Diagnostique

exquis_mots

Introspection de monsieur tout le monde.

    Aujourd'hui commence mon premier travail de thérapie. Allez savoir si cela aboutira mais je n'ai pas réellement le choix, je n'arrivais plus à me gérer seul. Bien que vierge de toutes accusations ou folies, je me retrouve à être suivi - ce qui est amusant pour une personne qui vivait dans l'ombre en poursuivant la vie des gens.


    Le psychiatre (merci à eux d'être remboursés par la sécu.) m'a demandé de tenir une sorte de journal de bord, disant que cela me permettrait d'extérioriser et de mieux comprendre en décrivant, sur le moment, ce qui se passait en moi. Mon côté voyeur me pousse souvent à épier les autres ; je me suis donc dit, quitte à exhiber mon âme, autant la partager sur la toile. Il est vrai que ce que l'humain aime, ce sont les effusions de sang, les dérapages, l'obscène et le malsain ; beaucoup pourraient donc espérer l'échec de tout cela pour me voir sombrer et pourtant je persiste à vouloir garder le contrôle sur moi-même.


    Alors que ressent-on lorsqu'on est moi ? A vrai dire, je n'en suis pas toujours sûr. D'après son premier diagnostique, je serais une personne bienveillante, très (voire trop ?) gentille, terriblement empathique à ma façon et qui sait, sans doute apathique. En soi il m'est difficile d'être quelqu'un de désagréable, sans écoute et sans désir d'aider autrui. Je suis un bon samaritain lambda, comme on en voit d'autres, avec un vécu assez banal, sans un passé vraiment douloureux ou traumatisant, pouvant justifier quoi que ce soit. Il pense que cet enfant doux et peureux que je suis, puisse être la cause de cette noirceur qui me consume ; comme s'il s'agissait d'une réaction animal face à la peur des adultes et de ce monde. Ce sont ces événements oppressants et ce rejet inconscient de l'Homme et de la société qui ont fait naitre ces envies morbides. A entendre cela, je pourrais me sentir victime ; heureusement pour moi, je ne suis nullement hors responsabilité et c'est sans doute ce qui me protège : la conscience et la peur. Il pense que les chances de passer à l'acte sont diablement infimes voire quasiment nulles, qu'il faudrait en soi que je perdre pieds avec la réalité - dites non à la drogue et à l'alcool.


    De mon côté, je me dis que les seuls raisons qui me tiennent sont la peur et l'anticipation. Je serais donc un foutu trouillard avec des pulsions, condamné à s'exciter sans pouvoir en jouir. Cette seule idée me rend triste. J'ai beau désirer me tenir une vie entière et ne jamais faire d'écart, dans ces moments là, j'admets vouloir plonger dans cet abime somptueux et mielleux qui m'appelle.

    Alors je reste là, les mains tremblantes de désirs, la nuque humide et glacée par mes chaines, à regarder mes vies défiler dans ma tête tandis que la mienne reste figée.

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