Elephant

ju1139

L'histoire d'une vie adolescente où amour et popularité sont les maîtres mots. Un Palo Alto a la française. (Titre hommage à la palme d'or de Gus Vant Sant : "Elephant").

I - Mort

 

 

            « La solitude est un sentiment partagé par tellement de monde qu'il serait égoïste de le ressentir seul... »

 

 

 

            J'entends des bruits dans mon dos, des chuchotements. Dans cette salle de classe je suis seul au milieu de cette jungle d'adolescents tous plus immatures les uns que les autres. Je suis seul, entouré de vide, de chaises vides. Rien, personne pour me consoler, personne à qui parler, seul au milieu de ces bêtes, sans soutien, sans rien à faire.

- « Aïe !! »

Une boule de gomme m'avait frappée en pleine tête ! Ah ces lâches, ils m'attaquent par derrière... Je les entends ricaner ces ânes sans cervelle. La prof ne fait pas attention a moi et continue son cours comme s'il ne s'était rien passé. Cette salle de classe, non même ce lycée est un enfer, mon enfer. Tous ces êtres humains qui m'entourent sont des flammes qui ne me laissent aucune échappatoire à cette souffrance. Je les entends encore se moquer de moi, dire que je suis gros, moche, con et que je ne sert à rien... A quoi bon répliquer après tout ! C'est mon lot quotidien, les insultes, les moqueries, les humiliations...

            Ça sonne enfin, je m'échappe vite de cette salle de torture. Je vais me réfugier dans les escaliers de secours. Entre deux escaliers il y a un palier. Une baie vitrée offre la vue sur la cours du lycée et l'extérieur. J'observe ces pourritures, seul, les larmes aux yeux. De la-haut je les observe et dans ma tête se succèdent les pensées. J'aimerais en finir, une bonne fois pour toutes. Le suicide ? J'y ai déjà pensé. Mais faire ça ce serait leur donner raison, leur prouver que je suis faible et lâche; alors non, je ne cèderais pas à la tentation !

            C'est bientôt l'heure de retourner en cours, je commence à redescendre et me prépare à affronter une nouvelle fois ces fauves sans foi ni loi. Je me dirige vers mon casier, je me fait bousculé par cette bande de sportifs au Q.I. d'huître. Je n'y prête pas attention, je passe mon chemin comme si de rien étais. A force, je m'habitue ! J'arrive à mon casier, je l'ouvre, quand j'entends la voix de cette fille. Je me retourne et la voix de cette petite brune aux cheveux longs et ondulés entourée de ces dizaines d'amies me fait quitter la terre ferme ! Chaque jour je la vois, chaque jour je l'observe. Mais chaque jour je me dis que jamais je ne pourrais lui parler... Je l'observe, la dévisage sans qu'elle ne me remarque. Chaque seconde à la regarder paraît interminable tellement sa beauté me subjugue. Je reprends mes esprits, je dois aller en cours. Je me dépêche, monte les escaliers en courant et me retrouve devant ma salle. Je me tiens un peu à l'écart. Des groupes se sont formés dans la classe, des groupes d'amis. Mais moi, moi je n'appartiens à aucun d'eux car je n'ai pas d'amis, pas un seul.

            Pendant ce cours, je suis seul, à l'écart, seul dans le fond de la classe. Les paroles de mon professeur ne me parviennent pas, je n'écoute pas, je suis déconnecté de ce cours aussi ennuyeux qu'inutile. J'écris, j'écris encore et toujours, j'écris sur cette fille qui alimente mes rêves, sur mon mal-être qui hante mes nuits et sur ma solitude qui détruit ma vie.

            Je suis jeune, j'ai des bonnes notes, personne ne me remarque et pourtant je suis au fond du gouffre, sans échelle ni corde. Je suis bloqué là sans espoir de survie.

