Paris sous le soleil

arthurm

Un été torride

« Adrien Miller » as-tu dit tout simplement, la première fois. C'en était fait de moi. « Je n'ai pas de culotte » as-tu continué, « je l'ai enlevée à la va-vite dans ma voiture, sur le parking, sous le regard d'une maman qui rangeait ses courses et qui a rougit » J'ai rougi aussi. Tu l'as vu et tu t'es amusée de la situation de la soumise maitrisant son sujet. J'ai regardé tes cheveux. Réflexe. Comme je te l'avais ordonné. Désordonnés. Ne demandant que le peigne. Mon peigne. Ma main. Ta douleur à chaque nœud qui cède. Ton silence. « Une semaine sans les laver, sans me peigner. Tu me fais chier, Adrien. » Agacement. Sincère. Mais curiosité. Rappel à l'enfance où ta mère passait de longues minutes à te coiffer. Et sourire, encore, toujours. Envie de tirer ce que tu peux de ces souvenirs. Avec moi. Ma main. Ça ne sera plus jamais pareil. Pervertir les souvenirs, c'est leur donner plus de force. Une autre. Ma force. Ma chose. À moi. L'été nous était tombé dessus comme ça. Je me souviens, j'en souris encore, de l'ambiance des rues, des terrasses bondées, des hommes dont le verre de bière était le prolongement de la main et les yeux des girouettes affolés devant tant de passage féminin. Là des jambes nues, en short, en jupe, en robe, ici des seins dessinés sous de légers t-shirts, tops, cache-cœurs, chemisiers aux motifs fleuris, colorés, basics, rayés, jouant de transparence. Partout des cheveux volant au vent, des peaux magnifiques à peine maquillées tant le soleil jouait sur le moral et la peau. Des regards, des sourires, des défilés de mode permanents, des parisiennes en somme, dévoilant au monde pourquoi elles étaient les plus belles femmes du monde. Un été à Paris, c'est une chose à voir, à vivre. C'est Paris retrouvée, c'est Paris désincarné, c'est Paris bondée de personnes lentes, c'est la sueur dans le métro, c'est un nuage opaque au dessus de la ville que l'on observe du belvédère de Belleville, c'est une désertification de certains quartiers, et ces dernières années, c'est le ramadan. J'habitais dans le nord-est et après les longues journées, Paris s'offrait lumineuse de couleurs, de rires, d'étals posés à même le trottoir, vendant des pains, des sucreries, des viennoiseries, les parfums de couscous, de brick, de tajines, de fruits et de légumes, bruyante des discussions, négociations, échanges et rires des passants, des habitués, des habitants. L'été à paris, c'est le parc des Buttes Chaumont, noir de monde, à tel point que les images des plages bondées le soir au 20h n'impressionnent personne ici. C'est le temps du rosé pamplemousse, des pique-niques de poulet rôti, des récalcitrants à la fermeture au son des sifflets, des files d'attente longues comme le jour à l'entrée du Rosa Bonheur, les quais de Loire grouillant de vie. Je lui offrais tout cela, mon Paris, ma vie, mon été dans cette ville, elle qui n'avait jamais ou presque passé ce côté-ci de la Seine, trouvant les quartiers crades et dangereux, quand je trouvais les siens vide de sens et de vie, hautains et arrogants. Les peurs des premiers instants, de cette première rencontre, s'étaient envolées. Nous marchions main dans la main, j'étais le roi de la jungle à surprendre tous ces regards de mâle la déshabillant, la soupesant, la dévorant avant de s'arrêter net et d'ouvrir la bouche en apercevant ce collier autour de son cou, véritable petit bijou de cuir et de métal, disposant d'un anneau sur le devant, autour duquel, dans l'intimité, une chaine venait s'accrocher. Ces hommes regardaient son corps mis en valeur par mes mains, mes goûts vestimentaires et saluaient de leurs yeux lubriques ma façon de l'habiller. Ils honoraient sa chevelure impeccablement peignée, parfumée, que j'avais passée