'il allait suffoquer tant il manquait d'air.

            — Hey, toi !

Arthur se retourna à peine. S'il courait, on l'arrêterait en un claquement de doigts. Il laissa l'homme venir à son niveau, prêt à accepter son destin.

            — Alors, c'est toi le nouveau ?

Il cacha son soulagement et hocha la tête. Cet homme de la cinquantaine, lui aussi en costard et cravate rouge, n'était certainement pas un sorcier.

            — Je suis Monsieur Lombard. Pourquoi n'es-tu pas venu dans mon bureau ?

            — Il fallait que je sorte les poubelles, bégaya-t-il.

            — Ce n'est pas parce que c'est ton premier jour qu'il faut que tu laisses tout le monde te refiler ses corvées. A chaque fois c'est pareil, soupira-t-il. Suis-moi.

Il le suivit dans les couloirs.

            — J'espère que tu as de l'expérience parce que le niveau d'exigence est très élevé ici. Tu te demandes surement pourquoi un sorcier a besoin de servants ? En effet, il pourrait simplement claquer des doigts, mais nous sommes là pour qu'il n'ait pas à le faire. Nous avons l'honneur de lui apporter tout le confort possible.

Il s'arrêta devant un tableau.

       — C'est grâce à son espèce que la nôtre profite d'un semblant de civilisation. Prends ce tableau par exemple. Nom, détruit lors de la Seconde Guerre mondiale, réparé par la grand-tante de notre maitre et gardé dans la famille loin des homos sapiens. N'est-il pas magnifique ?

              — Oui.

            — C'est tout ce que tu trouves à dire ? Tu es inondé de sueur, tous les nouveaux sont toujours aussi impressionnés au début, ralla-t-il.

              — Pouvez-vous me parler du maitre ?

            — C'est un jeune homme à peine plus âgé que toi, mais n'essaie pas de fraterniser avec lui. Ton prédécesseur a eu le malheur de fréquenter la même discothèque que lui et il l'a tué. Je ne comprends pas pourquoi ils ont encore envoyé quelqu'un de si jeune, ralla-t-il.  

Arthur eut la gorge nouée à la mention de son ami décédé. Une autre employée arriva vers eux, le visage ridé et sévère.

            — Ah, le nouveau ! Son tatouage a été vérifié ? demanda Milène.

            — Non, pas encore, répondit Monsieur Lombard.

            — Allons, pressons. S'il y a une erreur sur le tatouage de son appartenance et que le maitre le réalise …

            — Le maitre dort, la coupa Lombard.

Il défit sa manche et montra un tatouage rond renfermant un logo sur son avant-bras, puis incita Arthur à faire de même.

            — Désolé, on ne me l'a pas encore fait.

          — « L'Ordre des sorciers » ne t'a pas fait de tatouage pour te surveiller ? demanda la femme d'un ton sceptique.

Lombard lui prit le bras de force et défit sa manche. Il lui défit l'autre, mais il n'y avait rien.

            — Ce n'est pas un serviteur ! cria la femme. Intrusion !

Arthur partit en courant et Lombard le poursuivit en entrainant d'autres servants avec lui. Il parcourut les couloirs avec ses poursuivants aux fesses et reprit la même porte-fenêtre qu'il avait prise.

Lombard s'arrêta dans la rue, essoufflé, laissant ses collègues plus jeunes le pourchasser. Il fut furieux de les revoir revenir sans personne. Il ordonna à tous les serviteurs de se réunir dans le salon pour essayer de comprendre ce qui s'était passé.

            — C'est moi qui ai accueilli le nouveau, déclara un gros homme moustachu, et il avait son tatouage. Je l'ai envoyé jeter les poubelles.

         — C'est là que cet imposteur a dû prendre ses vêtements ! s'exclama Monsieur Lombard. Sophie, va voir s'il y est.

Elle se dépêcha d'y aller.

            — On devrait prévenir le maitre, continua Lombard.

            — On ne va pas le réveiller ! s'indigna Milène

          — Il a fait la fête toute la nuit, il va encore pioncer jusqu'à l'après-midi !

