Fidélisons la clientèle !

Gabriel Meunier

Les siècles passent ; la liberté est bradée pour quelques miettes d'amusement à la sauce sécuritaire.


La langue de bois a encore de beaux jours devant elle. "Fidélisons la clientèle" ! Et, tout de go, le conseiller commercial d'ajouter : Fidélisons en proposant une carte de paiement gratuite, des bons de réductions, l'accès à des caisses prioritaires etc...


"Fidéliser" où enchaîner ? Car cette langue de bois est bien polie, tourne rond - très rond - et ne sort pas naturellement de la bouche du staff commercial. Les études de marketing, de merchandising et autres managers en brain storming sont encore - hélas - le Graal, l'objectif visé par nombre de parents pour le parcours de leur progéniture.

Parler pour noyer le poisson.

Comment des millions d'individus peuvent-ils se laisser aller au point de fermer les yeux sur ces mensonges sirupeux, ces nuages de chloroforme qui mènent aux pires fourberies, atrocités et turpitudes ? Circulez ! Il n'y a rien à voir !

Etienne de la Boétie ( il y a presque 500 ans...) montrait déjà, dans La servitude volontaire, que l'immense majorité est prête à abandonner sa liberté, sans regret, cette liberté d'être un homme responsable si, au même moment, on lui tend une jolie gamelle et une niche relativement confortable.

La Boétie rejoignait le célèbre Panem et circenses*

Bien sûr, tout pouvoir politique est prompt à exploiter ce travers, quasiment génétique. Faites vous soigner, éduquer, nourrir, respectez les consignes, restez dans les clous... et tout ira bien.

Mais ce n'est sans doute pas la seule explication. Nombre de groupements humains en dehors du champ étatique (associations, entreprises, syndicats, églises...) relayent consciemment ou non ( le plus souvent) la plus grande part des décisions prises dans le champ politique. Cette situation a pour effet de mettre en laisse, purement et simplement, une bonne partie de la population, qui se laisse contrôler passivement, silencieusement jusqu'au dernier degré.

Dans un domaine où l'initiative, la curiosité et l'imagination devraient être prépondérantes, songeons à l'organisation croissante des congés payés. Le Club Med fit des des émules et maintenant les Center Parcs ou autres formes juridico-économiques, qui n'offrent qu'une illusion de liberté.

Plus récemment encore, les candidats à l'exode urbain et au retour à la campagne sont vus proposer - par une "association" - la possibilité de "faire un essai" dans tel ou tel village, avant d'ancrer leur domicile, pour de bon, dans le plus sympa, le plus beau et le mieux achalandé des villages de la région.

Se jeter à l'eau, se risquer n'est plus de mise ; il faut d'emblée accéder au Meilleur.


Ainsi faut-il avoir un travail, un domicile fixe, déclarer ses revenus, voter, être vacciné, passer le permis de conduire, être assuré, faire contrôler régulièrement son véhicule... De siècle en siècle la liste s'est allongée à l'infini. D'où des milliards d'informations (sur la santé, les pratiques sociales, les fréquentations...autant de Big Datas ), qui sont joyeusement récupérées, pardon, achetées en réalité aux grands Managers ( Facebook...) des "Réseaux sociaux ( malgré moults déclarations du contraire, de bonnes intentions, la bouche enfarinée ) par des entreprises, laboratoires, bureaux d'études, et même et bien sûr par tous les services de sécurité publics et privés.


En un mot, "le système" - avec quelques poignées de dirigeants, effectifs mais dans l'ombre - a réussi à créer des armées de petits soldats dénués de tout sens critique.

L'ombre du dictateur s'allonge de jour en jour.


Prenons une journée banale, d'un citoyen banal, dans une ville banale...
En 2020 le magazine Fémina avait publié une enquête sur le sommeil


Ils dorment 6h41 en semaine, 7h33 le week-end

Si les Français ne se levaient pas aux aurores, se coucher à une heure relativement tardive ne leur poserait pas de problème. Mais dans les faits, ils se réveillent définitivement à 6h35 la semaine en moyenne et à 7h51 le week-end. De plus, ils mettent en moyenne 33 minutes à s'endormir, en semaine comme durant les jours de repos. Résultat, ils dorment 6h41 durant la semaine (vs 7h07 en 2016) et 7h33 le week-end (vs 8h03 en 2016).
Le réveil matin ( numérique ) est précis ; il peut diffuser une musique sirupeuse (standard ou France
Musique), d'abord très doucement, puis de plus en plus impérative. Comment alors ne pas accepter de se rendre au turbin ?

Trajets : les usagers du métro ont des publicités "adaptées" à leur profil ; des réductions abonnement etc... de leur côté les automobilistes sont imprégnés  du code de la route, autant de normes dse plus en plus universelles.

Horaires : la pointeuse est morte ? Qu'importe ! Le télétravail est bien plus fiable !

Week Ends ? Les parcs de loisirs sont LÀ ; vous faites TEL sport, avec licence etc... sur TELS sentiers…

Il faut tondre le gazon, bien sûr ! pas un brin d'herbe ne doit arrêter le regard.

Question subsidiaire : Pourquoi planter les poireaux en rangs ? Réponse : il y a longtemps que le ramassage des poireaux n'est plus une promenade !


Conclusion

On est loin de l'époque où certaines girouettes représentaient un Renard  ( Patron de la confrérie libre des compagnons charpentiers, bien différente de celle du Devoir et du Tour de France ), qui pointait, selon les vents, tantôt sur le R (Renard) , sur le L ( Libre) sur le I ( Indépendant ) et souvent sur le J ( joyeux ).

A découvrir sur youtube collection de Mr Suhard

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* Juvénal, poète satirique, ( I & IIème s)


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