tant de temps à préparer. Ils vouaient un culte éphémère mais total à sa façon d'être, sa démarche souple, sa fierté, son port de tête, royal, son être tout entier. Ils enviaient sa liberté. Car voyez-vous, c'est cela qu'il faut dire. Là où moi j'étais esclave de mon désir de la soumettre, elle était maitresse de sa volonté d'être soumise. C'était son choix, son plaisir. Quand le mien était de la regarder se faire désirer par d'autre, son choix de porter ce collier et de se faire désirer était sa façon de me faire plaisir. Nous étions complémentaires. Entièrement. La plupart des abrutis qui la baisaient mentalement en la croisant ne comprendraient jamais, ce sentiment de leur être supérieur, d'avoir atteint une complicité, un respect mutuel de ce que nous étions, à la fois dans la vie et quand les portes du public se refermaient pour nous laisser tous les deux. La moiteur du jour ne cédait pas la nuit tombée, à la fraicheur et à peine sortis de la douche la transpiration revenait se coller sur la peau. Nous vivions donc nus et cela nous convenait. Elle riait de mon pauvre corps à chaque ondulation de son bassin, chose dont elle abusait outrancièrement. Elle roulait des fesses, ne serait-ce que pour aller chercher une bière dans le frigo, se penchait pour prendre son portable sur la table basse, me frôlait du bout des doigts (moi qui suis si chatouilleux) à chaque passage. Alors lentement, inexorablement, elle se levait pour un oui ou pour un non, me frôlait, roulait, repartait. Puis les frôlements devenaient plus secs, les roulements plus ronds, les ondulations plus marquées. Elle jouait de son rôle, me signifiant, sans dire un mot, qu'elle voulait. Elle avait ce droit. Elle en usait. Elle me frôlait une dernière fois, enfonçant ses ongles dans ma chair, celle de mes reins, la peau tendre de mon ventre, parfois celle de mon cou quand je restais assis, faussement insensible, le sexe rigide, sans aucune pitié. Elle disparaissait alors, à l'angle du couloir donnant sur les chambres et la salle de bain, sans un regard, faisant de mon portrait un tableau d'Hopper, seul et mélancolique devant une émission de télé. Lorsqu'elle revenait, je l'ignorais totalement. Elle avançait à quatre pattes, tenant dans sa bouche sa chaine, ses cheveux en désordre, anarchiques, avec un peigne, mon peigne, accroché à un nœud. Elle ne portait rien de plus qu'une marinière, ample, au col rond et se tombant tout juste sur le galbe de ses fesses. 24 rayures bleues, 23 rayures blanches. Fabriquée en France. En Bretagne. Pur coton. Chaude et légère. Ma marinière. Mon odeur sur elle. Preuve de notre amour sous le drapeau à l'hermine. Elle arrivait, doucement, le métal dans sa bouche, le cliquetis des boucles entre elles, le léger son mate. Elle se présente devant moi, s'assoit sur son séant. Lève la tête pour libérer sa gorge et me désigne l'anneau de son collier, sans aucune réaction de ma part. Alors elle va faire un tour, tourne autour de la table basse, me fixe de son regard vert, noir maintenant que je ne fasse pas attention à elle. Elle revient, et laisse tomber la chaine pleine de salive sur mon sexe. Elle remue sa mâchoire, endolorie, et me mords l'intérieur de la cuisse, puis très vite, me baise, ses lèvres chaudes et molles, à l'endroit même où ses dents se sont plantées. Son nez, son petit nez de souris vient soulever mes bourses et les fait glisser, pour qu'elles retombent sur sa langue. Une de mes mains vient se perdre dans ses cheveux, l'autre lui redresse le menton, et j'accroche enfin sa laisse. Sourire. Violent. Chaleur sourde de ce regard qui pétille et m'aime. Ses ongles me broient les cuisses. J'enroule le métal autour de ma main, me laissant une bride pour la corriger si besoin. Et je tire. Fort. Pour l'amener à