     — Monsieur Lombard ! cria-t-elle de façon indignée. Surveillez vos paroles, s'il voit comment vous parlez de lui …

           — Il faut appeler le sorcier qui protège le maitre, alors, la coupa Lombard.

            — On peut toujours essayer, s'il ne dort pas lui aussi.

Lombard l'appela sur son téléphone et les serviteurs le regardèrent avec inquiétude, ne faisant plus un bruit. Lombard s'éloigna et personne n'entendit rien de leur discussion. Il revint après avoir raccroché.

          — Il a dit qu'il ne fallait pas réveiller le maitre pour des histoires d'intrusions humaines aussi banales. La police magique va s'occuper de le pourchasser. Continuez de faire votre travail, nous devons être irréprochables vu ce qui s'est passé aujourd'hui.

Les serviteurs s'agitèrent dans tous les sens comme si leur vie en dépendait. Monsieur Lombard resta sur place, priant pour que sa décision ne soit pas contestée par le maitre.

 

 

            Arthur marchait dans la ville en regardant derrière son épaule. Après le fiasco de son intrusion ratée, il savait qu'on allait le pourchasser. Retourner chez lui était trop dangereux et il continua de marcher sans savoir où aller.

Il s'en voulait d'avoir tenté sa chance contre ce sorcier. Il se demandait bien comment il avait pu croire que lui, un homme lambda ne sachant pas se battre, aurait eu la moindre chance face à un tel dieu. Il ne connaissait rien sur la magie et avançait complètement à l'aveugle. Il ne savait même pas comment ils allaient le traquer, maintenant. Les humains utilisaient les caméras de surveillance et la localisation des téléphones, mais il n'avait pas la moindre idée de comment les sorciers pouvaient bien faire.

Il continua de marcher en espérant trouver une idée, lorsque les gens en face de lui s'arrêtèrent. Il se figea aussi. La rue longeait le grillage d'un parc. Il regarda discrètement autour de lui à la recherche d'un sorcier. A sa grande surprise, les gens ne semblaient pas figés, ils le fixaient. Les passants devant lui, le couple de vieux sur le banc, l'homme dans son camion pizzas, même les automobilistes dans leurs voitures. Cela devint encore plus terrifiant lorsqu'ils marchèrent lentement vers lui sans rien dire.

            — Que se passe-t-il ?

Aucune réponse. Les gens abandonnaient même leurs voitures pour se diriger vers lui.

            — Ce n'est pas bon signe tout ça.

Il chercha la présence d'un sorcier, dans la rue ou sur les toits, la moindre personne qui paraissait normale, mais il n'y en avait aucun. Les gens devinrent bien trop proches et il recula vers le grillage du parc. Ils accélérèrent le pas en tendant les bras vers lui et il se mit à courir le long du grillage en jouant des coudes. Ils lui coururent après comme des enragés et il accéléra le plus vite possible. Un homme en fauteuil roulant essaya de lui barrer la route, mais il réussit à l'esquiver.

D'autres personnes devant lui arrivèrent et il tourna pour entrer dans le parc. Il passa à côté des jeux et toboggans pour enfants, tandis que ses poursuivants hurlaient après lui.

            — Il est là !

            — C'est lui !

            — Attrapez-le !  

Les mères surveillant leurs enfants regardèrent cette foule d'un air inquiet. Arthur se dirigea vers elles, rassuré de voir des gens réagir normalement. Elles se levèrent subitement et s'élancèrent vers lui à leur tour. Même les enfants descendirent de leurs jeux pour lui courir après. Horrifié, il changea de direction et sprinta encore plus vite. 

Il dut passer à travers la pelouse pour éviter les promeneurs devant lui qui le pourchassaient dès qu'ils le voyaient. Un groupe de gens en pleine séance de méditation ouvrirent les yeux à son approche. Il fut obligé de passer à travers eux et ne leur laissa pas le temps de se relever pour disparaitre.

A la sortie du parc, un groupe de vélo s'arrêta devant lui, essayant de faire barrage. Il poussa l'un d'entre eux et lui vola son vélo. Il monta dessus aussi vite qu'il put et pédala comme un fou furieux. Des mains s'accrochèrent à lui, mais ses poursuivants tombèrent et se firent piétiner par leurs collègues.  