           

            Fin de la journée, enfin. Tout le monde se dit au revoir, ou part se balader en ville mais moi, moi je reste seul, je me dis au revoir à moi-même et rentre chez moi, sans que personne ne fasse attention a moi. Je suis un fantôme, présent sans l'être, existant sans que ça ne se remarque. J'arrive enfin chez moi après cette longue et harassante journée. Mes parents ne sont pas là, ma mère au travail et mon père en déplacement professionnel, comme à peu près tout le temps. On ne peut pas dire que j'ai les meilleurs parents du monde, ils ne sont jamais à la maison. Où quand ils le sont-ils ne s'occupent pas de moi. Ils sont tout juste bons à me donner de l'argent pour que je ne meure pas de faim le midi.

            Quand j'étais petit pourtant, ils s'occupaient de moi comme d'un prince, j'étais choyé et tout ce qui va avec. Mais depuis le milieu d'année dernière, depuis le jour où mes camarades se sont amusés à me déshabiller dans les toilettes et à cacher mes vêtements dans leurs casiers. Ce jour là, mon père a du venir me chercher au lycée et ce jour là, il a compris que son fils n'était qu'une lopette sans défense, sans orgueil et faible. Ce jour là j'ai vu la honte sur le visage de mon père. Depuis mes parents ne s'intéressent plus à moi, je ne suis devenu qu'un locataire de leur maison. Pour moi, c'est comme si je n'avais pas de famille. Ni famille, ni amis... Beaucoup se seraient pendus où même tirer une balle pour moins que ça. Mais moi je lutte, je lutte psychologiquement contre cette fin qui se rapproche à grand pas.

            Le soir, je ne sors pas de ma chambre, je reste dans mon lit, bercé par les chansons de Nirvana. Sur le mur en face de mon lit, un ange noir qui me tourne le dos est dessiné. Il représente mes pensées : la vie qui me tourne le dos puis s'en va petit à petit ! Ma vie est un combat, un combat de chaque instant pour ne pas tomber du mauvais côté de la barrière et prendre des décisions sans issue. Je dois me battre contre la vie, contre moi même.

           

            J'ai toujours respecté les règles, je n'ai jamais fait de folie. Je ne m'aime pas, je déteste mon corps, mon esprit. Je suis faible et sans défense. Parfois je me demande pourquoi j'existe, je me demande si ma vie a un sens... Mais cette question reste sans réponse, rien, le vide absolu. Je suis comme perdu au milieu de l'univers, comme un misérable grain de sable au milieu du Sahara, comme un pion sur un échiquier, inutile et sans importance. La vie, la mort; ça se résume à quoi ? A un cercueil et des yeux ouverts... Chaque jour de ma vie j'ai l'impression d'être enterré vivant, de subir le châtiment divin et d'être envoyé directement en enfer au milieu de ces fous délirants sans âme ni cœur.

 

 

 

 

II - Espoir

 

 

            « I walk a lonely road, the only one that I have ever known. Don't know where it goes but it's time to me and I walk alone. I walk this empty street on the boulevard of broken dreams. When the city sleeps and I'm the only one and I walk alone. » [Green Day – Boulevard of broken dreams]

 

 

 

            Nouvelle journée dans cette cage aux lions. Rien ne va, rien ne change. Ma vie est un calvaire et moi je ne fais rien pour que ça change.. On dirait que je me plais dans la souffrance, que je me contente de ce que j'ai sans espérer plus ! Pour tout vous dire, je n'ai jamais parler à une personne de ma classe, je n'ai jamais parler à une autre personne qu'un professeur. J'aimerais enfin parler à cette fille que j'observe jour après jour, ou même à ce rockeur fou qui a l'air pas mal torturé dans sa tête.. Je me contenterais même de parler à la bande de geeks asociaux qui ne savent pas parler d'autres choses que de leurs programmes informatique et tout le reste ! Bref je veux des amis, je veux avoir une ''vie sociale'', je veux être soutenu par quelqu'un quand je vais mal, je veux réconforter les gens quand ils ont un coup de mou et par dessus tout j'aimerais qu'a travers ça l'amour de mes parents revienne. Mais … comment faire ? Je ne sais pas, et je trouve que la vie à l'école primaire est bien moins compliqué ! J'aurais aimé rester petit toute ma vie, rester à cette époque où j'étais aimé de tous, rester à cette époque où mes copains étaient tout le temps chez moi, rester à cette époque où j'avais une petite amie, rester à cette époque où j'avais une famille. Revenir à la belle époque quoi, celle où j'avais la belle vie...

