Esquive

Catch You

On expulse cette parole comme on expulse l'air emprisonné de nos poumons quand on reçoit en pleine poitrine le corps d'un ami ou d'un amant.

I Catch You.

Je te tiens. Je te lâcherai pas.

I Catch You.

Libération. Enchainement. Croisement de membres. Au plus près des corps.

Catch Me.

Défi. A relever.

La musique a effrayé le chat. S'il y a une chose dont je ne me lasserais jamais, c'est le rituel du coucher. Chat roux aux yeux verts qui donne un grand coup de tête et qui va se rouler en boule le long de ta jambe. Bonne nuit. çà fait travailler les écarts, tout çà.

Un peu brouillon, un peu perplexe. Vécu son premier vol, sa première vraie catastrophe. Vécu son premier cinéma barcelonais. Vécu. Et chaque fois, ce déchirement : je ne veux pas rentrer. Laissez moi ici, dans cette ville. Laissez moi, jouons à cache cache. Laissez moi m'enfiler dans ces allées tellement étroites et disparaitre. Oubliée, égarée. Perdue pour mieux survivre. Mais non, les jours défilent, pas le temps de tout faire. J'y arrive pas. Faut penser aux cadeaux d'adieu, la liste est déjà faite. Penser au fait que Noël va perdre sa beauté familiale cette année pour le caprice d'une sœur qui continue à mentir ouvertement.

Je comprends pas le mensonge. Pourquoi me donner raison de ne pas faire confiance? Parce que c'est un fait, je ne fais confiance à personne et surtout pas à moi. Je ne fais confiance à personne. Dépendre des autres est un enfer. Les déceptions sont partout. Et quand ma propre sœur choisit de mentir à une question stupide, j'en ai la bouche qui reste béante. Parce que je sais quand on me ment.

Ici la vie suit son cours. Je soutiens ma coloc qui a vraiment eu une année terriblement mauvaise. Entre les décès, l'esclavage professionnel et le vol de sa pochette ordinateur qui contenait tous ses objets de valeur.. Elle a eu plus que sa part. La nuit tombe trop vite, le froid refuse de s'installer. Au final, avoir presque vingt degrés dans les rues, à Noël, c'est normal. Il fait froid sous la douche le matin, froid quand on sort du lit. Et quand on sort harnaché pour lutter contre un froid qu'on pense responsable de celui de la maisonnée, on finit en sueurs aux portes de l'hôtel, l'écharpe à la taille et l'imper au vent..

Je suis passée à autre chose, çà y est. Enfin. Je respire et je profite de mes derniers jours. Je grave les couleurs, les rires, les intonations et les éclaircissements. Un soleil aveuglant qui tape sur la mer lors du café d'après manger. Pas certaine de revenir un jour. Mais l'avoir expérimenté et l'avoir éclaté.