FANTOMES OU FANTASMES
Hervé Lénervé
Les fantômes sont des esprits errants qui furent un temps des personnes en leurs rangs. Ils habitent dans de grandes maisons, délicieusement surannées que l'on dit hantées pour la bonne raison que les esprits n'ont pas envie de cohabiter avec une tribu bruyante qui vient perturber leur sérénité. Conséquemment, les revenants font tout pour effrayer les arrivants, en hantant justement les lieux. Bruits insolites la nuit, portes qui se ferment toutes seules, objets qui volent dans les airs et ainsi de suite, bref l'arsenal d'effets classiques que peut encore produire le fantôme basique.
Cela commence comme toute histoire de fantôme par un jeune couple qui achète pour une somme dérisoire quant au bien, une propriété magnifique, à rafraichir. Une demeure délicieusement désuète, mais avec un potentiel extraordinaire, comme l'a dit l'agent immobilier, en omettant, bien évidemment, de mentionner que la maison avait également une autre extraordinaireté, celle d'avoir la très mauvaise réputation d'être toujours habitée. Mais qui croit encore aux histoires de fantômes ? Pas nous, assurément !
C'est donc euphorique que le jeune couple modèle accompagné de ses deux enfants, une gentille fille et une méchante peste de garçon, prend possession des lieux possédés, avec grand fracas. Meubles que l'on tire, portes que l'on cogne, cartons que l'on renverse et les enfants qui courent partout en tous sens pour découvrir et s'approprier leur nouvel espace de jeux dans l'excitation de la nouveauté. Bref l'arsenal de nuisances habituelles qu'occasionne tout emménagement d'une nouvelle habitation. Enfin, dans un vacarme à réveiller un mort, chose valant d'autant plus pour celui qui ne l'est qu'à moitié. Finies, pour le spectre, les siestes paisibles ou les repos réparateurs, ainsi que les méditations transcendantales ou les transports transiliens pour les Parisiens. Le demi-vivant doit repartir à la chasse des trop-vivants. Tiré de ses songes, il descend, de fort mauvaise humeur, du grenier, où il préfère séjourner, par confort, pour voir à quoi ressemblent les nouveaux intrus, par curiosité. Il aperçoit en pleine effervescence, l'homme et la femme qui s'échinent à faire entrer une imposante mazarine récalcitrante, peu commode la commode, par une porte trop petite qui résiste, elle aussi, de toute son étroitesse, à se laisser introduire et dans ces cas-là, tout aimant qu'un couple puisse l'être, il finit toujours par s'engueuler. La femme, plus perspicace dans les situations périlleuses, parce qu'elle est femme.
- Enfin tu vois bien que ça ne peut pas passer ! Réfléchit un peu ! Je vais chercher un mètre.
L'homme, plus obstiné dans son déni d'erreur, parce qu'il est homme.
- Laisse ! Je te dis qu'elle va entrer et elle va entrer ! Il suffit que tu y mettes un peu du tien, ce n'est quand même pas sorcier, bon sang !
Sorcier, sorcier ! Le fantôme n'aime pas les histoires de sorcellerie, il passe son chemin, laissant le couple à leur besogne, il reviendra plus tard, quand ils se seront réconciliés, pour leur pourrir l'ambiance. Il longe un grand couloir sombre et manque de se faire renverser par un train de gamins qui ne fait que le traverser. Un petit brun plein de vie, genre âne bâté… grave, puis une petite blonde pleine de joie, genre âme éthérée… grâce. Le revenant n'en revient pas, il ressent une sensation agréable à être parcouru par la gamine, alors que les fantômes détestent par condition que le vivant les pénètre. Il se retourne et regarde plus attentivement la drôlesse. Les fantômes ne fonctionnent pas comme tout un chacun, comme nous du moins, une seule attention leur est suffisante pour connaître tout de la personnalité des êtres. Le fantôme lit dans les esprits plus surement qu'une cartomancienne lirait dans son tarot, bref, ce qu'il y lit ici, est nouveau pour lui. Jamais, au grand jamais, il n'avait rencontré une personne de tant de pureté, une perle rare confinant à l'exception… à l'excellence, peut-être. Pas une once de mesquinerie chez cette enfant, de la malice certes, mais bienveillante, des simagrées certes, mais faussement jouées, de l'espièglerie certes, mais respectueuse. Bref, une belle âme dans un beau corps, corps qu'il détaille à présent plus précisément, elle est longiligne, fine, mais pleine, légère, mais consistante, spontanée, mais douce et voici notre fantôme ému par les traits de son visage, tout y est élégance, une réussite du hasard, des aléas de la recomposition des ensembles. Nez, yeux, bouche et fossettes, bien dessinés à l'unité, s'organisent, en lieu et place, dans les proportions convenables pour confiner à une image globale de l'harmonie, le charme d'un visage agréable, une impression rare de la perfection, un équilibre fragile qui suggère une expression pensive ; la poésie nostalgique du romantisme des belles esquisses. Le fantôme était artiste peintre en son temps et ce jour, il fut exposé au modèle qu'il avait recherché en vain toute sa vie. C'est seulement en présence de l'objet recherché que l'on peut se dire, « c'est là, c'est ça, c'est lui. » comme si avant cette confrontation, une représentation inconsciente attendait patiemment son pendant dans la réalité. Et il fallait qu'il fasse cette trouvaille dans le vide-grenier de la vie, alors qu'il avait cessé toutes activités créatrices, ironie du sort, sortilège maléfique, maudite destinée. Il venait d'accéder à son idéal esthétique, mais trop tard et il pesta contre sa condition.
