Dépasser sa Frontière

juecrivain

Ma propre définition du "borderline"

Le "Borderline"...un bien joli mot de premier abord, mais qui renferme bien des maux, mais décorticant mieux, on peut en tirer une définition assez claire du phénomène:

Le trouble de la personnalité borderline est un trouble de l'émotion.
"Ils ont une tendance à réagir plus intensément que les autres à des niveaux de stress moindres. L'on parle de dérégulation,d'hyperémotivité,émotionnelle,desurémotivité,".(Définitions.non médicales).

Ca laisse songeur sur le coup...mais içi on ne parle pas du trouble de la personnalité multiple. Si des lecteurs atteint de ce syndrôme comme moi lisent ce récit, ils savent bien de quoi je parle; on reste toujours le même personnage pendant qu'on franchit ce borderline. On ne change pas de nom par magie, on ressent juste un état émotionnel extraordinaire grandissant d'un coup, et influe, hélas, sur notre comportement général. Et ceci s'avère destructeur pour bien des personnes, qu'ils soient en couple ou celibataire, et peut se terminer tragiquement; le suicide répond présent dans certains cas.

Chaque cas est différent, et chacun a une manifestation bien à soi du Borderline.

Pour ma part, je le sentais. Je sentais bien que quelque chose ne faisait pas parti de la normalité chez moi. Comme un petit démon en moi qui me chuchottait à l'oreille le mode d'emploi du parfait personnage sans coeur. Je me disais: vu mon passif, quoi de plus normal? N'ayant pas pris le même départ que les autres, je possède quelque chose qu'ils n'auront jamais, une force de caractère qui intervient dans certains moments de ma vie. Tel un bulldozer, je roulerais sur toutes les emmerdes qui se colleraient sur mon dos! Pas, ou plutôt, plus d'angoisse, quitte à laisser les débris dérrière moi et que cela encombre toutes les personnes qui m'entourent. Je veux être libre, sans attache, la vie de famille inexistante pour moi, seul les amis comptent. Chouette, que je disais! J'ai CHOISI une vie parfaite.


Enfant adopté, grandi dans une famille d'acceuil, qui a fait de son mieux pour m'élever et me préparer à la vie, dure et cruelle qu'elle est parfois. Et c'est vrai qu'on en mange du pain noir, emotionellement, lorsque qu'on commence à poser des questions et qu'on est en plein adolescence. Le cocktail est détonant: quand on m'a tout raconté sur mon passé, ce fut une chute dans un puits bien, bien profond. Et je suis resté au fond, pendant bien des années, sans m'en rendre compte. Plus je vieillissais et plus je m'isolais du monde, petit à petit. J'allais de moins en moins voir la famille, les amis et commencais à hair ma vie misérable d'ouvrier payé au lance pierre. Des crises de colères intérieures commencaient à pointer, et les relations amoureuses, du balai! De toute façon je suis unique, alors je n'ai besoin de pesonnes, je me débrouille très bien tout seul. Rien que de regarder à la télévision, tous les méandres de la politique en France par exemple, cela me mettais dans un état proche du révolutionnaire, prêt à refaire le monde en enfilant ma cape de super héros. Cela me mettais hors de moi et dans une humeur colérique incroyable. C'est pas possible que je disais, j'ai vraiment envie de faire quelque chose de grand dans ma vie et en fin de compte je suis réduis à travailler comme esclave pour une disette.

Etouffant de ma vie pathétique que je menais, c'était vraiment le mot que j'employais, il me fallait d'agir, faire quelque chose de grand. J'ai eu l'opportunité de m'exiler en amerique du nord, histoire de balayer les pensées noires de ma tête et repartir à zéro, car j'étais vraiment dans un état emotionnel proche du néant. Cette méthode a assez bien fonctionnée il est vrai: se deraciner et voir du pays, ca vous occupe l'esprit et laisse moins de place aux doutes, aux angoisses. Mais étant un grand angoissé dans la vie, il me restait encore des restes. Grâce à cet intermède d'une année, j'ai découvert une passion pour les voyages, car cela me permet de m'evader plus facilement. Et j'ai reussi néanmoins à sortir la tête de mon foutu puit, dont je venais seulement de reconnaitre l'existence. Je m'étais paré d'un nouvel élan, d'une nouvelle volonté, moins de peur, et me voilà de retour au pays.

Le puit était maintenant loin de mon champ de vision, une bonne chose de faite! Je vais pouvoir affronter les choses avec plus de recul...mais peu à peu, les mauvaises habitudes reviennent, des crises de colères qui s'extériorisent, des amis auquel je coupe les ponts sans raison vraiment préalable, instabilité dans mes choix, incapacité de me soumettre aux ordres de quelqu'un...et plus je me regarde dans le miroir et plus je me demande qui je suis. Le borderline vient d'enclencher une vitesse supérieure et on ne se rend compte de rien. D'un coup, vous vous dites que vous êtes seul au monde, oublié de tous, alors qu'ils soient maudits! J'en étais même prêt à lacher le téléphone portable, de cette manière je n'aurais plus matière à m'emporter qand je verrais le téléphone vide de messages et d'appels. J'étais comblé de tristesse, je traversais ma Frontière de plus en plus souvent...

Le concept du borderline m'est venu alors que je fricotais avec une fille pour une soirée. En racontant un peu mon passé et ma personnalité, elle m'avait balancé ce mot comme réponse à mon tempérament d'adulte changeant subitement à un état...enfantin dira t'on. Comme quoi, certaines aventures charnelles peuvent vous transcender autre que sexuellement. Elle avait piqué ma curiosité cette nana et en établissant des recherches sur Internet, je fus surpris de voir que ceci était listé comme une Maladie. Serais je Malade, depuis tout ce temps? En listant les points caractéristiques de la maladie, certains concordaient avec mon cas: tristesse, colère, les sautes d'humeur, angoisse. Après une visite chez un spécialiste, le couperet est tombé: je suis borderline, mais pas à ce point élevé. Mon cas est solvable, me dis t'on, et ayons une pensée pour ceux et celles qui n'ont pas survécu à ce trouble, faute de soutien ou de volonté.

Moralité, chers lectrices et lecteurs, je suis atteint d'une maladie à 31 ans (moi qui me croyais invincible, le comble), et elle a guidé une partie de ma vie. Et c'est bien le plus cruel dans tout ça, je me suis fait MANIPULER par quelque chose d'abstrait, une zone noire au delà de ma frontière psychologique. Par moments je retombe dans le puit, en me rattrapant in extremis au rebord. C'est une petite victoire dirais je, même si j'éspere cette fois ne plus le revoir du tout. Le petit démon me dit à l'oreille que cela prendra effet avec le temps, et que la meilleure manière d'y arriver c'est de ne plus l'écouter. Je vais faire de mon mieux petit démon ...je vais faire de mon mieux. Je serais le seul gardien de ma Frontière dorénavant, sois en sûr.

Une pensée pour ceux qui vivent avec cette maladie ou qui y ont succombés.


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