EXTRAIT DE MON PREMIER ROMAN...

Jean Luc Bolo

Quelques semaines s’étaient écoulées, sur l’inéluctable rivière du temps, depuis cette rencontre avec le bel inconnu. Nonobstant l’indifférence  (faussement simulée) qu’elle feignit en sa présence, Stéphanie ne cessa de penser viscéralement à lui, depuis qu’elle fit le choix, contre toute attente, de braver la providence. Faute de pouvoir lécher compulsivement les vitrines, en compagnie d’Olivia (qui s’échinait ce jour-là, dans les cuisines du restaurant de ses parents), elle décida d’aller s’aérer l’esprit aux jardins du Luxembourg  à Paris, sous un soleil rayonnant qui scalpait généreusement, les velléités d’un automne timoré, décochant ses rayons sur les rires des enfants. Elle était assise sur un banc, lisant attentivement sur et entre les lignes, l’œuvre poétique d’Aimé Césaire (Cahier  d’un retour au pays natal), qui la captivait au point de faire abstraction de l’animation et du brouhaha ambiant intrinsèque, qui l’entouraient. Dans ce parc, tout était comme à l’accoutumée : joggeurs effrénés courant  après le temps, jusqu’à ce que les heures s’épuisent. Amoureux transis minaudant sur un banc, aux regards langoureux, enamourant  le ciel. Animations musicales, sans fausse note. Séance d’UV naturelle improvisée, sous un soleil radieux. Regroupement de personnes caressant lascivement  et chorégraphiquement les courbes du vent, par des mouvements séculaires et lancinants. Marchands de glace, pas trop glacial. Partie d’échecs qu’on mate. Et les touristes asiatiques immortalisant l’instant, de tous ces tableaux de vie.

Aucune de ces vicissitudes ne semblaient troubler Stéphanie de sa lecture captivante, jusqu’au moment où le destin semblait vouloir reprendre ses droits, sur un coup de tête…voire un coup à la tête ! Un ballon venait de rebondir (par derrière) sur sa tête, la réveillant brusquement de son hypnose littéraire. Elle se retourna, le regard légèrement courroucé, pour voir celui qui avait commis le sacrilège, d’interrompre sa lecture hypnotique.

‒Oh, excusez-moi mademoiselle, dit une jeune maman, en se couvrant confusément la bouche de la main droite, et tenant son fils de l’autre main. C’est mon fils de 4 ans, excusez le. Je lui dis pourtant de bien faire attention quand il joue, mais il n’en fait visiblement qu’à sa tête. Pardonnez-moi…vraiment…chuis désolé ! Ça va, vous n’avez rien ? dit-elle fébrilement.

A la vue de cette petite bouille joufflue, le regard de Stéphanie s’attendrissait soudainement, et l’orage qui semblait naitre il y a peu dans ses yeux, laissa place à de belles éclaircies, qui firent jaillir  dans son cœur  un arc-en-ciel rayonnant.

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