- Bordel de putain de merde de putain d'inexistence !
Ah ! Quand les fantômes pestent, ils pestent. Ils ne font pas semblant les revenants.
Maintenant, comme ordinairement, on n'est pas trop initié aux principes de l'au-delà, il est utile de préciser que les spectres ont une action sur le réel, autrement comment pourrions-nous, nous, simple agités, suspecter leur présence, l'existence de leur semi-existence ? L'irréel peut se manifester même aux sceptiques, mais peu de vivants, s'il en est, peuvent communiquer avec les esprits. Tout est subjectif et l'esprit l'est par nature. Des règles existent, mais elles ne font pas lois, elles sont changeantes et varient d'un individu à l'autre. Et oui ! Il n'est pas aisé de s'y retrouver dans le dédale des impressions diffuses, des sensations sans objet, de l'ineffable devenu fable, de l'indivisible devenu visible, du transparent devenu opaque, du sensible devenu sensitif et ainsi de suite, que des expressions abstraites pour tenter de concrétiser l'imaginaire, loin de la réalité tangible, patente et palpable à nos grosses idées maladroites.
Mais revenons plutôt à notre histoire. Le fantôme, donc, ébranlé par cette révélation décida de sursoir son manège effrayant de manifestations paranormales en laissant ainsi à la famille un temps de répit pour terminer son chamboulement révolutionnaire de colonisatrice. Il voulait connaître davantage cette apparition esthétique avant que de se manifester en tant qu'apparition ectoplasmique. Les fantômes peuvent, en effet, se dévoiler sous forme d'effets évanescents, des hologrammes variés et multiples aux couleurs fluorescentes et luminescentes et encore chacun y met ce qu'il veut bien y mettre. Les uns vous dirons, c'était vert et rouge avec des yeux hallucinés de psychopathe, (merci pour le portrait), d'autres c'était sombre et clair à la fois avec des serpents pour cheveux, (ça ne s'arrange pas) et les moins imaginatifs dirons, c'était un drap blanc en lévitation avec deux trous noirs pour les yeux, (le folklore étant le refuge des esprits les moins créatifs). Avec de tels témoignages, le portrait-robot du suspect laissera les enquêteurs pour le moins perplexes.
Le fantôme partit donc, sur les traces de la gamine, qui était partie sur la piste de sa curiosité, il la trouva en train de se cacher sous un grand lit hors d'âge, comme un vieux cognac, elle devait jouer avec son frère. Il se glissa, comme seul sait le faire une ombre, à ses côtés. La gamine se tourna vers lui avec un doigt sur les lèvres.
- Chut ! Ne fais pas de bruit, tu vas me faire repérer.
- Tu me vois ?
- Hé ! je suis jeune, je ne suis pas aveugle !
- Mais comment me vois-tu ?
- Tu veux que je t'explique le mécanisme de la vision ou l'aspect que tu as ?
- Mon apparence, bien-sûr !
- Bof ! Allez disons pas mal, mais sans plus.
- Mais enfin ! Je suis un fantôme.
- Oui et alors ! On ne va pas en faire un plat. Je t'ai demandé de faire moins de bruit. Parle plus bas.
Et le fantôme se mit à chuchoter à la gamine, la situation devenait plus ridicule que cocasse.