 

            Aujourd'hui, bizarrement, tout se passe bien, pendant cette matinée, personne n'est venu m'embêter, m'insulter ou me frapper. Quelle belle journée. Je sens qu'aujourd'hui je peux faire changer ma petite vie de lycéen bouseux.

            Pause de midi, je sors du réfectoire et me balade dans le parc à côté du lycée. De la verdure à n'en plus finir, de grands arbres majestueux, et des gens, assis en bandes sur l'herbe, à parler, rigoler et fumer. Moi je suis seul, je marche seul. Mais au détour d'un chemin je vois une fille, assise seule sur son banc, l'air blasé.. Elle écoute sa musique. Je la reconnais aussitôt, c'est la fille de mes rêves... J'hésite de longues secondes pour savoir si je vais la voir ou non, ce dilemme me torture l'esprit. Aller c'est parti, je m'approche !

–                    « Salut ! »

Pas de réponse...

–                    « Je peux m'asseoir ? »

Elle lève la tête et me fait oui de la tête.

–                    « Pourquoi tu es seule ? Tu as l'air triste... »

Elle enlève ses écouteurs, se tourne vers moi lentement et me dévisage quelques secondes.

–                    « Je pensais que tu étais muet toi ! Mais tu es vraiment sûr de vouloir écouter une fille se plaindre après une rupture ? »

–                    « Au point où j'en suis, je suis prêt à tout », lui répondit-je.

–                    « Alors voilà, j'ai quitté mon copain... »

Elle continuait de parler, elle me racontait l'histoire. Une sombre histoire de tromperie avec sa meilleure amie ou je ne sais quoi. Moi je n'écoutais pas, enfin que d'une oreille. Je l'observais, j'observais le mouvement de ses lèvres rosées, ses mains aux doigts fins et fragiles, son visage d'ange au mille et une merveilles ! Bref j'étais subjugué par sa beauté, je n'en revenais pas de parler a cette fille, sûrement la plus belle fille de l'univers !

–                    « Et voilà, maintenant tu connais toute l'histoire ! » me dit-elle en achevant son récit.

–                    « Ça doit être dur à vivre répondit-je, je suis désolé pour toi ! »

–                    « C'est pas grave, je m'en remettrais, il y a plein d'autres garçons !! Bon aller viens on retourne en cours ! »

Je me leva en même temps qu'elle mais la laissa partir devant.

–                    « Tu ne viens pas ? Me demanda-t-elle. »

–                    « Je vais venir, mais je ne veux pas que tu aies honte en arrivant avec moi, alors je préfère garder mes distances ! »

–                    « Abruti ! Aller viens, et plus vite que ça !! »

J'étais le mec le moins aimé du lycée, le souffre-douleur et là, j'étais avec une beauté céleste, le genre de fille que tu ne vois que dans les films et les séries américaines. Dans ma tête, je me dis que ma vie prend un tournant à cet instant précis ! Mais je ne pus m'empêcher de lui poser la question :

–                    « Pourquoi tu m'as raconté tout ça tout à l'heure alors qu'on ne se connait même pas et que je suis le mec qui crains le plus du lycée ? »

–                    « Peut-être parce qu'on ne se connaît pas ! Avec tous mes amis j'ai une image à montrer, alors qu'avec toi je sens que je peux être moi-même, que je peux me confier et puis … moi je trouves pas que tu craignes »

En achevant sa phrase elle me fit un clin d'œil puis on se mit à rire, un vrai fou rire comme je n'en avais pas eu depuis un an !

