Eurydice dans le désert

saharienne

Courir et dormir en même temps

C'est peut être la définition du rêve.

J'ai de la mélancolie

Pour ce qui n'a jamais été,

Je ne sais pas après quoi je cours,

Mais ce n'est jamais assez.

Je suis l'esclave de deux frères :

Le plus fou des deux me prend chaque jour.

Il prétend alors,

Immonde tas de chair glissant,

Qu'il me fait l'amour...

Mais à demi érectile seulement

Il ne se durcit,

Complètement,

Que lorsqu'entre deux râles simulés...

Je murmure, en toute sincérité,

Le nom de l'homme dont il partage le père...

Et puisque ces hommes ont, pensent ils,

Pris mon entière possession,

En même temps que ma vertu,

Je cacherais tout mon esprit et toute ma haine

Sous une apparence docile...

Pour mieux rire une fois seule la nuit venue,

Des queues, si fragiles,

Qu'ils jugent bon de me tendre,

Et que en retenant mes crocs

Presque par pitié

Presque pour sauver ma peau

Je gobe jusqu'à l'aine.

J'ai du sable jusqu'au fond de mon sexe creux

Mais je dois continuer à baisser les yeux

Et continuer à avancer et me taire

Parce que s'ils savaient, s'ils savaient,

Ce que je projette contre eux

Ils me tueraient probablement :

Ce serait ma punition

Pour ne pas l'avoir fait moi même avant

Et mon sang sera la seule source de ce désert...

Nous marchons depuis tant d'heures,

Aucun risque que quelqu'un

Ne vienne me sortir de cet Enfer.

Heureusement jamais

Ils ne se retournent vers moi,

Ils verraient alors la lueur assassine,

De mon regard sur leur échine.

Il n'existe aucun refuge

Je le sais car quand je rêve

C'est encore eux que je vois

Qui me regardent et me jugent

Et dans les miroirs ce n'est plus mon reflet

Mais les leurs qui m'observent.

Dans mes délires forgés par les rayons du Soleil

Je m'imagine que je pars en courant

Mais je ne sais pas après quoi je cours

Et ce n'est jamais assez

Le désert avance toujours plus

Et me rejoins.

Quand on ne sait pas après quoi on cours

C'est un rêve

Ou bien une fuite.

Et je crois bien que j'ai perdu.

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