- Quel âge je peux avoir, selon toi ?
Elle lui répondit dans le même murmure intime.
- Vieux, mon vieux, très vieux, mille ans ou plus… Allez ! Fait pas cette tête, j'te fais marcher !
Elle était exaspérante la petite. Leur conversation s'arrêta quand le garçon se rua sous le lit en tirant sa sœur par le bras pour l'en extraire : « je t'ai ! Je t'ai ! T'as perdu… » Puis en élargissant son regard, il cria d'effroi.
- Là ! Là ! une énorme araignée… énorme !
Puis, il détala à toutes jambes, laissant sa sœur en bonne compagnie avec l'arachnide, à ne pas confondre avec les arachides, la méprise pourrait être fâcheuse à l'heure de l'apéro.
- Hé bé ! Il n'a pas une bonne image de toi, mon frangin, mais rassure toi, il ne sait pas voir correctement. On a le même âge, mais c'est encore un gosse.
Il est vrai qu'à l'âge de la préadolescence les filles sont toujours en avance, c'est le système, la Société qui les retardera par la suite.
- C'est une peste ! tu sais pour moi, ces choses-là se voient comme le nez au milieu de la figure… Le tien est joli du reste.
- Merci ! Mais tu sais, moi aussi, je peux discerner au-delà des apparences immédiates et je sais que tu es bon, malheureux aussi, certes, mais bon quand même… maintenant je ne vais pas te draguer, non plus !
- C'est inutile, tu m'as déjà séduit et conquis. J'aurais aimé te connaître avant, du temps de mon vivant, veux-je dire. J'aurai peint ton portrait.
- J'aurais aimé poser pour toi. Tu étais peintre, tu me montreras tes tableaux ?
- Evidemment, ma muse ! mais il faudra que tu sois indulgente.
- Je n'aime pas critiquer. Et pourquoi ne me peindrais-tu pas ?
- Parce que je n'y arrive plus. J'ai essayé, mais ça ne donne plus rien… des croutes sans valeur, sans saveur, sans passion, de la merde quoi !
- Ça, c'est toi qui le dis. Moi, je suis sûr que je peux te redonner confiance en toi, te ramener au talent.
- Ça m'étonnerait.
- Eh bien, laisse-moi t'étonner, je poserai nue si tu veux, cela t'inspirera peut-être davantage.
- Tu n'es pas pudique, toi ! Il me semble.
- Bé non ! En fait cela dépend avec qui, avec un fantôme se serait ridicule de l'être, je suis persuadée que tu vois à travers les vêtements.
- C'est, ma foi, vrai, je vois où j'arrête mon regard comme le ferait un laser en sorte.
- Et alors ?
- Quoi ?
- Comment me trouves-tu, pardi, espèce de voyeur ?
Gabrielle, c'était son prénom, mais tout le monde l'appelait Gabi. Gabi, donc, eut l'impression fugace de voir rougir l'illusion.
- Alors ? Tu as perdu ta langue, ou quoi ? Tu es timide ma parole ? Ne sois pas tant pusillanime ! C'est moi, la jolie oie blanche, je te rappelle.
- Je te rappelle que je suis mort à la fin, ne le comprends-tu pas ?
- Que si, je ne suis pas débile ! Mais encore une fois et alors ? Je connais des copains trop vivants, bien plus morts que toi. Toi tu es juste bien comme il faut.
- Tu es une drôle d'enfant, sais-tu ? Et puisque tu veux le savoir, je te trouve le modèle idéal, parfait. Puis plus bas, très bas, dans le souffle de l'aveu, tu es incroyablement magnifiquement jolie.
- Hi, hi, hi ! Tu peux parler à haute voix maintenant, mon frère ne me cherche plus et il doit encore courir, il a la phobie des araignées et j'aime bien entendre distinctement les compliments.
- Cesse de te moquer de moi, reconnait mes errances, mes égarements, je ne suis que fulgurances.
- Mais tu vas arrêter un peu de t'apitoyer sur ton triste sort. Tu penses, donc tu es ! CQFD shakespearien. Allez, fait-moi rire !
- D'accord ! Tu connais l'histoire du fantôme et du tramway ?
- Bien sûr ! Elle est nulle ! (Du coup, on ne la connaitra pas… tant pis !)
- Ok, alors je vais te raconter la mienne d'histoire.
- Là ! tu m'intéresses davantage, tu vois quand tu veux, mon ombre.