            Quand on arriva devant les grilles du lycée, elle passa son bras autour du mien et se colla à moi.

–                    « Pourquoi tu fais ça ? » Demandais-je avec stupéfaction !

–                    « Parce que je t'ai dit que je te trouvais cool ! Tu es plus mature que les autres et tu as une vraie personnalité ! Puis pour tout t'avouer … j'en avais terriblement envie »

Elle se mit à rougir, elle était tellement belle ! On rigolait, ensemble, enlacés comme deux amoureux ! A ce moment, je me suis quand même dit que j'étais verni ! Depuis le début de l'année je rêve de ce moment, mais ce n'était qu'un rêve... jusqu'à aujourd'hui !

 

III – Résurrection

 

 

            « On peut perdre ses clefs, son temps ou ses illusions, tant que l'on garde espoir il n'y a pas de quoi s'affoler ! »

 

 

            Cette après-midi était merveilleux, je l'ai passé avec Ana ! C'est une fille vraiment formidable, bien loin de tous les préjugés que j'avais sur elle. En cours on est restés ensemble, à côté. Elle ignorais ses amis et se consacrait à moi, je me sentais vraiment vivre, j'étais bien ! Quand on croisait des gens, ils avaient tous ce regard interrogateur, cette impression de rêver, d'être au beau milieu d'un mauvais rêve... Mais non, c'était bien la vérité, Ana, la magnifique brune, était bien là accrochée à mon bras et en train de rigoler a plein poumons ! Mon bras commençait à devenir rouge a force que je me pince pour me convaincre que ce n'est pas qu'un rêve, mais non c'est la réalité !

            Le soir, à la fin des cours, elle me demande de la raccompagner jusqu'à chez elle. J'accepte. Le temps est radieux, un soleil de plombs, une petite brise légère, et parcours entouré de verdure. Cette journée est juste magnifique ! Je la raccompagne jusque devant sa porte, puis la laisse. Sur le chemin entre ma maison et la sienne, j'ai le sourire aux lèvres, je suis comme un gamin de cinq ans à qui on a acheté un jouet qu'il désirait depuis longtemps !

            J'arrive chez moi et le quotidien reprend. Mais aujourd'hui, l'ignorance de mes parents à mon égard me laisse indifférent, plus rien ne me touche après ce merveilleux après-midi. Le soir et la nuit je pense à elle, je rêve d'elle. J'ai à présent l'impression de vivre dans le même monde que les autres, d'être un lycéen normal !

 

            Le lendemain le réveil est tranquille, je suis de bonne humeur car j'ai hâte de retrouver ma petite brune ! Je sors de chez moi et là... une magnifique jeune fille attendait, assise sur la barrière en face de la porte d'entrée. C'était Ana, je n'en croyais pas mes yeux, elle était là devant moi, radieuse, et me faisait coucou de la main tout en rigolant ! Elle était toute rouge, elle était trop chou ! Elle me prît par la main et on se dirigea vers le lycée. Sur le chemin, on parlait de tout et de rien, de notre soirée, de notre nuit, de nos rêves. Pas une fois depuis la veille elle ne m'avais parler de ses amis, de ce qu'ils pensent de notre amitié. Elle était indifférente envers eux. En cours, quand nous n'étions pas à côté, elle m'envoyais des petits mots mignons, j'aimais cette journée et j'aimais cette fille ! Elle restait avec moi, ne me lâchais pas d'une semelle. J'étais heureux et elle le savais, et elle savais aussi que c'était grâce à elle.

 

IV – Le début d'un rêve

 

« Peut-être que tu perds tout, mais moi si je te perds, je suis perdu. »

 

            Rien n'était plus magnifique que cette journée. J'avais la belle vie, la vie dont rêve tout le monde. Les cours se sont bien passés et Ana me propose une séance de révision chez elle. J'accepte très volontiers, ça sera l'occasion de se rapprocher et de continuer nos super délires !

