Extrait journal (16)
Ce N'est Pas Moi, Ordi Hacké
Un concentré des 40 pages que j'ai écrit lors de mes 3 mois d'hospitalisation psychiatrique en 2013. Un vrai témoignage de bipolaire/borderline. J'ai juste enlevé les passages qui parlait de mon ex ; en respect de mon partenaire actuel. Le fait que le texte soit long peut vous faire fuir ; mais soit ne partez pas et prenez tout votre temps ; soit lisez en diagonale, soit ne lisez pas ;-)
05 septembre 2013 – Où il est question de profitabilité.
Cette hospitalisation m'est-elle plus profitable que la première ? En temps de durée (déjà trois mois), oui. En terme d'envie de fuite, non. J'ai psychologue dans l'après-midi, et plus de psychiatre. Ma chambre reste donc barricadée, et je n'ai pas le droit au parc. 10 jours déjà sans avoir mis le bout du nez dehors. Et il fait chaud ici. Dans les chambres, dans la terrasse, espèce de serre puisqu'anti-suicide.
06 septembre 2013 – Tout l'or du monde.
J'attends, impatiemment, mais patiemment d'apparence, quelques sorties. Je ressens enfin la capacité de reprendre les rennes de ma vie. Je ne veux pas que l'hôpital me fasse chuter du cheval. J'ai reçu, à l'hôpital, une carte postale de mon petit frère. Je ne m'y attendais pas un instant. C'est cela qui vaut tout l'or du monde, je ne peux en écrire plus, il faut digérer ce petit bonheur. Je l'aime, mon T.
15 août 2013 – Vous savez pourquoi je n'écris plus ?
J'écris parce qu'hier était un mal de chien (souffrent-ils tant que ça ?).
Je dois fixer mon emploi du temps pour tenir le temps et pour me réconcilier avec les placards défaits de mon cerveau. Des cafards chez moi, j'ai le cafard. Cette hospitalisation est-elle plus profitable que la première ? Oui en terme de durée, non en terme d'envie de fuite.
Paradoxe : Je suis ici je veux sortir. Je suis dehors je veux revenir. Je dois vous reciter Nicole Charpail (Un Amour sans nom, Sulliver) :
« Mes parents sont les seules personnes pour qui ma disparition serait une tragédie véritable. », « «Il faudrait que je puisse expliquer à mes parents, d'une part que ma vie a eu du sens pour moi, qu'elle n'est pas un échec en soi, c'est-à-dire que je ne regrette pas d'avoir été mise au monde (aparté, je pense le contraire), et leur faire comprendre que c'est uniquement pour qu'elle garde un sens que je l'interromps. Mais comment expliquer cela ? Les fatras que j'écris sont très probablement incompréhensibles pour mes parents. », « Paradoxe : mes parents sont ceux qui me sont le plus étrangers à moi-même et les seuls qui ont besoin vraiment que je vive. », « Mais pour des parents, il s'agit d'abord d'une amputation, d'une privation de sens. Des parents (qui ont aimé leurs enfants), ne comprennent pas pourquoi ils survivraient à leurs enfants. ». Conclusion : « Mais je ne peux tout de même pas exister pour faire plaisir aux gens. ».
Confère à la punition que vous me laissiez en vie.
Deux de mes livres actuels sont thérapeutiques. Je vais avoir une meilleure estime de moi, et perdre mon sentiment d'abandon. Formi-for me-idable.
Ces paradoxes-là et ces dilemmes sont des tortures que l'on s'inflige. On a beau les retourner dans tous les sens, il n'y a jamais de réponse qui apporte de satisfaction, car la balance est équilibrée et on ne sait pas de quel côté la faire pencher. C'est odieux, comme supplice, et pourtant, tu l'as surmonté. Tu as, pour reprendre un de tes mots : sur-vécu. J'en suis heureuse pour toi, je suis fière (c'est bizarre, mais c'est un mot qui me vient spontanément), fière de tout ce que tu as écrit et du combat que tu as mené. Merci pour nous avoir offert ce si beau témoignage, merci infiniment...
· Il y a plus de 8 ans ·Sy Lou
Bien sûr... bien sûr que oui... Ma "machine" est repartie depuis que j'ai lu tout ce témoignage et je gamberge...
· Il y a plus de 8 ans ·Sy Lou
Mais non, cela prouve que je n'ai pas nettoyé correctement dans ma petite tête, vois-tu. C'est moi qui te remercie...
· Il y a plus de 8 ans ·Sy Lou