- Ecoute, ma lumière…
- Dis-moi, mon absence !
- Voilà, ma présence…
Encore une énième histoire d'amour impossible qui se dessine, n'en finirons-nous donc jamais de ses chimères ? Mais en attendant, écoutons plutôt celle de notre fantôme…
- Je m'appelais Raymond Renoncé, je…
- Mais cesse de parler de toi au passé.
- Mais cesse de m'interrompre sans cesse ou je n'y arriverais jamais !
- Ok ! je me tais, je t'écoute, n'aie de doute, je suis pendue à tes lèvres.
Lui dit-elle en embrassant sur la joue le courant d'air.
- Je m'appelle donc Michel et j'ai toujours habité ici, cette grande maison. J'y ai passé une enfance torturée et lorsque mes parents sont morts, je suis resté seul dans la demeure.
- De quoi sont morts tes parents ?
- Tu es infernale à la fin ! Vas-tu me laisser raconter ?
- Ok, je ne dis plus rien ! Je reste coït.
- Je les ai tués… voilà t'es contente !
- Quoi ? Tu as tué tes parents !
- Oui ! Assassinés, je suis un assassin, un parricide.
- Oh ! Mon Dieu !
- Laisse le où il est, celui-là. Et depuis que je suis mort à mon tour, peu de temps après mon crime, un accident de cheval, je suis dans cet état à flotter entre le sensible et le néant. Ma punition sans nul doute pour expier mon acte impardonnable.
- Oh ! Mon pauvre ami ! Mais pourquoi as-tu tué tes parents, aussi ? On n'a pas idée !
- Parce qu'il fallait bien que quelqu'un le fasse. Ils étaient monstres, tous deux. Ils assassinaient des enfants.
- Oh ! My god !
- Encore ! Mais vas-tu cesser, à la fin, d'invoquer les Dieux.
- Excuse-moi, ça m'a échappé.
- Mais pourquoi tuaient-ils des enfants, tes parents ?
- Ben… je pense qu'ils aimaient cela, tout simplement, ils étaient fous, tu sais.
- Euh… non… je ne sais pas, je n'arrive pas à imaginer qu'on puisse tuer comme ça, pour rien, tout simplement, comme tu le dis. Tuer, n'est pas rien, quand même, on ne tue pas pour un rien.
- Hé si ! La preuve. Ils tuaient sans remords et sans peur, car personne ne pouvait les soupçonner d'une telle ignominie. Ils faisaient partie des notables de cette ville, mon père en était le maire et ma mère était un médecin respecté de tous. Qui les aurait jamais suspectés ?
- Donc ! toi tu les as tués et en faisant cela, tu as sauvé d'autres enfants. En fait tu es plus un justicier qu'un assassin.
- On peut le voir ainsi, pourtant ce ne doit pas être l'avis de tout le monde là-haut, car depuis je suis coincé dans ces limbes, ici-bas, entre mort et vie.
- Ecoute ! Ton histoire est terrible, elle m'a attristée et je n'aime être affligée, ça m'afflige. Je vais te redonner le goût en la vie.
- Tu veux me faire renaître de nouveau, pour ainsi dire, ma résurrection ?
- Voilà, je préfère encore ton cynisme sarcastique à ton air de chien battu. Tu vas me peindre et cela sera ton chef-œuvre. La toile de ta vie, de celles qui restent pour l'éternité dans les musées, mitraillées par des tribus d'asiatiques souriants.
- On n'a pas le droit de prendre des photos dans les pinacothèques.
- M'en fout !
- Qu'est-ce que tu fous encore sous ce lit, t'es complètement dingue ou quoi ?
C'était le petit monstre qui était revenu à la charge, il devait s'ennuyer tout seul et maintenant il tirait sa sœur par les pieds.
- Mais laisse-moi tranquille Mathieu, je n'ai pas envie de jouer avec toi. Tu n'es plus un gamin quand même !
Mathieu ne l'entendait pas ainsi et puis si, il était encore un gamin.
- Allez viens ! tu ne vas pas passer ta vie sous ce lit !
Gabi se tourna vers son fantôme.
- Aide-moi, s'il te plait ! C'est une véritable plaie.
- Avec plaisir, mon désir, c'est un plaisir.
L'ombre sortit de sa cachette et encore une fois l'enfant ne vit qu'une gigantesque et répugnante araignée. Il cria comme un putois et prit la poudre d'escampette en continuant de crier comme un sourd. On entendit ses parents s'exclamer.