            On arrive chez elle tranquillement, son appartement est grand pour celui d'une étudiante. Elle vit seule, ses parents lui ont offert son logement car ils aiment voyager et le font toute l'année. Ils lui donnent beaucoup d'argent pour qu'elle puisse subvenir à ses besoins.

            On se pose sur son canapé, avec nos cours sur sa table basse. Une bière chacun et c'est parti pour réviser ! C'est du grand n'importe quoi, on n'est pas concentrés et on révise à peine. On fait que rire, se taper -amicalement bien sûr- et se jeter dans les bras l'un de l'autre. A un moment on se chamaille et on commence à se faire un câlin, nos yeux sont plongés les uns dans les autres. La tension est palpable, mon cœur bat à cent à l'heure. Son visage se rapproche, ses lèvres touchent les miennes. Sont baiser est tout simplement magique, j'ai l'impression que ça dure une éternité mais non, seulement quelques secondes. Nos visages s'écartent.

–                    « Désolé... » me dit Ana

–                    « Ce n'est pas grave, au contraire ça m'as fait plaisir mais … pourquoi tu as fait ça ? »

–                    « Je sais pas, j'en avait envie. J'ai envie d'être avec toi ! »

A ces mots je la pris dans mes bras et l'embrassa de nouveau, sa langue jouait avec la mienne c'était juste magique.

 

            J'avais une petite copine. Ce mot je ne le connaissais plus, ne l'espérais plus. Ana était un ange, un ange tombé du ciel, sûrement mon ange gardien.

            Après cet après-midi de pur bonheur je rentrais chez moi heureux. J'évitais mes parents, m'enfermait dans ma chambre et souriait. Allongé sur le lit j'affichais ce rictus de bonheur. Dans ma tête tout se mélangeait, plus rien n'était clair mais c'était peut-être ça le bonheur..

 

V – Le début de la vie

 

« Jour et nuit je traque les épiphanies avec la rage d'un mercenaire sous crack, d'un alcoolique en manque de Jack, d'un amant qu'on plaque. »

 

            Une nouvelle journée commençait. Je marchais. Je me posais mille et une questions : quand je vais la voir qu'est-ce que je fais ? Je l'embrasse ? Je l'ignore ? Je lui fais la bise ? Je ne savais pas, tout était confus.

« - Hé ! » criait une petite voix douce derrière moi. Je me retournais et c'était Ana, elle courait vers moi. Elle sauta dans mes bras et m'embrassa, c'était parfait, quelle belle journée, la plus magnifique de toutes. Sur la suite du chemin on parlait de tout et de rien mais on rigolait et on était heureux.

            Le lycée, on y arrivait. Le stress commençait à monter. Comment les gens vont réagir ? Je m'en fou tant que je suis avec elle. Au moment de passer les grilles elle serrait plus fort ma main et se collait contre moi. Dans le couloir des casiers tout le monde nous regardait, on entendait des quolibets et des moqueries. Mais rien ne nous atteignais.

« - Salut la traînée, j'vois qu't'as pas réussi à trouver mieux que moi finalement ! ». C'était son ex, un sportif, un mec populaire qui se la joue gros dur.

« - Ferme-la » balbutiait Ana.

« - Oh mais c'est qu'elle est vulgaire maintenant… »

Je voyais Ana malmenée par ce type.. Mais c'était  ma copine, je devais la défendre. Je sais pas ce qui m'arrivait mais j'étais énervé et galvanisé, je n'étais plus moi-même !

« - Maintenant tu vas la fermer connard » criais-je en saisissant Matt a la gorge et en le plaquant contre les casiers. Il essayait de se débattre mais n'y arrivait pas, je le tenais trop fermement.

