Et si demain je devais m'éteindre ?
Claude Cotard
Et si demain je devais m'éteindre ?
Je me retourne et me demande ce que je laisserai, quel héritage ?
Quelles traces indélébiles de mon passage ?
La plupart des gens ont fait des enfants.
Des enfants qui auront à leur tour des enfants, qui auront des enfants.
C'est la continuation d'une chaîne.
Vous aurez été le fils, puis le père. Le grand père puis l'arrière grand-père.
D'où l'importance de ne jamais lâcher ses enfants. Quoi qu'ils fassent, quel que soit leur choix.
Et même si, comme dit le poète Khalil Gibran, les enfants ne sont pas vos enfants, pas votre chose, ils sont votre œuvre.
Vous avez été là pour leur premier pas. Là pour leur apprendre à marcher, à se libérer de l'infantilisme.
Vous avez été un maillon dans le tourbillon de la vie. Qu'importe ce qu'ils deviendront, ils seront à leur tour un maillon.
D'où l'importance de savoir être toujours là quelque soit les blessures et les déceptions. Vous faites partie, comme eux d'une chaîne dont ils sont les nouveaux maillons qui prolongeront la chaîne de la vie.
Je me retourne.
L'artiste, le bâtisseur laisse-t-il une œuvre qui soutiendra les hommes de demain ?
L'homme sème, mais qu'est-ce qui à poussé quand arrive l'automne ?
Oh il peut avoir fait de son mieux, avoir aimé, donner, pardonné beaucoup, peut être autant que que ses erreurs passé.
Mais quand viendra l'heure du bilan, qu'aura-t-il laissé qui peut croître ?
Quand viendra l'heure de s'éteindre et de rendre des comptes,que restera-t-il ? Que laissera-t-il sur cette terre ?
Est-ce de l'orgueil mal placé d'espérer avoir autre chose qu'un chien errant à son inhumation ? Un chat de cimetière ?
Je regarde ces vieux, seuls, qui traînent leurs derniers pas dans les squares.
Et chez eux, du lit à la table, de la table au fauteuil, et du fauteuil à la fenêtre pour retourner au lit.
Ils attendent la fin, le grand départ. Souvent les valises sont déjà prêtes.
Ils ont fait ce qu'ils ont pu. Profitent maintenant pour lancer leurs derniers rires. Leurs derniers clins d'œil.
D'un pas maladroit, parfois. Ils savent qu'ils n'ont plus rien à donner. Rien qui perdurera.
C'est trop tard, la plupart ont donné avant. Et quelle que soit la situation présente, ils ont des enfants quelques parts qui poursuivent la chaîne.
Et il y a ces autres, qui se veulent encore jeunes hommes, mais qui au fond n'ont plus d'illusions.
Ils jouent les beaux, séduisent encore, essayent. Ils rient, ils dansent. Mais ils sont seuls le soir au fond de leur lit.
Combien seront-ils à l'enterrement ? Parfois ils se posent la question.
Souvent, une seule main suffit à répondre, quand ce n'est pas encore trop.
Hier encore ils avaient trente ans. L'âge idéal pour se mettre à l'ouvrage.
Quarante ans, pour peaufiner l'ouvrage. Le laisser s'envoler.
À cinquante, commencez à récolter quelques lauriers.
Soixante pour contempler l'œuvre.
Peut-être pas parfaite, mais elle est là. Elle vie.
Septante, la dernière ligne droite. Ils sont lucides. Et selon ce qu'ils voient en se retournant, ils sourient ou ils pleurent, en silence.
Comme la vie est étrange.
Les uns qui n'ont rien demandé, on vu cette œuvre naître et croître.
Avec des luttes et des combats oui, mais sans avoir besoin de déplacer les montagnes.
Et d'autres encore ont passé leur vie à essayer, à tomber et réessayer encore sans jamais réussir.
Ils se retournent quand arrivent l'hiver, et il n'y a rien. Pas d'enfants, pas d'œuvres, ou stériles.
Se demandent alors "A quoi bon tout ce chemin ? "
Que de temps perdu !
Oh ils ont aimé, ils ont donné. Ils ont essayé bec et ongles, mais le vent n'était pas en leur faveur.
Pourquoi ? C'est un mystère bien trop grand pour eux. Ils sont comme des enfants qui n'ont rien compris à la vie qui s'ouvrait devant eux.
Comme ces joueurs de loterie qui ne gagneront jamais. Pourquoi ? Énigme et mystère.
Ils ont ouvert des boîtes et des boîtes. Toujours vides.
Et puis encore il y a ceux qui ont construit, bâti, et tout détruit.
Pour leur caractère, leurs visions nombrilisques. Les égoïstes. Parce qu'ils n'ont rien compris à la vie.
Il y a cette femme, 40, 50 ans, qui se croient en vie parce qu'elle à des amants, qu'elle plaît encore.
Des amants qui restent des semaines, des mois parfois et finissent par s'envoler eux aussi.
Elle prends des amants comme pour se mettre un voile et ne pas voir ses rides se dessiner.
Elle a du succès, pour le moment. Ne sont-ils éphémères quand elle se retrouve seule au matin dans son lit ?
Dans 10 ans, dans 20 ans qu'en sera-t-il ?
Ça va vite 10 ans, ça passe vite 20 ans.
Qu'aura-t-elle construit ?
Elle sera seule avec ses souvenirs. Peut-être un homme qu'elle aura gardé parce que la peur de finir seule l'aura rattrapé.