- Mathieu ! Reste un peu tranquille ! et le mari à son épouse. Il nous rendra dingue ce gosse, parfois je me demande s'il est vraiment normal. On devrait peut-être l'emmener consulter un pédopsychiatre ?
- C'est toi qui es fou à la fin, il est seulement turbulent. Il faut bien que jeunesse se passe.
- Ok ! Mais chez lui cela fait longtemps que ça dure et ça ne semble que s'amplifier.
- Laisse tomber et monte plutôt ce carton à l'étage.
Sous le lit, le fantôme dit à sa nouvelle amie.
- Bon ! il a raison ton frangin on ne va pas rester là, toute notre vie sous ce lit. Vient, je vais te montrer où je vis.
Et le spectre emmena Gabi dans son antre.
- Je pense qu'ici, on devrait être peinard, c'est plein de toiles d'araignées, ton frère ne devrait pas y rentrer.
- C'est vrai que je ne te félicite pas pour le ménage. Tu as vu cette poussière !
- Que veux-tu je ne suis pas maniaque, c'est tout.
- C'est peu de le dire, mais à présent tu n'es plus tout seul, il faut aussi que tu tiennes compte de moi.
L'esprit fut ravi de cette remarque, cela faisait tant de temps qu'il était effectivement seul comme une âme en peine que cette amicale association lui fit chaud au cœur.
- Merci ma tendre, je peux t'embrasser ?
Il eut peur un instant d'avoir été trop loin dans son hardiesse, mais la réponse candide de Gabi le désarçonna tant qu'il en oublia même de s'exécuter.
- Bien sûr, mon grand, fait… Je désespérais que tu ne le demandes un jour.
- Et alors qu'est-ce que tu attends ??? J'attends, moi ! On ne va pas y passer la vie, non plus, je n'ai pas l'éternité devant moi, moi !
Il déposa un tendre baiser sur les lèvres de l'enfant.
- Vous êtes bien familiers, vous, les fantômes pour embrasser sur la bouche la première-venue. Lui dit-elle.
- Tu n'es pas la première-venue, mon Eve, tu es la première qui me voit tel que je suis encore, mon égérie. Mais accepte mes excuses pour cet emportement.
- Ne t'excuse pas, cela m'a surprise, mais pas déplu, de plus tu sens bon, tu sais ?
- Non ! c'est bien la première fois que l'on me dit cela. D'ailleurs, c'est également la première fois que j'embrasse une personne depuis si longtemps que j'en avais oublié le goût sucré d'un baisé, c'est délicieux.
- Magique même. Mais j'espère bien que tu ne vas pas te mettre à embrasser d'autres filles que moi à tour de bouche où je t'arracherai les yeux, je suis très jalouse, sais-tu, mon fantôme à moi toute seule.
- Je te le jure, je ne serai qu'à toi. De plus qui d'autre voudrait bien de moi, généralement les autres filles, comme tu dis, s'enfuient en me voyant. Tu vois je ne suis qu'un piètre séducteur.
- Parce qu'elles ne savent pas voir la beauté, la tienne est particulière, il est vrai, mais elle est justement vraie, sincère, sans fard, sans tricherie. Tu es beau, mon fantômeau.
Et le fantôme aux incertitudes en question serra dans ses bras cette singulière enfant pour un câlin fantastiquement fantasmagorique. Ne voit-on pas parfois pousser une fleur magnifique sur les terrains les plus stériles ? L'Amour en est de même, il peut transgresser les interdits, les impossibilités et s'épanouir là où nul ne l'aurait jamais espéré, ni même seulement attendu.
A partir de cet instant, le fantôme se fit discret en sa demeure et la famille put y vivre, en toute quiétude, sans jamais déceler sa présence. La réputation de la maison retrouva la banalité plate de toute maison normale, au désespoir du voisinage qui aimait enjoliver des histoires à faire peur.
Dans le grenier des amants, trônait un magnifique portrait en pieds d'une agréable enfant nue et ingénue, la reproduction fidèle du charme à l'état émotionnel. Le genre de toile qui défie les siècles… en somme, un chef-d'œuvre de l'intemporalité.
C'est fini, les petits.
Merci pour cette belle histoire....que j'ai eu grand plaisir à lire...
· Il y a plus de 7 ans ·anne-onyme
Merci Anne pour ton merci ! T’as un bel œil, tu sais !
· Il y a plus de 7 ans ·Hervé Lénervé