Arthur accéléra sur la route. Partout où il passait, les passants se retournaient et lui courraient après en criant. Il avait l'impression d'être dans un cauchemar et continuait de pédaler sans savoir où aller. Une voiture essaya de l'écraser et il l'esquiva de justesse, mais fut obligé de rentrer dans un centre commercial. Les gens y étaient encore plus nombreux et il ne put les esquiver éternellement. Il tomba de son vélo et entra dans un grand magasin de vêtement.

La meute enragée entra après lui et le chercha partout. Arthur se cacha entre plusieurs cintres dans un rayon désert. Il entendait les gens se séparer et le chercher. Pris au piège, il essaya de réfléchir. Il prit un teeshirt et le jeta vers le portique d'entrée. Celui-ci se mit à biper et tout le monde courut vers la sortie en pensant qu'il s'était échappé. Personne ne resta à fouiller et il en profita pour chercher une deuxième sortie. Il n'y en avait aucune.

Dans la galerie, les gens cherchaient avec de moins en moins d'énergie. Ils finirent par s'en aller comme si de rien était. Certains retournèrent dans le magasin et reprirent même leurs courses.

Arthur ne comprit pas comment les sorciers avaient pu le perdre. Avec les caméras de surveillance, il était difficile de le rater. Il n'y avait donc personne d'intelligent qui le pourchassait, seulement ces sortes de zombies hypnotisés. Les sorciers avaient peut-être hypnotisé la ville entière pour le pourchasser s'ils le voyaient. Il lui fallait donc quitter la ville sans être vu.

Il passa dans les rayons en jouant à cache-cache avec les gens qui faisaient tranquillement leurs courses. La scène aurait pu être ridicule dans d'autres circonstances. Il se demanda une nouvelle fois s'il n'était pas devenu complètement fou, victime d'hallucinations, courant dans la ville comme un dératé sans aucun poursuivant. Non, aussi fou que cela puisse paraître, il savait ce qu'il avait vu.

Il prit un sweat à capuche et déchira l'anti-vol. Le visage rivé vers le sol, il sortit du magasin en évitant les gens le plus possible. Personne ne le poursuivit. C'était donc bien à la vue de son visage que les gens devenaient complètement fous.

Il marcha pendant une heure pour sortir de la ville, toujours sur le qui-vive. Ses parents habitaient en dehors de la ville et il espérait que cette espèce de sortilège ne fonctionnerait pas jusque-là. Sinon, sa dernière option était de fuir à l'autre bout du monde et il n'était pas prêt pour ça. 

Il arriva devant la maison de ses parents et ne s'était jamais senti aussi anxieux. Il ouvrit avec ses clefs et alla dans le salon. Sa mère regardait la télé. Terrifié à l'idée qu'elle essaie elle aussi de l'attaquer, prêt à prendre ses jambes à son cou, il lui adressa la parole.

            — Maman ?

Elle se retourna d'un air surpris. Pendant quelques secondes, elle ne dit rien, et il retint sa respiration.

            — Arthur ? Qu'est-ce que tu fais ici ?

Il lâcha un soulagement. Content de revoir enfin quelqu'un de familier, il fondit dans ses bras. Elle le sera très fort contre lui sans rien dire. Un objet lourd heurta soudainement sa nuque et elle le retint pour le poser sur le canapé. A moitié sonné, il découvrit son père avec une poêle dans la main.

            — Pas vous, murmura-t-il.

Son père l'empêcha de bouger et sa mère tapa un numéro sur son téléphone.

            — Je vous en prie, réveillez-vous ! Je suis votre fils !

Quelqu'un répondit à sa mère.

            — 26 rue Arnaud Bernard, déclara-t-elle.

Désespéré, il essaya de se relever, mais son père l'en empêcha. Sa mère le rejoignit et ils restèrent sur lui, comme des animaux défendant leurs proies et attendant. Il supplia sa mère du regard et celle-ci perdit enfin son regard vide.

            — Allons, c'est pour ton bien. 

Deux hommes en costard noir arrivèrent ensuite et l'assommèrent.

