Erratum

Christian Gagnon

Faut regarder derrière, c'est là que ça se passe!

  Je ne regarde ni ne sais où je vais! J'avance à l'amour, à l'aveugle, je me cogne à tout ce qui est vivant. J'avance à la musique: pas de droites, juste des croches. Je préfère regarder le ciel et perdre pied que regarder mes pieds et perdre le ciel. La vie est absurde et n'a de sens que si on en lui donne, je suis paresseux, j'ai préféré ne pas lui en donner, j'ai laissé le Grand Hasard prendre mes guides.

Je ne sais pas où je vais, je ne l'ai jamais su. Je n'ai jamais su que j'allais naître, c'est ma mère qui le sentait. Je n'ai jamais su que j'allais tomber en amour, ce sont toutes les femmes qui m'ont volé mes yeux qui le voulaient. Je n'ai jamais su enseigner, ce sont mes élèves qui me l'ont montré. Je n'ai jamais su que mon père partirait un jour et je ne sais pas quand il reviendra. Non je ni ne regarde ni ne sais où je m'en vais, je laisse ça au Grand Dieu des routes. Et celui (elle) qui le sait, il n'est pas né comme tout le monde entre la fiente et l'urine, il est né de la cuisse de Jupiter.

Mais en revanche, je sais très bien d'où je viens. Il y a une rivière qui coule derrière moi, et il y a tous ceux (elles) que j'aime, disparus ou non, qui marchent dessus comme Jésus. Et la rivière va pisser dans le fleuve qui crache dans la mer qui se saoule dans l'océan. Et l'océan se ressource dans cette rivière. Et si la source se tarit, il n'y a plus de vie. Alors oui, je rétrovise, je zieute derrière: ouf, la marée monte,tout le monde est là et mon père bat la marche.

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