Et maintenant, que vais-je faire de toi?

En pénétrant dans l'appartement de ce garçon rencontré quelques heures plus tôt dans une soirée speed-dating, Caroline comprit l'insistance de ses allusions à l'attachement, l'art des nœuds ou encore sa fascination pour les maîtres du Shibari. Une drôle de sensation prit naissance au creux de son ventre, une sorte d'appréhension nuancée d'excitation. Il la regardait avec douceur, guettant visiblement la moindre de ses réactions, elle comprenait ce qu'il attendait d'elle, restait à savoir si elle allait accepter de figurer dans son jeu, et si oui jusqu'où ?

Silencieusement, Caroline fit le tour de l'unique pièce de l'appartement, admirant sans retenue les différentes estampes et lithographies hautement suggestives qui ornaient les murs, pendant que le beau garçon versait du Champagne dans deux coupes de cristal ciselé. Toujours sans un mot, elle déposa sur le confortable canapé de cuir gris son manteau de laine et son sac à main, accepta la coupe qu'il lui offrait et lui rendit son sourire. Il serait toujours temps de dire stop si elle estimait que les choses allaient trop loin. Sans trop savoir pourquoi, elle sentait la curiosité céder progressivement la place à l'envie de cette expérience, elle le lui fit comprendre en nouant ses bras autour de son cou et lui donna un baiser sans ambiguïtés sur ses intentions.

D'un mouvement souple démontrant une force insoupçonnée, il la souleva sans cesser de l'embrasser, et la porta jusqu'au grand lit futon où il la déposa délicatement. Elle lui laissait l'initiative, il l'avait comprit. La laissant allongée, il se remit debout et ôta sa chemise, dévoilant un torse étonnamment musculeux, puis se penchant vers elle, déposa un baiser au creux du poignet droit avant de l'enserrer de quatre tours d'une corde de soie sortie mystérieusement de sous le fin matelas écru. Le doux contact de la corde déclencha chez Caroline un irrépressible frisson qu'elle ponctua d'un profond soupir. Il se pencha une nouvelle fois, lui embrassa cette fois-ci le poignet gauche, et de quelques nœuds habiles, elle sentit sans rien pouvoir ni vouloir y changer ses deux poignets se souder l'un à l'autre, maintenus délicatement mais irrémédiablement prisonniers par la corde de soie d'un blanc immaculé. Caroline se raidit quand elle le vit l'enjamber et s'agenouiller à cheval sur elle, mais son sourire la désarma une fois de plus, et elle le laissa faire quand il bascula ses bras entravés par dessus sa tête et qu'il les attacha au pied du lit, penché sur elle, son torse puissant à quelques millimètres à peine de son visage. Une telle promiscuité avec un homme presque inconnu la perturbait profondément sans qu'elle puisse réagir, tant l'expérience était déconcertante, et son guide maître en son art. Toujours à genou de part et d'autre de ses hanches, l'homme se pencha sur le côté et Caroline ne put réprimer un nouveau frisson assorti d'un franc sourire quand elle aperçut les minuscules ciseaux pour bébé qu'il tenait à présent à la main. Un sourire filou sur le visage, il découpa avec une étonnante précision le chemisier de Caroline avant de lui clore les lèvres d'un long baiser, étouffant tendrement à la source toute velléité protestataire.

Quand elle rouvrit les yeux, essoufflée, il avait à la main une nouvelle corde de soie immaculée. Toujours dans un silence velouté, toute volonté éradiquée par la puissance apaisante de son sourire, elle se laissa faire quand il déboutonna et fit lentement glisser son jean le long de ses jambes graciles. Elle sentit un baiser délicat sur chaque cheville, puis la douceur du serpent de soie sur sa peau. Elle était entravée, pieds et poings liés, uniquement vêtue des deux pièces de dentelle et de soie de sa lingerie.

A présent qu'elle était offerte à sa fantaisie, et sans se départir de son merveilleux sourire, il s'allongea à côté d'elle et commença à la caresser du bout des doigts, avec une nonchalance de propriétaire. Une nouvelle corde apparut, écarlate celle-ci, et entama un jeu sensuel, serpenta dans son cou, passa sous les bretelles de son soutien-gorge, fit plusieurs fois le tour de sa taille avant de s'insinuer dans son tanga, pour terminer son vagabondage autour de chacune de ses cuisses, dans un entrelacs de nœuds aussi complexes qu'esthétiques. Caroline commença à s'agiter, dans un mélange d'excitation et d'angoisse, mais d'une caresse sur la joue, il effaça toutes ses inquiétudes et elle se laissa retourner sur le ventre, lui offrant de la sorte son dos et ses fesses. Il s'installa confortablement à califourchon sur les fesses rebondies si gentiment offertes et prit un malin plaisir à ébouriffer les longs cheveux noirs de Caroline.

« Et maintenant, que vais-je faire de toi ? »

Il avait juste chuchoté, mais sa question eut l'effet d'une gifle. Il descendit d'une poussée le long des jambes de Caroline et lui empoigna les fesses à pleines mains, lui arrachant un petit cri de surprise. Elle se cambra dans une posture terriblement impudique, et d'un geste félin replia ses genoux en position fœtale. Désarçonné et décontenancé, l'homme se laissa tomber sur le dos à côté d'elle, la gratifiant d'un sourire plein d'admiration. Caroline profita de l'occasion pour lui sauter dessus, enserrant sa tête entre ses cuisses laissées intentionnellement libres de s'ouvrir.

« Et maintenant, que vais-je faire de toi ? »

D'un simple geste, il libéra ses chevilles, puis ses poignets et avec un sourire carnassier, lui demanda sur quelle extrémité de la corde rouge elle désirait qu'il tirât. Elle lui rendit son sourire quand il expliqua que l'une des deux ferait sagement glisser la corde, tandis que l'autre la débarrasserait des quelques grammes de dentelles qui protégeaient encore son intimité.

Caroline ferma les yeux, le laissant ainsi reprendre l'initiative, et ne put empêcher son sourire de s'élargir encore quand elle sentit la corde emporter comme par magie avec une lenteur insoutenable son soutien-gorge, sa culotte et enfin tous ses doutes sur la force du lien qui venait de se créer plus solidement qu'à l'aide de n'importe quelle corde...