 

 

           Arthur se réveilla avec les mains menottées aux bras d'un fauteuil, sa tête maintenue par une sangle l'empêchant de se retourner. Il se trouvait dans une salle sans fenêtre, un unique miroir sur sa droite, la lumière des néons au-dessus de lui l'éblouissant un peu. Il entendait deux voix derrière lui qui discutaient entre elles. Il se sentait un peu dans les vapes et avait l'impression qu'on touchait à sa tête pour y faire Dieu ne sait quoi.

            — Ca ne fonctionne pas.

            — Ce n'est pas naturel, j'espère ?

            — Non, quelqu'un est responsable.

            — On peut remettre en place le sortilège, alors ?

        — Oui, mais ça va prendre du temps. D'abord, on doit attraper celui qui a levé le sortilège sans l'accord de personne.

Ils s'assirent à la table devant lui et il ne se sentit plus dans les vapes. Il les reconnut, c'était les deux mêmes hommes en costard noir qui l'avait arrêté chez ses parents. L'un était un Asiatique chauve tandis que l'autre était un Hispanique avec une barbe.  

        — Ecoute-moi bien, l'homo sapiens. Je suis Wong et lui c'est Hernandez, on est des inspecteurs de « l'Ordre des sorciers ». Tu es entré par effraction dans la maison d'un sorcier et pas n'importe lequel. Tu risques très gros, on peut te faire des choses que tu ne pourrais même pas imaginer. Alors je te conseille de nous dire toute la vérité ou ça va mal se passer pour toi.

            — On le saura, si tu mens, précisa Hernandez.

            — J'ai compris, bégaya Arthur.

            — Ça remonte à quand tes souvenirs de la magie ?

Il fut incapable de dire combien de jours s'étaient écoulés tant cela avait paru long.

            — Samedi soir. J'ai vu mon ami mourir, mais personne ne l'a vu.

            — Tu ne peux pas avoir vu la magie de toi-même, gronda Wong. Quelqu'un a dû lever le sortilège « d'agnosie magique » avec lequel tous les homos sapiens naissent.

            — Oui, il y a quelqu'un qui a lavé le cerveau de mes amis pour maquiller un accident. Il m'a hypnotisé pour me faire porter son cadavre, je m'en rappelle.

            — C'est à ce moment-là qu'il a dû l'ensorceler, comprit Hernandez. Ce mec, c'est qui ?

Arthur sentit un frisson glacial lui parcourir le corps. Il avait une idée et elle impliquait de leur mentir. Il prit le risque.

          — Il s'appelle Logan. J'étais avec ma copine et il la voulait pour lui. Il m'a dit qu'il voulait que je me rappelle que c'était lui qui m'avait tout pris et que je devrais vivre en sachant que je ne pourrais jamais rien faire contre lui.

            — Alors ça, c'est une grave infraction ! ragea Wong. Ça va à l'encontre même de nos lois les plus sacrés !

            — Logan, ce n'est pas le fils de riche qui a déjà eu des problèmes avec la justice ? demanda Hernandez.

               — Logan, oui, naît sous le nom de François Chevallier. Il avait tué plus d'homos sapiens qu'il ne le pouvait et il s'est déjà bagarré contre d'autres sorciers.

            — Je l'ai vu tuer un autre sorcier au Lux ! intervint Arthur. Il y avait des éclairs et des flammes et …

Wong leva un doigt et plus aucun son ne sortit de sa bouche.

            — T'as intérêt à dire la vérité, l'homo sapiens, ou on le saura très vite et tu seras bien dans la merde. Allez Hernandez, on va aller dans ce club tant qu'il fait jour et vérifier tout ça.

            — On devrait peut-être aller chercher le jeune Logan, histoire de l'interroger un peu ?

            — T'as raison, un petit séjour chez nous, ça ne fera pas de mal à un fils de riche comme lui.

Ils sortirent de la salle en traversant le miroir sur sa droite. Au point où il en était, cela ne l'étonnait même plus. Il était à la fois paniqué et soulagé. Il ne pouvait rien contre celui qui avait tué son meilleur ami et abusait de sa copine, mais eux, ils pouvaient lui causer des problèmes.