ma bouche. Pour que ses seins pleins s'écrasent sur mon torse. Que ses reins viennent coller les miens. Je l'embrasse, enfin. Je mords ses lèvres, aspire sa langue. Je relâche mon emprise. Elle reste. Mon regard change. Tendre, doux, fébrile comme face à une apparition divine. J'effleure du dos des doigts les lignes de sa mâchoire, son nez, je dessine ses lèvres de la pulpe du pouce. Je retiens, j'enregistre encore ce territoire que je connais si bien mais que je découvre à chaque fois. Comme un cartographe amoureux, sa géographie me fascine.. Mon autre main marque au blanc le rebond de ses fesses. Je me mords les lèvres. Je me laisse envahir par ce désir de la posséder, lentement, comme les vannes d'un barrage proche de céder. Elle le sent. Elle frissonne. Elle sent, tout contre son bas ventre, les contractions du mien. Il faut ralentir, absolument. Ce moment est toujours le plus délicat à passer. Cet abandon de l'humanité pour satisfaire, de manière sublime, l'animal. C'est un pacte avec la bête. Une fois seulement, on ne l'a pas maitrisé. Je passe mes doigts sur la boursouflure qu'elle porte sur l'omoplate, cicatrice de chacune de mes dents plantées en elle, je me souviens des gifles, de sa peur, de ma propre violence et je recule. Un sanglot monte, qu'elle réprime d'un sourire si tendre, d'une caresse sur ma joue, d'un baiser sur mes seins, d'un croque sur mon ventre, d'une aspiration complète et totale de mon sexe, accompagné d'une légère pression de ses dents, de son corps qui se relève, de ses mains qui me prennent le visage, de son regard qui plonge et noie le mien, de ses lèvres sur mes lèvres, d'un « je t'aime » murmuré en attrapant le lobe de mon oreille entre ces incisives.

Je la soulève, elle, petite et je l'allonge, baisant sa peau, les larmes aux yeux, elle qui me sauve, elle qui me rend pire qu'humain, ce fil tenu qui nous fait aimer, s'aimer, je l'embrasse, je lui tire les cheveux, je relève son menton pour embrasser son cou, en partant de sous l'oreille. J'appuie sur ses côtes, sous ses côtes, là où le ventre est mou et où les poignées d'amour sont autant de force pour l'amant qui enfonce ses doigts, ses dents et sait très bien que les femmes aiment, quoi qu'elles en disent, être saisies. Je l'écrase de ma masse, mes bras tendus et mes reins collés aux siens quand le haut de mon dos se relève et offre à ses doigts, ses ongles, ses yeux, un torse bandé et contracté pour qu'elle souligne l'homme qui la possède. J'embrasse ses seins, arrogants et fiers, tendus vers le ciel, roulant sous ma langue. Je descends sur son ventre, qu'elle rentre, soulignant le dessin de son bassin. Sans ménagement, je lui écarte les cuisses. Je marque une pause, je prie, devant la vierge qui ne l'est pas, devant ce pour quoi il faudrait un pèlerinage. Alors doucement, le bout de mes doigts l'écarte encore. Le bout de mes lèvres, parfois mes dents, viennent pincer et croquer cette peau souple, douce, descendant, peu à peu vers le graal. Quand j'y arrive enfin, je me relève, et attaque l'autre jambe. À l'orée du bois, je sens des mains agripper mes cheveux. Je lappe. De toute la surface de ma langue. Puis je m'arrête. J'embrasse le pourtour, au bord des lèvres gonflées, là où jadis se situait une pilosité. Je relève son bassin, et du bout d'un doigt curieux je glisse le long de son sexe, à la recherche du miel.. Quelques allers retours et celui ci, timide d'abord, s'ouvre pour moi... alors je suce cette récompense, ce bout de moi en elle. Elle soupire. Je me rapproche la caressant toujours. Se gonflant de sang à chaque passage, j'entrouvre ces portes, pour découvrir, déjà un peu tendue, déjà si belle, sa rose, ce bouton de rose dépourvu d'épine qui ne réclame que l'amour de son jardinier pour s'ouvrir et grandir. Je