« - Oh tu crois qu'un petit minus comme toi qui se tape mon ex va me faire peur ? Aller lâche-moi si tu veux pas te faire luncher maintenant ! » Me dit Matt.

Je ne le supportais pas et je l'avais là à quelques centimètres de moi. Je ne sais pas ce qui m'arrivait mais j'ai levé le bras et je l'ai frappé, une belle droite dans le nez. Il était à terre maintenant, je l‘avais laissé tomber. Il était ko, il allait mal. Je m'en foutais, je repartais avec Ana main dans la main. Tout le monde me regardait avec un mélange d'admiration et de peur. Bref cette journée commençait plutôt bien !

 

            Midi arriva et avec Ana on alla manger à la cantine, seuls à une table. On discutait quand les emmerdes ont commencées. Matt et son bandage ridicule sur le nez accompagné de ses deux potes étaient là. Matt cracha dans mon assiette.

« - C'est con, je crois que c'est plus très bon. » me dit-il avec son air provocateur.

« - Tu veux quoi ? »

« - Que tu t'excuses comme ça je pourrais peut-être passer l'éponge… »

« - Jamais de la vie, tu le méritais ! »

« - D'accord, comme tu voudras. » A ces mots il leva son poing pour me frapper mais il était trop lent. J'avais eu le temps de saisir mon plateau et de lui asséner un coup au visage avec. Il était mal en point mais il revenait à la charge pour ne pas se ridiculiser. En vain. Avant qu'il n'ait pu me toucher je lui ai mis un crochet dans la joue puis pendant qu'il se baissait un coup de genou dans le visage. Cette fois il ne reviendrait pas. Je me rassis puis me tourna vers ses deux potes qui étaient encore la immobiles et dubitatifs.

« - Vous voulez la même chose ou vous dégagez ? »

Ils sont partis en courant.

 

            Il était 15h et la proviseur voulait me voir dans son bureau. J'y allais avec un peu d'appréhension, mais bon on peut pas changer le passé.

« - Bonjour monsieur Crane. »

« - Bonjour madame la proviseur. »

« - Bon, j'imagine que vous savez pourquoi je vous ai convoqué donc passons directement aux choses sérieuses. Pourquoi avez-vous frappé votre camarade ? »

« - Ce matin il nous a manqué de respect en nous insultant et après tout ce qu'il m'avait fait, je n'étais plus moi-même je l'avoue, j'ai eu un mauvais comportement mais c'était libérateur. Et pour ce qui est de la cantine c'est lui qui a provoqué, demandez aux témoins mais c'était plutôt de la légitime défense, même si c'est un mauvais comportement. »

« - Bon, je comprends. Si dorénavant vous vous tenez correctement il n'y aura pas de sanctions. Mais au moindre écart c'est l'exclusion. C'est clair ? »

« - Oui madame. »

 

            Ana m'attendait devant son bureau. On repartait du lycée quand un mec est venu nous voir. Il s'appelait Jake il me semble, c'était la première fois qu'il me parlait.

« - Y'a une soirée ce soir chez moi, si ça vous tente, venez il y aura du monde et comme ça tu pourras faire connaissance avec des gens Allan. Et toi Ana tu connais a peu près tout le monde. En plus Matt ne peut pas venir à cause de la raclée que tu lui a mis. »

« - On verra » l'interrompit Ana.

On partit. Sur le chemin elle me parla de la soirée.

« - Tu veux y aller chéri ? »

« - Je sais pas trop je ne suis jamais allé à une soirée… »

« - Bon on va y aller. Mais tu restes avec moi et pas d'excès ! »

« - D'accord ! »

 

VI – Nouveau monde

« Sur la musique on va on vient, on s'éloigne et on revient. Puis tu t'élances et je te tiens du bout des doigts pour te ramener contre moi. Sur la musique on va on vient, corps contre corps, main dans la main. Plus rien n'existe, plus rien de rien quand je te tiens du bout des doigts pour te ramener contre moi. »