 

 

            Les servants du manoir étaient alignés dans le salon, la sueur trahissant leur peur. Le maitre de maison était réveillé et il n'appréciait en rien les explications du serviteur Lombard.

            — Donc un homme est entré dans ma demeure et vous n'avez pas jugé bon de me prévenir ! s'énerva Logan.

            — Je ne voulais pas vous réveiller pour …

            — Depuis quand n'avez-vous pas le droit de me réveiller pour un problème de sécurité ? Si la maison était en flamme, vous me laisseriez bruler avec ?

Lombard ignora l'haleine matinale de son maitre qui lui criait dessus, tout comme il s'empêcha de lui rappeler que tous les servants qui le réveillait étaient toujours punis, quel qu'en soit la raison.

            — Ce n'était qu'un homo sapiens …

            — Ah oui ! Tu en es sûr ? lui demanda-t-il en collant son visage au sien. Tu sais faire la différence entre un sorcier et un homo sapiens d'un simple coup d'œil ? Tu es peut-être un sorcier, si ça se trouve ?

            — Non, maitre.

            — Il y a plein de sorciers qui veulent ma mort ! Ça aurait pu être un sorcier se faisant passer pour un humain ou alors un humain envoyé par un sorcier !

        — J'ai appelé Henry qui m'a dit d'appeler l'ordre des sorciers, maitre, enchaina-t-il aussi vite qu'il le pouvait.

              — Henry ? L'Ordre des sorciers ?

Il l'envoya valser contre le mur d'un simple revers de la main.

          — Espèce d'incapable ! Tu veux que l'Ordre découvre tous ceux que j'ai tués ? Tu as de la chance que mon contrat ne m'autorise pas à te tuer.

Il agita les mains pour lui envoyer un sortilège et Lombard se tortilla sur le sol en hurlant de douleur. Logan le regarda quelques secondes, puis s'adressa à la servante d'à côté.

            — Où était l'intrus ? demanda-t-il pendant que Lombard hurlait de douleur.

            — Ici même, bégaya-t-elle en montrant un coin du salon.

Il alla devant l'endroit indiqué et lança un nouveau sortilège. Le salon prit soudainement vie et des sortes de fantômes apparurent. Ils marchaient rapidement à reculons, comme si le temps était inversé. C'était en fait des reflets des servants dans le passé, une projection en trois dimensions de ceux qui avaient marché dans le salon. Logan rembobina le temps jusqu'à voir le moment où l'intrus était arrivé. Il arrêta l'image au moment où Lombard vérifiait son tatouage. Il s'approcha du visage transparent de l'intrus et mit du temps à reconnaitre.

            — Lui ! Le copain d'Anaïs ? Qu'est-ce qu'il faisait ici ? Henry était censé m'avoir débarrassé de lui. Oh le salopard ! C'est lui, c'est de sa faute !

Un gong sonore résonna dans le manoir. Wong et Hernandez traversèrent le miroir magique au niveau de l'entrée.

       — Inspecteurs de « l'Ordre des sorciers », veuillez n'opposer aucune résistance ! cria Wong.

Ils entrèrent dans le salon et Logan poussa le canapé par magie, les renversant au passage. Les servants partirent en courant et Logan concentra des éclairs entre ses mains. Wong le propulsa contre un mur avec une onde de choc, espérant l'empêcher d'aller plus loin.

            — Agent de la sécurité magique ! cria-t-il à nouveau. Ceci est une grave infraction !

Logan rampa jusqu'à la cuisine.

       — Vous croyez que je vais me laisser prendre si facilement ! cria-t-il d'un air paniqué.

Il ouvrit tous les tiroirs par magie, fit s'élever les couteaux et fourchettes dans les airs et les envoya vers la porte de la cuisine lorsque le premier entra. Wong se prit la moitié d'entre eux dans le torse et s'écroula par terre.

Hernandez hurla de rage et fit s'écrouler un mur pour se jeter par surprise sur Logan. Ses mains se serrèrent autour de sa gorge pour l'étouffer. Logan fit voler une chaise qui se fracassa sur sa pleine tête, mais Hernandez était trop énervé pour s'arrêter. Trop fatigué pour faire de la magie, Logan attrapa avec sa main un morceau de chaise cassé et le planta dans les côtes de son assaillant. Imperturbable, Hernandez glaça le cou de ce petit morveux jusqu'à ce que sa tête devienne toute bleue. Logan arrêta de bouger, la tête devenue aussi dur que de la glace.

