En attendant qu'il neige

Ferdinand Legendre


Montre-moi qu'il y a encore un peu de souffle. Dis-moi que ce sera fort à nouveau, promets-moi l'ivresse. Déshabille-toi encore à la lumière de la lune, entre deux rideaux fins, dessine-moi la mer ou emmène-moi la voir. Ces moments qu'on a peints, ces instants qu'on a feints ou bien vraiment vécus. Ces plateaux et ces plages, où nos passions mirages ne sont pas mal perçues. Où rien de c'que tu dis ne peut être plus beau, où tu m'as tout appris, coincés dans nos tableaux, noyés dans l'horizon. Ecoute-toi quand tu parles, chaque mot est une papille, lécher doucement l'arme, en serpents et en vrilles, je n'peux entre les tiennes que laisser se faner, les mots qui se retiennent, comme sur nos peaux tannées.

Comme si dix mille gouttes auraient fait l'édifice, comme si la pluie de doutes, les plaintes que l'on tisse, ne pouvaient plus couler.

Se protéger de quoi ?

Lentement se désagrègent,

Les lumières sur le toit,

En attendant qu'il neige.

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