            J'étais là dans ma chambre, devant mon miroir et je me regardais. C'était bizarre quand même tout ça, cette façon dont ma vie s'est emballée, s'est transformée. D'ailleurs il n'y avait pas que ma vie qui s'était transformé, moi aussi, ma personne, mon essence même s'était changée. Devant ce miroir j'avais ce sentiments étrange, ce sentiment perturbateur que l'on ressent quand on fait face à un inconnu, à une personne qu'on ne connaît ni d'Eve ni d'Adam. Le mec que je voyais dans ce miroir il avait frappé un gars au lycée, il sortait avec une des plus belles filles du bahut, il était invité à une soirée. Ok pour vous ça peut paraître normal, mais pour moi non. Le mec que je voyais dans ce miroir c'était le héros d'un vieux roman à l'eau de rose qui plaît aux jeunes filles pré-pubères. Alors que moi j'étais le mec un peu old school, un peu hors du temps, enfin hors de ce temps en tout cas. J'devenais comme les autres. A croire que je ne valais pas mieux que tous ces gens que je détestais.

            Enfin bref, j'étais devant ce miroir, là dans ma chambre à m'observer en attendant qu'Ana arrive. Ça sonnait. J'ai sursauté. Puis j'oubliais toutes mes idées noires et j'allais ouvrir à cette jeune demoiselle magnifique avec laquelle je sortais. Elle était rayonnante, comme toujours. Une robe noire, simple, épurée, des escarpins de la même couleur. J'avais face à moi une jeune femme tout à fait sublime, à mon goût comme dans mes rêves les plus fous.

‘'Ana, faut qu'on parle''. Je ne sais absolument pas ce qui m'a pris, c'était parti tout seul, comme un cri du cœur. J'ai vu l'inquiétude dans son regard, ça m'a fait de la peine.

‘'- Qu'est-ce qu'il y a ? Dis-moi…
- Ben.. Tu sais, c'est la première fois que je vais à une fête, je suis stressé, je me sens pas moi-même tu vois ?
- Allan, tu es toi et rien ne te changera ! C'est ta vie, profites-en tu crois pas ?
- Oui, tu as sans doute raison chérie.''

Elle avait raison, je devais profiter de cette vie, de cette chienne de vie transformée en un véritable conte de fée.

VII – Au bout du conte

‘'Why'd you only ever call me when you're high ?''

            On était arrivé à cette fameuse soirée. Le monde, la fumée, l'alcool, les couples, la danse, la musique, tout, vraiment tout était comme je l'avais imaginé. C'était fou, un autre monde, une autre galaxie, un autre univers, une nouvelle dimension.

            Ana me prît par la main et m'emmena au centre de la piste de danse. J'étais plongé au cœur de ce trip sans retour, de ces danses frénétiques sans aucun sens ni tenu. Je fermais les yeux, la musique vivait en moi. Les corps bougeaient autour de moi, ma tête explosait du bruit qu'il y avait. Tous mes problèmes, toutes mes craintes, j'oubliais tout au milieu de cette piste de danse. Chacun était dans son monde, se touchait, s'éloignait, se tenait. Ana était face à moi, dans son monde. Elle avait le sourire aux lèvres, j'aimais ça. Elle me plaisait vraiment. J'avais envie de la prendre dans mes bras, de l'embrasser, de me défoncer et de m'allonger seul dans l'herbe au milieu d'un champ avec elle. Ana était, pour moi, la reine dans ce royaume de la déchéance humaine. Elle était ma muse au milieu de tout cet alcool, ces drogues et ce sexe.

            La musique s'arrêta un court instant. Ana vint se blottir dans mes bras.
‘'- Alors tu t'amuses ?
- A fond, c'est génial !
- Alors viens par-là, j'ai d'autres choses à te montrer !''