Essoufflé, Hernandez enleva le morceau de bois de ses côtes et rampa vers son collègue. Il était encore en vie. Il appela des renforts et attendit avec lui.

 

 

            Arthur attendait nerveusement sur son fauteuil, prit de courbatures à force de ne pas bouger. Une femme en tenue d'inspectrice était venue pour toucher à sa tête, marmonnant quelque chose comme quoi il fallait qu'un ensorceleur vienne le « réparer ». Il allait donc perdre la mémoire, tout oublier sur la magie et sur ce que ces gens faisaient subir à son espèce. Le seul réconfort qu'il trouvait était qu'au moins, il n'allait pas être tué.

Pourtant, les heures s'écoulèrent et personne ne rentra. A moitié en train dormir dans une position inconfortable, les mains toujours menottés, il sursauta lorsqu'un homme traversa le miroir. Il le reconnut, c'était Henry. Celui-ci posa une tête de glace sur la table et s'assit devant lui.

            — Oui, c'est bien Logan, il est mort.

            — Que s'est-il passé ?

         — Les inspecteurs que tu as envoyés ont fait ce que tu attendais d'eux. Ils l'ont tué.

            — Ce que j'attendais ?

           — Tu leur as menti, dans le seul but de nuire à cet idiot et ça a fonctionné.

          — C'est bien vous qui m'avez ensorcelé, au Lux ? C'est vous qui avez retiré le sortilège « d'agnosie magique », comme ils disaient.

           — Evidement. J'avais une dette à payer à ses parents et ils m'ont demandé de veiller sur leur fils pour qu'il ne fasse pas trop de bêtises. Tu sais ce que ça fait de surveiller un enfant pourri gâté qui se prend pour un dieu ? C'est le pire boulot au monde. Je suis trop vieux pour ces conneries. Lorsqu'il a tué James dans un nouveau caprice, j'en ai vraiment eu ras le bol. Je me suis dit que toi, au moins, tu méritais de te rappeler ce qui était arrivé. J'ai senti que ça allait se retourner contre lui et j'ai eu bien raison. Ce con était tellement paranoïaque et avait tellement de choses à cacher qu'il n'y avait aucune chance qu'il se laisse capturer par l'Ordre des sorciers. Par chance, aucun inspecteur n'est mort, donc l'enquête ne sera pas très approfondie et personne ne découvrira ce que j'ai fait.

Il claqua des doigts et ses menottes se défirent par magie. Arthur prit la tête gelée avec précaution, comme si elle allait reprendre vie, mais il était bien mort. II la reposa avec dégout, les doigts trempés d'eau gelée.

            — Anaïs, que va-t-il lui arriver ?

            — Rien. Elle va continuer sa vie sans se souvenir de quoi que ce soit.

            — Elle a perdu son frère !

            — Elle est en vie, c'est déjà pas mal. Peu de jolies filles comme elle survivent au passage des sorciers comme lui.

            — Et moi ? Que va-t-il m'arriver ? Vous m'avez dit tout ça parce que je vais tout oublier, n'est-ce pas ?

       — Pas nécessairement. J'ai pris un arrangement avec l'Ordre des sorciers pour réaliser un ensorcellement sur une seule victime de cette affaire. Je vous laisse le choix. Soit je restaure les souvenirs de votre copine sur votre relation et vous vivrez le parfait amour avec elle, oubliant tous deux l'existence de la magie et retournant à vos petites vies, ou soit je vous laisse tous vos souvenirs et je vous protège de l'hypnose, mais vous ne pourrez plus jamais la revoir.

Arthur fut décontenancé par cette proposition, mais comprit par son regard qu'il était des plus sérieux.

             — Alors, que choisissez-vous ? L'amour ou la vérité ?

 Il réfléchit pendant quelques secondes, puis donna sa réponse.

 

 

                                                                                                           Fin 

Signaler ce texte