Non pas qu'elle l'aime vraiment, mais ça fait une présence et c'est mieux qu'un canari ou qu'un chat pour discuter.
Pour ne pas mourir seule dans un coin en attendant que quelqu'un s'aperçoive que vous existiez, avant que ce ne soit l'odeur de votre dépouille qui importune les voisins.
Pour l'instant, elle rit, elle danse, elle séduit.
Mais dans son lit, seule, la nuit.
À quoi pense-t-elle ?
Il y a ce vieux couple qui passe. Main dans la main. Comment ont-ils fait ?
Ils passeront Noël entouré, en famille, une grande famille.
Bien sûr il y a eu des tempêtes, des tornades, mais ils ont tenu bon la barre, parce qu'ils savaient eux où ils voulaient en arriver.
De compromis en tolérance. D'amour en tendresse. Ils se sont accrochés l'un à l'autre pour lutter côte à côte. Et ils ont gagné.
Je regarde quelques vieux couples autour de moi.
Oh oui, des tempêtes, des naufrages parfois, des raz de marée il y en a eut.
Mais ils sont restés soudés.
Et ils marchent aujourd'hui, dans la paix, main dans la main. Ils ont gagné.
Noël, parlons-en !
Combien seront seuls, abandonnés ?
Serait-ce une fatalité ou bien le moment de se remettre en question avant l'automne ?
Qu'auront-ils laissé au moment où l'étincelle s'éteindra ?
Ils ont tant d'amour à donner parfois, mais personne d'intéresser. Si, un chien, un chat.
Combien de noëls, d'anniversaires oubliés ?
Bientôt la nouvelle année et tant de questions à se formuler. De choses à changer pour un jour se retourner et contempler autre chose qu'un désert aride. Plus de temps à perdre.
Pour les uns c'est trop tard. Ils ne se posent plus de questions.
C'est déjà l'hiver.
Qu'il était beau celui-là. Il changeait de femmes comme il changeait les draps. Beau parleur, bel amant. Un vrai mâle que celui-là qu'on met ce matin dans la fosse commune en présence de trois chats et deux corneilles.
Et si demain je devais m'éteindre ?
J'y pense, je regarde. Pas inquiet, ce n'est pas encore l'automne. Mais j'y pense.
Et toi ? Bientôt le Nouvel An. Encore un. Tu te retournes, et que vois-tu ?
Un jour tes enfants partiront. Ils s''s'envoleront pour continuer la chaîne.
Qui sera à tes côtés pour poursuivre le chemin ? Avec qui partageras-tu les souvenirs en riant ?
Attendras-tu de ne plus avoir le choix et de prendre le premier qui voudra encore de toi ?
Tu papillonnes, tu t'en moques, tu te sens jeune.
Bien ! Mais demain ?
Et toi qui méprises et négliges ce que tu as ! Ta femme, tes enfants.
Et demain ?
Et si tu prestais un peu d'attention aux cadeaux que la vie t'a mis entre les mains ?
Te rends-tu compte de la préciosité de ces cadeaux ?
Mais peut-être envies-tu ceux-là ? qui, seuls à noël, racontent à leurs voisins de bistro leurs conquêtes
féminines ou comment ils ont dressé leurs femmes, leurs enfants. Et se noie dans l'alcool pour oublier qu'ils ont tout gâché et qu'ils sont seuls.
Peut-être envies-tu celle là, qui fait la belle devant sa télé avec pour seule compagnie une bouteille de blanc, trois huîtres et un cafard à couper au couteau.
Regarde ta vie, fais tes choix, demain l'hiver
sera là. Ne dis pas "il sera bien temps".
La nuit tombe parfois bien plus vite que l'on croit.
Te rappelles-tu la cour d'école ? Aurais-tu imaginé te retrouver là aujourd'hui, à ce moment-là sous le préau ?
Combien ? 35, 40 ans ? 50 peut être. Il est encore temps de te retourner, il y a encore du travail à faire pour qu'un jour, les regrets, l'amertume, l'aigreur ne soient pas ton quotidien, du lit à la table, de la table au fauteuil, et du fauteuil à la fenêtre pour retourner au lit.
Bonnes fêtes de fin d'années et joyeux Noël !
Que cette nouvelle période soit pour toi un temps de réflexions et de remises en question si ta vie n'est pas ce qu'elle devrait être.
Pour que tu réalises que tu dois prendre soin des tiens et que la vie t'a offert un cadeau magnifique en les plaçant entre tes mains.
Et même s'ils ne te le rendent pas toujours,donnent leur l'amour, la patience et la tolérance.
Aiment tes enfants comme tu aurais aimé l'être à leur âge, car ils ne sont que le reflet de celui que tu étais.
Souviens-toi de l'enfant que tu étais oui.
Aime ta femme, car elle t'a choisi, elle t'a aimé. N'oublie jamais les premières fois, les premiers jours où tu l'as connue.
Et même si elle a changé, tu as changé aussi. Mets ta fierté et ton orgueil de côté et parle-lui comme pour la première fois.
Comme à votre premier rendez-vous.
Peut-être t'es-tu égaré toi aussi.
Aime ton mari, car le fil qui le retient ne conduit ni à la cuisine ni au lit, mais au cœur.
Retrouvez-vous famille, pardonnez-vous vos querelles passées, posez vous la question : Et si demain je devais m'éteindre ?