            Je la suivais de prés, nos mains entrelacées. Elle m'emmena loin, on entendait encore la musique mais à un volume normal. On était au fond du grand jardin, affalé contre un arbre. J'étais assis et Ana était allongée dans mes bras. Elle sortit de sa poche un joint et un briquet. Elle l'alluma et tira dessus. Puis elle me le tendit.
‘'- T'en veux ?
- Euh… C'est-à-dire que j'ai jamais…
- T'as jamais fumé ?
- Non, je suis un enfant sage !
- C'est ce qu'on va voir !

Je pris le joint et tira dessus. Je me suis étouffé évidemment. Elle rigolait, elle se moquait. J'ai retiré et retiré encore et encore. Je me sentais bien, comme apaisé. Rien ni personne ne pouvait troubler ce moment d'extase intérieure que je vivais. J'étais juste bien.

            Ana se décolla de moi et se tourna vers moi. Elle commença à m'embrasser, c'était bon, comme dans mes rêves les plus fous. Elle était assise sur moi, face à moi, en train de m'embrasser, en passant ses mains dans mes cheveux, sur mes bras et sur mon torse. Tout s'emballait, tout tournait autour de moi. Des soupirs se faisaient entendre, tout était trouble, folie et volupté. Je sentais du plaisir mais ne comprenais rien. Un corps transpirant, nu contre moi. J'étais là sans l'être, je ressentais sans vraiment voir. Des bruits, des mots, des sensations, un moment magique, trouble et inoubliable, perturbant et pourtant si parfait. Une osmose entre elle et moi, entre nos corps qui a engourdi mon esprit sans altérer mes sens. Puis plus rien, le noir.

VIII – La vie normale

‘'Mais parfois se produit pourtant une manière d'évènement mystérieux et éblouissant qu'on contemple encore longtemps après avec un émerveillement lié au respect qu'impose le sacré''.

            Le noir, le vide. Mon cœur bat lentement, je suis comme comblé dans cette noirceur. Rien n'existe, tout que néant autour de moi. Mais je sens mes esprits me revenir, des bruits me parvenir et des images m'envahir. Les bruits se font de plus en plus forts et les lumières de plus en plus présentes. Je réalise, l'esprit encore un peu embué, je me réveille. Mes yeux s'ouvrent et la lumière m'aveugle. Puis je distingue des choses dans la pièce où je suis : des meubles, une table, un canapé. Je suis perdu. J'étais dans un lit de draps blancs et, en tournant la tête sur la droite, j'ai vu Ana, endormie à côté de moi. Elle ouvre timidement ses yeux. Son visage est radieux. Nous n'échangeons pas un mot, des regards suffisent. Je ne sais pas si ça vous est déjà arrivé à vous mais je suis comme dans un rêve, comme dans du coton. Rien ne peut briser ce coin de paradis qu'on s'est construit.

            Je l'ai ramené chez elle puis je suis rentré. Je repense à cette soirée, à cette nuit avec Ana. Que faisions-nous, où allait-on ? Je n'en savais rien et je ne voulais pas savoir. C'était la première fois qu'une fille s'intéressait à moi. J'étais allé à une soirée, j'avais des potes, des gens me disaient bonjour en arrivant au lycée. Mais que se passait-il ? Comment ma vie avait changé autant en si peu de temps ? Je réfléchissais mais profitais du même temps. Ana renvoyait l'image d'une fêtarde superficielle mais je la connaissais, du moins j'en avais l'impression. Elle était différente, intelligente et sensée. Je l'aimais.

  • Il y aurait beaucoup à dire sur ce texte, j'aime la façon de décrire les émotions, pas étonnant qu'il y est du Fauve là dedans...

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Holi le festival des couleurs inde

    joanandmom

    • Merci beaucoup !! On va dire que je préfère décrire une émotion que de décrire la personne. On en apprend toujours pus de quelqu'un quand on sait ce qu'il pense que quand on le voit ! Et Fauve a joué, joue et jouera encore un grand rôle dans ma façon de penser !

      · Il y a plus de 10 ans ·
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      ju1139

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