Esquisses de scénarii pour la ville de demain

Thibault Fournier

La question de la proximité suscite depuis déjà un certain temps une grande attention de la part du monde politique, culturel et socio-économique. Ainsi, la notion d’économie de proximité a été mise en avant afin de promouvoir un mode de collaboration et de production davantage tourné vers les relations directes et l’ancrage territorial. Les clusters, tels qu’ils vont être développés dans le cadre du Grand Paris, en sont une émanation concrète. Outre l’économie, la politique s’est également appropriée la notion de proximité pour que celle-ci favorise l’émergence de nouveaux modes consultatifs et décisionnels, beaucoup plus centrés sur les citoyens et leur besoin croissant d’information.

            La ville, n’a pas échappé à cette tendance puisqu’avec l’arrivée des problématiques liées au développement durable, la proximité a pris une place de première importance en devenant un nouvel élément de structuration du tissu urbain et des relations humaines. Alors que jusqu’à présent nous étions dans un modèle où la question des frontières d’une métropole aboutissait le plus souvent à l’annexion et à l’occupation de nouveaux territoires pour atteindre la taille optimale dans une perspective de planification générale, la logique s’est renversée pour favoriser la fabrication d’une ville plus dense fondée sur un mode d’organisation prenant en compte les différents types de proximité. Partant de ce constat, je me suis alors demandé à quoi pourrait ressembler cette « ville des proximités » dont il est tant question dans les réflexions et les discours actuels. Deux scenarii antagonistes me sont alors venus à l’esprit.

LA VILLE OUVERTE

            La ville ouverte est la première image qui me soit venue à l’esprit en essayant de me représenter la ville de demain. Ville où la connexité est à son paroxysme, il s’agit d’un espace davantage ouvert sur lui-même. Ici, les transports en commun sont devenus le meilleur moyen pour se déplacer d’un point à un autre en raison d’un maillage du territoire très fin. Alliées aux nombreux avantages des nouvelles technologies de l’information et de la communication, la fiabilité et la régularité de ce réseau ultradéveloppé permettront aux habitants de davantage maîtriser le temps et de se détourner de la voiture, en particulier dans le centre-ville où la circulation fait augmenter le temps d’attente. La deuxième conséquence de ce réseau est qu’il permettra de relier le territoire dans son ensemble et de cette manière de réduire les différentes fractures pouvant exister.

            La proximité trouvera ici tout son sens puisque la ville ouverte offrira en son sein la plupart des ressources dont un citadin a besoin pour vivre et s’épanouir, à savoir commerces, services publics décentralisés, espaces verts, art urbain, terrains de sport…, le tout à distance raisonnable, ce qui n’est pas encore le cas dans de nombreuses villes.

            Enfin, cette ville sera reliée directement avec ses territoires agricoles. L’idée est ici de ne plus considérer territoires urbains et agricoles comme opposés. En effet, ils sont plutôt complémentaires, les territoires agricoles pouvant permettre d’approvisionner la ville en denrées alimentaires grâce au développement de circuits courts et donc plus respectueux de l’environnement et les villes investissant davantage dans ces espaces périurbains afin de les dynamiser tout en les préservant.

LA VILLE DES PROXIMITES FERMEES

            Le premier scénario que j’ai développé est fortement imprégné de toutes les conceptions relatives à la ville durable. Cependant, concilier ville et proximité ne veut pas forcément dire amélioration des conditions de vie des citadins. Effectivement, un second cas de figure m’est venu en tentant de dépeindre la ville des proximités. Il s’agit de la ville des proximités fermées. J’entends par là, un espace qui perpétuerait les travers actuels de notre développement urbain. De cette manière, les bidonvilles continueraient à s’étendre à côté des quartiers sécurisés à destination des populations aisées. Certes, il y aurait une proximité géographique mais aucun contact entre ces deux mondes, les riches se protégeant toujours plus des plus pauvres en sécurisant leur logement et les alentours et une partie de la population se sentant exclue. La mixité sociale serait ici une douce utopie n’arrivant pas à se concrétiser dans sa totalité. Ville et campagne seraient en tout point opposées avec un territoire attractif vidant le second de sa population et de sa main d’œuvre. Ce scénario existe déjà, c’est celui des villes du sud comme Bombay par exemple.

            Ainsi, proximité n’est pas forcément synonyme de convivialité, de viabilité et d’échanges. Cela dépendra des engagements qui seront pris par les municipalités et leur volonté à faire de la ville un espace d’altérité.

  • Tout reste à faire, et puis la ville ne va pas toujours dans la direction qu'on voudrait lui faire prendre. Les banlieues n'ont pas grandi Paris...

    · Il y a presque 11 ans ·
    20130516 172635

    Aliette Griz

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