le gobe. Je me joue de lui avec ma langue. Avec mes lèvres, telle une douce ventouse je le pousse à s'épanouir. Mes doigts curieux jouent, eux aussi, et suivent le ruisseau, tels des adolescents insolents, jusqu'à la découverte d'une autre grotte, singulière, sublime, plus intime encore, douce et chaude, serrée et accueillante pour ceux qui sauront lui dire « sésame ». Nous jouons, encore. Comme l'assoiffé face à Manon des sources. Ma belle Emmanuelle. Et quand tes doigts me griffent, quand tu te jettes sur moi, par amour, par envie, par plaisir de me satisfaire. Tu tends ta main jusqu'à la mienne pour me donner ta chaine, et tu me caresses le torse, avant de venir engloutir mon sexe de toute ta bouche. Tu me baises, littéralement, et mes va-et-vients au fond de ta bouche ne sont que des anecdotes tant c'est toi qui me baise, tirant parfois sur ta propre chaine pour t'étouffer et me rendre fou. Car fou je le suis. Alors tu me regardes. Alors tu enfonces toute ta bouche sur mon sexe et tu tires la langue pour me lécher les boules. Alors tu suffoques un peu et sans honte je t'appuie sur la tête pour que tu y restes. Je te baise. Et ta tête n'est qu'un jouet au service de mes envies. Et tu baves. Et tu pleures. Et tu domines tant pourtant. Je te vois te toucher, cette zone interdite un peu plus tôt. Sans un mot un seul, je te retourne. Je m'allonge, seul, et toi, dans l'attente de te faire prendre, tu attends aussi. On pourrait croire à du grotesque. Mais tu me vois, et alors tu viens, posant tes mains sur moi, t'assoir. Tu saisis mon sexe et en me souriant, tu le glisses en toi. Centimètre par centimètre, parfois sortant même, ou faisant semblant, tu te joues de ce pauvre être et de moi-même. Tu connais décidément très bien ton rôle et tes libertés accordées. Puis tu restes, comme en suspension, à mi chemin du fond de ton être, et tu viens poser tes mains de chaque côté de ma tête, et tu la baisses, cette tête, pour me croquer la lèvre, embrasser mon nez, me sourire et te relever, renversant ta tête, faisant se dresser tes seins, se dessiner les muscles de ton ventre en t'enfonçant d'un coup. Mes mains sur tes hanches, c'est à moi alors de te soulever et de commencer mes va-et-viens. Prisonnière tu subis mes assauts de plus en plus vifs, claquant et intenses, et je vois ta gorge se serrer parfois pour retenir un son qui ne doit pas sortir. Mes ongles dans tes hanches, tu viens me déchirer le torse. C'est le signal. Je nous retourne et t'allonge, posant tes jambes sur mes épaules, et te souillant de plus belle, t'étranglant légèrement et te fessant de l'autre, regrettant de n'avoir pas trois, quatre, cinq, six mains pour m'occuper de toi. Trop jaloux encore, pour confier ces mêmes mains à d'autres. Je te possède. Tu ne dois pas dire un mot et je sens ta souffrance de ne rien exprimer. Mes coups te rougissent, mes va-et-viens aussi et comme une libération tu gémis de ce son haché semblable à un sanglot, tes doigts me mordent, s'agrippent. Les positions s'enchainent, les rires, les serviettes qui épongent la sueur, la douceur, la tendresse, la violence de te réduire à l'état d'objet, et ta voix, qui perce, malgré mon interdiction. Jusqu'au moment où je jouis. Moi et peu importe où. Parce que je tente tout. Parce que tu m'offres tout. Parce que la croix de Saint-André ne t'écartèlera jamais autant que ce paroxysme de douleur et de tendresse. Parce que c'est intérieur, parce que c'est sublime, parce que ma jouissance ne se fait qu'avec la tienne, parce que lorsque je jouis en toi et que je viens le récupérer pour que tu lèches mes doigts c'est ton choix, tu es une chienne, une salope, un objet mais tu es aussi une princesse, une reine, une impératrice.

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