Epöna (Dr Forlen)

Caïn Bates

           La cité d'Epöna est le dernier refuge de la pureté, rare ceux sont qui connaissent son emplacement. Des milliers de familles ont péries à sa recherche, longeant le littoral bordant l'ouest du continent. De nombreuses légendes la disent gardée par des créatures fantastiques allant des minuscules démons aux géants qui se relaient pour la porter. Les vents et les mers balaient ses cheveux azurs et sa croupe de pierre, de granit et d'ambre; les dernières plantes vivantes l'entourent pour leur offrir un sol confortable, l'herbe fraiche lui chatouille amoureusement les pieds et des milliers de fleurs embaument son entourage.
            Son regard apaisant nous ferait presque oublier les milliers de cadavres jonchés derrière elle, Epöna est vierge de toute souillure. Ses yeux sont froids et ses manières brusques, son parfum de paix couvre l'odeur de la Mort d'Iroise, un fléau qui arpente les cieux, les terres et les mers qui voudrait s'approprier sa beauté en les écrasant sous ses doigts glacés d'os taillés. Belle de jour, Bête au crépuscule, Epöna est l'amante meurtrière des Hommes qui les embrasse de ses promesses de Renouveau et de Bonheur retrouvé.

             Je n'ai jamais compris pourquoi mes parents l'ont quittés pour aller vivre à la Capitale mais ils auraient dû se douter de ce qui les attendait; je crois avoir entendu leurs cris au loin, des sons de crocs lacérant leurs victimes, le ricanement des créatures de la nuit. La fugue aura été ma providence, j'ai prêté serment à la cité des eaux, je la servirais dans cette vie et  les autres, je serais son bras prêt à frapper, une main tendue au dessus des falaises escarpées arborant ma plus belle lanterne. Je me suis tout de même enfui peu de temps après, détourner la voie des envahisseurs était une chose mais leur ôter la vie en était une autre, je ne suis pas un assassin. J'ai rejoint un groupe de récolteurs et j'ai déserté une fois que mon groupe avait pris assez de distance avec sa muraille invisible. Armé uniquement d'un briquet et mon instinct de survie, je devais savoir pourquoi mes parents partaient vers la Capitale.

         Bien des années plus tard, je suis revenu en paria, j'avais fui la Capitale avec l'envie de la détruire, Epöna n'a pas le choix de m'épargner, Ruine me revient.

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