Il est très tôt et cette ponctualité si tenace ne m'apporte plus aucune surprise. Je le revois, chaque jour ses deux pieds rappant le sol, ses deux mains frappant ses paumes, et soufflant l'air comme si le vent n'existait plus. Il s'approche, il ne me regarde pourtant pas, ou plutôt, il ne me regarde pas encore. Il faut lui laisser le tort, le temps de se trouver, de s'oublier dans cette espace, qui dépourvu de son ne fait que l'impasse aux beautés des coeurs des oiseaux.
Rappant encore le sol, il frivole et détournant son regard, vit, dans l'angle de l'espoir, les carreaux froids et cassés de sa fenêtre. Elle était opaque, rien ne pouvait y transparaître, pas même un rayon, pas même un être. Cela lui suffisait pourtant pour y croire, à s'y voir rêver que quelqu'un l'attende, qu'enfin une femme le demande.
Alors il avance mais il ne peine plus, il accélère même, il court ! Je trouve si beau de voir un homme rêver, ses yeux sont si remplis de passion, d'illusions pour lesquels il ne souhaite faire face, puisqu'il est lasse de la vie dans laquelle il a été condamné. Alors il prit un morceau de papier, et nettoyant les plaies de son visage, il n'y vit personne. Seul y était présent le paysage, l'horizon oublié. Alors il souffla de nouveau, prit sa pipe, et l'alluma.
Il resta là une bonne heure, les coudes à la fenêtre, à rêver pour toujours et encore. Mais une fois que le temps lui paru long, il se décida enfin à venir me retrouver, et prenant pinceaux, spatules, couleurs, crées, laisse d'un geste tendre, à l'image d'une caresse, le doux baiser de la création, à sa tendre aimée.