Escargot

Lorsque j'étais petite et que je gambadais dans le jardin de mes grands parents, je m'arrêtais toujours devant une cage isolée remplie de feuilles de salade et de petites coquilles. J'admirais lesdites puis remarquais qu'une tête sortait de devant. L'animal avait des cornes et cheminait sur la laitue disposée. J'avais touché leur tête un jour et avait trouvée cela dégoûtant – un bruit visqueux c'était formé lorsque mon doigt toucha ce corps disgracieux.

Ce sont des escargots. Et ils avançaient avec peine tandis que j'en attrapais un pour le glisser sur ma main. Il y avait de la salive qui sortait – on pouvait suivre le chemin de l'animal comme le petit Poucet avec ses cailloux – et des petites bulles blanches séchaient sur ma peau, elle s'aplatissaient. On aurait dit un sillage de mousse comme lorsque ma mère lavait les vitres avec une éponge et que une patte crémeuse se fixait sur les fenêtres. Elle séchait et devenait dure et sale elle aussi.

Un jour, l'un d'eux s'était collé à ma fenêtre et l'avait escaladée. Je m'étais étonnée de ne pas le voir tomber et puis j'ai revu sa bave grasse et muqueuse. Son corps était musclé et il poussait sur chaque bord pour monter plus haut, plus haut et encore plus haut. Je ne cherche jamais la hauteur, mon poids me rattrape et je m'écrase souvent sur le sol pour souffrir d'un léger hématome bleui par le temps sur les fesses. L'escargot était moche de la où j'admirais son corps, très moche.

Ils ont de charmantes coquilles. On dirait qu'ils se la sont faites tatouer de fines rayures chez un professionnel qui a travaillé pour les rendre jolies avec son aiguille. Je me demande s'il n'a pas fracassé beaucoup de ces légères maisons. Les escargots, c'est moche, mais j'aime les voir se cacher dans ce cocon beige tatoué.

Je ne veux pas les écraser même lorsque l'un d'eux dépose ses excréments sur mes vêtements – de petits points noirs sortis de je ne sais où. Ils n'ont pas la taille de leur yeux, ceux qui sont au sommet de leur cornes. Ils ressemblent à l'idée que je me fais des extraterrestres, leurs globes oculaires sortis de leur tête verte. Les escargots ont une couleur bizarre et ces yeux paresseux me paraissent mornes. Je ne joue plus avec eux comme je le faisais avec mon index. J'appuyais sur chaque extrémité pour qu'elle s'enfonce.

Je me revois toujours debout devant cette cage en fer sans songer à l'idée qu'on pouvait se nourrir de ces petits mollusques lents. Ils pullulent nos jardins, pourtant, ils sont là, coincés derrière les lisières de métal. Des êtres prosaïques, ils le sont, avec leur carapace couverte de dessins.

Petit être.