Elle m'a quitté...
elcanardo
La page blanche… Fantasme ou cauchemar, c’est selon… M’en voilà victime. Des années d’écrits, de récits, de personnages, d’émotions … des années consacrées à cette passion stoppée net, réduites à ce cadre blanc où seul le néant est présent. Que vais-je devenir si je ne peux plus assouvir mon besoin ? Le crayon reste muet sur les « plages » blanches de mon île de la création. L’azur de mon imagination jusque là sans nuage s’est obscurci d’idées noires et de frustrations récurrentes. Ma tartine à lettres n’a plus de beurre. Inconsciemment, je me refuse peut-être désormais à toute évasion, à toute liberté.
Plus aucun de mes chantiers ne trouve grâce à mon envie. Malgré quelques idées, allant du traité de philosophie au conte pour enfants de la plus belle des princesses, en passant par le roman à l’eau de rose ou par l’apologie d’un dictateur sud-américain déchu d’une république bananière, je reste en panne. La source est tarie semble t-il. Le clavier s’est emmêlé les touches au point où je ne me reconnais même plus moi-même. Que suis-je devenu ? Où me suis-je perdu ? Quelle mauvaise tragi-comédie suis-je en train de m’infliger ?
Ni le petit bureau sous le toit, ni l’alcôve du patio et sa douce fontaine, ni la terrasse sous les amandiers ne trouvent grâce auprès de mon inspiration déficiente. Je me sens perdu en cette maison si grande, nid de toutes mes créations, désormais ruinée d’âmes et de muses. Le navire de ma créativité voguait jusqu’à alors avec une voile ventripotente et rubiconde. Le vent s’en est allé gonfler d’autres voiles, jouer de la musique dans d’autres harmonicas de la création. Moi, coquelicot entre les mains de l’absence, j’ai perdu mes pétales flétris par le manque d’idées. Que m’importe de savoir où se trouve le nord ? Que m’importe de savoir si l’automne est toujours de saison ? Le voyage avec mes chimères s’arrête tant que le chauffeur de cette embarcation, que je suis, connaitra les démons de la désertification. Ceux-ci comme mûs par des forces magnétiques et maléfiques m’encerclent…
Depuis, la nuit dans mon esprit semble éternelle.