Dix chansons à offrir avant la fin du monde
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Il paraît que le monde va s’arrêter sous peu. En soi, la croyance populaire vieille de quelques millénaires n’est plus un scoop pour personne. Il y a quelques années, un nanar signé Roland Emmerich venait même enfoncer le clou à grands renforts d’orchestrations pompeuses et de bons sentiments. Jusque là, rien de bien méchant si ce n’est l’incompréhension de voir un type de la trempe de John Cusack se commettre dans le schéma blockbuster. Certains ont joué la prudence et construit des bunkers pendant que la majorité sait déjà que le 21 décembre prochain, une autre fin, salvatrice celle-là, sera proche: celle de la course aux cadeaux de Noël.
Il paraît que le monde va s’arrêter, disions-nous... Quand on voit que quelques croquis d’un goût douteux et deux tétons princiers surexposés suffisent à mobiliser l’ensemble des rédactions de France et de Navarre, on se demande en plaisantant si les choses ne sont pas mieux ainsi. Sauf que là, le doute est (re)lancé par Alexis HK.
HK l’affranchi, l’antihéros notoire, HK, jadis homme du moment, aujourd’hui homme du présent, fusse-t-il le dernier. Le dandy imperturbable au verbe faussement apathique qui pèse chacun de ses mots (ndlr : essayez donc, vous, de caser "chafouin" et "claudiquant" dans une discussion sans passer pour un nostalgique du jeu télé Pyramides et de son amas de briques). Alexis HK, le sarcastique capable de vous faire éclater de rire tout en gardant le sérieux d’un huissier de justice au réveil.
On l’avait quitté en 2009 avec un album classieux, Les affranchis. Un millésime à la robe violette duquel se libéraient des arômes de Sicile (le morceau-titre), de Californie (C’est le printemps) et d’un ailleurs révolu (Maudits Anglois). Fort d’une galerie de portraits atypiques (Jack le manager, Nick le coq, Zouzou, la famille Ronchonchon ou encore Fanny, la fille du fossoyeur), l’album plaçait son auteur à un niveau encore jamais atteint en et ce, malgré deux premiers disques de bonne facture.
En cette fin d’été, Alexis HK revient donc avec une quatrième galette enregistrée entre mars et avril dernier sous la houlette de l’indispensable Matthieu Ballet et baptisée Le dernier présent. Et si vous pensiez trouver en cette demi-heure de musique la bande son idéale pour revoir vos photos de vacances, passez votre chemin. D’abord parce qu’un album du bonhomme n’a pas, en règle générale, vocation à illustrer les exploits de tonton Serge au marathon des vignobles de Saint-Maximin, mais surtout parce que l’exercice 2012 fait place à un ton résolument plus sérieux. Fini les lancers de nain, les ringards du placard et autres hommages à Tom de myspace. Aujourd’hui, à la trentaine finissante, Alexis HK laisse un peu plus de lumière à Alexis Djoshkounian pour un répertoire volontiers plus introspectif (Je reviendrai ou Fils de, petit frère musical de Chicken manager) où l’on retrouve un peu de Joe Dassin (Je reviendrai), de Brassens (Charité populaire) ou du Renaud période Boucan d’enfer (le très beau César).
Ceux qui pourraient regretter ces temps où le garçon parsemait ses textes de petites piques espiègles ne manqueront pas de se jeter sur Princesse de papier ou On peut apprendre, même si, sur ce plan-là, on reste un poil en deçà de ce dont est capable celui qui fête, cette année, ses quinze ans de carrière.
Musicalement enfin, si le ménestrel confirme son goût pour les comptines médiévales (Ignoble noble où l’on retrouve ses camarades du jeu du projet Seuls à trois, Renan Luce et Benoît Dorémus), il s’impose comme un excellent créateur d’espace et fait de l’aérien La fin de l’empire la meilleure pièce d’un album qu’il convient de laisser décanter, les premières écoutes pouvant trahir quelques langueurs. Derrière son apparente froideur et sa sobriété se cache, en effet, un disque profond dans lequel l’artiste se dévoile sûrement plus qu’il ne l’a jamais fait auparavant.
Que pourrait-on bien vous raconter d’autre ?... Ah oui ! Il paraît que le monde va s’arrêter… Mais ça, vous le savez, maintenant. Alors si vous faîtes partie de ceux qui bâtissent des abris anti-atomique en attendant que ça arrive, emportez avec vous un exemplaire de ce disque. Pour les autres, ne perdez pas de temps : déballez dès maintenant ce dernier présent que vous fait Alexis HK. Et carpe diem…