Exutoire nocturne

Hier soir, je n'avais pas envie de m'endormir. 1h15 toujours sur mon Instagram à regarder, à idolâtrer des images du monde entier. Je voue un vrai culte à ce réseau plus qu'à Facebook et les autres. Ça me vend plus de rêves que toutes les autres applications du monde !

Le temps passant, je me suis dit :  je vais faire comme avant fermer les yeux et sombrer en pensant à mes RV.

RV ?

Rêves Virtuels. Quand j'aurai expliqué cela, je vois déjà vos joues rougir, car je pense que nous le faisons tous.

Quand j'étais adolescente avec O. nous avions convenu de ce nom de code pour parler de ces mondes fascinants dans lesquels nous plongions avec allégresse la lampe de chevet éteinte. C'était un univers à l'opposé de nos vies, des personnages inventés, des vies dessinées par notre imagination débordante d'adolescente ayant une trop grande soif de vie. Le lendemain à l'aide de nos cahiers à spiral nous nous en parlions ... Oui O. et moi n'étant plus dans la même classe on se racontait nos vies en se passant ces cahiers dans les couloirs du collège et du lycée. Un jour chacune. Ces cahiers existent encore, griffonnés de mots d'ado, de dessins, de paillettes, de stickers, de listes de nos envies, de nos copains, de nos chagrins ... Ce sont certainement mes plus beaux trésors, mes plus beaux souvenirs, ces cahiers ont une valeur indéfinissable.

Mais ne perdons pas le fil de ma vie nocturne. En grandissant ce petit rituel ne m'a jamais laissé et pendant les périodes difficiles de ma vie j'enviais ma couette et le confort douillet de mon matelas pour me ressourcer dans un monde parallèle. J'avoue que pendant ma thèse, je m'accordais des siestes crapuleuses simplement pour rejoindre ces mondes que j'inventais de toute pièce. Des Lego à l'infini !

Célibataire j'envisageais une histoire d'amour passionnel avec des mecs  n'existant pas en vrai, des histoires avec des dialogues romanesques "tu es ma femme et pour toi je donnerai ma vie"... Pffff ! me direz-vous ! mais je ne trouve rien de plus beau qu'un homme se laissant aller face à son amour... certes c'est cul mais c'est surtout très rare. Chacun ses RV,  j'ai envie d'ajouter.

Parfois mes RV tournaient autour du boulot, de voyages, parfois ils me permettaient de réparer une journée calamiteuse "j'aurai dû dire ça ... faire ça... " Vous l'aurez compris j'ai une imagination débordante et étant extrêmement rêveuse, dans la lune ce petit jeu nocturne pouvait être alimenté à jamais.

Et puis depuis presque 1 an, ça m'avait passé.Comme si cet exutoire nocturne n'avait plus de sens. Une délivrance car dés fois je me faisais du souci pour moi-même, préférant ma vie nocturne à la réalité des choses. Et donc, hier soir, ne trouvant pas le sommeil, me mettant en boule dans mon lit je me suis dit "tiens à quoi pourrais-je bien rêver pour sombrer en paix ?". Les RV mieux que le Valium, mieux que tous les somnifères !

- Un mec ? bah j'en ai un, il navigue certainement dans ses songes à l'opposé du lit...

- Un voyage ? Des vacances ? non trop déprimant, j'ai pas de tunes je suis pas prête à revivre mes grands trips américains et australiens...

-Un boulot ? Ayant pas obtenu le job de rêve et de déception en déception (vis ma vie de free lance) je ne sais encore moins quoi faire. Ce job de rêve était une telle opportunité pour ma carrière et pour la parenthèse enchantée dans mon quotidien... n'en parlons plus.

- ...

Et de fil en aiguille j'ai écrit cet article. Je crois qu'il était mieux rédigé dans mes RV...

J'imagine mon père lire ce billet, mon père à qui je racontais parfois mes cauchemars quand nous vivions que tous les deux et qui me répondait  "moi la nuit je dors."

A tantôt.